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Le tsäbäl jaillissant déjà béni mais encadré par l’Eglise

P REMIERE PARTIE

IV. L’eau bénite ou tsäbäl

IV.2 Le tsäbäl jaillissant déjà béni mais encadré par l’Eglise

Nous employons l’expression « site d’eau bénite » pour qualifier l’ensemble : l’eau bénite, l’espace géographique où elle jaillit et qui est manipulé, travaillé par les hommes, et enfin, les rites auxquels elle donne lieu. Le fait que l’Eglise même emploie le terme tsäbäl pour qualifier l’eau déjà bénie par le divin, est en soit significatif. En effet, les Catholiques ont établi des procédures de canonisation et de vérification de la sainteté des personnages et des lieux considérés comme tels par les laïcs. Le christianisme éthiopien ne connaît pas ce type de procédure (Hirsch, 2003 :162), il rejoint d’ailleur sur ce point, l’Eglise orthodoxe russe (Pancenko, 2005). Cette dernière toutefois est plus circonspecte que l’Eglise éthiopienne puisqu’elle a fait fermer des puits auxquels les fidèles attribuaient des guérisons miraculeuses (Istjakov, Lambert, 2005). Dans ces conditions, on peut s’interroger sur les conditions, les critères selon lesquels une eau est appelée tsäbäl et est considérée comme chargée de l’energeia nécessaire à une ritualisation religieuse.

IV.2.a. La « découverte » de la source

L’analyse des récits d’apparition de l’eau bénite de six sites58

, fait apparaître une structure en trois temps : première apparition du sacré (et/ou de l’eau bénite), disparition (de l’eau ou de la sacralité du lieu), et enfin, (ré)apparition de l’eau bénite. La manière dont la sacralité du lieu et l’energeia de l’eau bénite, apparaîssent et disparaîssent met en jeu les couples sacré/profane et sacré pur/sacré impur. Le premier événement se situe dans la longue ou la moyenne durée, il fait intervenir différents personnages, mais le plus souvent un saint, un ange ou un roi et plus rarement des laïcs. Ceux-ci peuvent être à l’origine de l’apparition de l’eau dotée de pouvoir thaumaturgique propre (energeia) et du sacré (ange, saint moine) du lieu. Ces personnages peuvent être plus simplement à l’origine de la découverte de l’energeia de l’eau. Un deuxième événement provoque la disparition de la source. Le plus souvent il s’agit d’un meurtre commis sur le site, d’un interdit brisé, une guerre, ou la mort du roi, soit un événement que E. Durkheim qualifie de « producteur de désordre » (2003: 584) et R. Callois « d’impureté menaçant la communauté de sa souillure mystique » (1950 :52). Ces deux auteurs le nomment le « sacré impur ». Le surgissement du sacré impur dans un espace sacré pur provoque la disparition de ce dernier. Le troisième événement est celui de la réactualisation de la sacralité et des pouvoirs thaumaturgiques. Il fait intervenir là encore, (ou pour la première fois si la source a été découverte par des laïcs) un personnage saint et/ou religieux. Il peut s’agir d’un ange, d’un moine, d’un ermite, d’un atmaqi littéralement, “celui qui baptise” soit un moine « spécialisé ». Ce personnage va non pas réactualiser la sacralité mais être le messager, l’annonceur de la capacité de l’eau à guérir de plusieurs et généralement de nombreuses maladies. Souvent, ces personnages (moines, atmaqis, ermite) ont reçu en songe une visite d’un ange ou de la Vierge qui leur a indiqué l’existence de la source (à l’instar de Lourdes). La découverte d’une source d’eau bénite par un moine ou un ermite lui confère un surplus de charisme et inversement, la découverte de la source par un personnage pieux ou religieux atteste de l’existence du charisme propre de l’eau. Ainsi, l’energeia circule entre le découvreur et la source, les deux étant alors liés. De cette manière, les hautes autorités de l’Eglise n’ont pas à vérifier l’authenticité, elles n’y songent d’ailleurs pas, car simplement, le mode même d’apparition de l’eau déjà bénite par le divin exclu tout « mensonge », ou tromperie ou dévotion populaire débordant les cadres de la religiosité officielle.

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On trouvera en annexe (cf. Annexe 4) les récits d’apparition de ces six sites accompagnés d’une succincte analyse. Ces récits nous ont été communiqués tant par les fidèles que par des clercs (prêtres, diacres, moines, bahetawi) durant nos enquêtes sur les sites d’eau bénite, ils sont donc actuels. Certains comme le récit d’apparition de l’eau bénite à Zeqwala est plus ancien, mais son actualité nous amène à le considérer comme contemportain. Par ailleurs, ces récits sont largement connus, au-delà même des sites d’eau bénite. La réputation même d’un site peut en partie être évaluée à l’aune de la diffusion de son récit fondateur. Ainsi, Ent’ot’o Maryam est connu au sein de la diaspora éthiopienne installée en Europe et aux Etats-Unis. Plus récemment, en 2011, la notoriété du site de de Shenquru Mikaél est arrivé jusqu’en France, certains fidèles nous ont rapporté le récit de fondation de cette source, que nous avions déjà collecté en 2008. Enfin, il est notable que la seule différence que nous avons pu établir entre les récits rapportés par les deux catégories de personnes, les clercs et les laïcs est la précision, les clercs étant plus précis que les fidèles. Le fait que ces deux catégories de personnages rapportent des événements similaires pour expliquer l’apparition d’une source miraculeuse atteste de la prégnance et du partage de la foi dans les miracles. Point qui, nous estimons, constitue l’une des

IV.2.b. L’encadrement religieux de l’energeia

Si les sources peuvent apparaître n’importe où sur le territoire (mais préférentiellement en terre chrétienne), son organisation obéit à des règles précises quoique largement non explicites. Par ailleurs, si des sites d’eau bénite peuvent surgir loin de toute habitation, ou de présence humaine, il est notable que beaucoup soient attachées à une église qui encadre le rituel de l’eau bénite et structure l’espace autour de la source. L’analyse de l’organisation géographique des douze sites d’eau bénite visités59

et des églises qui les encadrent révèle une récurrence presque parfaite. Toutes les sources d’eau bénite ne sont pas dès leur découverte adossées à une église, et leurs recours encadrées par des clercs. Certaines d’entre elles apparaissent loin d’un bâtiment religieux. Mais dans tous les cas, que la source apparaisse après ou avant l’édifice religieux principal, l’église (entendue comme l’espace des sacrements, de la liturgie et de la bénédiction de l’eau par les prêtres), est toujours localisée en amont de la source. L’église surplombe le site d’eau bénite, ou au minimum est au même niveau. Parallèment, sur les douze sites d’eau bénite visités, dix se situent en contrebas, en aval des habitations humaines et ce quelque soit l’ordre d’apparition de la source. Si bien que l’église et la source d’eau bénite bordent, entourent les hommes dans leur vie « profane » (On trouvera en annexe 3.3 plusieurs schémas quant à l’organisation des sites d’eau bénite et des églises).

De même que les églises, les sites d’eau bénite sont organisés à partir d’un cœur contenant la sacralité maximum : l’espace de douche d’eau bénite. Quant à la source, la plupart du temps, elle n’est pas visible, parfois son emplacement même n’est pas connu des fidèles laïcs. Cette source sacrée est protégée dans certains cas matériellement, (fermeture du site à Kidanä Meherät, ‘Uraél, Ent’ot’o Maryam – obstruction de la source à Ent’ot’o Maryam, Giyorgis Lalibela) et dans d’autres, c’est le respect qu’inspire sa sacralité qui la protège. Certains sites sont construits en dur et leur structuration spatiale est analogue à celle d’une église (bâtiment et enceinte). Les sites non structurés ont des frontières moins nettes mais non moins existantes et sensibles : absence d’habitation dans les alentours, lieu reculé et difficile d’accès, contrôle par les habitants ou par des gardes. Comme pour les églises, la sacralité ne s’arrête pas au mur d’enceinte mais « contamine » les espaces les plus proches selon la même configuration (pas d’habitation et commerce uniquement d’articles religieux). Ainsi, les sites d’eau bénite ont une struture similaire aux églises.

Deux aspects les distinguent et entérinent la supériorité de l’église sur le site. Même si un site d’eau bénite abrite des tabots (des Tables de la Loi) ce qui théoriquement en ferait une église, aucun sacrement n’y est célébré et délivré, et, le sacrement des sacrements, l’eucharistie accompagné de la liturgie eucharistique ne peut s’y dérouler. La transsubstantiation des espèces aura toujours lieu dans l’église en contre-haut. Par contre sur les sites les plus structurés (‘Uraél, Ent’ot’o Maryam, Kidanä Meherät), une équipe de clercs (sous-diacres,

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Ces sites sont : Abba Yohänes, Abuna Hara, Bäshet Maryam, Ent’ot’o Maryam, Gärima Gädam, Giyorgis Lalibela, Kidanä Meherät, Shenquru Mikaél, Shenqwära Yohänes, ‘Uraél, Wänqeshét Gabrél, Zeqwala. Les conditions dans lesquelles ils ont été visités sont décrites dans le prochain chapitre, et une description plus fine de ces sites sera donnée dans le chapitre 9.

diacres et prêtres) y célèbrent une « liturgie » appelé kidan, terme ge’ez que l’on traduit par “pacte”. Comme il a été précisé précédemment, ce terme désigne le pacte qu’un saint

« Reçoit de Dieu en récompense de son dévouement. Ce pacte établit que ce saint reçoit le pardon divin pour les péchés de quiconque priera, sera charitable envers les pauvres et à l’Eglise en son nom » (Taddesse Tamrat, 1972 :2-3)

Durant cette célébration, des témoignages de guérison par l’eau bénite du site sont donnés par les fidèles eux-mêmes. Ces récits miraculeux entretiennent la foi des fidèles, rappellent à l’assistance la possiblité d’être pardonné, d’être le bénéficiaire d’un miracle. A cette fin, il est nécessaire, dans la conception éthiopienne, d’avoir une foi certaine, absolue, et foi, non pas uniquement dans la capacité du divin à guérir les hommes, – l’existence même de l’eau jaillissant déjà bénite par le divin en constitue la « preuve » – mais surtout en la survenue d’une guérison pour eux-mêmes, individuellement60.

IV. 3 Le(s) rituel(s) du tsäbäl jaillissant

L’eau bénite de source est chargée de la puissance thaumaturgique divine, à ce titre, un grand nombre d’Ethiopiens y ont recours, soit pour soigner un mal léger, « pour leur foi » comme ils l’expriment, ou encore pour justement guérir du sida. A l’instar des églises, les sites d’eau bénite sont des espaces sacrés, et la prise d’eau bénite s’apparente à un rite de purification. L’accès à cet « objet-élément » et au site même requièrent de la part du fidèle un état de pureté particulier. Cet état est atteint en respectant un certain nombre d’interdits ayant trait entre autres, à l’activité sexuelle, à l’absorption de substances associées au diable, au « commerce avec les esprits ». De manière générale, tout ce qui dénote d’un manque de contrôle de soi est soumis à interdiction. Les relations sexuelles sont prohibées trois jours avant la prise d’eau bénite (aspersion/absorption) pour un homme et sept jours avant pour une femme, car ces dernières sont considérées comme conservant plus longtemps les traces des relations. Le tabac que l’Eglise considère comme la plante du diable, la marijuana et le khat61 voient sur tous les sites leur consommation prohibée sept jours durant avant la prise d’eau bénite. Celle-ci est composée de deux phases : l’aspersion ou baptême puis l’absorption. Le “baptême” peut être suivi, si le site est encadré par une église, par la participation à la liturgie eucharistique de l’église qui gère le site ou au kidan qui, quand il est donné, est célébré sur le site même.

Tous les fidèles n’ont pas en permanence les mêmes besoins en terme de rituel. On peut distinguer trois types idéaux de recours et conséquemment de rapports au rituel : le recours ponctuel, le pèlerinage et la cure à proprement parler qui font des fidèles des tsäbältägnas. Les fidèles ne présentant pas d’affection grave mais un rhume passager, un mal de tête ou une douleur légère, ou simplement « pour leur foi », auront recours ponctuellement au rituel de l’eau bénite. Ces personnes se rendent le matin tôt à jeun, sur un site, la plupart du temps le

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Nous reviendrons sur ce point longuement dans le chapitre 9. Il y sera notamment discuté de l’infrastructure symbolique permettant « l’advenue » des miracles.

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Le khat, amharique tshat, est une plante, dont les feuilles ont des effets euphorisants et stimulants. Cette plante considérée comme une drogue dans de nombreux pays d’Europe (notamment en France). Son absorption est le

plus proche de chez eux. Ils se soumettent aux deux composantes du rituel ou à l’une des deux uniquement. En cas d’absorption seule une petite quantité d’eau bénite sera bue. Les personnes peuvent à leur guise choisir de suivre le rituel une seule fois ou pour une durée de deux à sept jours. Leur participation au kidan est aléatoire, et varie d’un individu à l’autre, selon les besoins et les envies. Ce recours ponctuel n’est pas possible sur tous les sites, certains sites comme Ent’ot’o Maryam sont très exigeants en terme de participation des fidèles : on ne peut entrer et sortir du site à sa guise.

Le deuxième type de recours est le pèlerinage. La geste pèlerine est un autre des aspects importants de la religiosité chrétienne éthiopienne, c’est une occasion de vivre sa foi et de l’éprouver également. De nombreux lieux de pèlerinages accueillent en leur sein des sites d’eau bénite et inversement, les sites d’eau bénite peuvent donner lieu à des pèlerinages. Cette pratique pèlerine peut donc être conjuguée au recours thaumaturgique, et de fait, de nombreux fidèles se rendent en pèlerinage vers des sites d’eau bénite. Dans ces conditions, le cadre même du pèlerinage appelle une plus grande implication et participation au rituel de l’eau bénite et au respect des règles l’entourant pour une durée plus longue, variant entre quelques jours et quatorze jours. Les personnes se soumettent alors à l’entièreté du rituel et assistent au

kidan ou à la liturgie. Nous avons pu observer que certains pèlerins étaient toutefois moins

assidus.

Enfin, le dernier type de recours, pour une maladie longue, nous intéresse plus spécifiquement. Comme il a été précisé, le terme tsäbältägna signifie “celui (ou celle) qui prend de l’eau bénite”. Ni les fidèles qui recourent au rituel ponctuellement ni les pèlerins se faisant asperger durant leur pèlerinage ne sont qualifiés de tsäbältägna par les prêtres, les habitants ou les autres tsäbältägnas vivant sur les sites d’eau bénite. C’est donc une appellation spécifique qui implique un rapport particulier au tsäbäl. De fait, est appelée

tsäbältägna, une personne s’installant sur un site d’eau bénite pour une cure d’une durée

variant d’une semaine à plusieurs années, voire pour le reste de son existence. Cet état, ce statut, suscite d’ailleurs le respect, les encouragements sinon l’admiration de l’entourage. Le recours au rituel de l’eau bénite dans la longue durée a des conséquences notables sur la vie quotidienne. Le respect des interdits et des règles de pureté permettant d’accéder à l’eau bénite implique l’adoption d’un mode d’existence très différent de la vie ordinaire. L’abstinence sexuelle, le contrôle des pulsions (addictions et consommation du tabac, de marijuana, de khat et d’alcool prohibés) sur le temps long sont une condition inhérente à l’accès à l’eau bénite. Les femmes, quant à elles, doivent respecter leur place traditionnelle (tenue vestimentaire : port du pantalon interdit) et éviter la séduction (maquillage, parures capillaires proscrits). En outre, les tsäbältägnas observent en sus d’autres règles qui fondent leur « sortie du monde » et s’apparentent à un rituel de pénitence et/ou de rédemption auxquels les sites d’eau bénite sont d’ailleurs dévolus. A ce titre ce sont des espaces hors du monde :

« Shenquru Mikaél est un endroit loin de la ville et du monde, et c’est aussi un lieu protégé par les saints » (tsäbältägna, Shenquru Mikaél, juin 2008)

Nous avons montré ailleurs (Hermann, 2010, 2012) que la cure par l’eau bénite s’apparente à une forme laïcisée d’ascèse monastique. Un retour sur la composition du gädl, soit la vie d’un saint révèle certaines similarités. En effet, les sites d’eau bénite comme les saints voient leur

« biographie » racontée par les fidèles qui leurs rendent un culte pour les saints, et pour l’eau bénite, les fidèles se soumettent au rituel. Dans les deux cas, les récits de miracles constituent un des points importants fondant et affirmant la foi dans la capacité du saint/de l’eau bénite à les sauver. Cependant, les fidèles n’ont pas personnifié l’eau et ne s’adressent pas à elle pour les guérir, mais établissent un contact étroit avec « elle ». Pour les saints comme pour l’eau bénite, un pacte, kidan est établi. En priant le saint et en accomplissant les actes de dévotions requis en son nom, le fidèle obtiendra le pardon divin pour ses péchés. Les fidèles en se soumettant au rituel de l’eau bénite et en observant les règles monastiques, trouveront la rédemption. Enfin, le gädl comporte un mälk, des hymnes composés en l’honneur du saint. Or en 2007, une cassette de chant religieux avait été enregistrée, un de ces chants est spécifiquement dédié à l’eau bénite de Ent’ot’o Maryam et à ses miracles. Si nous n’avons pas recensé d’autres cas, il n’est pas certain que ce chant soit unique ou que des poèmes n’aient pas été composés en l’honneur d’autres sites d’eau bénite. Sans considérer cette question du mälk, il apparaît que l’eau bénite joue un rôle très proche de celui des saints. L’analogie serait, à notre sens, à questionner plus avant. Pour l’heure elle interroge la traduction du terme tsäbäl. Il semblerait tout à fait valide d’employer l’expression “eau sainte” pour cette eau déjà bénie par le divin. Nous lui avons préféré l’expression “eau bénite” permettant de traduire également la polysémie du terme tsäbäl (qui désignerait alors tout autant l’eau bénite que l’eau sainte) car en amharique, ce seul terme désigne deux réalités différentes.

Conclusion

Le fait que le christianisme éthiopien soit le seul à voir la puissance divine se matérialiser dans un « élément » non travaillé par l’homme est révélateur de son rapport non seulement au divin, mais aussi à la matière dont ces deux espaces interagissent. A titre de comparaison, le catholicisme et l’orthodoxie slave acceptent comme objets porteurs de la puissance divine des objets travaillés ou émanant des hommes. Ainsi, les catholiques ont une préférence pour les reliques, restes des squelettes des saints ou tout objet ayant été en contact avec lui, voire même la chape qui les contient (Geary, 1978 ; Brown, 1984 ; Bozoky, Helvétius, 1999 ; Georges, 2002 ; Bozoky, 2006). Cette tendance à vénérer des objets émanant des saints témoignent d’un rapport particulier au corps (saint ou pas), à la matière, au divin ainsi qu’aux relations entre ces deux espaces. Il est d’ailleurs notable que pour eux, le Christ soit homme et dieu en un seul être, les deux essences étant toutefois parfaitement distinctes et séparées. Les Orthodoxes considèrent les icônes comme capables de porter, de capter et de diffuser la puissance divine (Auzépi, 1996). Quoique les reliques existent chez eux également, elles n’ont pas la faveur des dévots (Istjakov, Lambert, 2005). Pour les Orthodoxes, c’est l’image et son support qui sont les mieux à même de diffuser le divin, rendant compte d’une relation spécifique au corps, à l’image, à la matière, au divin et aux interactions entre nature et surnature.

Il semble donc que chaque forme de christianisme choisit, préfère certains « objets » pour recevoir le divin/la puissance divine et le/la diffuser. A notre connaissance et comme le note V. Stahl (1992 : 304), si l’anthropologie des objets religieux existe, elle n’a que peu été

développée. En revanche, en histoire des religions occidentales, les reliques « sont devenues un nouvel objet historique » (George, 2002 : 563). Nos analyses sur l’eau bénite éthiopienne

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