• Aucun résultat trouvé

La recherche d’une définition de l’intérêt communautaire

LA DEFINITION DE L’INTERET COMMUNAUTAIRE

A. La recherche d’une définition de l’intérêt communautaire

Il revient à François BENCHENDIKH de mettre en évidence l’existence ancienne de la notion d’intérêt communautaire326. D’après l’auteur, la première apparition de la notion d’intérêt communautaire remonte au début du XIXe siècle, présenté alors sous la notion d’intérêt intercommunal. Il relève alors que plusieurs lois adoptées au cours de cette période contribuèrent pleinement à l’avènement d’un intérêt autre que communal. Ainsi, ces intérêts

325

Article L. 5214-16-IV pour les communautés de communes, article L. 5215-20 pour les communautés urbaines et l’article L. 5216-5 pour les communautés d’agglomération.

326

François BENCHENDIKH, « Les avatars de la notion d’intérêt communautaire des communautés d’agglomération », RGCT, n° 24, juillet – août 2002, p.p. 267 - 297

« intercommunaux » avaient un objectif commun qui était de circonscrire certains domaines d’action des compétences communales. Par conséquent, l’intérêt intercommunal et l’œuvre d’utilité intercommunale avaient pour vocation de reconnaître la compétence du

regroupement communal au détriment de la commune. Dès l’origine, il s’agissait bien d’un critère susceptible de répartir des compétences communales entre la commune et les différentes formes de regroupements de l’époque.

Tout au long du XXe siècle, et avec l’aide du juge administratif, s’élabora la différenciation entre l’intérêt communal et l’intérêt intercommunal.

Une fois la distinction entre intérêt communal et intérêt intercommunal effectué, nous pouvons procéder à la différenciation de l’intérêt intercommunal et de l’intérêt

communautaire.

L’intérêt intercommunal peut s’analyser comme étant la mise en œuvre, à un niveau supra communal, d’un intérêt simplement communal. Pour François BENCHENDIKH, l’intérêt intercommunal à part entière, « n’existe donc pas, puisqu’il correspond à la translation de

l’intérêt communal à la structure intercommunale. Il s’analyse ainsi comme un système permettant de transférer des compétences communales sans en altérer leur substance » En

revanche, l’intérêt communautaire ne satisfait pas à cette définition. Il s’analyse comme un élément contribuant à la formation progressive et à part entière d’une identité

intercommunale. Pour l’auteur, « l’intérêt communautaire tire son originalité de son

autonomie par rapport à l’intérêt intercommunal »

La notion d’intérêt communautaire a été introduite par la loi du 6 février 1992327 pour les communautés de communes et élargie aux communautés urbaines et aux communautés d’agglomération par la loi du 12 juillet 1999. Nous pouvons cependant noter que la définition de l’intérêt communautaire n’appartient pas aux mêmes organes qu’il s’agisse des

communautés de communes ou des communautés d’agglomération et urbaines. En effet, concernant les communautés de communes, il appartient aux conseil municipaux de définir l’intérêt communautaire des communes membres à la majorité qualifiée requise pour la création328. A l’inverse, la définition de l’intérêt communautaire des communautés

327

La loi du 6 février 1992, disposait respectivement dans ses articles 71 et 73 que les communautés de villes et de communes, exercent de plein droit, au lieu et place des communes membres, pour la conduite d’actions d’intérêt communautaire, des compétences relevant, chacune, des groupes de compétences obligatoires et optionnelles.

328

d’agglomération et urbaines est faite par l’organe délibérant de l’EPCI à la majorité des deux tiers du conseil329.

La nécessité de définir l’intérêt communautaire pour les EPCI est clairement inscrite dans la loi du 12 juillet 1999. Mais le législateur n’a pas pris la peine de définir lui-même cette notion. Aussi la question se pose de savoir pourquoi la définition de l’intérêt communautaire n’est pas identique pour les trois types de communautés. Comme le relève François

BENCHENDIKH, les parlementaires se sont longuement interrogés afin d’établir s’il fallait associer les conseils municipaux dans la définition de l’intérêt communautaire pour les communautés urbaines et d’agglomération.

Il fut cependant décidé que la définition de cette notion, dans le cadre d’une communauté d’agglomération, se ferait sans recours au vote des conseils municipaux la composant330.

Pour François BENCHENDIKH, la définition de l’intérêt communautaire pour les

communautés d’agglomération échappe aux conseils municipaux qui la composent car elle est une structure beaucoup plus intégrée que la communauté de communes. Les

parlementaires craignaient également qu’en alignant la définition de l’intérêt communautaire des communautés de communes sur les deux autres communautés (à savoir que la définition serait établie par le conseil communautaire), on contribue à freiner la constitution des communautés les moins intégrées.

L’auteur constate alors que « ces distinctions dans les lieux et les modalités de définition,

entre les communautés urbaines et d’agglomération d’une part, et les communautés de communes d’autre part, ne permettent en aucun cas l’avènement d’une notion commune pour l’ensemble des structures intercommunales »

Nous serions tenté de valider cette affirmation en effectuant à partir de la différence effectuée entre l’intérêt intercommunal et l’intérêt communautaire, une comparaison : Le premier pouvant être facilement appliqué aux communautés de communes331 et le second étant appliqué aux communautés d’agglomération et urbaines332.

329

Article L. 5215-20-I pour les communautés urbaines et article L. 5216-5-III pour les communautés d’agglomération

330

Il ressort que les députés communistes avaient également souhaité que l’avis des conseils municipaux soit requis pour la définition de l’intérêt communautaire des communautés urbaines.

331

Cette observation n’est pas soutenable d’un point de vue juridique dans la mesure ou le CGCT ne fait référence bien sur qu’à l’intérêt communautaire pour les communautés de communes : article L. 5214-16 : « La communauté de commune exerce de plein droit au lieu et place des communes membres, pour la conduite d’actions d’intérêt communautaire, des compétences relevant de chacun des deux groupes suivants… »

332

En tenant compte des critères d’intégration, de la taille et de l’étendue des trois types de communautés et du nombre de compétences transférées, nous constatons une différence entre d’un côté les communautés de

La loi du 12 juillet 1999 marquait une importante évolution par rapport à celle de 1992. En effet, le transfert de compétences, suite à la définition de l’intérêt communautaire, ne provient plus des conseils municipaux souhaitant se départir de certaines compétences, mais des communautés d’agglomération et des communautés urbaines qui vont déposséder les

communes membres de leurs compétences. Ce sont donc ces deux structures les plus intégrées qui vont déterminer le degré de leurs compétences. Elles se voient reconnaître la faculté de déterminer de leur propre chef ce qu’elles considèrent comme étant une compétence d’intérêt communautaire.

L’absence de définition légale de l’intérêt communautaire engendra néanmoins de

nombreuses difficultés d’interprétation. Face à l’impossibilité de définir la notion d’intérêt communautaire, c'est-à-dire à l’impossibilité d’édicter des critères susceptibles de circonscrire les compétences des organes communautaires, certains parlementaires et certains auteurs ont opéré un rapprochement avec le principe de subsidiarité.

Nous avons déjà vu que le principe de subsidiarité, adopté par la révision constitutionnelle du 28 mars 2003333, permettrait d’opérer un système de répartition des compétences entre les différents niveaux de collectivités. Appliqué à la définition de l’intérêt communautaire, le principe de subsidiarité voudrait dire que la communauté s’emparerait de la compétence que la commune ne pourrait pas efficacement mettre en œuvre à son niveau.

Mais il semble impossible d’assimiler le principe de subsidiarité avec la définition de l’intérêt communautaire. En effet, si une commune éprouve certaine difficultés à accomplir une de ses compétences, la structure intercommunale ne pourra nullement se substituer à elle au seul motif que la collectivité de base n’exerce pas sa mission avec suffisamment d’efficacité.

Aussi, comme le constate François BENCHENDIKH, le Code générale des

collectivités territoriales n’a pas prévu que les structures intercommunales doivent faire la preuve, pour déposséder les communes, d’un meilleur exercice des compétences communales au niveau communautaire, ni même de l’existence de difficultés rencontrées par les

communes334. L’auteur explique alors qu’ « il est possible d’affirmer que le principe de

subsidiarité n’a aucune vocation à contribuer à la répartition des compétences entre l’EPCI

les communautés de communes ont conscience ou non de l’existence d’une identité intercommunale forte à la différence des grandes communautés d’agglomération, sans aborder le cas des communautés urbaines.

333

Article 72 alinéa 2 de la Constitution

334

Le transfert de compétence répond à des règles précises qui ne peuvent nullement être comparées avec celles régissant la dévolution des compétences des Etats membres vers les institutions européennes. Le seul point commun entre ces deux notions est qu’il s’agit d’une technique de répartition des compétences, mais cela ne suffit pas pour procéder à un rapprochement.

et les communes membres, car il a, à ce jour, toujours été confiné dans sa définition

communautaire…La définition du principe de subsidiarité, pour ce qui est de la répartition des compétences entre les structures intercommunales et leurs membres, ne peut en aucun cas être assimilée à celle du droit communautaire »335.

Partant du constat qu’il n’existe pas de définition claire et précise de l’intérêt communautaire, le législateur a donc laissé le soin aux conseillers communautaires de le faire. Dans tous les cas, la définition de l’intérêt communautaire permet d’opérer une répartition des compétences entre celles des communes membres et celles de leur EPCI.

Outline

Documents relatifs