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142 DYNAMIQUES TERRITORIALISÉES DU CHAMP DE L’INTERMÉDIATION / ÉTUDES ET RECHERCHES

AGENCES PÔLE EMPLO

142 DYNAMIQUES TERRITORIALISÉES DU CHAMP DE L’INTERMÉDIATION / ÉTUDES ET RECHERCHES

niveau des agences, elles sont en concurrence et un interviewé relate par exemple qu’il a dû s’employer pour faire venir une entreprise sur son territoire alors qu’il était en concurrence avec d’autres. Autre exemple du maintien de frontières : l’adresse du demandeur d’emploi détermine l’agence par laquelle il va être suivi et même parfois les mesures auxquelles il peut avoir ou non accès pour toutes les mesures relatives aux Quartiers prioritaires de la Politique de la Ville, qui sont des zones restreintes et bien délimitées au sein des communes. En outre, un demandeur d’emploi qui déménage doit changer d’agence et donc d’accompagnateur. On peut se demander si le déploiement du suivi dématérialisé en cours pour une partie des demandeurs d’emploi n’amènera pas nécessairement à repenser cette question, les

demandeurs d’emploi acceptant peut-être moins bien qu’auparavant de devoir changer d’interlocuteur en cas de déménagement alors que le large développement des services dématérialisés permet de s’affranchir des distances.

Au-delà de ces questions, celle du niveau d’échelle territoriale pertinent pour élaborer la politique de l’emploi semble se poser. Aux yeux d’un directeur d’agence rencontré, l’objectif actuel est d’assurer la transférabilité des compétences tout au long de la vie sur un territoire donné. Mais quel doit-être ce territoire : la commune, le bassin d’emploi ou la France ?

Comment assurer par ailleurs la coordination entre ces politiques d’employabilité assurées par les intermédiaires du marché du travail et les politiques de développement économiques qui restent aux mains des élus ? (Cf. fiche acteurs municipaux).

Partenariats : viser la complémentarité plutôt que la concurrence mais avec Pôle emploi comme acteur central

« Pôle emploi 2015 change cette notion de concurrent

et nous positionne plus par rapport à l’environnement autour en tant que partenaire. Partenaire central cela dit parce qu'on a une force de frappe qui est assez

importante et reconnue. »

« Le partenariat chez moi il est énorme. L’objectif pour

moi est de développer le partenariat sur une base de réciprocité […] et de voir à quel moment […] je peux développer et étendre ma zone d’influence. »

Ces deux extraits d’entretiens réalisés avec des directeurs d’agence résument la vision du partenariat que nous avons rencontrée à Pôle emploi au cours de notre enquête. Tous les interlocuteurs rencontrés le soulignent : le partenariat est central dans leur activité et Pôle emploi 2015 a beaucoup fait évoluer les choses sur ce point.

Après une période de repli sur soi, où les directeurs disent s’être consacrés en interne à absorber le choc de la fusion, Pôle emploi 2015 leur a accordé des marges de manœuvre pour développer des partenariats locaux. La territorialisation des actions et la recherche de dynamiques locales pour compléter l’offre de services de Pôle emploi tient une place importante dans la nouvelle stratégie. Les indicateurs de performance semblent être en cohérence avec cette évolution puisque désormais ce sont les placements et le délai de satisfaction qui sont évalués ce qui incite Pôle emploi à solliciter ses partenaires pour effectuer du sourcing par exemple dans une perspective de réciprocité. Les évolutions récentes – renégociation des conventions de co-traitance entre Pôle emploi d’une part et Cap emploi et les missions locales d’autre part ; mise en place de la nouvelle modalité d’accompagnement global conjointement par Pôle emploi et les conseils

départementaux – s’inscrivent également dans la même ligne des nouveaux rapports que Pôle emploi entend développer avec ses partenaires. Il s’agit de mettre en œuvre une logique de complémentarité plutôt que de concurrence afin d’éviter les doublons. Du point de vue de Pôle emploi, s’appuyer sur les autres

intermédiaires du marché du travail a divers enjeux :

Déléguer le suivi des demandeurs d’emploi que Pôle emploi n’a pas les moyens ou les compétences pour suivre (quand la taille des portefeuilles est au maximum ou pour tout le volet social de l’accompagnement) ;

Faire du sourcing quand il y a des offres d’emploi à pourvoir ;

Relayer l’information sur l’offre de services de Pôle emploi.

Plusieurs nuances peuvent néanmoins être apportées à cette vision apaisée du partenariat.

Quand on étudie le rapport de Pôle emploi au partenariat, il faut prendre en compte trois échelles différentes qui correspondent (aussi) à trois entrées de terrain différentes. Aucune de ces échelles ne doit primer sur les autres, et aucune ne permet à elle seule d’avoir une vision complète et réaliste de la situation.

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ÉTUDES ET RECHERCHES / DYNAMIQUES TERRITORIALISÉES DU CHAMP DE L’INTERMÉDIATION

1) Si l’on questionne les institutionnels, directeurs d’agence et cadres intermédiaires de Pôle emploi, ils mentionnent une grande diversité de partenariats qui paraissent à la fois cohérents et sereins.

Des partenariats institutionnels souvent qualifiés de « naturels », parce qu’ils sont rendus obligatoires par la définition légale du Service public de l’emploi. Il s’agit là de partenariats avec d’autres instances locales de la politique de l’emploi (Direccte, conseil départemental, région), avec des homologues opérationnels (mission locale, Cap emploi, structures RSA) ou bien encore avec l’IAE (Pôle emploi animant le CTA et participant au dialogue de gestion des structures IAE avec la Direccte)

Des partenariats de régulation qui découlent de la politique de sous-traitance de l’établissement et qui consistent à organiser matériellement la circulation des demandeurs d’emploi parmi ces structures selon le volume et le rythme déterminé au préalable par contrat. Il peut s’agir là des OPP bien sûr mais aussi des organismes de formation.

Des partenariats émergents91 – ou choisis – en

fonction de l’offre et des besoins sur le bassin d’emploi. C’est sur ce segment que les directeurs d’agence sont libres d’être créatifs, de construire des partenariats avec des associations (Nos quartiers ont du talent, Solidarités Nouvelles face au Chômage, organismes d’aide à la création d’entreprise), avec des homologues publics (MDE, structures municipales), des concurrents privés (ETT). C’est là que l’on observe également des différences d’un terrain à l’autre, avec des partenaires très présents d’un côté et quasi absents de l’autre (cas de l’intérim entre les territoires 1 et 2) voire absents dans les deux cas (l’Apec). Ces trois types de partenariat sont surtout des partenariats de coordination, qui prennent une large place dans l’agenda des directeurs (sous la forme de réunions), notamment lorsqu’il s’agit de monter des opérations en commun. De ce fait, assez

mécaniquement, les entretiens avec des dirigeants de ces structures conduisent à donner une large place à ces partenariats. D’où l’expression récurrente : « on travaille beaucoup avec X », « on a fait de belles choses avec Y ». Mais le « travail » évoqué, s’il ne doit pas être sous-estimé, relève surtout d’un travail de coordination et d’organisation qui ne préjuge pas d’un travail

opérationnel effectif ni de volumes importants de personnes concernées par ces partenariats. Pour voir cela il faut placer la focale à d’autres échelles.

2) Si l’on se place à une échelle opérationnelle en regardant les acteurs qui ont effectivement le partenariat pour activité concrète, on voit tout autre chose. En observant les services administratifs des agences Pôle emploi en question, on se rend compte d’une part que tous les partenariats – même les mieux réglés – ne sont pas jugés de même valeur par les agents : il y a des partenariats qui sont de l’ordre de l’externalisation de capacité. Les demandeurs d’emploi sont orientés pour réduire la taille des portefeuilles sans que la prestation ne soit jugée de qualité et des

partenariats valorisés car ils permettent – du point de vue des agents – de faire avancer un dossier, un demandeur d’emploi, un projet. On se rend compte, surtout, de la faiblesse quantitative des places que ces partenariats recouvrent. Si un temps important est pris pour les élaborer et les mettre en œuvre, ces partenariats ne concernent qu’un nombre faible de chômeurs. Pour donner un exemple chiffré, l’une des agences étudiées comptait 4000 demandeurs d’emploi catégorie ABC, parmi lesquels 400 étaient délégués à la mission locale, 100 à Cap emploi et 50 en IAE. Il y avait en interne 155 places d’accompagnement renforcé. Dès lors cela signifie que près de 80 % des demandeurs d’emploi inscrits ne bénéficient quasiment jamais de l’activité conjointe entre Pôle emploi et ses partenaires, à l’exception des ateliers « CV » et « utiliser Internet dans sa recherche d’emploi ». A cette échelle

d’observation, on constate également le déséquilibre entre le poids symbolique attachés à tel ou tel partenariat et le poids réel qu’il représente dans l’activité quotidienne. Dans une agence observée, une conseillère était ainsi occupée à alimenter des « informations collectives » pour des agences d’intérim sur la totalité de son temps de travail en back office. A l’inverse, les envois en IAE, les entrées en formation ou les signatures de CUI-CAE n’ont pas concerné plus de 10 candidats sur la semaine de travail observée, bien que le temps de travail dévolu à ces opérations fût quasiment identique. Dit autrement, la construction de six informations collectives comprenant plus de 10 participants pour le compte de différentes ETT correspond au même temps de travail que celui dévolu à la signature de 10 à 15 CUI-CAE. Cela s’explique simplement par le fait que la constitution des convocations pour les informations collectives est en grande partie mécanisée/industrialisée. Il faut trouver une salle, trouver un créneau, puis identifier des personnes à convoquer grâce à un logiciel de gestion des dossiers (Infocentre opérationnel). Surtout, les

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