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De la centralisation à l'obligation de rendre compte

Paragraphe 1. La subsidiarité active

A. L’organisation infrastructurelle

L’infrastructure étant l’ensemble des éléments interagissant pour la consolidation de la structure, nous pouvons la rapporter au cas d’espèce à toutes actions mises en œuvre pour réussir à asseoir une réelle ascension de la collectivité.

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François-Xavier AUBRY, op.cit., p. 51.

105

Martine LOMBARD, op.cit., p. 13.

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48 Cette organisation tient compte de la valorisation des biens publics (1) et de l’obligation de constituer un domaine public (2) capable d’améliorer la productivité de la collectivité.

1. La valorisation du patrimoine

Comme les autres personnes publiques, les personnes administratives ont un patrimoine, qu’elles gèrent librement. Elles disposent de ressources propres et engagent certaines dépenses. Le vote d’un budget matérialise cette faculté.

Le patrimoine des collectivités locales se traduit généralement par l’ensemble des biens dont elles disposent, c'est-à-dire des ressources matérielles qui leur permettent d'assurer leur mission.

C’est souvent à partir de la richesse du patrimoine infra-structurel, immobilier et foncier qu’on qualifie la richesse ou la faiblesse d’une collectivité locale. Mais cette qualification doit tenir compte de la volonté de cette collectivité à continuer son œuvre pour le développement. Il s’agirait donc pour elles d’asseoir une réelle politique de gestion de ce patrimoine dont elles sont les garantes.

Si l'on part du constat que, « le patrimoine reflète l'image de santé économique de la collectivité locale, on ne peut qu'être d'accord avec l'idée selon laquelle le patrimoine constitue un facteur dynamisant de l'action économique des collectivités locales dans le cadre de leur intervention »107. Cette dynamisation émanerait de la mise à disposition des collectivités locales et leurs ressources pour aider à répondre à la pléthore de questions en rapport avec la réussite de la décentralisation et de la bonne gouvernance en général, et de leur essor en particulier.

C’est dans ce sens que le patrimoine des collectivités locales devient utile à une mise en valeur certaine, pouvant aider à la libération des d’activités financières, constituer un apport certain et parvenir au développement territorial espéré. « Chaque collectivité est propriétaire de son domaine »108. Il incombe aux élus d’œuvrer pour son émancipation.

107

Mohamed EL MOUCHTARAY, Le rôle des collectivités locales dans le développement économique et

social du Maroc, Revue marocaine d’administration locale et de développement n° 24, 2000, p. 189.

108

49 Ainsi, certaines collectivités dotées de patrimoine naturel, telle la mer, pourraient favoriser les activités autour de stations balnéaires. Cet atout s’avère être une source de revenue que les élus pourraient utiliser pour mieux organiser l’activité et la rendre prospère.

Cet exemple pourrait s’étendre à toutes les collectivités locales possédant un patrimoine, qu’il soit historique, culturel ou naturel. Parce que chaque patrimoine est différent, les nécessités des collectivités locales seraient forcements différents. Car dans la mesure où « dès qu’on s’éloigne du centre, les besoins peuvent varier et à côté des généraux, il peut s’en créer des locaux, l’autorité centrale n’est ni suffisamment avertie de ces besoins locaux, ni suffisamment rapprochée pour y pourvoir »109.

Devenue une préoccupation majeure pour les élus locaux, la valorisation du patrimoine est une manière singulière d’approcher la question de la décentralisation. Il est par ailleurs important d’arriver à une qualification efficace de ce domaine dans les pays en voie de développement. D’autant plus que l’autorité centrale peut intervenir dans la gestion de ce patrimoine en raison de ces besoins et de ces apports110.

2. La domanialité des biens publics

Régit par le code général de la propriété des personnes publique, la jurisprudence qualifie être du domaine public, tous biens appartenant à une personne publique et faisant l’objet d’une affectation à un intérêt général. Qu’il soit naturel ou artificiel, d’utilité générale ou administrative, le domaine public représente l’ensemble des biens faisant partie des moyens de valorisation de la collectivité. En France, la reconnaissance du domaine public émane de l’article Article L2111-1 du Code Général de la Propriété des Personnes Publiques (CG3P). Cet article explique que « sous réserve de dispositions législatives spéciales, le domaine public d’une personne publique, est constituée de biens lui appartenant et qui sont soit affectés à l’usage direct du public, soit affectés à un service public pourvu qu’en ce cas, il fasse l’objet d’un aménagement indispensable à l’exécution des missions de ce service public »111. On comprend alors que c’est la notion d’appartenance d’un bien à la personne

109

Léon BEQUET, Répertoire de droit administratif, tome IX, p. 472.

110 Quand bien même des compétences de gestion sont attribuées aux collectivités locales, il se peut que dans

certains cas, que l’État intervienne dans cette organisation locale. Cette immiscion concerne tout ce qui est central, tel que la construction d’une autoroute. Ce cas s’applique aussi à certains musées de ville ou des édifices nationaux. (La tour Eiffel ne relève pas de la compétence de la mairie de Paris. C’est un édifice national qui est géré par l’État).

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50 publique qui détermine son caractère public. Partant, le conseil constitutionnel leur a reconnu le droit de propriété sur leurs domaines. Partout, l’on note le caractère utile de ces biens mis à disposition des collectivités pour mener à bien leurs missions. C’est pour cela qu’à l’article précédemment citée, s’adjoint la loi du 31 juillet 1837 qui apporte des éléments essentiels à la postérité de ces domaines, à savoir une réelle reconnaissance de la personnalité juridique des municipalités...112.

Le Sénégal est le premier pays ouest africain à avoir introduit le concept de domanialité des biens publics dans une loi de 1964113. Dans cet État, le domaine public s’identifie à ce qu’on pourrait qualifier de domaine national. Il inclut de plein droit « toutes les terres non classées dans le domaine public, non immatriculées ou dont la propriété n’a pas été inscrite à la conservation des hypothèques... », à la date d’entrée en vigueur de la loi. Ainsi, le domaine national sénégalais se composerait de terres anciennement possédées en vertu des principes coutumiers et que l’État détient au nom de la Nation et en vue « d’assurer leur utilisation et leur mise en valeur rationnelles, conformément aux plans de développement (...) ». Dans la perspective de cette utilisation rationnelle, on pourrait diviser le domaine national en « quatre catégories que sont les zones urbaines, les zones classées, les zones des terroirs, et les zones pionnières. Les zones pionnières notamment correspondent aux espaces pouvant être aménagés conformément aux plans de développement. Les terres de ces zones sont affectées par décret aux communautés rurales, à des associations coopératives ou à des organismes créés par le gouvernement ».114

Qu’ils appartiennent à la région, au département ou à la commune, les biens domaniaux « supposent des attributions suffisamment générales et effectives et une libre gestion qui exclut les atteintes ou les empiétements de l’État »115. Il faut dire « qu’ils intègrent aussi l’exigence valorisante des biens publics »116.

112

LOI n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018.

La loi de 1837 a multiplié, par ailleurs, les matières sur lesquelles peuvent porter les délibérations des conseils municipaux. L'idée d'une « compétence générale » sur les sujets « d'intérêt communal » est esquissée. Sénat du 28 juillet 2019.

113

Recueil des textes sur les collectivités locales au Sénégal, LOI N° 64-46 DU 17 JUIN 1964 relative au Domaine national. (J.O. 3692, p. 905)

114G. CHOUQUER, Les appropriations de terres à grande échelle. Analyse du phénomène et propositions d’orientations, Comité technique « Foncier et Développement » (AFD-MAEE), juin 2010, p. 56.

115

P.N.G. OLAMBA, Décentralisation, Démocratie et Développement local au Congo-Brazzaville, L’harmattan, 2013, p. 52.

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51 Le domaine public ivoirien quant à lui est, en comparaison à celui du Sénégal, peut consistant en raison des incertitudes notées face à l’identification même de ce domaine. C’est à partir du décret de 1928117, dont la « connaissance est tributaire des quatre domaines qu’elle a expressément exclus (domaine public, périmètres urbains, zone d’aménagement différé, forêts classées) » que les gouvernements ont apporté une définition au domaine foncier rural.

S’étant avérée caduque, cette identification a été modifiée par la loi n° 98- 750 du 23 février 1998 qui a reconnu une nouvelle catégorie foncière appelée le « domaine forestier ». L’action première était de faire une séparation entre le fonds de terre, ′′le foncier′′ et les ressources ligneuses qu’il comporte, la forêt. Par ailleurs, le domaine forestier « soumis à un régime spécifique, vient en ajouter à la confusion et à l’incertitude de l’identification des diverses divisions spatiales et juridiques dont les biens fonciers et forestiers sont l’objet dans notre pays »118.

Aujourd’hui encore, ce pays continue d’actualiser et de moderniser son domaine public avec l’adoption de l’ordonnance n° 2016-588 du 21 novembre 2016 qui a ouvert la possibilité, pour les personnes publiques, de consentir des baux emphytéotiques sur le domaine public. Et ceci, en vue de dynamiser l’économie des collectivités.

Cependant, malgré sa clarification, il existe une difficulté à promouvoir le développement des collectivités à partir la mise en valeur du patrimoine des pays d’Afrique de l’Ouest. Car celui presque inexistant est très souvent laissé en ruine, ou détruit lors de différents soulèvements populaires comme ce fut le cas en 2012, de la destruction des mausolées de Tombouctou au Mali par les rebelles islamistes. En Côte d’Ivoire, les réserves naturelles font l’objet de pillage, et de défrichements agricoles. Ces zones, depuis les années 2000, sont assiégées par certaines populations à cause de la démographie galopante et des grandes migrations nord-sud, non contrôlées, existant entre les différentes zones frontalières.119 La forêt classés du parc du Mont PEKO, n’existe plus que nom, tant elle a été l’objet de conflits en tout genre entre les Guérés et les baoulés, entre les populations autochtones Toura et les allogènes burkinabés pour l’implantation illégale de culture de cacao...

117 Décret du 29 septembre 1928, portant réglementation du Domaine public et des servitudes d'utilité

publiques en Côte d'Ivoire modifié par D. du 7 sept 1935 et D. n° 52-679 du 3 juin 1952.

118 P.C. KOBO, A. FIAN, Étude relative à l’implication de la définition du domaine foncier rural sur les autres domaines fonciers et au statut de l’arbre, Ministère de l’Agriculture Ivoirien, Aout 2009, p. 1.

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D.K. KOUADIO, Forêts classées de Côte d’Ivoire : la conservation à l'épreuve des modes

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