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b) La structuration des réseau

Les femmes enceintes et toxicomanes sont la préoccupation de deux réseaux sur le nord des Hauts-de-Seine : le réseau périnatal Nord 92 financé par le Conseil général en partenariat avec la PMI et qui regroupe treize communes (voir carte en annexe) et le réseau ARES92 dont la tête de pont est le CHU et spécialisé sur les questions de toxicomanie et de précarité.

Le réseau Périnatal a pour vocation de lutter contre les grossesses mal suivies. La plaquette de présentation définit trois objectifs : favoriser l’accompagnement médico- social des familles avant, pendant et après la grossesse, favoriser l’accès aux soins pour toutes les femmes enceintes, prévenir les troubles de la relation précoce parents-enfants et leurs conséquences à long terme. « Le principe de base est

d’améliorer la coordination et la communication entre les différentes structures de prise en charge des femmes enceintes et des nouveau-nés ; ces structures existent et jouent déjà, depuis longtemps, un rôle majeur dans ce domaine, mais souvent sans qu’il existe entre elles des liens structurés » (Lejeune Claude, 2001). Les principaux

partenaires du réseau périnatal sont les professionnels des maternités publiques et privées, les professionnels des services de néonatologie ou de pédiatrie, les médecins et sages-femmes libéraux, l’hospitalisation à domicile (HAD), les centres de protection maternelle et infantile (PMI), l’Aide sociale à l’enfance, les centres de santé, les centres maternels, les secteurs de psychiatrie infanto-juvénile, les associations, les autres réseaux, la caisse d’Allocations familiales, l’Assurance maladie, etc.

Le réseau ARES92 a été créé en 1992 autour de l’hôpital et a, dès le départ, intégré les centres de soins pour toxicomanes du département et organisé une consultation conjointe toxicomanie et maladies infectieuses, par une convention avec un centre de soins. En 1994, la deuxième circulaire sur la création des réseaux toxicomanie a entraîné l’élargissement du réseau : au départ, en 1994, un médecin coordinateur, puis une infirmière en 1996, une psychologue et une assistante sociale en 1999. En 1999 toujours, le réseau a de nouveau été élargi à la précarité. Ce qui donne aujourd’hui une structure ville-hôpital-sida-toxicomanie-précarité qui fonctionne grâce à des subventions de la DDASS, du Conseil général et de l’AP-HP. Ce réseau regroupe des professionnels hospitaliers, des centres de soins spécialisés aux toxicomanes, des travailleurs sociaux, des médecins libéraux, mais également des pharmaciens.

L’idée globale des réseaux est que les professionnels travaillent ensemble, mais pas de la même façon. Ainsi, le réseau créé autour du centre de soins parisien observé vise à ce que chacun connaisse les autres partenaires, travaille avec eux, mais sans perdre sa spécificité, et sans adhérer à une norme commune, comme l’explique le médecin psychiatre qui anime l’une de ces structures :

Essayer de trouver des partenaires, essayer de construire un objet commun sans qu’il y ait consensus, voilà le but c’est qu’il n’y ait pas de consensus, et qu’il n’y ait de langage commun, l’idée c’est que chacun reste bien sur sa compétence, parce que le conflit est à un moment donné inévitable. Parce que sinon les gens qui protègent l’enfant ne protègent plus l’enfant, les gens qui soutiennent l’adulte ne soutiennent plus l’adulte. Or, les deux choses sont indispensables. C’est plutôt comment on articule les conflits et comment on peut travailler sur l’idée que le conflit est salutaire. […/…]

Mais bon, petit à petit, on a commencé à créer cet objet un peu virtuel de travail. On a fait des groupes de travail, des formations sur site, on a fait tout ce qu’on pouvait faire pour travailler auprès des gens, c’était assez intéressant même si c’était un peu aride. Parce qu’évidemment comme ce n’est pas une institution, mais un espace en fait creux, les gens nous oublient en fait très vite, donc il faut tout le temps réactiver.

Psychiatre CSST, entretien n° 34.

Certains ne nous ont pas caché les difficultés liées à l’existence même du réseau et à la multitude d’intervenants sur une même situation, souvent sans qu’il existe un « référent » mais plusieurs partenaires, dont certains s’occupent de l’enfant, d’autres de la mère, d’autres encore des liens entre eux :

Donc c’est vrai que le plus embêtant peut être dans ces situations c’est de délimiter un petit peu les missions de chacun, et c’est pour çà que c’est intéressant d’organiser des synthèses et des réunions pour savoir qui fait quoi, faire aussi la part des choses entre la théorie, ce qui est dit dans les textes au niveau des missions de chacun, parce que les missions de la polyvalence elles sont quand même très, très larges, et les missions des organismes spécialisés tels que [CSST] et aussi essayer de travailler en harmonie, essayer d’aller dans le même sens, et puis si c’est pas le cas, essayer de comprendre pourquoi c’est pas le cas, et comment justement dans l’intérêt de la famille on peut aller quand même dans un chemin commun et ne pas s’évader, si on est pas clair entre nous, on pourra pas être clair auprès de madame, donc çà c’est notre rôle. Là je pense que c’est la plus grande difficulté.

Ainsi, l’assistante sociale d’un établissement de soins spécialisés pour toxicomanes aura des missions très larges de réinsertion de la personne, qui, en pratique, interfèrent sur les missions « normales » de la polyvalence, mais sans pouvoir s’y substituer totalement. De fait, pour les personnes concernées, le rôle de chacune des assistantes sociales sera mal défini, avec une tendance à l’évitement de l’une ou l’autre.

Le partenaire le moins bien positionné dans ces différents réseaux est l’Aide sociale à l’enfance. Selon sa responsable, cela tient au fait qu’elle n’est pas perçue par les autres intervenants comme relevant de la prévention, alors que c’est le thème fédérateur des réseaux.

Oh ils nous contactent en bout de chaîne, c’est le problème avec ces équipes-là, c’est vrai qu’ils essayent de maintenir ce lien mais ils pensent pas que l’ASE aussi ils peuvent être là pour un partenaire

[Question : Donc vous êtes pas identifiés comme un partenaire possible de la chaîne ?]

Voilà

[Question : Et pourquoi ?]

Parce que, parce que on a toujours une représentation de la DDASS, le placement et tout le travail qu’on peut mener en prévention avec d’autres partenaires, çà ils en ont, c’est pas encore approprié. Et avec d’autres, pas tous seuls, sur des problématiques particulières, euh, la toxicomanie, la prostitution, on travaille beaucoup avec [association], hein !

Cadre ASE, entretien n° 15.

Enfin, la collaboration entre les différents réseaux n’est pas évidente : « Bien que ces deux réseaux puisse être amenés à se rencontrer et à collaborer, tout semble se passer comme si nous avions d’un côté les réponses relatives à la période de gestation, de l’autre, celles relatives à des conditions de vie précaires. Une femme enceinte SDF aura alors plus de chances de trouver les réponses à son itinérance au sein du réseau Arès92, celles inhérentes aux conséquences de la précarité sur sa grossesse dans le réseau ville-hôpital Périnatal… L’organisation de la prise en charge par le biais des réseaux met également en évidence une apparente séparation entre ce qui relève de la maternité et ce qui relève de la précarité » (Planche Maelle, 2004). Ces observations rejoignent notre constat concernant la séparation déjà évoquée entre grossesse et toxicomanie, dont les prises en charge sont souvent incompatibles.

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