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 3 Repères et approches méthodologiques

Chapitre 1  Introduction élémentaire aux films sanitaires

17.  Le renouveau des films de prévention 

D’un point de vue institutionnel, le nouveau statut du CFES lui permet de bénéficier d’une certaine autonomie dans les déclinaisons de ses actions de communication. Un ensemble de nouvelles conceptions éducatives, méthodologiques, d’apports techniques et de nouveaux moyens financiers260 amène dès 1976 la création de sa première campagne nationale d’information261. Elle sera suivie d’autres actions similaires dès 1977 et les années suivantes. Comme le remarquent justement Laurence Tondeur et François Baudier, « la

visibilité de la santé publique prend alors une dimension originale. La publicité, qui à l’époque n’était pas considérée comme un domaine très respectable et respecté, se mettait tout d’un coup au service de la santé. Cette arrivée inopinée, devait s’avérer par la suite comme essentielle pour une communication nationale en santé publique structurée et efficace »262. Cette nouvelle visibilité et ces nouveaux outils amènent la CNAMTS, partenaire des films depuis leur création, à revendiquer en 1976 l’hégémonie des films sanitaires, donc à s’autonomiser dans leur production263. Cette nouvelle ligne de conduite induit plusieurs changements majeurs dans la réalisation des films de prévention à la fin des trente glorieuses. Et c’est sans le concours du CFES que les productions télévisées d’éducation sanitaire sont désormais programmées à partir de 1976.

       

260

Le budget du CFES passe de 2,5 millions de francs en 1974 à près de 11 millions de francs en 1977. Cf Luc Berlivet, Uneasy Prevention: the problematic modernisation of Health Education in France after 1975, dans Virginia Berridge, Kelly Loughlin (dir.), Medicine, the Market and Mass Media : Producing Health in the

Twentieth Century, London, Routledge, « Studies in the Social History of Medicine », 2005, pp. 95-122.

261

Campagne 1976 contre le tabagisme : « Sans tabac, prenons la vie à pleins poumons ». Pour une analyse sociologique proche de nos problématiques, voir Luc Berlivet, Une biopolitique de l’éducation pour la santé.

art. cit.

262

François Baudier, et Laurence Tondeur, Le développement de l'éducation pour la santé en France : aperçu

historique, Actualité et dossier en santé publique, n° 16, septembre 1996, page VI.

263

Consciente du nouveau rôle qu’elle doit assumer, l’Assurance Maladie engage rapidement une diversification des productions, bien aidée en cela par un budget croissant264. Elle abandonne la série « Je voudrais savoir » au profit d’« Objectif santé »265, au style similaire, mais dont le titre évoque davantage l’idée d’une quête ou d’un accomplissement personnel. La division sanitaire de la CNAMTS explicite les projets et la portée sociale de ses émissions, conditionnés par les ambitions du VIIème Plan santé : « grâce à elles, l’Assurance

Maladie pourra progressivement faire jouer à l’éducation sanitaire le rôle qui lui incombe dans l’économie du système et lui donner la place qui lui revient dans une nouvelle éthique sociale »266. Afin de poursuivre le développement d’une culture sanitaire à grande échelle répondant aux nouveaux périls de la société moderne, la principale stratégie de la CNAMTS s’oriente vers la sensibilisation du jeune public. Elle cherche notamment à développer des programmes plus ciblés, destinés aux enfants. C’est ainsi que naît l’émission « La vie en

toi »267, identifiée comme « la première série d’émissions télévisées d’éducation sanitaire

réalisée à l’intention des jeunes dans notre pays »268. Outre ces deux nouvelles initiatives, diffusées par la Société Nationale Française 1 dès 1976, la CNAMTS propose les années suivantes près d’une demi-douzaine d’autres initiatives, récapitulées dans le schéma présenté ici.

       

264

Le budget effectivement utilisé pour les films d’éducation sanitaire passe de 1,8 millions de francs en 1975 à 3,7 millions de francs en 1976 (Rapports d’activités CNAMTS 1975 et 1976)

265

Rapport d’activité de la CNAMTS 1976, p. 466. 266

Ibid., p. 468. 267

« La vie en toi », émission hebdomadaire de 5 minutes destinée aux enfants (1976-1978), diffusée à partir du 19 mai 1976 par la Société Nationale Française 1.

268

Cependant, viser une incorporation des réflexes sanitaires dès le plus jeune âge nécessite une adaptation des contenus et des discours divulgués. Par exemple, pour pallier aux difficultés des enfants à se focaliser sur des informations scientifiques ou médicales, les réalisateurs optent pour un format de présentation plus court. La durée est ainsi réduite de dix à cinq minutes. Des évolutions sont aussi à noter à propos de la scénarisation des productions pour enfants. Plus soignées, elles cherchent à fidéliser les téléspectateurs, en employant par exemple des acteurs récurrents, rendant ainsi plus facile l’identification aux personnages et donc indirectement l’intégration des contenus. Les scénarios s’orientent davantage vers des situations amusantes voire burlesques, aidant à faciliter encore davantage l’acquisition de connaissances et leur assimilation. L’introduction de personnages d’animation voire d’effets spéciaux (thématique de l’espace, personnages de type « robots ») est la dernière innovation marquante, renforçant encore le côté ludique destiné aux jeunes, mobilisant leur imaginaire et

Figure 16 : Répartition chronologique des principales séries télévisées (1976‐1988)  1976          1978       1979      1980       1982       1984       1985       1986        1988 Hygea 7  La Belle  Santé La vie en toi  Jouer le jeu Super Doc Prévention Outre‐Mer Prévention 20 Objectif Prévention Objectif Santé 1981

renforçant leur attention. Néanmoins, si la CNAMTS intensifie son action vers cette catégorie spécifique des enfants, elle n’oublie pas pour autant de proposer des émissions aux autres publics, qui nécessitent aussi une éducation sanitaire aux différents âges de la vie et dans les différentes régions françaises. En témoignent par exemple les créations originales Prévention

20269, destinées très spécifiquement aux adolescents et aux jeunes adultes et Prévention Outre Mer270, traitant des conditions sanitaires dans les DOM-TOM.

Ces différentes évolutions structurelles induisent une modification de l’espace audiovisuel de l’éducation sanitaire. De nouvelles représentations, de nouveaux discours et de nouveaux publics s’accompagnent aussi d’une réactualisation des thèmes. Les nouvelles priorités abordent davantage les pathologies induites par les modes de vie de la société moderne. Elles questionnent également la place de l’individu et la fréquence des risques liés à ses pratiques quotidiennes.

18.  A  chacun  sa  responsabilité  :  accidents  domestiques,  sexualité  et 

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