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Chapitre 7. Les études de cas : neuf portraits d’enfants allophones

7.1 Portraits des enfants observés à l'école genevoise

7.1.3 Portrait de Nelly

Nelly est une petite fille kosovare grande de taille, élancée et très jolie de visage. Elle vit avec ses parents et sa petite sœur d’environ 1 an. Elle est née en Suisse.

L’enseignante ne sait pas si elle a été en crèche mais présume que non. Ses cheveux châtains arrivent en-dessous des fesses. On dirait une poupée. Elle se fait couper ses cheveux quelques semaines après la rentrée63. Elle a aussi des tâches noires sur les dents. Elle porte des habits confortables souvent des pulls et des leggins. Son allure est soignée. Elle est souriante mais très angoissée par l’école : elle suce ses doigts pour essayer de se calmer. Dès les premiers jours d’école, elle créé des liens d’amitié avec deux fillettes kosovares, Sofia et Alice (trio des enfants qui parlent albanais), mais ses interactions avec les autres enfants sont souvent conflictuelles.

Ses moments de séparation

C’est sa maman de moins de trente ans qui l’accompagne chaque matin à l’école, avec qui elle a une relation douce, complice et contenante. Dans les moments de séparation, sa maman est souriante, sereine, confiante, rassurante. Elle donne l’impression de croire en la capacité de sa fille à surmonter la séparation64. Elle accepte le départ de sa maman, son inquiétude se dissimule rapidement.

La plus jeune maman dit au revoir à sa fille qui conteste un peu, elle s’agrippe à sa maman qui la reprend dans ses bras. Elle est tellement grande, ses membres pendent de partout. La maman lui parle en souriant. J’ai l’impression qu’elle est joyeuse et légère et sa fille sourit aussi.

Finalement quand la maman part, elle ne conteste pas. Ensuite elle erre un peu dans la classe mais très vite elle commence à jouer avec une autre petite fille, grande taille, très semblable à elle. Elles s’amusent à monter sur les bancs, regardent les coloriages affichés sur le tableau. Je me demande si elles parlent la même langue mais je n’en suis pas certaine.

(Observation matinale du 3ème jour d’école, 28 Août 2014) Nelly et Sofia sont complices dès les premiers jours d’école. Le 6ème jour, quand Nelly arrive en classe, Sofia l’accueille en allant vers elle et elle la tire vers la classe. Nelly passe des bras de sa maman à ceux de Sofia. La gentillesse, la douceur de Sofia aide Nelly à accepter le départ de sa maman et à dépasser ses angoisses. Néanmoins, lorsque Sofia est absente, Nelly cherche sa place, cherche le contact avec moi et fuit dans des gestes maniaques. Elle est envahie par l’angoisse.

Nelly arrive avec sa maman. Elles sont toutes les deux souriantes. La maman laisse sa fille pendre à son cou puis elle lui fait un dernier bisou et elle part. Nelly me regarde. C’est peut-être pour la première fois que je me sens visible à ses yeux. Je lui souris, elle me fait aussi un petit sourire. […] Elle regarde autour d’elle, me regarde à nouveau et continue à glisser sur les bancs avec des mouvements maniaques. J’ai l’impression qu’elle cherche à entrer en relation mais elle ne semble pas savoir comment faire. Elle regarde vers la porte comme si elle attendait quelqu’un.

[…] Quand Sofia arrive, elle s’installe à côté d’elle. Les fillettes se font des grands sourires. Elles semblent s’apprécier.

(Observation matinale du 15 Septembre 2014)

63 Le changement de coupe de cheveux de Nelly et de Sofia donne une certaine dureté et une fermeté à leur apparence. C’est comme si l’école transformait leur beauté et leur rayonnement.

64 cf. Chapitre 1 (aussi dans le portrait Alice) : rapport entre l’état émotionnel des parents et ceux des enfants ou comment se retentissent les appréhensions ou la confiance des parents sur les enfants.

Chapitre 7. Les études de cas : neuf portraits d’enfants allophones

Un mois après la rentrée, après le départ rapide de sa maman, Nelly s’occupe. Elle est calme mais joue souvent seule.

Une fois entrée dans la classe, Nelly se dirige vers l’étagère, prend un livre et s’installe dans le coin lecture. Elle est couchée sur le dos. Je ne vois pas son visage, mais elle semble être calme et concentrée. Ses pieds reposent sur un petit rebord. Elle paraît à l’aise dans cette posture.

(Observation matinale du 26 Septembre 2014) Comme pour d’enfants, son anxiété se manifeste environ deux mois après la rentrée.

Nelly est alors inquiète, triste, dérangée quand elle arrive à l’école65.

Nelly apparait dans la porte de la classe et à ma grande surprise, Sofia n’accourt pas pour la saluer. Elle regarde craintivement autour d’elle en avançant à petits pas. C’est comme si elle essayait de comprendre ce qu’il se passe. […] La maitresse demande à Nelly de prendre place et lui tend un cahier qui porte son prénom. Elle prend place machinalement, regarde le cahier, regarde autour d’elle la bouche ouverte, les épaules rentrées, puis elle regarde la maitresse qui donne des instructions aux autres enfants.

(Observation matinale du 16 Octobre 2014) Pour le mois de décembre, quatre mois après la rentrée, Nelly est plus détendue et sereine quand elle arrive à l’école.

Ses relations en construction

Comme pour la plupart des enfants allophones observés en Suisse, le contact entre Nelly et son enseignante est minime dans les premières semaines d’école. Après deux ou trois mois passés à l’école, Nelly fait des grimaces et des gestes moqueurs avec certains de ses camarades lorsque l’enseignante a le dos tourné. Parfois elle exprime à l’enseignante son ennui ou conteste les activités qui lui déplaisent. Leur relation reste insignifiante, quasi inexistante tout au long de l’année.

Quand l’enseignante lui demande de poursuivre son activité, Nelly conteste en regardant la maitresse d’un air malicieux et en agitant la tête sur le côté. Elle ne dit rien mais elle montre son désagrément.

(Observation matinale du 10 Novembre 2014) La maitresse donne des activités, rappelle certains à l’ordre. Alice et Nelly lèvent la tête de temps en temps, comme pour comprendre ce qu’il se passe, mais leur regard est vide et désintéressé.

(Observation matinale du 24 Mars 2015) Ses premières semaines d’école sont remplies d’interactions douces et réconfortantes avec Sofia, une fillette kosovare de sa classe. Dès le sixième jour d’école, Sofia l’accueille avec tendresse et curiosité. Plus tard dans l’année, quand Nelly est perturbée dans sa relation avec ses camarades, elle trouve réconfort auprès de Sofia elle. Leur relation est « intérieure » alors que les autres relations de Nelly restent

« extérieures ».

Dès l’arrivée de Nelly, Sofia la suit partout. Elles s’installent dans le coin lecture où elles feuillettent chacune un livre. Sofia pointe les images : elle imite les bruits des animaux. […] Sa camarade rit de son jeu d’imitation. Il semble y avoir une bonne entente entre elles. A un autre

65 C’est peut-être à ce moment-là qu’elle réalise que l’école n’est pas optionnelle ni temporaire

Chapitre 7. Les études de cas : neuf portraits d’enfants allophones

moment, Nelly attrape la main de sa copine Sofia pour la tirer vers elle afin de pouvoir lui montrer une image dans son livre. Le contact physique entre les fillettes me plonge dans un sentiment de bien-être : c’est agréable.

(Observation matinale du 6ème jour d’école, 2 Septembre 2014) En parallèle, Nelly refuse tout contact avec ses camarades. Elle se coupe et se désintéresse d’eux.

Sofia regarde de manière inquiète ses camarades de table, comme si elle cherchait à faire comme eux. Les deux autres fillettes allophones, Nelly et Alice gardent le regard fixé sur leur feuille et elles n’interagissent pas avec les camarades. Il n’y a aucune communication entre eux.

(Observation matinale du 6ème jour d’école, 2 Septembre 2014) Deux mois après la rentrée, Nelly commence à s’ouvrir à ses camarades, mais elle est très sélective et ses interactions sont fragiles et maladroites. Elle a de la peine à trouver le bon ton avec ses camarades.

Un enfant appelle la maitresse de manière affolée, et il lui dit « Elle […] m’a craché ». La maitresse s’approche rapidement et demande à l’enfant ce qu’il s’est passé. Il explique qu’elle lui a craché dessus, pointant Nelly. La maitresse gronde Nelly en s’adressant à elle sur un ton élevé et lui demande de dire pardon. Nelly agite sa tête sur le côté en la regardant avec effroi. La totalité de son poing est dans sa bouche, mais on dirait que cela ne l’apaise pas. La maitresse retente plusieurs fois de l’inciter à s’excuser mais ça ne marche pas, elle continue à agiter la tête. La maitresse dit « Tant pis » et part laissant Nelly seule, blottie contre le mur. Elle éclate en sanglots.

Un garçonnet l’appelle, essaye de lui prendre la main pour qu’elle suive le cortège mais elle ne bouge pas, elle pleurniche en regardant avec frayeur ce qui va se passer. […] Je lui dis : ‘Tu veux qu’on aille chercher un ptit mouchoir pour toi ? On va demander à la maitresse’. […] elle sort sa main de la bouche, me regarde comme un chien battu et avance lentement vers l’escalier. Je suis soulagée.

(Observation matinale du 10 Novembre 2014) Dans cette scène, Nelly est paralysée et délaissée par l’enseignante et ses camarades. Il est alors difficile pour elle, l’enseignante et ses camarades de rétablir le cercle bénin (Klein) afin de pouvoir retourner vers le groupe. Elle est alors envahie par l’angoisse, la solitude et par le sentiment de persécution66.

Une nouvelle forme de relation amicale remplie de tendresse et de joie émerge dans ses relations avant les vacances de Noël. Elle est alors plus calme et posée dans ses interactions avec qui enfants avec qui elle ne partage pas la même langue maternelle.

Nelly joue à la poupée avec une fillette. Je ne les ai jamais vue jouer ensemble. Elles sont tranquilles, paisibles, souriantes contrairement à la maitresse qui circule énergiquement entre les tables et semble être beaucoup moins posée que les enfants. »

(Observation matinale du 25 Novembre 2014) Ses conflits avec certains de ses camarades se poursuivent tout au long de l’année.

Lorsqu’elle est gênée ou ne sait pas comment réagir, elle a comportement agressif envers ses camarades67.

66 Est-ce la barrière de la langue qui contrarie l’enseignante à aider Nelly ?

67 Ses réactions agressives sont-elles liées à l’allophonie ? On peut penser que la difficulté à comprendre et à se faire comprendre provoque une tension interne chez Nelly qui ne peut plus être tolérée après un certain temps. Alors elle extériorise sa frustration en mordant, tapant, crachant sur ses camarades.

Chapitre 7. Les études de cas : neuf portraits d’enfants allophones

Nelly rejoint les garçons. Elle reste derrière un garçonnet, garde ses mains proche de son dos puis se penche sur lui en disant « Bouuuu » pour lui faire peur. […] Ensuite elle malaxe ses épaules comme pour le masser. Son touché est dure et fort, comme si elle essayait de lui faire mal. […] Elle lui malaxe la joue et tapote dessus de plus en plus fort jusqu’à lui donner des claques. Son regard est maintenant féroce, ses sourcils sont levés, on dirait une sorcière. Les garçons crient « Aie, Aie » mais ils la laissent faire. Je me demande pourquoi ils ne l’arrêtent pas.

Un peu plus tard, pendant le regroupement, elle leur donne des fessées.

(Observation matinale du 24 Mars 2015) Avec moi, Nelly est méfiante, elle se cache de mon regard. Elle construit un barrage à mon regard comme pour se protéger. A la fin de l’année, elle ne fuit plus mon regard, me parle avec facilité de sa maman, de sa petite sœur. Par contre, après chaque interruption, elle se braque et il faut aller la chercher, il faut insister pour qu’elle reprenne confiance à vouloir partager, échanger. Elle semble avoir besoin de beaucoup d’attention, mais elle communique le contraire.

La maitresse demande aux enfants d’aller chercher les accessoires pour faire du piquage au poinçon. Nelly s’installe tranquillement, par automatisme. Je lui demande si elle est d’accord pour que je m’asseye à côté d’elle. Elle est d’accord, me regarde et me sourit timidement. J’ai l’impression que chaque fois que je m’approche d’elle, on doit tout recommencer à zéro, on doit renégocier à nouveau la relation.

(Observation matinale du 28 Avril 2015) Ses communications et incommunications

Nelly est surtout ouverte, communicative et coopérative avec Sofia dans un premier temps. Elles jouent ensemble dans leur langue maternelle (et aussi avec Alice à partir de 2-3 mois d’école).

Les trois fillettes que j’observe discutent dans leur langue maternelle entre-elles. C’est la première fois que je les entends parler cette langue. Elles se prennent la main et se rangent à trois dans le cortège […]. La maitresse est surprise que c’est la première fois qu’elle entend la voix de Nelly.

(Observation matinale du 26 Septembre 2014) Dans les premières semaines, Nelly ne cherche pas à interagir avec l’enseignante.

Elle commence à aller vers elle environ trois mois après la rentrée.

Nelly se lève en même temps que les autres enfants et se dirige vers le bac contenant les prénoms. […] Elle cherche longtemps mais ne trouve pas son prénom, alors elle s’avance vers la maitresse, lui tapote l’épaule sans rien dire et pointe le bac des prénoms. Elle lui demande

« Tu ne trouves pas ton prénom ? » Elle acquiesce. La maitresse se lève pour feuilleter les prénoms à son tour. « C’est celui-ci le tien ? ». Elle acquiesce avec le sourire illuminé.

(Observation matinale du 10 Novembre 2014) Pendant le regroupement, elle commence à imiter ses pairs, lève le doigt pour prendre la parole après trois ou quatre mois.

Plusieurs enfants lèvent le doigt. On dirait qu’ils ont tous besoin de parler. Nelly lève la main mais quand la maitresse l’interroge, elle ne dit rien, alors l’enseignante donne la parole à d’autres enfants.

(Observation matinale du 25 Novembre 2014)

Chapitre 7. Les études de cas : neuf portraits d’enfants allophones

Tout comme Alice, en cours de soutien, Nelly est beaucoup plus active et communicative68.

Dans la classe de soutien, on dirait un autre enfant. Nelly est active, elle parle beaucoup, répond aux questions de la maitresse, lui coupe la parole. Elle la regarde avec des yeux pétillants. […]

Elle s’excite, se précipite pour répondre.

(Observation matinale du 9 Décembre 2014) Pour la fin de l’année, Nelly n’est pas tout à fait fluide en français, elle cherche ses mots mais elle est à l’aise dans ses échanges. Néanmoins, elle reste sélective dans ses choix d’interlocuteur : elle discute avec l’enseignante de soutien, avec moi et certains de ses camarades, mais avec l’enseignante elle est réservée et parle moins.

Ses jeux, ses occupations et ses activités

Comme Alice, Nelly est passive, figée, perdue, statique au cours des premières activités dans la classe. En cours de rythmique, elle ne participe pas, elle observe l’enseignante et essaye de l’imiter mais reste en décalage par rapport à ses camarades.

Nelly avance et s’arrête. Elle n’imite pas le geste de l’appareil photo comme il est demandé de faire. Elle observe de manière concentrée ses camarades comme si elle essayait d’absorber ce qu’il faut faire en les fixant. Je remarque qu’elle a quelques secondes de retard par rapport à ses camarades. J’ai de la peine pour cette petite qui essaye désespérément de suivre les autres mais le temps qu’elle comprenne ce qu’il faut faire, ils sont déjà passés au geste suivant.

(Observation matinale du 10 Novembre 2014) Dans les activités, au lieu de faire les exercices d’écriture, elle dessine sur sa feuille.

(cf. portrait d’Alice). Elle commence à montrer son ennui après 6 mois d’école quand elle arrête précipitamment le piquage dès que la cloche sonne. Après 8 mois d’école, elle exprime explicitement son désagrément à faire du poinçonnage. Alors elle se déconcentre : elle discute avec moi et pointe ses travaux accrochés dans la classe.

Pendant le regroupement, elle est ailleurs, se tord dans tous les sens, suce ses mains.

Elle est anxieuse et le mouvement perpétuel semble la calmer un peu.

Elle regarde la maitresse, regarde autour d’elle, sort la langue, plisse les yeux et écarte la bouche.

Ses petites dents toutes noires apparaissent. Elle ne sourit pas, fait une sorte de grimace en montrant ses dents, puis elle ferme la bouche et regarde à nouveau la maitresse. Lorsqu’elle fait cette grimace, elle me fait penser à un petit monstre. […] Ensuite elle attrape son écharpe, la tord dans tous les sens, l’entoure autour de sa poignée et la tire à nouveau dans le cou. Pendant qu’elle « joue » avec l’écharpe, elle sort la langue et continue à faire des grimaces. Elle semble être dans son monde à elle.

(Observation matinale du 16 Octobre 2014) Elle est souriante par moments, sinon elle garde souvent la main dans la bouche pendant le regroupement. Elle fait constamment bouger des parties de son corps, comme si elle ne pouvait pas s’immobilier, se tranquilliser.

(Observation matinale du 9 Décembre 2014)

68 Est-ce l’effet « petit-groupe » ? Est-ce la stimulation de l’enseignante qui l’encourage à participer ? Est-ce la confiance acquise à comprendre et à parler en français ?

Chapitre 7. Les études de cas : neuf portraits d’enfants allophones

Nelly se coupe de l'intérieur et se réfugie dans une intériorité quand elle suce ses doigts. Elle s’auto-stimule pour s’apaiser sans avoir recours à une aide extérieure69, mais son bien-être reste fragile : elle donne l’impression d’être en déséquilibre, de flotter, de ne pas avoir d’appui.

Elle met ses doigts dans la bouche, attrape ses dents de devant avec les deux mains et suçote plusieurs doigts à la fois. Parfois elle fait sortir sa langue, puis la rentre. Je suis gênée en la regardant […]. On dirait qu’elle est dans son monde, peu importe où elle regarde. Son « évasion » dans cette activité buccale n’est pas très remarquable pour les autres, étant donné que plusieurs enfants se lèvent, crient, coupent la parole de la maitresse. Elle continue à « masser » ses dents et sa gencive. Ses pieds sont sur la pointe des pieds, les genoux serrés, ses coudes reposent sur ses cuisses. Je me dis qu’elle est dans une position instable, en déséquilibre, pas du tout posée, tranquillisée. Plus tard, pendant qu’elle colorie, j’ai l’impression qu’elle flotte, comme si elle n’était pas appuyée au sol ou au banc. […] Le seul moment quand elle arrête un peu de bouger, c’est quand elle « masse sa bouche.

(Observation matinale du 9 Décembre 2014) Pour la fin de l’année, Nelly est beaucoup moins inquiète pendant le regroupement et les activités en classe. Nelly semble connaître la routine de la classe, elle a intériorisé l’enchainement des activités. Ses gestes sont automatisés. Même si elle est souvent souriante, elle reste passive et désorientée par moments. Parmi les enfants observés, Nelly est l’une des enfants pour qui la première année ne semble pas avoir été suffisante pour qu’elle soit pleinement à l’aise et épanouie à l’école.

Nelly est présente mais peu impliquée dans l'activité. Après avoir écrasé les capsules (atelier du matin), elle se rassoit à sa place et mâchouille le pied de sa mini-Barbie. Puis elle regarde avec curiosité les enfants qui se lèvent et se baladent alors que la maitresse ne leur a pas permis. Elle regarde autour d’elle, se lève, erre entre les tables, regarde les autres puis s’assoit avec une feuille à côté d’un groupe de fillettes.

(Observation matinale du 28 Avril 2015)

69 D’où vient la nécessité de se couper ? Est-ce en lien avec la difficulté à tolérer la barrière de la langue ? On peut penser que quand on n'a pas la langue, c'est comme être sourd, être dépourvu de ses moyens, ne pas trouver du sens à ce qu’on fait. Nelly trouve un moyen de s’évader et de supporter