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De la centralisation à l'obligation de rendre compte

Paragraphe 1. Le déclin de l'État centralisé

B. Le péril de la politique ouest africaine

Alors que la situation des États africains devenait de plus en plus complexe au vu du mode de gestion perpétué par ces dirigeants, ceux-ci ont eu l’idée d’en appeler à la communauté internationale (1) en vue de trouver des pistes pour une sortie de crise efficiente. Cela a donc orienté leurs différents choix organisationnels vers un certain nombre de programmes encadrés par les politiques publics (2).

1. L’interventionnisme international

À partir de la vague de sommations démocratiques des années 80, un certain nombre de prérogatives avaient vu le jour. Pour la plupart des États en crise, les raisons de ces revendications ont été non seulement le fait de la mauvaise gestion des politiques, mais « aussi et surtout due à une crise des finances publiques dont la manifestation la plus emblématique fut la crise de la dette publique qui avait déjà été amorcée une décennie plus tôt »69.

Pour faire face à cette dernière crise qui était plutôt structurelle, « la quasi-totalité des pays africains ont mis en œuvre, depuis le début des années 1980, des politiques de stabilisation et d’ajustement »70 sous fortes suggestions et avec l’appui des institutions de Washington tels que le Fond Monétaire International (FMI) et la Banque mondiale.

En 1981, les agriculteurs ivoiriens ont été confrontés à la puissance des autorités de Bretton Woods qui avaient demandé la baisse de leurs rémunérations. Face au refus du président de la république, il a été constaté un blocus mis sur le cacao de la Côte d’Ivoire, désorganisant le circuit commercial local et aggravant la situation des planteurs dont les campagnes 1988- 1989 sont restées impayées.

La situation des populations devenant de plus en plus critique et face au maintien du blocus, les États africains se sont tournés vers les politiques publiques. Elles leur ont été proposées pour réussir une sortie de crise efficace et probante, au moment où la question du

69

A. KY, op.cit., p. 42.

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35 développement71économique se posait avec davantage d’acuité au sein de ces États nouvellement indépendants. Les institutions internationales ont donc présenté leur aide sous forme de contrepartie, ou encore de prime à la démocratisation 72.

2. L'adoption des politiques publiques

« Historiquement, le point de départ des politiques publiques est lié aux premières formes de pouvoir politiques institutionnalisées dans l’antiquité »73. En Afrique de l’ouest francophone, c’est en vue de parvenir à cette institutionnalisation et d’éradiquer les fléaux nés de la mauvaise gouvernance en démocratie, que les États ont adopté un ensemble de stratégies qui sont des actions coordonnées, ayant pour objectif d'obtenir une modification ou une évolution d'une situation donnée.

En général, les politiques publiques sont conduites par les institutions et administrations publiques avec un ensemble de moyens (humains, financiers et matériels). Ces moyens servent à agir sur une situation structurelle ou conjoncturelle déterminée. Au titre de ces situations, nous pouvons citer celles concernant la santé, la famille, le logement, l’emploi, la recherche, la fonction publique, la crise, le déficit. Ces différents moyens doivent aussi permettre d’atteindre un ensemble d’objectifs préalablement fixés en rapport avec l’égalité, la justice, la santé publique, le bien-être social, la résorption de la crise, le déficit budgétaire.

Cependant, ils devraient être mesurés en fonction de la qualité et de l’opportunité de l’intervention publique. En somme, il s’agit de comprendre par des approches multidisciplinaires, quels sont les problèmes publics qui doivent être traités par l’autorité publique et comment74.

71

J. BRIGNON, Petit précis de santé publique, Éditions Lamarre, Pays-Bas, 2007, p. 179 : « Au sortir de la seconde guerre mondiale, le vocable « sous-développement » désignait l’ensemble des pays n’ayant pas atteint un certain stade d’industrialisation. Il était caractérisé du seul point de vue économique. Mais plus récemment, la définition de développement va prendre en compte des progrès technologiques, et des changements structurels au sein de la société. Ces derniers font référence aux conditions sociales (diminution de la mortalité infantile et maternelle, augmentation de la natalité, augmentation du nombre d’emploi rémunérés) et institutionnelles (établissement d’un système de protection sociale, mode d’exercice démocratique du pouvoir, stabilité politique) du pays ».

72

S. P. EKANZA, L’Afrique et le défi du développement, L’Harmattan, 2014, p. 64.

73

P. LASCOUMES et P. LE GALES, Sociologie de l’action Publique, Armand Colin, 2012, p. 9.

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36 Ces politiques publiques doivent être constituées en gardant à l’esprit les objectifs de respect des normes de la bonne gouvernance adoptées par plusieurs pays. Notons que « la Banque mondiale a été prolifique dans la production de documents concernant la gouvernance en tant qu’outil général du processus international de développement »75.

Ayant fait l’objet de discussion lors de la mise en place de cadres de dialogues nationaux (Conférences Nationales), ces revendications ont permis de soulever des lacunes importantes dans le fonctionnement de ces pays jeunes et fragiles. Elles ont été adoptées dans la plupart des États francophones Ouest africains comme ce fut le cas au Benin, au Niger, en Côte d’Ivoire au Burkina Faso, mais encore au Cameroun avec « l’instauration du forum de réconciliation »76.

Couramment sollicités pour débattre des diverses réformes à apporter à l’État en récession, « ces Conférences Nationales ont regroupé la plupart des acteurs politiques et de la société civile et ont été les événements nationaux fondateurs des processus de démocratisation »77. Malgré ces desseins, le bilan est demeuré le même. Les résultats de ces techniques n’ont pas toujours eu des retombées satisfaisantes et probantes, comme dans les pays d’où elles ont été importées (pays de l’occident développés).

À l’inverse, ces procédés ont évolué vers de nouvelles formes de déliquescence78 et de pillage des ressources étatiques entre autres maux, altérant l’efficacité de l’administration des pays africains. La crise de l’État africain en ce XXe siècle finissant n’était pas seulement une crise politique, « elle était aussi et surtout une crise des finances publiques dont la plus grande lacune fut constatée lors de la crise de la dette publique qui avait déjà été amorcée une décennie plutôt »79.

75

Conférence sur Les fonds internationaux de Développement Agricole, Conseil d’administration - Soixante- septième session, Rome, 8-9 septembre 1999, p. 1.

76

Pour être plus proche de la vérité, il convient de signaler que le forum de réconciliation nationale du Burkina Faso n’avait pas pu aller jusqu’au terme de ces assises. En effet, avant le début des travaux proprement dits, les participants ne sont pas parvenus à s’accorder sur la nécessité de la retransmission en direct des débats du forum sur les antennes de la radio nationale. Il s’en est suivi un blocage des travaux ce qui a entraîné la dissolution dudit forum par le gouvernement qui l’avait convoqué quelques jours plus tôt. Du reste, la convocation de ce forum était intervenue bien après l’adoption de la Constitution de juin 1991 qui avait déjà consacré le retour du pays à la démocratie et au pluralisme politique de même que le principe de la décentralisation.

77

C.N. MBACK, Démocratisation et décentralisation : Genèse et Dynamiques comparés des processus de

décentralisation en Afrique subsaharienne, Karthala, 2003, p. 57.

78

Déliquescence : décadence complète, perte de cohésion.

79

37 Les solutions que proposaient ces institutions, dans le cadre des programmes d’ajustements structurels, ont été presque partout les mêmes sur le continent : assainissement des finances publiques, suppression des distorsions, ouverture extérieure, réformes institutionnelles conduisant à plus de démocratie80. Et au titre des réformes institutionnelles, nous pouvons citer l’instauration du multipartisme, dans le contexte de transition démocratique qui prévalait alors.

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