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2. ANALYSE DU RITE DU RASAHARIAGNA

2.2. LES ACTES ET LES PAROLES DANS LE RASAHARIAGNA

2.2.5. Les Kabary ou les discours pendant le Rasahariaña

Pendant le rite du Rasahariaña, il y deux discours : le discours d’ouverture et celui de clôture. Pendant l’annonce aux gens du village, souvent et normalement la veille du rite, il y a déjà le discours d’invitation et d’annonce du rite. Ce discours d’invitation au Rasahariaña peut aussi avoir lieu de bon matin le jour du rite. Il se fait de porte à porte. Son contenu contient deux points : l’annonce de la tenue du rituel et l’invitation à l’assister. La formule de demande d’assister est une formule de demande d’aide ou de secourir et de sauver. Voici un exemple de formule de cette annonce : « Zahay toy amaraigny mikasa hagnamia rasa Raiano

205 Cf. Enquête VII avec Meur FELIX, Antsohihy le 30 juillet 2011. 206

igny satria mbola tsy nahazo izy, kay magnasa anareo hamonjy amianareo ravin’ahôdy zahay toy ay. » Traduction : demain, nous allons donner la part de telle personne car il ne l’a pas encore reçue, nous vous invitons à assister à ce rite, nous vous demandons de nous secourir, donnez-nous des feuilles de remède.

Cette annonce et cette invitation montrent la nécessité de l’assistance de la communauté villageoise comme condition sine qua non de la réalisation et de la réussite du rituel. Sans cette assistance le Rasahariaña n’aura pas lieu. Bien qu’il y ait une famille organisatrice, cette annonce manifeste également que le Rasahariaña est l’affaire de la communauté villageoise entière. Cela explique la nécessité de sa présence.

La feuille de remède qu’on demande dans cette annonce sert à guérir la maladie, à apporter le bonheur, la guérison et la santé ; c’est-à-dire à rétablir et à renforcer la relation et les liens entre les vivants et les Ancêtres. La communauté villageoise participe à rétablir la relation et la communion entre la société terrestre et celle des Ancêtres. Alors la communauté villageoise entière sera en communion avec les Ancêtres et Zanahary par ce Rasahariaña. C’est la signification de l’invitation à ce rite adressée aux habitants du village.

La réponse des invités au cours de cette annonce de la tenue de ce rite est d’accepter d’assister à ce rituel et d’apporter les feuilles de remède demandées. C’est-à-dire ces invités acceptent de s’entraider avec la famille organisatrice, de la secourir à renforcer la relation, le lien et la communion entre la société terrestre et celle céleste. Ce discours d’annonce et d’invitation et sa réponse constituent un discours préliminaire du Rasahariaña car il se tient avant même le rite. Il est fait par les parents de la famille organisatrice.

Pendant le rite du Rasahariaña, le premier discours, nous l’appelons ici le discours d’ouverture ou de commencement du Rasahariaña. Il est fait par le mpitanjiny. Celui-ci se lève pour prononcer ce discours à toute l’assistance le jour de la tenue du rite au début du rituel. Comme structure, le mpitanjiny salue toute l’assistance, ensuite il annonce la raison du rassemblement qui est un rite du Rasahariaña pour un défunt, et enfin il montre les caractéristiques du bœuf à offrir. Concernant les caractéristiques du bœuf, on montre surtout sa couleur, on annonce aussi que cet animal appartient à la famille organisatrice et n’est pas volé. Voici un exemple de discours d’ouverture de Rasahariaña : « Arbaigny atsika jiaby tonga soa aman-tsara eto am-panaovana Rasahariaña. Ny antony namoriagna atsika jiaby eto niany dia Ranona nangataka rasa ka hagnamia rasa azy zahay toy niany. Ary io ny ômby hamiaña azy, ômby tambala izy io. » Traduction: « Bienvenue à tout le monde. La raison de notre rassemblement aujourd’hui est que telle personne a demandé sa part et nous allons la donner aujourd’hui. Voici le bœuf qu’on va lui donner, il appartient à la famille ».

Ce premier discours prononcé par le mpitanjiny montre que la famille est tenue de mettre au courant toute l’assistance de ce qu’on va faire qui est le Rasahariaña et du bœuf qu’on donne au défunt demandeur du Rasa. Le mpitanjiny fait ce discours parce qu’il représente la famille organisatrice en tant que chef de ladite famille. La véritable raison de l’annonce du rite et des caractéristiques du bœuf à toute l’assistance, c’est que le Rasahariaña est l’affaire de toute la communauté villageoise et du groupe Tsimihety même, et la famille organisatrice est chargée de l’organiser. Toute l’assistance doit être au courant de tout cela. Et concernant l’annonce du bœuf, si jamais il y a des affaires ou des accusations de vol cela touche toute l’assistance, donc elle doit connaître l’animal à offrir.

Ce premier discours montre la relation qui lie toute la communauté villageoise puisque la famille organisatrice fait partie de cette communauté, c’est le Fihavanana malgache. Ce Fihavanana de la communauté villageoise se manifeste dans ce cas par la solidarité, la communion de tous les membres. Il y a alors dans cet aspect une cohésion entre les habitants d’un village. À travers ce premier discours, on peut dire que ce rite ainsi que les autres rites de cultes des Ancêtres de la religion traditionnelle malgache sont des expressions du Fihavanana malgache, et de communion et de cohésion.

Après ce premier discours du rite du Rasahariaña, un représentant de toute l’assistance se lève pour répondre. Dans sa réponse, le représentant de l’assistance doit d’abord répéter tout ce que le mpitanjiny a dit et après cette répétition à sa manière, il dit sa propre réponse qui consiste à dire qu’on est au courant de ce qu’on va faire et du bœuf à offrir. La répétition par celui qui répond de tout ce qu’a dit dans le premier discours est typique du discours des Tsimihety comme dans certains autres pays. Cela montre le respect du représentant de l’assistance à celui à qui on répond par un discours. Si on ne répète pas ce qu’a dit celui qui a prononcé le discours d’ouverture, cela signifie un manque de respect pour le représentant de la famille organisatrice qui a prononcé le premier discours du rite. La reconnaissance de l’annonce du Rasahariaña et du bœuf à offrir par le représentant de l’assistance montre la reconnaissance de celle-ci à la famille organisatrice. Cela renforce également l’intégration de cette dernière dans la communauté villageoise. C’est dans ce sens que le premier discours du mpitanjiny et la réponse du représentant de l’assistance constituent un seul discours.

Le dernier discours, ou le deuxième pendant le rite, se fait après le repas communautaire et hiérarchisé de toute l’assistance. Nous l’appelons ici le discours de clôture du Rasahariaña car par ce discours, le mpitanjiny clôt le Rasahariaña. C’est le discours de remerciement adressé à toute l’assistance et en même temps c’est un discours qui clôt le Rasahariaña parce qu’après ce discours tout le monde rentre à la maison. C’est le mpitanjiny qui prononce ce petit discours. Dans ce discours, le mpitanjiny remercie toute l’assistance et annonce que le Rasahariaña est terminé. C’est une reconnaissance de l’assistance de la communauté villageoise. Voici un exemple du discours : « Mankasitrka atsika fôkonôlogno jiaby zay nanatrika teto niany zahay fa vita ny Rasahariagna zay nataontsika teto. Nahazo Rasa ny maty sy hahivagna ny marary ary ho sambatra ny fianakaviagna, ka misaotra atsika jiaby fa vita ny raha natao teto niany. » Traduction : « À toute la communauté villageoise, nous vous sommes reconnaissants de votre assistance pendant ce rite de Rasahariaña que nous avons fait ici aujourd’hui car ce rite est fini. Le défunt a reçu sa part, celui qui est malade sera guéri et la famille sera heureuse, donc merci à tous car ce que nous avons fait est fini et réussi ».

A ce discours, il n’y a pas de réponse, et tout de suite après tout le monde quitte le lieu du repas communautaire pour rejoindre son village. Et la vie reprend son cours normal.

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