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Chapitre 1: La mission de l’école enfantine, de l’accueil des élèves allophones

1.1 Place et rôle de l’école enfantine dans les deux contextes étudiés

1.1.3 L’origine des écoles enfantines dans les contextes suisse et hongrois

La question de l’origine de la prise en charge des petits de 3 ou 4 ans revêt d’une grande importance pour comprendre la pédagogie actuellement en vigueur dans les deux contextes choisis. Elle est essentielle également pour comprendre la place accordée à la dimension affective dans les programmes scolaires étudiés.

D’où viennent les écoles enfantines à travers le monde, en Europe et plus spécifiquement dans les deux contextes étudiés ? Quelles influences ont connues les courants pédagogiques, éducatifs et sociaux au fil du temps ?

1.1.3.1 Brève historique et mission des écoles enfantines : passé et présent

C’est en parallèle qu’apparaissent au début du 19ème siècle dans plusieurs villes d’Europe, les institutions d’accueil des enfants en bas âge, entre 2 et 6 ans. Les premières salles d’asile, les Infant school (Grande-Bretagne) et les Kindergarten (Allemagne), les « jardin des anges » (Hongrie) ont des objectifs multiples. Du point de vue pragmatique, ils prennent en charge les enfants de mères travailleuses abandonnés à la rue pour leur donner les soins nécessaires, des occupations et des activités utiles. Le but de ces institutions est aussi de sensibiliser les enfants, dès le plus jeune âge, à une vision philanthropique de la société, inspirée par les grands penseurs du siècle des Lumières. L’enseignement à la discipline et les pratiques religieuses y sont considérés comme piliers de l’éducation des jeunes enfants (Luc, 1999 ; Mészáros et al., 2003). Dans ses débuts, l’école enfantine est donc pensée pour « gardienner », guider et orienter les enfants vers des mœurs qui conviennent à la société.

Petit à petit, ces écoles pour les petits connaissent un essor considérable à travers l’Europe. Des institutions ouvrent leurs portes dans les villes et les campagnes. Elles sont d’abord privées et exigent une rémunération des parents. Luc (1999) définit quatre grandes catégories de types d’institutions préscolaires au 19ème siècle, distinctes les unes des autres par leurs modes de fonctionnement, leurs fondateurs (pédagogues ou philanthropes) leurs gestionnaires (associations, Eglise, Etat) ou par les idéaux qu’elles représentent.

A Genève et à Lausanne, c’est en 1826 qu’ouvre les portes des « écoles des petits » fondées par l’association des dames charitables. Deux années plus tard, Brunswick Thérèse donne naissance à la première école enfantine de l’Europe de l’Est à Buda (Pest) nommée « Jardin d’anges » (Luc, 1999 ; Vág, 1970) qui accueille des enfants de 3 à 5 ans.

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 En Suisse

L’éducation de la petite enfance en Suisse repose sur deux cultures différentes bien qu’elle ait la même origine. Pestalozzi à la fin du 18ème - début du 19ème siècle, s’interroge sur la prise en charge des enfants des travailleurs des plantations de coton.

Frappé par les circonstances désastreuses, l’entassement des enfants dans des espaces insalubres et l’absence d’hygiène dans les garderies rurales, il initie une action éducative pour ces enfants, une pédagogie adaptée à leurs besoins physiques et psychologiques. Par la suite, Pestalozzi inaugure le premier établissement d’accueil des jeunes enfants en milieu urbain, installé dans la ville de Genève en 1826.

Le disciple de Pestalozzi, Friedrich Fröbel, sur les bases des travaux de son maître, fonde sa pédagogie basée sur le jeu. Le premier Jardin d’enfants froebélien ouvre ses portes à Lausanne en 1860. La fin du 19ème siècle - début du 20ème siècle est marqué par l’essor des écoles enfantines qui prolifèrent sur l’ensemble du territoire de la confédération. Les premiers établissements publics apparaissent au moment de la Première Guerre Mondiale. La construction et l’épanouissement de la personnalité, le jeu, les manipulations d’objets sont au cœur de la pédagogie. Comme le mentionnent Gilliéron Guirou et ses collègues (2013, p.3), « les objectifs sont centrés sur l’enfant et dépouillés de tout aspect scolaire ».

La tradition froebélienne détermine et influence fortement les pratiques éducatives en Suisse alémanique notamment puisqu’elle est le berceau du mouvement des Kindergarten suisses et aussi la pionnière de la formation des jardinières d’enfants froebéliens. En effet, la vision éducative en Suisse alémanique repose sur la tradition alémanique préscolaire du Kindergarten. Brougère (1997, p.51) explique que dans les Kindergarten allemands :

Nous trouvons dès l’origine, la liaison fondamentale entre jeu, intervention indirecte de l’éducatrice, initiative enfantine ou liberté, confiance en la nature. Il s’agit d’un modèle de fonctionnement que l’on trouvera dans les systèmes préscolaires qui mettent le jeu au centre […]. Le jardin d’enfant allemand revendique aujourd’hui encore l’héritage fröbelien et dans les systèmes où le jeu est très présent, tels le Japon ou les Etats-Unis, on peut découvrir une origine fröbelienne.

En Suisse romande, vers le début du 20ème siècle, les changements dans les courants éducatifs français influent sur l’enseignement. La dénomination « école » soutient une forme d’apprentissage de type scolaire. Les formes scolaires telles que la lecture, l’écriture et le calcul se hissent progressivement dans les pratiques en école enfantine, laissant derrière elles le jeu comme forme d’apprentissage. L’annuaire de l’instruction publique de 1910 aiguille la différence entre les programmes d’études alémaniques excluant les activités de type scolaire et les pratiques en Suisse française, se rapprochant davantage des méthodes d’apprentissages scolaires (Forster, 2007b).

Située entre la France et l’Allemagne, la Suisse a toujours été influencée par les courants pédagogiques des pays limitrophes. Les discordances autour des contenus de l’enseignement ont pu être résolues par l’élaboration de plusieurs plans d’études : Le Plan d’étude suisse romand est centré sur une méthode éducative de type scolaire.

Les plans d’étude dans les cantons alémaniques et du Tessin prennent toutefois en considération d’autres cultures éducatives. Lors de la préparation de l’harmonisation du système éducatif suisse, les spécialistes se sont heurtés à la difficulté de rapprocher deux cultures scolaires controversées. Gilles Brougère (2010)

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questionnant les pratiques des enseignant-e-s du préscolaire allemand et français, explique que les enseignant-e-s français-es sont frappé-e-s par l’aspect ludique des activités, l’absence de consignes et de pression dans les classes allemandes. A contrario, les enseignant-e-s allemand-e-s s’étonnent de la pression exercée sur les enfants, des consignes directes donnés par les enseignant-e-s. Ils/elles disent que l’apprentissage est plus visible dans les classes françaises tandis que dans les classes allemandes, il reste souvent implicite puisqu'il se fait par le jeu. Une enseignante française dit « chez nous c’est clair, vous venez à l’école pour travailler » (ibid., p.51).

Les paroles des enseignant-e-s mettent en lumière la divergence des pratiques de l’enseignement préscolaire d’un pays à l’autre. L’enseignement suisse a pour particularité qu'il se situe au croisement de ces divergences.

 En Hongrie

En Hongrie, le « Jardin d’anges » de Brunswick Thérèse, créé en 1828, fonde la culture de l’école enfantine en Europe centrale. Inspirée de l’infant school anglaise, cette institution serait désignée actuellement comme « école des petits écoliers » puisque les enfants y apprennent à lire, à écrire, à compter et étudient des disciplines telles que la géographie et les sciences naturelles (Mészáros et al., 2003).9 Plus tard, d’autres institutions de la petite enfance ouvrent leurs portes, et l’Association des Instituts de la Petite enfance hongroise connaît le jour. A la fin du 19ème siècle - début du 20ème siècle, les écoles des petits en Hongrie tendent de plus en plus vers une pédagogie qui respecte le développement de l’enfant et de ses centres d’intérêt. Le jeu a une place centrale (ő, 1970). La loi de 1891 décrète que l’école enfantine, accueillant les enfants de 3 à 6 ans « fait partie intégrante de l’instruction publique » (Kelemen, 2000, 2003, p.324). L’enseignement est donné en langue hongroise, son but premier est de « protéger » les enfants et l’apprentissage n’y a pas sa place.

Les guerres mondiales et les décennies de régime socialiste laissent leurs traces sur les idéologies et les rôles décrétés de l’école enfantine hongroise. L’entre-deux guerres est marqué par l’expansion des écoles enfantines sur le territoire hongrois ainsi que la lutte pour l’enseignement en langue hongroise. Après la deuxième guerre mondiale, et jusqu’à la fin du régime socialiste en 1989, les idéologies soviétiques ou les inspirations socialistes transparaissent dans les méthodes pédagogiques. L’école enfantine devient obligatoire à partir de sa dernière année et l’enseignement y est focalisé sur les soins et la construction du « bon communiste » (Vág, 1970, p. 73). Vág Otto, enseignant-chercheur de l’époque, spécialisé dans la mission éducative de la petite enfance en témoigne. Son « cahier de cours », devenue la Bible de l'éducation de la petite enfance prône pour une vision éducative inspirée d’Anton Makarenko, fameux pédagogue de l’URSS.

Les inspirations socialistes déterminent encore les coutumes scolaires actuelles. Les tâches fondamentales de l’école enfantine socialiste telles que l’éducation corporelle, éthique, intellectuelle et esthétique (Vág, 1970, p.78) font partie intégrante de la

9 Remarquons que pour les chercheurs en histoire de la petite enfance en Hongrie, le curriculum de cette première institution de la petite enfance, dans son aspect « scolaire » est relevé comme étant différent de la vision de l’école enfantine moderne. En d’autres termes, il est important de souligner que dans les écoles enfantines hongroises, l’éducation et l’enseignement se font essentiellement à travers le jeu et les activités ludiques. L’apprentissage de la lecture et de l’écriture ne fait pas partie du

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dernière version révisée du Programme national d’éducation enfantine (ONOAP : Óvodai nevelés országos alapprogramja) de 2012.

Par ailleurs, l’apprentissage de type ludique puise également dans la tradition de la pédagogie socialiste. Vág (1970 [traduit du hongrois par A. Toth]) explique que

« l’élaboration et la planification des activités doit avoir une forme ludique, accessible et motivante pour les enfants »

Les missions éducatives enfantines hongroise et suisse romande sont le produit de changements divers qui ont contribués à leurs définitions actuelles. D’autres tendances universelles, telles que la performance scolaire évaluée par l’enquête PISA, la lutte contre les inégalités scolaires, les amalgames entre le dépistage précoce et la réussite scolaire10 (Garnier, 2009 ; Wannack et al., 2006) ont aussi fortement influencé les objectifs éducatifs de l’école enfantine contemporaine. Voyons à présent quelles sont les priorités actuelles de l'éducation en école enfantine dans les deux contextes étudiés.

1.1.3.2 Caractéristiques spécifiques de l’entrée à l’école selon les courants actuels

 Enseigner VS éduquer

L’entrée précoce dans l’apprentissage s’avère être primordiale pour le bon développement cognitif et la réussite scolaire ultérieure des enfants. Ceci est démontré par plusieurs études, notamment le rapport de Wannack et ses collègues (2006) qui font référence aux études internationales pour appuyer l’aspect scolaire de l’école enfantine suisse. Réalisée auprès de 3000 enfants en bas âge en Grande-Bretagne, l’étude longitudinale de 2002, Researching Effective Pedagogy in the Early Years (EPEY) met en évidence que les enfants ayant fréquenté une institution préscolaire avant l’entrée en école primaire sont plus développés sur le plan cognitif et social que les enfants passant directement de la maison à l’école. Il est important de souligner que cette précocité de l’apprentissage scolaire est aussi le résultat d’une pression croissante de la part des parents, qui stimulent leurs enfants de plus en plus tôt par des jeux éducatifs, et poussent l’école suivre cette démarche intellectuellement stimulante pour les enfants.

La mission éducative de l’école enfantine vise aussi la réduction des inégalités sociales. Selon la même étude, les écarts entre les enfants venant de différents milieux sociaux pourraient être estompés par une scolarité riche en apprentissages scolaires dès les plus jeunes âges (Wannack et al., 2006). Wannack et son équipe soutiennent l’idée que plus les enfants entrent tôt dans les apprentissages, plus leurs difficultés dues à la transition vers l’école primaire sont réduites.

Pour toutes ces raisons, dans la dichotomie entre éduquer et enseigner, l’école enfantine suisse tend plutôt vers le penchant « enseigner ».

10

http://www.oecd.org/fr/education/scolaire/petiteenfancegrandsdefisiieducationetstructuresdaccueil.htm

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En Hongrie, entre « enseigner » et « éduquer », la mission de l’école enfantine tend plutôt vers « éduquer » bien que son rôle majeur, comme son nom l’indique, soit plutôt de protéger.11 Dans le Programme national d’éducation enfantine (ONOAP : Óvodai nevelés országos alapprogramja) et le rapport de 2014 sur les stratégies de développement de l’éducation publique (Köznevelés-fejlesztési stratégia), la fonction protectrice de l’école enfantine est mise en avant, ainsi que sa place centrale au sein de la coopération avec les familles en vue de réduire les écarts sociaux. Comme l’a montré l’analyse de contenu des programmes d’école (Tableau 1), le terme

« apprentissage » est très peu cité dans le programme national hongrois. Cela appuie l’idée que l’école enfantine hongroise n’est pas une institution centrée sur les apprentissages et sur les enseignements. La mission de l’école enfantine est donc d’éduquer et non pas d’enseigner, et avant tout, de protéger les enfants (Vekerdy, 1989).

Malgré cela, une autre tendance se dessine. Dans le rapport de 2014 sur les stratégies de développement de l’éducation publique (Köznevelés-fejlesztési stratégia), les directives éducatives accentuent l’importance du développement cognitif, du développement de l’attention, de la mémoire, du langage et de la construction de la pensée à travers les apprentissages. La lutte contre les inégalités sociales, la pression et les attentes des parents, la volonté de minimiser l’échec scolaire et de maximiser l’efficacité de l’enseignement dès le plus jeune âge sont des problématiques actuelles en Hongrie et à travers le monde. Compte tenu de ces tendances contemporaines, la mission de l’école enfantine va-t-elle obligatoirement basculer vers la valorisation du fait d’« enseigner » Quelles seront les pertes et les gains d’une éducation recentrée sur les apprentissages scolaires ?

 Jouer VS travailler

Le jeu était une forme d’activité présente et valorisée dans les Kindergarten et quasi absent et marginalisé dans les écoles maternelles françaises (Brougère, 1997, 2010).

Les Tableau 1 et 2 ont montré que les termes « jeu », « jouer » étaient des plus fréquemment mentionnés dans le programme hongrois (43 fois contre 13 fois dans le PER suisse), et que les dérivés de « travail » étaient les deuxième plus utilisés (après apprentissage) dans le PER (34 fois contre 18 dans le programme hongrois). Pourquoi le jeu qui était au cœur de la pédagogie de Pestalozzi et de Fröbel dans les écoles enfantines suisses du 19ème siècle (Forster, 2007a ; Gilléron Giroud et al., 2013 ; Thevenaz-Christen, 2005) a perdu sa place capitale dans le programme actuel ? Comme mentionné auparavant, Veuthey et Capitanescu Benetti (2014, p.18) se demandent : « L’école première, qui visait le développement global de l’élève, ne se dirige-t-elle pas actuellement plutôt vers un formatage de l’enfant, prérequis à l’entrée dans les apprentissages formels ? ». Pourquoi le jeu n’est plus suffisant pour le bon développement de l’enfant. Y’a-t-il réellement besoin d’apprentissage ou d’activité de type « travail » en école enfantine ?

óvoda (école enfantine) contient la racine « óv » qui signifie protéger.

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Selon Bouvier (2007), le jeu libre des petits n’est pas une perte de temps mais essentiel pour la compréhension du monde. Néanmoins, le temps de jeu est de plus en plus réduit dans les classes enfantines. Il reprend l’idée avancée par la psychothérapeute Etty Buzyn qui dit : « les parents et le système éducatif ont tendance à émousser les désirs et les rêves des enfants, dans le but de les rendre conformes à des intérêts de société et de rassurer les adultes sur leur avenir » (Bouvier, 2007, p.9).

Les enjeux sociaux de la suppression du jeu de l’espace scolaire apparaissent ici. Si l’éducation enfantine a besoin d’être rentable et efficace, est-il possible d’imaginer une éducation basée sur le jeu et l’épanouissement de l’enfant ?

En Hongrie, la première directive sur l’école enfantine cité par Vág (1993, p.60) décrète que « le travail et l’enseignement (type apprentissage) n’ont pas leur place en école enfantine ». Vág précise qu’avant l’entrée en l’école enfantine, les enfants ne distinguent pas le jeu, l’apprentissage et le travail (Vág, 1970, p.101). Vekerdy (1989, p.47) soutient que l’activité première des enfants en école enfantine est de jouer. Il parle du jeu, comme « la forme d’activité la mieux adaptée au développement d’un enfant entre 3 et 6 ans » [traduit du hongrois par A. Toth].

On voit apparaître ici des approches controversées autour du jeu et du travail en école enfantine. En quelle mesure le jeu est-il encore d’actualité dans les écoles enfantines ? Quelle place occupe-t-il alors que la vision de l’enseignement tend davantage vers des formes d’apprentissages scolaires ?

 L’âge de la scolarisation obligatoire

La question de l’âge d’entrée à l’école est capitale puisque d’une année à l’autre, le développement physique, cognitif et psychique des enfants varie considérablement.

Le questionnement autour de l’âge de scolarisation obligatoire revêt une grande importance dans cette thèse, étant donné qu’en Suisse romande, depuis la mise en vigueur du concordat HarmoS, la scolarité est devenue obligatoire à partir de 4 ans12 et en Hongrie, elle est fixée à 3 ans depuis 201513.

La première primaire suisse se doit de permettre à l’enfant de se socialiser, de s’habituer aux formes scolaires, tout en respectant les étapes de son développement et sa maturité affective. (Hutterli & Vogt, 2014). Les principales raisons de l’avancement de la scolarité obligatoire, fixée auparavant à 6 ans, sont les suivantes.

Avant le concordat HarmoS, 86 % des enfants en Suisse fréquentaient déjà les deux années d’école enfantine, bien qu’elles n’aient pas été obligatoires (Gilléron Giroud et al., 2013 ; Hutterli & Vogt, 2014). D’autre part, la scolarité obligatoire à 4 ans facilite le passage entre école enfantine et école élémentaire, aide les parents à concilier vie professionnelle et vie familiale et réduit les inégalités socio-économiques divergentes et minimise ainsi le risque d’échec scolaire (Hutterli & Vogt, 2014). Enfin, l’étude de Wannack et son équipe (2006) montre que la fréquentation d’une structure préscolaire réduit le décalage et favorise l’entrée dans les apprentissages. Compte tenu de ces arguments, l’avancement de l’âge de la scolarité obligatoire revêt la question de savoir

12 Article 5 de la loi HarmoS, dans le paragraphe intitulé « Caractéristiques structurelles de la scolarité obligatoire » précise : « l’élève est scolarisé à 4 ans révolus au 31 Juillet ». (Hutterli & Vogt, 2014, p.3).

13 Programme national d’éducation enfantine (Óvodai nevelés országos alapprogramja)

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si l’entrée précoce dans les apprentissages peut respecter le bon développement et répondre aux besoins des enfants (Veuthey & Capitanescu Benetti, 2014).

L’âge de la scolarité obligatoire connait aussi des changements dans le contexte hongrois. Depuis les années 1970 jusqu’en 2015, seule la fréquentation de la dernière année d’école enfantine était obligatoire pour les enfants de 5 ans. A partir de la rentrée 2015, les enfants de 3 ans révolus au 31 août 2015 doivent participer en raison de quatre heures par jour aux activités matinales en école enfantine14. Les principales raisons de la scolarisation obligatoire avancée à 3 ans sont d’ordre social ayant pour but de réduire les écarts entre les enfants. Elle a pour but de permettre aux enfants issus de familles défavorisées d’accéder à une scolarité de qualité dès leur plus jeune âge, facilitant ainsi le passage en école élémentaire (Makki, 2015). De manière implicite, cette directive est une forme de lutte contre la pauvreté des enfants puisque les statistiques de 2015 révèlent que 31% des enfants en Hongrie vivent dans des conditions socio-économiques précaires et 11% parmi eux vivent en-dessous du seuil de pauvreté. Parallèlement à l’introduction de la scolarité obligatoire à 3 ans, le gouvernement hongrois met en place un système de restauration gratuit dans les écoles enfantines appuyant cette idée de lutte contre la pauvreté et les conditions déplorables des enfants en bas âge.

 « Période d’intégration » et autres stratégies d’accueil

 « Période d’intégration » et autres stratégies d’accueil