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La répartition des compétences communales et communautaires

LA DEFINITION DE L’INTERET COMMUNAUTAIRE

B. La répartition des compétences communales et communautaires

S’il est difficile de définir la notion d’intérêt communautaire, il est en revanche simple d’en cerner l’objet. Celui-ci réside dans le partage des compétences entre les communautés et les communes. François BENCHENDIKH affirme clairement que « cette notion est effectivement

appréhendée comme un moyen permettant de structurer les compétences entre les EPCI et les communes membres »

A ce stade, nous pouvons entrevoir des différences fondamentales entre les systèmes de répartition des compétences entre la décentralisation et l’intercommunalité. En effet, dans le cadre de la décentralisation, les compétences transférées aux collectivités ont eu pour méthode la clause générale de compétence puis la méthode des blocs de compétences. Or l’intérêt communautaire ne procède d’aucune de ces deux méthodes de répartition des compétences. Le législateur n’a pas accordé de clause générale de compétences aux communautés, qui aurait eu pour conséquence de leur permettre de se déclarer compétente dans de nombreux domaines propres aux conseils municipaux. Dans ce cas, la structure intercommunale aurait « vider » de sa substance le principe même de l’action communale défini par « le fameux et historique » article L. 2121-29 du Code général des collectivités territoriales : « Le conseil municipal règle par ses délibérations les affaires de la commune » Pourtant, comme le constate Pierre-Yves MONJAL, « cette règle continue et continuera de demeurer le principe

établissant la compétence générale des communes. Mais l’attribution de compétences sans

335

François BENCHENDIKH, « Les avatars de la notion d’intérêt communautaire des communautés d’agglomération », RGCT, n° 24, juillet – août 2002, p.p. 276

cesse plus importantes aux EPCI…risque néanmoins, par effet d’engrenage, d’aspirer par le haut les « affaires communales » »336

Le législateur n’a pas non plus établi des blocs de compétences qui auraient répondu à l’intérêt communautaire. Comme le relève les professeurs DEGOFFE et DREYFUS, « la

communauté de commune se prête à un enchevêtrement des compétences puisque la loi ne définit pas les compétences de cette catégorie d’établissement public de coopération intercommunale en termes de blocs de compétences »337. Il s’est borné à énumérer les compétences exercées de plein droit au lieu et place des communes. Il a dressé la liste des compétences optionnelles parmi lesquelles le choix est effectué par décision des conseils municipaux, selon les règles de la majorité qualifiée. Les communes peuvent également décider librement de transférer à la communauté des compétences autres que celles dont le transfert est imposé par la loi. Mais l’intérêt communautaire n’est pas défini à priori. A l’intérieur de domaines assez vastes (développement économique, aménagement de l’espace communautaire, équipement social de l’habitat …) la notion d’intérêt communautaire doit permettre de tracer une ligne de partage entre les compétences demeurant communale et celles dont disposent les EPCI. A l’intérieur de ces vastes domaines de compétences, indiqués par le législateur, la communauté (les communautés d’agglomération et les communautés urbaines) peut donc se saisir elle-même des prérogatives qu’il lui parait opportun d’exercer. C’est pourquoi, nous sommes fondés à dire que le législateur n’a pas établi de blocs de compétences relevant de l’intérêt communautaire.

Force est de constater qu’il n’a pas réussi non plus à établir par blocs les compétences

pouvant être transférées entre l’Etat et les différents niveaux de collectivités territoriales, dans la mesure ou il n’existe pas de barrière étanche entre les différentes compétences transférées.

Ainsi, pour MONJAL, « on ne dispose pas de critères juridiques qui permettraient à coup sur

de conclure, une fois ces critères réunis, dans quelle situation il y a un intérêt communautaire à procéder à tel ou tel transfert de compétences »338.

336

Pierre-Yves MONJAL, « Les enjeux de la notion « d’intérêt communautaire » ou les faces cachées d’une réforme constitutionnelle décisive pour les EPCI », AJDA, 29 septembre 2003, p. 1703

337

M. DEGOFFE, et J.-D. DREYFUS, « Transfert de compétences et conventions dans le droit de l’intercommunalité », AJDA, 2001, p. 807

338

L’intérêt communautaire est donc une donnée brute qui fonde la compétence de l’EPCI, sans précision quant au moment du constat de cet intérêt, de sa réversibilité, de son appréciation objective et de sa portée.

Pourtant, il existe un critère fournissant une indication quant à la portée du transfert de compétence à opérer : il s’agit du principe de spécialité. En effet, une compétence ne peut faire l’objet d’une attribution globale à un EPCI, qui priverait alors les communes de son exercice. L’auteur explique qu’effectivement, « le seul critère dont on pourrait disposer, à

condition que la juridiction administrative le systématise, c’est celui tiré du principe

d’attribution, qui suppose que les communes, titulaires de la compétence générale d’action, ne se privent pas de cette compétence au profit exclusif d’un EPCI ».

Quoi qu’il en soit, l’intérêt communautaire, même s’il reste difficile à appréhender, doit être défini à un moment donné pour que les compétences de la communauté puissent être mises en oeuvre. Aussi, la solution réside dans l’inscription dans les statuts de l’EPCI de l’intérêt communautaire de la structure. Hervé GROUD339 constate qu’il n’y a pas de réponse dans la loi. La Direction générale des collectivités locales parait souhaiter qu’une décision définitive intervienne dès la rédaction des statuts, afin d’éviter une multiplication des conflits. Pour autant, les communautés intégrent rarement, au sein de leurs statuts, la définition des compétences qu’elles estiment être d’intérêt communautaire. Les dispositions statutaires reprennent, le plus souvent, les termes mêmes du Code général des collectivités territoriales. Pour François BENCHENDIKH, « les statuts apparaissent généralement d’un intérêt limité si

l’on veut connaître avec précision les compétences de ces structures intercommunales »

La solution consisterait à rédiger avec plus de précision les statuts de la structure

intercommunale340. La rédaction plus consciencieuse des statuts permettrait aux communes, de circonscrire certaines compétences particulièrement larges et importantes (développement économique, environnement…), en ne transférant qu’une partie de celle-ci. Seule une ligne de partage claire entre les compétences transférées au groupement et les compétences

conservées par les communes permettrait d’éviter certains contentieux.

Bien que cette solution semble simple, elle est pourtant difficile à mettre en œuvre. La rédaction des statuts, intégrant la définition de l’intérêt communautaire de la structure

339

Hervé GROUD, « L’intérêt communautaire au lendemain de la loi Chevènement », AJDA, 2000, p. 967

340

Comme le constate Hervé GROUD, « une telle solution conduirait à une situation proche de celle des anciens EPCI, une répartition des compétences étant préétablie. Au contraire, la lecture des premiers statuts et l’observation des négociations en cours montrent que, dans une très grande majorité des cas, les élus préfèrent s’abstenir d’arrêter une position à priori afin de s’autoriser une définition au cas par cas, permettant de faire évoluer les compétences communautaires en fonction des besoins et du climat politique »

intercommunale, engendrerait de la sorte sa propre limitation, en ce sens où une délibération du conseil communautaire pourrait être illégale car contraire à la définition statutaire. Selon BENCHENDIKH, « Choisir de définir la notion d’intérêt communautaire au sein des statuts

engendre effectivement une auto-limitation mais également un risque de contentieux dont l’objectif était précisément de l’éviter »341.

Finalement, il est nécessaire de se référer aux délibérations de l’instance communautaire pour savoir dans quelle mesure elle peut exercer une compétence qu’elle aurait préalablement qualifiée d’intérêt communautaire. Il semble plus facile, à ce moment, de définir cet intérêt au fil de leur existence plutôt qu’à leur création.

§ 2. L’obligation de définir l’intérêt communautaire

Pour Nicolas PORTIER, « la consécration de la notion d’ « intérêt communautaire »

par la loi n° 99-586 du 12 juillet 1999 a ainsi constitué une première volonté

d’assouplissement de la notion de compétence en permettant, au sein de champs de politiques publiques données, une définition fine et évolutive des rôles respectifs des communes et de leurs groupements »342. Le législateur de 1999, s’était cependant abstenu de définir cette notion, ne privilégiant alors que l’adoption des modalités procédurales de définition de l’intérêt communautaire343. La loi du 13 août 2004 ne revient pas sur cette méthode

d’adoption mais impose de définir rapidement l’intérêt communautaire de ces structures (A). L’adoption automatique de l’intérêt communautaire pour les communautés pourrait alors préfigurer l’existence de compétences générales propres à ces groupements de communes (B).

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