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La Responsabilisation des collectivités territoriales

Paragraphe 2. Les limites à l’autonomie des collectivités territoriales

A. L’intervention de l’État

Dans la mesure où le champ d’application de la décentralisation est l’État unitaire, les collectivités territoriales seraient « nécessairement soumises à l’intervention [de celui-ci] à travers ses représentants »262. Et quand bien même La France a évolué vers la fin de la tutelle sur les maires, autrefois « sous contrôle étroit des autorités déconcentrées de l’État, à la fois organique et fonctionnel »263, elle demeure en État conservateurs.

En effet, on constate l’action de l’État centrale en fort mouvement au travers des contrôles des actes administratifs (1) mais également sur les élus locaux (2).

1. Les contrôles administratifs ou l’ancien contrôle a priori

Les différents contrôles administratifs représentent tous les actes pris par les autorités communales et qui font impérativement objet de contrôle par les représentants de l’État. Ce contrôle vise la « légalité que l’opportunité de l’acte »264 s’exerçait a priori.

En application de la loi sur la décentralisation, il a été constaté que les actions des élus étaient en permanence examinées par les représentants de l’État. Mais, les différentes évolutions des lois sur la décentralisation ont réussi à limiter les actions de ce pouvoir de tutelle.

261

J. MOREAU, Droit administratif, Collection Droit fondamental, PUF, 1987, p.122.

262

V. DONIER, Droit des collectivités territoriales, 2ème

Edition, Dalloz, 2017, p. 55.

263

O. GOHIN et alii, Droit des collectivités territoriales, 2ème Edition, CUJAS, 2015, p. 15

264

103 En effet, dans l’exercice du pouvoir de tutelle « confié aux représentants de l’État aux fins de contrôler les conditions dans lesquelles celui-ci est exercé, la plupart des contrôles a priori ont été supprimé au profit des contrôles a posteriori »265, dans le but d’accorder aux plus de libertés aux communes. Mais, l’État se laissait tout de même la latitude de pouvoir exercer « le contrôle a posteriori, sauf dans les cas limitativement énumérés par la loi »266.

Aujourd’hui encore, ce contrôle s’exerce sous forme de saisine du juge administratif par le préfet, en constatation d’une erreur lors de la conclusion d’un acte par une commune. Par exemple, après examen de l’acte à lui soumis par la collectivité, le préfet a pour obligation de contester la légalité de l’acte en saisissant le juge administratif, seul capable d’annuler un acte. Cette action de préfet peut être, elle aussi, soumit à la censure du juge administratif, lequel a une mission de justice, eu égard sa position de supérieur hiérarchique267. En effet, dans cette espèce, « la faute lourde a été retenue en raison de refus répété de préfet de déférer des délibérations locales dont l’illégalité était manifeste »268

Loin de cet idéal démocratique épousant un aspect de respect des valeurs communales, mais aussi étatique, les pays subsahariens, en plus de faire obstacle à ses contrôles sont aussi souvent sujet à une importante ingérence des acteurs politiques dans les affaires communales. Par exemple, en Côte d’Ivoire, la coexistence de deux types de contrôle, a priori et a posteriori, constitue l’une des importantes insuffisances de l’exercice de la tutelle de l’État sur les entités décentralisées. En effet, l’application, de l’un, aux communes et, de l’autre, aux départements et aux districts, constitue une source de frustration pour les Maires, selon lesquels le contrôle a posteriori permet à l’entité décentralisée d’être plus diligente dans ses actions. En outre, il a été enregistré, au titre du contrôle a posteriori, des obstacles liés à l’absence de tribunaux administratifs locaux et de chambres régionales des comptes. S’agissant des T.A.L., les actes des collectivités territoriales, en vertu du mode de contrôle a posteriori, sont notifiés à l’autorité de tutelle qui, si elle estime qu’ils sont contraires à la légalité, devrait pouvoir les déférer devant

265

O.GOHIN et alii, op.cit., p. 590.

266 DGDDL, Institutions locales, Guide pratique de l’élu à l’attention des collectivités territoriales de la Côte

d’Ivoire,2007.

267

Confère la jurisprudence du ministre de l’intérieur contre la commune de Saint-Florent, CE du 6 Octobre 2000, rec., p. 395.

268

104 le tribunal administratif local. Mais, bien que la Côte d’Ivoire ait adopté depuis 2001 le principe du contrôle a posteriori, ce mode d’exercice de la tutelle ne peut, à ce jour, être normalement appliqué faute de T.A.L., ce qui constitue un sérieux handicap à l’exercice du contrôle de légalité et par conséquent à l’application harmonieuse de la nouvelle politique de décentralisation.

Concernant les chambres régionales des comptes, il convient d’indiquer que la Cour des Comptes a, entre autres missions, le contrôle de la gestion financière et comptable des collectivités territoriales. Cependant, son éloignement des collectivités territoriales pose le problème de son efficacité en matière de contrôle des actes budgétaires de ces entités décentralisées.

Avec les nouvelles évolutions constatées dans les lois de décentralisation, ces contrôles peuvent également être effectués sur les élus locaux.

2. Le contrôle des élus locaux

Même si les nouvelles lois de la décentralisation tendent à apporter plus de liberté aux élus locaux, ils ne sont pas exempts de tout contrôle quant à la gestion de leurs collectivités. Gaston DÉFERRE annonçait en 1981 que les élus locaux devraient cesser d’être des « mineurs soumis aux décisions d’une classe politique et d’une administration de plus en plus centralisée, de plus en plus technocratique pour devenir des élus majeurs, responsables, libres d’agir sans ces contrôles a priori, sans que leurs décisions ne soient remises en cause, retardées, déformées »269. Même l’idéal de cette gouvernance des collectivités sans contrôle a été réprimée, et fort est de constater son importance pour la préservation des intérêts de la collectivité et aussi de l’État.

Les contrôles sur les élus tendent à s’assurer que ceux-ci ne manient pas directement les deniers publics et font appel pour se faire à des experts, « habilités à le faire et à exécuter les opérations de recettes et de dépenses (…), toujours sur la base des ordres donnés par l’exécutif local »270. Auquel cas, l’élu local se rendrait coupable de gestion de fait. Dans le cas d’espèce si dessus

269

B. MATHIEU, Michel VERPEAUX, op.cit., p. 1.

270

105 cité, un contrôle de gestion différent du contrôle juridictionnel imposé aux collectivités territoriales pour respecter les normes de bonne gouvernance, est réalisé par la chambre régionale des comptes dans le but de tenir les élus locaux dans l’efficacité de leur mode de gestion.

Toujours dans le but de répondre aux exigences de la bonne gouvernance, un autre type de contrôle est exercé sur les élus locaux pour éviter toute sorte de dilution de responsabilité. « La clarté ne s’accommodant pas d’ambiguïté »271, un contrôle peut concerner la vérification des responsabilités, de leurs compétences et des différents acquis au sein de la collectivité. Tel est le cas d’une personne adossant les responsabilités de députés et de maire, deux fonctions en totale contradiction avec l’esprit démocratique. En tant qu’exécutif et agent de l’État, la pertinence de son apport dans la collectivité dont il a la charge, des actes qu’il prend est soumise au contrôle administratif. Une telle ambiguïté ne facilite pas forcement la décentralisation et la bonne gouvernance au sein de l’entité décentralisée à qui il convient d’avancer dans la lumière et la simplicité pour en garantir l’efficacité de ce mode de gestion administratif. Dans cette optique, la loi n° 2014-125 française du 14 février 2014 interdisant le cumul des fonctions exécutives locales avec le mandat de député ou de sénateur a été adoptée.

Il est vrai que la décentralisation n’est pas forcement cet idéal libertin auquel certaines collectivités auraient pu rêver. Jacques BAGUENARD exprimait à ce propos qu’elle n’est « que ruse du pouvoir qui ne trouve son sens que si on l’appelait tout à fait autrement, c'est-à- dire autogestion »272. Il importe en outre de mentionner l’importance de la réglementation de ce type d’aménagement territoriale face aux dérives politiques constatées.

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