L’APPROFONDISSEMENT DE L’INTERCOMMUNALITE : LES APPORTS DE LA LOI DU 13 AOUT
A. Une évolution des structures intercommunales facilitée
Pour le professeur DEBOUY, la loi du 13 août 2004 « répond à des attentes, mais vise aussi à
combler des lacunes que le législateur avait laissées en 1999, à corriger des erreurs de rédaction ou à supprimer des imprécisions dans le code, voire à clarifier des dispositions inutilement vagues »293. L’auteur analyse précisément le contenu de la loi et constate qu’elle facilite l’évolution des structures intercommunales et l’évolution de la composition du
groupement : « Une fois le groupement de communes créé, au terme souvent d’un long
cheminement parsemé de compromis et de négociations, il devient difficile de le faire évoluer. Cela peut tenir à l’impossibilité juridique de procéder à certaines évolutions, comme par exemple procéder à la fusion de plusieurs établissements publics de coopération
intercommunale. Dans d’autres situations, c’est l’évolution de la structure dans ses éléments constitutifs (membres) qui peut poser des difficultés que le code ne résout pas ou mal »
292
M. DEGOFFE, « L’intercommunalité après la loi du 13 août 2004 relatif aux libertés et responsabilités locales », AJDA, 2005, p. 133
293
C. DEBOUY, « De l’intercommunalité », JCP Administrations et Collectivités territoriales, Dossier spécial, 10 janvier 2005, p. 64
Un fois le constat établi, le professeur DEBOUY montre que la loi contient « deux mesures
essentielles à ce sujet : d’une part la possibilité de fusion entre établissements publics de coopération intercommunale, d’autres part la transformation de syndicats en communautés de communes ou d’agglomérations »294
Nous envisagerons alors l’évolution des structures intercommunales dans sa simplification par la procédure de fusion des EPCI. Cette procédure est une nouveauté de la loi du 13 août 2004, permettant de résoudre les difficultés rencontrées par des EPCI, qui au fil du temps, ont pris conscience des insuffisances de leur périmètre respectif en vue de réaliser sur un espace cohérent un projet commun de développement à une échelle territoriale pertinente. A la rencontre de deux EPCI, une commune membre pouvait quitter l’un pour intégrer l’autre. Le retrait d’une commune pour adhérer à un autre EPCI n’était évidemment pas la meilleure solution et n’avait aucune autre marge de manœuvre pour trouver un équilibre convenable aux deux EPCI. Pour l’auteur, « dans une certaine mesure, la question de la fusion des structures
intercommunales est aussi la rançon du succès de développement de l’intercommunalité : le territoire national étant presque entièrement couvert par des établissements publics de coopération intercommunale, la nécessité de redessiner les contours de l’intercommunalité s’est fait sentir » Avant la loi du 13 août 2004, le Code général des collectivités territoriale ne
prévoyait que la possibilité de procéder à la dissolution de l’un des deux EPCI, puis d’autoriser les communes « libérées » de l’EPCI dissout à adhérer à l’autre établissement. L’autre possibilité était de dissoudre les deux EPCI et de prévoir la création d’un seul établissement. Outre les difficultés juridiques à surmonter, la nécessaire simplification des procédures de fusion « a pour mérite d’éviter le passage par la dissolution préalable des
structures existantes, souvent politiquement sensible »295
Aussi, cette procédure intéresse pleinement notre sujet : l’article 153 de la loi prévoit les modalités de fusion de deux EPCI. Le processus suppose qu’au moins l’un des deux établissements soit un EPCI à fiscalité propre296. L’EPCI issu de la fusion est soumis au régime de l’établissement le plus intégré : le critère est celui des compétences accordées par la loi, il n’y a pas lieu de prendre en compte les compétences que les communes ont choisi de transférer à la structure intercommunale. Les taux d’imposition, abattements et exonérations de la nouvelle structure sont maintenus ou, ne doivent pas subir de fortes variations pour
294
Idem p. 65
295
Nicolas PORTIER, « Loi du 13 août 2004 : un bilan mitigé pour l’intercommunalité », AJDA, 2005, p. 140
296
Dans la mesure ou les EPCI à fiscalité propre sont la forme de coopération intercommunale la plus élaborée, il semblait évident que le noyau de cette fusion ne puisse être d’une des trois formes de communautés
garantir la sécurité juridique des contribuables concernés. Enfin, la fusion entraîne une nouvelle élection des délégués des communes au conseil du nouvel EPCI297.
La fusion d’EPCI emporte des conséquences importantes que la loi du 13 août 2004 prend en compte en y apportant des réponses adaptées. Laissant de côté les considérations purement techniques298, nous retrouvons l’intérêt de notre sujet dans la mesure ou la fusion va emporter un réaménagement du partage des compétences puisque celles qui avaient été transférées à titre obligatoire ou optionnel aux EPCI seront désormais exercées par le nouvel établissement public sur l’ensemble de son périmètre, ce qui conduira à étendre autoritairement les transferts de compétences dans le cas des communes les moins intégrées auparavant. En revanche, pour les autres compétences transférées avant la fusion, un choix est possible puisque si elles seront exercées en principe par le nouvel EPCI, celui-ci pourra en restituer aux communes299. La loi a également prévu les modalités de succession du nouvel établissement public aux
établissements fusionnés pour ce qui concerne les biens, droits, obligations et les personnels. Elle a également organisé les conséquences financières et fiscales de la fusion300.
Si la possibilité de fusion de plusieurs EPCI est une innovation importante apportée par la loi du 13 août 2004, elle opère une simplification du droit quant à la procédure de transformation d’un syndicat en communauté de commune ou d’agglomération. L’article 152 de la loi (codifié à l’article L. 5211-41-2 du Code générale des collectivités territoriales) prévoit que lorsque les conditions sont remplies, pour qu’un syndicat de commune puisse devenir
communauté de commune ou communauté d’agglomération, la transformation est décidée par délibérations concordantes du comité syndical et des conseils municipaux des communes membres ; elle est prononcée par arrêté préfectoral et engendre les effets habituels sur les
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De la même manière, l’article 155 de la loi du 13 août 2004 permet aux syndicats mixtes ouverts et fermés, de fusionner entre eux dans les mêmes conditions que celles prévues pour les EPCI
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La complexité du procédé de fusion entre plusieurs EPCI est un constant unanime de la doctrine, tant pour le professeur DEBOUY que pour le professeur MOREAU. Pour lui, la fusion de plusieurs EPCI « est une des innovations marquantes de la loi, qui exprime bien l’extraordinaire enchevêtrement des structures
intercommunales dans la France d’aujourd’hui…la lecture de la très longue disposition commentée montre que l’opération demeure complexe puisque doivent être réglés des problèmes touchant au périmètre, aux
compétences, à la composition du conseil de nouvel EPCI, sans oublier les conséquences fiscales et juridiques » J. MOREAU, « L’intercommunalité dans la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales », Jurisclasseur Collectivités Territoriales – Intercommunalités, octobre 2004, p. 7
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Comme le constate le professeur DEBOUY, la procédure de restitution n’est pas précisée, la circulaire d’application étant au surplus muette sur ce point.
300
Les conséquences financières et fiscales de la fusion de plusieurs EPCI sont prévues en ce qui concerne le calcul de la dotation d’intercommunalité par l’article 153 – II de la loi du 13 août 2004, codifié à l’article L. 5211-31-1 du Code général des collectivités territoriales.
droits et obligations, biens et personnels. L’ancienne procédure consistait à dissoudre le syndicat et à créer un nouvel EPCI.