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Nous voudrions mentionner brièvement ici la dimension sociale du langage humain dans la réflexion théologique d’Augustin. En effet, il est important de souligner que sur ce registre également, Augustin a apporté des vues neuves, à telle enseigne qu’on a pu écrire : « la tradition se bornait à affirmer la destination sociale du langage ; Augustin se prévaut de cette notion pour souligner le caractère radicalement social des règles de l’usage linguistique, se plaçant ainsi à un niveau de considération bien plus profond ». 89

Nous avons vu au chapitre précédent comment, dès le De Dialectica, et jusqu’à la fin de sa vie, saint Augustin incluait dans la définition du verbum la dimension sociale comme constitutive de celui-

87 Il n’est tout de même pas inutile de rappeler qu’à cette époque, les valeurs symboliques de la croix n’étaient pas,

comme de nos jours, totalement déconnectées de la pratique du supplice : la croix n’était pas encore devenue vraiment un symbole visuel. C’est donc d’autant plus intéressant de voir ici Augustin en faire un symbole qui rassemble en lui toutes les dimensions signifiantes de l’existence chrétienne.

88 De doctrina christiana II, XLI, 62 : « in caritate radicati et fundati possimus comprehendere cum omnibus sanctis quæ

sit latitudo et longitudo et altitudo et profundum, id est, Crucem Domini. Cuius latitudo dicitur in transverso ligno,

quo extenduntur manus; longitudo, a terra usque ad ipsam latitudinem, quo a manibus et infra totum corpus affigitur; altitudo, a latitudine sursum usque ad summum, quo adhæret caput; profundum vero, quod terræ infixum absconditur. Quo signo crucis omnis actio christiana describitur: bene operari in Christo et ei perseveranter inhærere, sperare cælestia, sacramenta non profanare. Per hanc actionem purgati valebimus cognoscere etiam supereminentem

scientiæ caritatem Christi, qua æqualis est Patri, per quem facta sunt omnia, ut impleamur in omnem plenitudinem

Dei. »

89 R. SIMONE, « Sémiologie augustinienne », Semiotica VI (1972), pp. 1-16 a beaucoup insisté sur cet aspect (le texte

ci : « verbum est uniuscujusque rei signum, quod ab audiente possit intelligi, a loquente prolatum »90. Le

signe verbal ne se comprend donc pas en dehors de la présence mutuelle du locuteur et de l’auditeur. Et nous avons noté que, dans le De Doctrina christiana, saint Augustin montre que ce sont les règles de l’usage social, le consensus qui mettent en œuvre telle ou telle des nombreuses similitudes potentielles entre les choses et les mots91 : l’intérêt de cette question ne réside pas dans le fait que

notre auteur reprenne encore la vielle théorie stoïcienne de la similitude ou celle du législateur platonicien du Cratyle, mais bien plutôt qu’il en montre le caractère secondaire et très aléatoire, pour justifier le fait qu’un signe soit signe. Augustin développe donc ici, au sujet de la dimension sociale du langage, les principes contenus dans son analyse du signe comme signum datum. On revient donc, dans ce domaine également, à la nécessité pour tout utilisateur de signes de connaître la relation du signe à la res, c’est à dire de la relation entre les voces et leur signification, ce qui fait dire à R. Simone :

« La double constitution du signe linguistique n’est donc pas un fait qu’il faut seulement constater, mais aussi une fin à laquelle il convient de tendre si l’on veut réaliser la fonction première du langage, la communication. »92

Mais cette dimension sociale du langage ne se limite pas au fait de son institution ou de son usage par la société : pour Augustin, la manière même dont un système de signes est utilisé est, pour ainsi

dire, constitutive de tel ou tel type de société : c’est ainsi que peut s’interpréter le fameux passage sur

l’usage comparé des signes dans le paganisme gréco-romain, dans le peuple juif et dans le peuple chrétien :

« Il faut, tout d’abord, se garder de prendre au sens littéral une expression figurée. C’est à quoi se rapporte le mot de l’Apôtre : « La lettre tue et l’Esprit vivifie » (II Cor. 3, 6). Entendre un terme au sens figuré comme s’il était dit au sens propre, c’est penser charnellement [...] L’homme, en effet, qui suit la lettre, tient pour propres les

expressions figurées et ne rapporte pas le sens d’un terme propre à une autre signification.

Entend-il parler du sabbat par exemple, il comprend un des sept jours qui reviennent selon un rythme continu [...] Aussi est-ce justement pour l’âme une pitoyable servitude, que de prendre des signes pour les choses et d’être impuissante à élever l’œil de l’intelligence au-dessus de la création temporelle, pour le remplir de lumière éternelle. »93

« Cette servitude, toutefois, chez le peuple juif, était bien différente de celle des autres nations. Car la soumission des Hébreux aux choses temporelles ne les empêchait pas de glorifier en tout le Dieu unique. Et, bien qu’ils aient observé les signes des réalités spirituelles au lieu des réalités spirituelles elles-mêmes, car ils ignoraient à quoi ces signes se référaient, ils avaient implantée en eux la foi que par une telle servitude, ils plaisaient sans le voir au Dieu unique de l’Univers […] Voilà pourquoi les Juifs qui

90 Dual. 5 (P.L. 32, 1410).

91 De doctrina christiana, II, XXV, 38.

92 R.SIMONE,Sémiologie augustinienne, p. 14. Toutefois, nous ne partageons pas son jugement, note 21, p. 16,

lorsqu’il affirme que cette dimension de communication s’affadit et se banalise dans le De doctrina christiana. À notre avis, il s’agit de préoccupations nouvelles au sujet de langage qui n’excluent pas la dimension sociale mais l’envisagent dans un cadre plus large.

93 De doctrina christiana, III, V, 9 : « Nam in principio cavendum est ne figuratam locutionem ad litteram accipias.

Et ad hoc enim pertinet quod ait Apostolus : Littera occidit, spiritus autem vivificat . Cum enim figurate dictum sic accipitur, tamquam proprie dictum sit, carnaliter sapitur. Neque ulla mors animæ congruentius appellatur, quam cum id etiam quod in ea bestiis antecellit, hoc est intellegentia, carni subicitur sequendo litteram. Qui enim sequitur

litteram, translata verba sicut propria tenet, neque illud quod proprio verbo significatur refert ad aliam significationem.

Sed si sabbatum audierit, verbi gratia, non intellegit nisi unum diem de septem, qui continuo volumine repetuntur […]. Ea demum est miserabilis animæ servitus, signa pro rebus accipere, et supra creaturam corpoream oculum mentis ad

s’y sont obstinément attachés n’ont pu supporter le Seigneur qui tenait ces signes pour négligeables, quand le temps d’en révéler le sens fut désormais venu. »94

« Quant à nous, il nous est prescrit (Deut. 6, 5) d’aimer et d’honorer un seul Dieu, créateur de tous ces êtres dont les païens vénèrent les statues soit comme dieux, soit comme signes et images de dieux. Si donc prendre un signe utilement institué, pour la

réalité même qu’il est chargé de signifier, est une servitude de la chair, combien plus grande est la servitude, de prendre des signes, chargés de signifier des réalités inutiles, pour ces réalités ! Et quand même on ne verrait dans ces images que les objets qu’elles

signifient, vouer à ces objets un culte religieux, n’est-ce pas toujours se courber sous le joug d’une erreur et d’une servitude avilissantes? »95

« Est esclave d’un signe, en effet, celui qui fait ou révère un acte signifiant, sans en

connaître la signification. Celui qui par contre fait ou révère un signe utile, divinement institué, dont il comprend la force significative, ne révère pas l’apparence qui passe mais plutôt la réalité à laquelle tous ces signes doivent être rapportés. Or un tel homme est

spirituel et libre, même au temps de la servitude, lorsque la signification de ces signes ne devait pas être manifestée aux esprits charnels qui devaient subir leur joug. Tels étaient les Patriarches, les Prophètes96 [...] À notre époque, après qu’eût brillé, grâce à

la Résurrection de notre Seigneur, le signe très manifeste de notre liberté (indicium

nostræ libertatis illuxit), nous ne portons plus la lourde charge de pratiquer même ces

signes, car nous les comprenons désormais. Leur multitude a été remplacée par un petit nombre, très faciles à accomplir, très augustes à comprendre, très saints à observer, que le Seigneur lui-même et l’enseignement des Apôtres nous ont transmis. Tels sont les sacrements comme la baptême et la célébration du corps et du sang du Christ. Tout chrétien, quand il les reçoit, sait à quoi ils se rapportent et, par suite, est

amené à les révérer non par une servitude charnelle, mais, au contraire avec une liberté spirituelle. Toutefois, comme ne s’attacher qu’à la lettre, et prendre le signe pour là réalité qu’il recouvre, c’est l’indice d’un âme faible et servile ; ainsi donner à des figures

des interprétations vaines et stériles, est la marque d’un esprit livré à l’illusion et à l’erreur. D’un autre côté, savoir reconnaître ce qui est une figure, quoiqu’on n’en comprenne pas le sens, ce n’est plus être esclave ; mieux vaut alors être asservi à des figures inconnues, mais utiles, que de chercher, en en donnant des interprétations futiles, à secouer le joug de la servitude, pour s’engager dans les liens de l’erreur. »97

94 De doctrina christiana, III, VI, 10 : « Quæ tamen servitus in Iudæo populo longe a ceterarum gentium more

distabat, quandoquidem rebus temporalibus ita subiugati erant ut unus eis in omnibus commendaretur Deus. Et

quamquam signa rerum spiritalium pro ipsis rebus observarent, nescientes quo referrentur, id tamen insitum habebant,

quod tali servitute uni omnium, quem non videbant, placerent Deo […]Et ideo qui talibus signis pertinaciter inhæserunt, contemnentem ista Dominum, cum iam tempus revelationis eorum venisset, ferre non potuerunt ».

95 De doctrina christiana, III, VII, 11 : « Sed nobis unus diligendus et colendus Deus præcipitur, qui fecit hæc omnia,

quorum illi [=pagani] simulacra venerantur vel tamquam deos vel tamquam signa et imagines deorum. Si ergo signum

utiliter institutum pro ipsa re sequi, cui significandæ institutum est, carnalis est servitus, quanto magis inutilium rerum signa instituta pro rebus accipere ! Quæ si retuleris ad ea ipsa quæ his significantur, eisque colendis animum

obligaveris, nihilominus servili carnalique onere atque velamine non carebis. »

96 On mesure l’inexactitude des affirmations du Frère Y. CONGAR, lorsque dans sa détermination de l’Ecclesia

sacramentorum, il assimile indistinctement toute forme de signe à un registre ontologique inférieur, parce qu’il

implique une servitude (B.A. 28, Introduction, p. 115).

97 De doctrina christiana III, IX, 13 : « Sub signo enim servit qui operatur aut veneratur aliquam rem significantem,

nesciens quid significet. Qui vero aut operatur aut veneratur utile signum divinitus institutum, cuius vim significationemque intellegit, non hoc veneratur quod videtur et transit, sed illud potius quo talia cuncta referenda sunt.

Talis autem homo spiritalis et liber est, etiam tempore servitutis, quo carnalibus animis nondum oportet signa illa revelari, quorum iugo edomandi sunt. Tales autem spiritales erant Patriarchæ ac Prophetæ […] Hoc vero tempore posteaquam resurrectione Domini nostri manifestissimum indicium nostræ libertatis illuxit, nec eorum quidem signorum, quæ iam intellegimus, operatione gravi onerati sumus, sed quædam pauca pro multis eademque factu facillima et intellectu augustissima et observatione castissima ipse Dominus et apostolica tradidit disciplina, sicuti est

Ce développement très important qui situe les unes par rapport aux autre les “religions” païenne, juive et chrétienne, se fonde sur la théorie du signe : les païens ont des signes inutiles (statues de dieux) qui font appréhender faussement les réalités auxquelles elles renvoient (la mer comme une puissance divine , alors qu’elle est une créature) ; les Juifs ont des signes inutiles de réalités vraies (le Dieu unique) mais ces signes sont inutiles dans la mesure où ceux qui y étaient soumis, n’avaient pas encore la possibilité de connaître les choses qu’elles signifient (et donc qu’elles étaient des signes) ; enfin les chrétiens n’ont plus qu’un petit nombre de signes, — c’est précisément ici que saint Augustin fait référence explicite aux sacrements — mais dont ils connaissent la relation à la réalité qu’est le salut par le Christ : une telle connaissance des signes comme signes est même assimilée à un régime de liberté. Il n’est pas exagéré de dire que nous avons ici le premier grand texte d’une phénoménologie de l’histoire des religions, dans la mesure où :

1) il y a un accord fondamental entre les divers statuts religieux de l’histoire de l’humanité et le fait qu’ils s’expriment dans des ensembles de structure signifiantes ; 2) chaque étape est caractérisée par un régime spécifique de rapport avec les signes et le réel (vrai ou non auxquels ils renvoient). Cette question de la signification inclut donc celle de la vérité, puisque, selon les divers statuts d’existence religieuse, la manière dont les signes donnent accès à la réalité est différente. Saint Augustin insiste sur le fait que la même réalité peut être signifiée par des systèmes de signes différents (c’est le même Dieu pour les Juifs et pour les chrétiens et, seule, diffère l’économie des signes98) ;

baptismi sacramentum et celebratio corporis et sanguinis Domini. Quæ unusquisque cum percipit, quo referantur

imbutus agnoscit, ut ea non carnali servitute, sed spiritali potius libertate veneretur. Ut autem litteram sequi et signa pro rebus quæ his significantur accipere, servilis infirmitatis est ; ita inutiliter signa interpretari, male vagantis erroris est. Qui

autem non intellegit quid significet signum, et tamen signum esse intellegit, nec ipse premitur servitute. Melius est autem vel premi incognitis, sed utilibus signis quam inutiliter ea interpretando, a iugo servitutis eductam cervicem laqueis erroris inserere. » (Trad. G. COMBES parfois modifiée pp. 351-359).

98 Telle qu’elle est exposée et résumée dans ce passage, cette affirmation d’Augustin est très insuffisante, car il faut

bien mesurer que le changement d’économie des signes est fondé lui-même sur le fait que, par l’Incarnation du Verbe et le don de l’Esprit, c’est le type même de societas entre Dieu et les hommes qui est d’abord modifié. C’est tout le problème de la “nouveauté” de l’Alliance en Jésus-Christ : cette nouveauté n’est pas une “innovation” ou une création

ex nihilo de l’Église, comme si Dieu avait créé un deuxième peuple (l’Église) par suite de l’abandon du premier

(Israël), mais une “actualisation” plénière des potentialités de vie en societas telles qu’elles avaient été déposées sur le mode de promesses messianiques faites aux Pères, dans le peuple d’Israël. Ce qui est très remarquable dans cette constitution ontologique de la societas divino-humaine qui en fin de compte est le mystère lui-même au sens paulinien, c’est, à notre avis, le fait que voici : dans les sociétés humaines dont la réalité du lien social repose pour l’essentiel sur un passé commun (l’histoire) et sur un présent commun (institutions, liens socio-économiques et liens affectifs), l’avenir commun échappe par définition à ses acteurs (à moins qu’il ne soit récupéré par des rêves ou des perversions idéologiques ou totalitaires qui sont également très problématiques, si l’on en juge par la déroute dans laquelle s’est achevé le rêve marxiste !) ; à l’inverse, dans l’économie du mystère comme convivialité de Dieu et des hommes, c’est l’institution par Dieu d’un projet de communion des hommes avec lui et l’avenir eschatologique qu’il ouvre

ainsi à cette rencontre qui constituent le fondement du lien social : l’Église et Israël ne se sont pas auto fondés (c’est toute

la théologie de l’élection) ; et l’Église est l’avenir d’Israël comme le Royaume est l’avenir de l’Église, même si les ruptures et les passages d’un stade à l’autre ne sont pas du même ordre. Sur ce point, il y a beaucoup à retenir des réflexions de saint Thomas d’Aquin dans son traité de la loi ancienne (Summa Theologiæ, Ia

-IIæ

, q.107, art. 1, ad 2um

). Autrement dit, un regard rétrospectif sur les étapes de l’histoire révolue ne peut rendre compte du rapport qui existe entre ces étapes : à vouloir expliquer les rapports entre Israël et l’Église par la seule comparaison de l’Alliance mosaïque à l’Alliance dans le Christ, on risque tout simplement de perdre de vue le seul véritable point de référence qui est pour l’un et l’autre l’accomplissement, c’est-à-dire le Royaume. On comprend d’ailleurs que ce point est d’autant plus difficile à admettre pour les Juifs que l’affirmation chrétienne de l’inauguration des temps messianiques dans la personne de Jésus Fils de Dieu, constitue une sorte de “provocation”. Il n’empêche que pour nous, disciples du Christ, il nous faut sans cesse réaffirmer, qu’un discours ecclésiologique n’est possible que parce que Dieu se fait

l’avenir, se donne comme avenir à son peuple, que cette proposition soit faite au plan de la création, au plan de l’Ancienne Alliance, ou au plan de la Nouvelle, lorsque le Fils unique prenant la condition d’homme devient, dès

maintenant par son humanité abaissée puis glorifiée le principe ontologique de ce rassemblement. Pour en revenir à la question des signes, si la différence des signes est comprise à la lumière de ce qui vient d’être dit, on comprend l’intérêt que peut avoir la position d’Augustin, dans la mesure où la différence entre les signes du culte juif et ceux du

3) les trois phases se situent de façon progressive les unes par rapport aux autres, la dernière étant caractérisée par le minimum de signes99, mais le petit nombre est ici

“compensé” par leur caractère vénérable et surtout par le fait qu’ils donnent pleinement

accès à la réalité signifiée, comme s’il y avait une proportion inverse entre le nombre de

signifiants et leur capacité à donner accès au réel.

On sent bien qu’ici Augustin veut manifester le caractère incontournable et dirimant de la

médiation des signes dans la vie et l’existence sociales des hommes, et particulièrement des chrétiens :

cette insistance est d’autant plus significative qu’il oppose, selon un schème métaphysique néo- platonicien, le sens littéral comme portant sur les réalités sensibles au sens figuré portant sur les réalités intelligibles100 : nous voyons ici comment saint Augustin ne renie pas la perspective

fondamentale qui sous-tend tout le traité De Doctrina christiana. En effet, c’est le problème de la signification qui rend compte du dualisme métaphysique d’inspiration néo-platonicienne et non le dualisme qui explique la variété des structures de la signification.

Pour conclure sur le sujet de la dimension sociale du langage et des signes telle que l’envisage ici saint Augustin et dégager la ligne fondamentale de sa réflexion, il nous semble important de souligner ceci : c’est la première fois dans l’histoire de la pensée occidentale que l’on accorde une place si centrale au langage dans la constitution d’une société comme société (ici, il s’agit de la société envisagée dans sa cohésion religieuse, mais cela n’excluerait pas les autres dimensions de la vie sociale ; simplement à l’époque, on ne pouvait pas envisager la cohésion de la société indépendamment de cet aspect). Il est intéressant de remarquer que cette interface entre langage et société a été soulignée à plusieurs reprises et de façon presque parallèle à celle d’Augustin par É. Benveniste :

« Si la diversification constante, croissante des activités sociales, des besoins, des notions, exige des désignations toujours nouvelles, il faut qu’en retour, il y ait une force unifiante qui fasse équilibre. Au-dessus des classes, au-dessus des groupes et des activités particularisées, il règne un pouvoir cohésif qui fait une communauté d’un

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