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La signification évolutive de la notion de transferts de compétences dans le cadre de la décentralisation

LES TRANSFERTS OBLIGATOIRES

B. La signification évolutive de la notion de transferts de compétences dans le cadre de la décentralisation

Comme le remarque le professeur PONTIER, « les transferts de compétences concentrent sur

eux l’attention qu’ils méritent effectivement… »412. Ce constat a pour origine l’évolution de la problématique des transferts de compétences depuis les années 1982/1983 jusqu’à

aujourd’hui. Nous pouvons affirmer que l’évolution de la problématique des transferts de compétences est liée systématiquement à celle de la répartition des compétences.

Cette idée est validée par l’affirmation du professeur PONTIER qui déclare : « il serait vain

de croire qu’il est possible de régler une fois pour toute la question de la répartition des compétences entre l’Etat et les collectivités locales. C’est l’inverse qui est vrai : une

répartition est définie à un moment donné, avec des transferts déterminés, en tenant compte

410

Opus cité p. 151

411

Laetitia JANICOT, « Réflexions sur la notion de compétences propres appliquées aux collectivités

territoriales en droit français », AJDA, 2004, p. 1574. L’auteur met en évidence de nombreux domaines donnant lieu à une collaboration obligatoire entre l’Etat et les collectivités territoriales. Elle donne l’exemple de la formation professionnelle continue et d’apprentissage. Elle relève également que certaines collectivités

territoriales peuvent intervenir dans le domaine de compétence d’autres collectivités dès lors que celui-ci ne leur est pas réservé. Par exemple, une commune a été autorisée à intervenir dans le domaine de l’action sociale, domaine attribué par la loi aux départements.

412

J.-M. PONTIER « La République décentralisée de J.-P Raffarin », Revue administrative n° 332, mars 2003, p. 191

des besoins, des aspirations et des conceptions prévalant à ce moment donné…Et dès l’instant que l’on admet qu’il est indispensable de revoir une partie de la répartition des compétences, on intègre l’idée de transferts à opérer, qu’il s’agisse de simples rectifications de transferts déjà effectués ou de nouveaux transferts de compétences »413.

En effet, la problématique des transferts de compétences a évolué avec le temps. Déjà en 1983, Jérôme CHAPUISAT déclarait que la méthode législative retenue pour les transferts de compétences pouvait s’apparenter « à la technique du roman-feuilleton dans lequel chacun

des épisodes annonce le suivant »414.

Cette analyse reste toujours d’actualité, sauf à prendre en compte les apports de la révision constitutionnelle du 28 mars 2003, qui pourtant, ne semble pas avoir modifié le processus législatif des transferts de compétences. Pour PONTIER, « quel que soit le domaine

considéré, des lois ultérieures ont complété ou corrigé le dispositif des transferts de

compétences, et les lois de 1983 ont elles-mêmes été modifiées à maintes reprises. Mais les transferts effectués depuis 1983 sont plus difficiles à apprécier que ceux résultant directement des lois de 1983 ».

Nous pouvons établir plusieurs raisons à ce phénomène : En premier lieu, les transferts de compétences effectués depuis ceux de 1983, présentent un effet moins spectaculaire parce qu’il ne s’est plus agi de transférer des matières mais d’apporter des aménagements, des inflexions aux transferts de 1983. En deuxième lieu, ces modifications sont réparties dans un assez grand nombre de textes415, eux-mêmes étalés dans le temps, ce qui ne favorise guère la visibilité des transferts. En dernier lieu, les ajouts apportés ont un caractère de plus en plus technique parce que, après avoir posé les principes généraux, il faut bien entrer dans le détail. Selon PONTIER, « ces aspects techniques se prêtent moins facilement à une appréciation

générale, les citoyens y sont moins sensibles et les comprennent moins ».

413

J.-M. PONTIER, « Actualité, continuité et difficultés des transferts de compétences entre l’Etat et les collectivités territoriales », RFDA, janvier – février 2003, p. 38

414

Jérôme CHAPUISAT, « La répartition des compétences : Commentaires de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983, relative à la répartition des compétences entre les communes, les départements, les régions et l’Etat », AJDA, 20 février 1983, p.p. 81-91

415

J.-M. PONTIER, « Pourquoi de nouvelles lois de décentralisation », Revue administrative n° 329, septembre - octobre 2002, p. 507. L’auteur explique les raisons de l’abondance de texte dans le domaine de la

décentralisation. Il déclare à ce titre : « un autre facteur permet de rendre compte de la production continuelle de lois en France, le phénomène s’appliquant tout particulièrement à la décentralisation, c’est ce que l’on pourrait qualifier d’auto – engendrement des normes. Les textes appellent les textes. Ou encore, plus la production normative est importante, plus il est indispensable de continuer à adopter des textes pour compléter, corriger, amender ceux qui existe déjà ».

Cette abondance de textes peut traduire des finalités divergentes des transferts de

compétences. Cette idée signifie que « les transferts de compétences ne se suffisent pas, parce

qu’ils ne peuvent trouver en eux-mêmes leur propre justification. Ce ne sont que des moyens pour servir une fin »416.

Les transferts de compétences ont ainsi une double finalité et doivent être appréciés au regard des objectifs poursuivis.

Le premier objectif assigné aux transferts de compétences obligatoires a pour fondement l’approfondissement de la décentralisation. Cette plus grande décentralisation passe nécessairement par des transferts de compétences dans la mesure où ils la définissent

partiellement. Cette affirmation est justifiée par le professeur PONTIER qui affirme a ce sujet que « la décentralisation ne peut être sans des transferts de compétences opérées par l’Etat

au profit des collectivités territoriales, sauf à affirmer que celles-ci disposent de certaines compétences ce qui, en France, non seulement n’a jamais été consacré, mais a toujours été refusé ».

Ainsi, la raison d’être des transferts de compétences obligatoires est de donner « corps » aux trois niveaux de collectivités territoriales, en leur permettant d’exister « en dehors » de l’Etat, c'est-à-dire en leur confiant une autonomie de gestion dans les compétences que l’Etat leur a transféré. Pour illustrer notre propos, nous n’hésitons pas à reprendre, une nouvelle fois, la définition de la véritable décentralisation du professeur Charles EISENMANN qui déclarait : « les autorités locales reçoivent le pouvoir de poser des règles ou des normes d’espèce avec

la liberté que leur laisse le législateur, sans être soumises à aucune volonté d’une autorité administrative d’Etat »417. Cette définition qui date de 1948 peut aujourd’hui parfaitement s’appliquer à notre étude sur les règles relatives aux transferts de compétences, du moins dans le cadre de la décentralisation. Nous allons voir que les finalités des transferts de compétences obligatoires dans le cadre de l’intercommunalité sont différentes.

§ 2. Les transferts obligatoires de compétences dans le cadre de l’intercommunalité

Nous allons présenter dans ce paragraphe les modalités de transferts de compétences obligatoires dans le cadre de l’intercommunalité. Nous avons choisi de distinguer ces

416

J.-M. PONTIER, « Actualité, continuité et difficultés des transferts de compétences entre l’Etat et les collectivités territoriales », RFDA, janvier – février 2003, p. 42

417

modalités de transferts de celles mises en place dans le cadre de la décentralisation car, si elles procèdent de la même logique, elles ont des conséquences différentes (A). Nous pourrons alors déterminer les compétences obligatoires des EPCI418 (B).

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