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De la centralisation à l'obligation de rendre compte

Paragraphe 2. La participation citoyenne

A. La participation citoyenne objet d’interaction communautaire

Partant des équilibres fonctionnels à réaliser, la participation citoyenne est la caractéristique d’un progrès constant qui renouvelle le débat du passage de l’autogestion à la démocratie participative (1). Elle permet par ailleurs de développer les outils nécessaires à une définition précise des besoins des collectivités (2).

1. De l’autogestion à la démocratie participative

L’autogestion est une forme de pouvoir développée par Proudhon, qui exprimait sa méfiance à l’égard de toutes les formes de représentation politique, et surtout à l’égard des partis politiques.

Si tant est qu’elle s’apparente à un contrôle, elle exprime la volonté de « rompre avec une conception de la société socialiste où les changements sont essentiellement apportés par l’État, pour imaginer un socialisme où les organisations à la base exercent une part de pouvoir »145. Selon lui (Proudhon), l’autogestion est une pratique exercée en général au plus petit échelon de la communauté.

Il s’agit d’un principe dont la perceptibilité est souvent analysée dans les localités traditionnelles d’Afrique de l’ouest, dans les communautés villageoises où les populations sont souvent en parfaite relation d’entraide entre voisins ou membres du même clan. Au

144

O. GUICHARD, Vivre ensemble, rapport de Droit administratif-Administration régionale et locale, Éditions Larousse, 1976.

145

P-J. PROUDHON, Qu’est-ce que la propriété ou recherche sur le principe du droit et du gouvernement, Librairie de Prévôt, 1841, p. 37.

60 nom de cette cohésion, un pêcheur échangerait les produits de sa pèche contre une partie de la récolte d’un agriculteur ou un commerçant de tapisseries ou de bijoux.

En somme la production était suffisante pour le nombre de personnes de la communauté. Et cela s’étendait même aux moyens humains dans la mesure où un paysan pouvait solliciter la main d’œuvre de ses autres confrères de clan pour l’aider à défricher ou récolter son champ. Ainsi, l’autogestion revêtait un caractère de communautarisme dans la mesure où « l’individu n’existe pas indépendamment de ses appartenances à sa culture, à son ethnie et sa société »146.Grâce à cette affiliation forte à sa communauté, l’individu éprouvait une aisance à défendre celle-ci, à œuvrer pour l’intérêt de la tribu et non seulement pour le sien. Depuis plusieurs années, le sentiment d’appartenance s’est avéré être de moins en moins présent dans les États Ouest Africains, notamment dans ceux qui ont connu de véritables changements du fait de la démocratie, adoptée dans les années 90 pour répondre aux idéaux internationaux. Pour cause, « les dynamiques émergentes ne se sont pas toujours inscrites dans un développement soucieux de la réduction de pauvreté »147, ce qui a rendu les populations austères à tout projet émanant de l’État.

Mais en partant du postulat que la démocratie est nécessairement participative, « l’idée de démocratie participative s’est aujourd’hui peu à peu diffusée, par différence avec la démocratie représentative classique. Son principe général étant simple : les citoyens doivent être consultés avant la prise de décision politique. Mais son application soulève de nombreuses difficultés »148 pour la plupart relative à l’inconsistance des moyens utilisés pour atteindre la population. Se pose alors le problème de la multiplicité de langues en Côte d’Ivoire et de la nécessité pour les élus locaux de comprendre les attentes de celles-ci149. Ils pourront ainsi organiser la consultation, aller plus loin dans la concertation, en évitant de se contenter d’une société civile cooptée. Cette démarche fera alors éviter les risques de populisme 150.

Avec la participation citoyenne, l’on note une évolution des actions en faveur de la revalorisation culturelle de l’esprit national et de l’amélioration des institutions politiques.

146

C. HALPERN, Communautarisme, une notion équivoque, agencements collectifs et l’écologie des

pratiques, article de Sciences Humaines, Avril 2004, p. 16.

147

E. MATTEUDI, op.cit.

148

J-P. GAUDIN, La démocratie participative, Armand Colin, 2e

éd., 2013, p. 8.

149

La nécessité de communiquer avec les individus issus d’autres communautés, la forte hétérogénéité linguistique ont été la cause de l’émergence de la langue française en Côte d’ivoire, à l’instar du dioula qui était la langue du commerce... Aussi le fort poids d’étrangers dans ce pays a encouragé cette population à se familiariser avec la langue française qui est aujourd’hui la langue des institutions.

G. PERRIN, La population francophone de Cote d’Ivoire : Données statistiques et estimation pour 1980, IRAF (Institut de Recherche sur l’Avenir du Français), Paris, 1990, p. 8.

150

61 Il s’agirait ainsi d’élever à un niveau différent, la démocratie en tant que procédé actif pour l’enracinement d’une gestion efficace des affaires du clan, du village, mais encore de la commune, de la région et même du pays tout entier. En ce sens que tout groupement dans son ensemble concourt à une certaine autogestion des affaires commerciales qui devraient être prévues dans le mode d’organisation actuel. On en arrive à une véritable liberté et prise en compte des choix des populations, mises à contribution pour toute intervention dans leur localité, à travers les débats publics, les réunions de concertation, les enquêtes individuelles. En effet, il s’agit de « rendre aux citoyens le plus de pouvoir possible dans le plus de domaines possibles, […] leur offrir les possibilités concrètes d’exercer un contrôle démocratique et une prise réelle sur les choix qui les concernent »151.Aussi, ce pourrait être l’occasion d’optimiser les interventions au sein des collectivités, et de se rendre compte des réels besoins des peuples.

2. Outils de définition des besoins

La simplification des méthodes démocratiques en matière d’expression de besoins et la quête de mobilisation des acteurs économiques locaux représente un moyen efficace pour améliorer la désignation des besoins réels d’une population. Comme le démontre si bien l’exemple français, la participation des acteurs tels que les populations, les administrations locales et les pouvoirs publics locaux, permettrait d’atteindre cet objectif.

Mais loin de continuer sur les « itinéraires de développement calqués sur les modèles du Nord et qui ont engendré une dégradation des indicateurs macroéconomiques, sociaux et sanitaires depuis les années 80 »152, la proposition des projets devrait émaner d’une étude spécifique en rapport avec des indicateurs plus concrets et plus proches de la réalité des populations africaines ; ce qui en garantirait sa viabilité.

En raison de l’insuffisance de ses moyens et de la crise intellectuelle dont elle est victime, l’Afrique est plus que jamais en mesure d’exprimer ses attentes à travers la participation citoyenne, mais également d’identifier ses propres besoins. Plusieurs études ont vu le jour pour déterminer les différents indices de développement de ce continent plein de ressources

151

A. ROUX, 50 ans de démocratie locale, comment la participation citoyenne s’est laissée endormir,

pourquoi elle doit reprendre le combat, Éditions Yves Michel, 2011, p. 57.

152

E. OGOUWALE, Les chemins du développement en Afrique de l’Ouest : hier, aujourd’hui et demain, « Sortir du sous-développement : quelles nouvelles pistes pour l’Afrique de l’Ouest ? Aspects, historiques, institutions et intégration régionale », tome 1, L’Harmattan, 2014, p. 47.

63 caractère axé sur plus de sécurité, en vue de « la réduction des inégalités socio- économiques »155. La résorption de la crise, la réduction du déficit budgétaire, l’exercice du droit et la participation démocratique sont les principes qui ont besoin d’être développés pour répondre aux attentes du plus grand nombre. Suivant les indicateurs développés par la Fondation Mo Ibrahim156, « la gouvernance en Afrique est bonne », seulement lorsqu’elle répond aux objectifs de développement humain, de bien-être social, c’est-à-dire d’éducation et de santé de la population. En tenant compte de ces indices, on considère également les différentes interactions de la population dans le processus de développement. L’essentiel de ces principes repose donc sur le bien-être des populations dont l’intervention dans le processus de développement est non négligeable.

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