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P REMIERE PARTIE

VI. Les organismes internationaux et les américains

VI.1 L’Ethiopie et les instances internationales

Il n’est donc pas surprenant que le régent Ras Tafari, futur Hailé Selassié, ait été, en 1923, un des premiers signataires de la Société des Nations créée en 1920, à la fin de la Première Guerre mondiale. Son inefficacité à empêcher la Seconde et à défendre des peuples comme l’Ethiopie alors même que Hailé Selassié, était venu en personne alerter la SDN et demander son aide et appui contre l’agression dont son peuple et son pays étaient victimes, mais il se vit opposer une fin de non recevoir. Et ainsi que l’avait annoncé Hailé Selassié, la Seconde Guerre mondiale éclata.

VI.1.a. Des institutions récentes

Suite à cet échec, en 1942 les USA et l’Angleterre élaborent les premières ébauches d’une charte qui sera travaillée par différents représentants d’Etats. Au printemps 1945, « les représentants de 50 pays se rencontrent lors de la conférence de San Francisco ». En juin 1945, la Chartre des Nations Unies est signée par ces 50 futurs Etats membres et en octobre, l’Organisation des Nations Unies (ONU) est instituée par la ratification de la Chartre par divers pays, dont la Chine, les Etats-Unis, la Grande-Bretagne, la France et l’URSS42

. L’Ethiopie signera la Chartre en novembre devenant l’un de ses membres fondateurs. A ses côtés, l’Afrique du Sud et le Libéria (et l’Egypte, à considérer celle-ci comme située en Afrique) sont les trois seuls pays du continent à avoir de statut.

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Dans le sillage de l’ONU, différentes instances internationales seront créées : • le Fond Monétaire International (FMI) en 1944,

• la Banque Mondiale et l’Organisation des Nations unies pour l’Education, la Science et la Culture (UNESCO) en 1945,

• le Fond des Nations Unies pour l’Enfance (UNICEF) en 1946,

• le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) en 1947, • le Haut Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés (HCR) en 1951, • la Commission Economique pour l’Afrique (CEA) en 1958, qui est une des

commissions du Conseil Economique et Social des Nations Unies (ECOSOC) • le Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP) en 1967,

• l’ONUSIDA en 1995,

• Le Fonds Mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme crée en 2002 dans le but de financer la lutte contre le sida, parmi les organismes donateurs on compte ONUSIDA.

La plupart de ces agences internationales sont présentes à Addis Ababa qui accueille le siège de la CEA (Commission Economique pour l’Afrique) depuis sa création. Toutes participent à divers niveaux et selon des degrés variables à la lutte contre le sida en Ethiopie. Elles ont, entre autres, incité le Gouvernement éthiopien à créer le NAC (National HIV/AIDS Council – Conseil National du Sida) présidée par Negasso Gidada alors, puis par Girma Wolde Giorgis et à mettre en place les premiers programmes de lutte.

Comme il a été présenté précédemment (cf. section II), douze organismes des Nations unies présentes sur le territoire éthiopien se sont rassemblées en une équipe baptisée « Joint Team on AIDS » pour aider l’Ethiopie à lutter contre le sida. Ces agences sont : la FAO, BIT, ONUSIDA, PNUD, UNESCO, HCR, FNUAP, UNICEF, PAM, OMS, OIM, et la Banque Mondiale. Ensemble ces organismes ont crée le programme : « Joint UN Programme of Support on AIDS in Ethiopia » et ont mis en place en 2005, le « United Nations Development Assistance Framework » (UNDAF) qui visait et vise à soutenir les plans successifs de lutte gouvernementaux (Ethiopia’s Strategic Plan for Multisectoral HIV/AIDS Response). A ce titre, le programme du « Joint Team on AIDS » en Ethiopie est doté d’un budget d’activité pour les années 2007-2011, de près de 15 millions de dollars. Cependant, depuis 2005, le Fond mondial et le PEPFAR demeurent les plus gros bailleurs de fonds de la distribution des ARV à l’échelle nationale.

VI.1.b. L’implication des congrégations confessionnelles dans la lutte contre le sida vues par les instances internationales

Il est courant d’imputer l’implication des congrégations religieuses à la lutte contre le sida à G.W. Bush et au PEPFAR. Toutefois, un rapide survol de la littérature scientifique et grise, émanant, entre autre, d’ONUSIDA et du Fond Mondial révèle que dès le milieu des années 1990, la question de l’implication des congrégations confessionnelles aux actions de contre le sida se pose pour ces instances. Les réticences quant à leur implication tiennent essentiellement aux tabous religieux autour de la sexualité face à la réalité de l’infection. Ces

aspects sont considérés comme un problème, aboutissant d’après certains auteurs, au conflit entre les promotions de l’abstinence et de la fidélité et celle du préservatif (Faril et al. 1992). Pour autant, divers experts s’interrogent, du moins dans les pays du Sud, en Ouganda bien sûr (Kagimu et al., 1998) mais aussi au Brésil (Campolino, Adams, 1992), au Sri Lanka (Ariyaratne, 1998), de manière générale pour l’Afrique (Cohen, Trussels, 1996 ; Mansary, 1992) et pour les Afro-Américain (Mertz, 1997 ; Sanders, 1998, cités par Francis, Liverpool, 2009). Témoignant d’un intérêt pour l’implication des religions, en 1998, ONUSIDA publie dans sa collection « best practices », un document intitulé “AIDS education through Imams. A spiritually motivated community effort in Uganda” dans lequel l’association IMAU (Islamic Medical Association of Uganda) rapporte les actions mises en place et les succès obtenus. Cette expérience est, par ailleurs, largement connue, rappelons les grandes lignes de cette initiative.

L’association IMAU, fut créée en 1998 pour aider le personnel soignant d’obédience musulmane à lutter contre le sida. Avant l’édition du document, cette association reçut les soutiens financiers de l’OMS, de USAID, de UNICEF, du PNUD ainsi que de l’ONUSIDA. Soutiens montrant que les organisations internationales avaient déjà pensé et réfléchi à la question de l’implication des religions dans la lutte contre le sida. Depuis 1992, l’association a formé et sensibilisé plus de 8 000 leaders religieux et leurs équipes de volontaires. Dès 1989, le grand Mufti Ougandais sensibilisé à la question du VIH encouragea l’association. A partir de 1995, les statistiques indiquaient en milieu urbain une baisse très significative du nombre de partenaires, le report de l’âge d’entrée dans la sexualité ainsi qu’une augmentation de l’utilisation des préservatifs (1998 : 9). De même, les personnes les plus à risques faisaient état d’une diminution du nombre de partenaires et une utilisation des préservatifs plus importante. Les messages religieux diffusés par les Imams étaient la chasteté et l’abstinence ainsi que la fidélité. La promotion du préservatif ne faisait pas partie du programme la première année, mais il est apparu de manière informelle dans les discussions et finalement son utilisation a augmenté, bien que de manière limitée. Par la suite, des discussions entre IMAU et les leaders religieux ont permis d’intégrer la promotion du préservatif en troisième option. La première est « abstaining from sex » (« abstenez-vous de sexe »), et la deuxième, « having sex only within mariage » (« ayez des relations sexuelles uniquement dans le cadre du mariage ») (1998 : 30). Par ailleurs, pour les personnes déjà infectées et les plus fragiles, furent mis en place des programmes d’éducation et de financement, débouchant sur la création d’activités génératrices de revenus. Ces initiatives furent couronnées de succès et constituèrent un modèle d’action souvent cité en exemple (Demange, 2010).

En 2002, se tint l’Assemblée des autorités religieuses africaines sur les enfants et le VIH/sida. Plusieurs leaders se montrèrent intéressés à participer à la lutte contre le sida et en 2004, ONUSIDA conjointement avec l’UNICEF et la Conférence mondiale des religions pour la paix produisent un manuel et un guide ayant été testés auprès de différentes communautés religieuses africaines et asiatiques, à destination de ces congrégations religieuses (UNICEF, 2004). Dans ce document, ces organismes reprennent des extraits de plans élaborés par des Eglises et des organisations œcuméniques et confessionnelles d’Afrique, d’Amérique du Nord et d’Europe suite à une rencontre notamment en 2001.

Ainsi, bien que l’histoire de l’implication dans la lutte contre le sida des organisations confessionnelles reste, nous pensons, à faire, il apparaît que les différentes agences des

Nations Unies étaient très au fait de leurs activités et en ont soutenu certaines dès la fin des années 1990 et possiblement avant. Il est donc faux d’imputer à PEPFAR et USAID la primauté des financements des congrégations religieuses dans la lutte contre le sida. Par ailleurs, nous avons vu dans la section précédente, que deux agences internationales (HRC et Water Aid) avaient subventionné l’EOTC ou l’avaient mise à contribution dans l’élaboration de leurs programmes de développement et de protections des réfugiés. Les Américains n’ont donc vraisemblablement pas la primeur qu’on leur prête habituellement.

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