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Crise adolescente et crise identitaire Les adolescents sont des jeunes gens qu

2. L’adolescent et la problématique de la crise identitaire et narcissique

2.1. La crise identitaire à l ’adolescence

Pendant la période adolescente, le sujet a le sentiment de ne plus se reconnaître, de ne plus pouvoir s’identifier avec certitude. La crise de l’identité à l’adolescence peut être appréhendée de deux façons différentes. Elle peut se situer dans une forme de continuité de l’histoire du sujet et faire appel aux mécanismes du couple identité-identification ; l’identité de l’adolescent peut aussi être comprise comme un mouvement de rupture. L’adolescent peut être en rupture avec les parents et avec lui-même. Il s’agit là du rejet de soi en tant qu’être sexué. Ce rejet de soi passe bien évidemment par le rejet des objets parentaux. L’adolescent est dans ce cas de figure, étranger aux autres et à lui-même. Cette situation entraîne une angoisse aussi profonde que celle du conflit œdipien et attaque particulièrement la cohésion de la personne.

Ce que révèle la crise identitaire à l’adolescence est que le jeune vit ici une période d’ajustement, d’adaptation et donc d’adhésion à la filiation. II est ici appelé à marquer son acceptation. Acceptation de son histoire, de l’histoire de sa famille et du lien qui le rattache à quelque chose de plus fondamentale (l’ancêtre fondateur), faisant de lui un être qui se sait mortel. Cette situation qui se vivait de façon latente, car transmise depuis l’enfance par l’enculturation et l’éducation, va désormais être soumise à l’interrogation de l’adolescent, à son rejet, en même temps à son acceptation. La crise peut ainsi mettre en scène : la problématique de l’identité sexuelle, celle de la perte des idéaux infantiles, celle de l’adoption d’autres idéaux véhiculés par exemple par la situation interculturelle.

2.1.1. Le phénomène de séparation-individuation à l’adolescence

La séparation est avant tout le « sentiment dêtre séparé en référence à la réalisation intrapsychique d’un sentiment d’être séparé de la mère, et par-là, de l’univers dans son ensemble » (Mahler, 1975, p. 20). Une telle conception porte l’intérêt sur la valeur psychique de la séparation. En effet, certaines séparations ne provoquent pas chez le sujet un éprouvé de séparation, mais un éprouvé de détresse. Ce qui pose la relativité des séparations réelles pour la vie psychique. Mahler (1990, 1975) a élaboré une théorie évolutive du processus de séparation- individuation à partir de l’observation directe des nourrissons en présence de leur mère. Mahler distingue ainsi séparation et individuation comme des processus à la fois concomitants et complémentaires, observables tous deux à partir des données empiriquement repérables du comportement de l’enfant. Ainsi comprise, la séparation est d’abord et avant tout séparation

d’avec la mère, et l’enjeu du processus de séparation est principalement la construction d’une représentation différenciée de soi, c’est-à-dire l’autonomisation, mieux encore, l’individuation.

Ce point de vue a été repris par Blos (1967) qui l’a adapté à l’adolescence. Ce dernier pense que le processus de séparation-individuation aurait pour finalité de permettre l’acquisition progressive du sentiment d’être séparé. Il considère par exemple qu’il se produit à l’adolescence un second processus de séparation-individuation, par opposition au premier mis en évidence par Mahler (1975). Cette visée développementale et psychogénétique est en fait une présentation de l’histoire de la psyché humaine en considérant que des phases s’y succèdent les unes aux autres, dessinant un long chemin qui va de la naissance à la mort, et qui conduit l’individu, de la fusion initiale à l’objet primaire vers toujours davantage d’autonomisation, de séparation, d’individuation.

Ainsi, à l’adolescence, se répéterait l’éclatement de la membrane symbiotique, mais cet éclatement, qui avait permis à l’enfant d’acquérir une certaine individuation, permet désormais à l’adolescent de conquérir son autonomie et de se séparer de sa famille (Blos, 1967). On comprend à partir d’un tel schéma que l’adolescence, au même titre que la petite enfance est une période de restructuration et de renégociation du lien à l’objet. Bernateau (2008) dira à ce sujet que « là où la petite enfance sépare l’enfant de la mère réelle grâce à l’internalisation de celle-ci, l’adolescence sépare au contraire l’enfant de ses objets internalisés pour l’amener à rencontrer un nouvel objet réel » (2008, p. 430). Ce travail qui va constituer, pour l’adolescent à déplacer ses objets internalisés vers la réalité est une tâche difficile du fait du caractère narcissique des liens objectaux. Le lien aux objets œdipiens, au regard de la relation mère/enfant sur laquelle il s’appuie apparaît donc pour Mahler (1975) et Blos (1967) comme essentiellement narcissique. La question qui surgit à ce niveau est celle de savoir si au final, le second processus de séparation-individuation propre à l’adolescent ne serait pas en tous points une reproduction pure et simple du premier propre lui à la petite enfance ? Bernateau (2008) s’interroge à ce sujet lorsqu’il se demande si l’adolescent est sous le coup d’une reviviscence de l’archaïque, ou s’il souffre au contraire de la liquidation du Complexe d’œdipe ? La réalité est qu’à l’adolescent et dons au moment du nouveau ou second processus de séparation-individuation, ces deux registres : celui de l’œdipe comme celui de la reviviscence archaïque se recouvre l’un l’autre. C’est dans ce sens que Blos, (1967) va placer le second processus de séparation-individuation dans le prolongement du premier, même si l’on note dans les développements de l’auteur, comme une priorité à la référence œdipienne.

Pour Blos, (1967) la référence à la relation préœdipienne mère/enfant prend sens dans le lien qu’il établit entre « la régression de l’adolescent et son évolution, qui va le faire passer d’un stade à l’autre. L’adolescent est selon lui contraint de réexpérimenter des états moïques abandonnés » (Bernateau, 2008, p. 431). C’est cette régression, momentanée qui aboutit finalement à l’affirmation d’une subjectivité plus affirmée de l’adolescent.

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