• Aucun résultat trouvé

Chapitre 1: La mission de l’école enfantine, de l’accueil des élèves allophones

1.2 La place de l’enfant allophone à l’école

1.2.1 Brève histoire de la migration dans les deux contextes

Les stratégies d’accueil et de scolarisation des élèves migrant ne peuvent être saisies sans la connaissance préalable de l’histoire et de la politique d’immigration, surtout s’ils diffèrent autant que dans les deux contextes étudiés.

 En Suisse

La Suisse est, après le Luxembourg, le deuxième pays européen à accueillir le plus d’immigrés sur son territoire. 25% de sa population est de double nationalité. Dans les années 1960-1970, les travailleurs italiens et espagnols ayant subi la crise pétrolière arrivent en Suisse, suivis des portugais, des turcs et des yougoslaves. Il s’agit de

Chapitre 1: La mission de l’école enfantine, de l’accueil des élèves allophones et les communautés d’étrangers selon les contextes

travailleurs peu qualifiés, spécialisés dans l’industrie, la restauration, l’hôtellerie, l’agriculture et d’autres secteurs nécessitant de la main d’œuvre avec peu ou pas de qualification. En réponse à leur arrivée massive, le gouvernement met en place en 1970 un système de quotas en limitant l’entrée des travailleurs sur le territoire de la Confédération. En parallèle, des permis saisonniers sont délivrés, maximalisés à neuf mois (Becker et al., 2008). En accumulant plusieurs permis, les migrants peuvent obtenir un permis annuel (35% des saisonniers ont pu ainsi obtenir un permis annuel), premier palier pour l’obtention du statut de résident. Même si le système autorise l’accumulation des permis, il ne la favorise pas. Cette politique d’immigration est dite de type « contrat de travail » (Schnapper, 1992, p. 46 citée par Mottet, 2013) et s’oppose à une politique dite « d’intégration » dans la mesure où elle favorise le travail à court terme et rejette l’idée d’une sédentarisation de ces travailleurs sur le territoire de la Confédération.

En 1989, entre en vigueur la loi bilatérale sur la libre circulation des ressortissants de l’UEE (Union Européenne Économique) qui fait basculer le décor de l’immigration suisse. Certains secteurs ne peuvent plus accueillir les travailleurs à cause du ralentissement économique et les étrangers doivent retourner ou rester chez eux. En parallèle, les travailleurs qualifiés, les demandeurs d’asile et les ressortissants de pays hors UEE apparaissent sur le marché du travail suisse. Le Conseil introduit en 1991 le modèle à trois cercles, réglementant l’admission des étrangers et des réfugiés en fonction de leur pays d’origine (Mottet, 2013 ; Becker et al., 2008). Ce modèle est découpé en trois cercles :

 Dans le 1er cercle, sont acceptés les personnes venant de pays UEE/AELE (Association économique de libre échange). Si le travail ne peut être fait par un travailleur ressortissant de ces pays, alors il y a possibilité de recruter une personne du 2ème cercle

 Dans le 2ème cercle sont acceptés les personnes venant des USA, Canada, Australie, Nouvelle Zélande, Europe centrale et Europe de l’Est. Si le travail ne peut être fait par un travailleur ressortissant de ces pays, alors il y a possibilité de recruter une personne du 3ème cercle

 Dans le 3ème cercle sont acceptés les personnes venant des autres pays Ce modèle à trois cercles favorise l’immigration des ressortissants d’ex-pays Yougoslaves, notamment des kosovars, l’une des minorités les plus importantes aujourd’hui en Suisse. L’année 1998 apporte un nouveau changement : le modèle à trois cercles est remplacé par un système binaire différenciant les ressortissants de l’Union Européenne et/ou de l’AELE et les « autres ».

Alors qu’autrefois les italiens et les espagnols étaient majoritaires, aujourd’hui, les origines des immigrés sont variées. La Figures 315 montre les origines de la population étrangère en Suisse. Les cinq pays d’émigration les plus représentés sont l’Italie (15,8%), l’Allemagne (15.3%), le Portugal (13,5%), la France (6%) et le Kosovo (5,4%).

Les enfants allophones que nous avons observés dans notre étude sont originaires du Kosovo et du Portugal. Ils appartiennent donc aux communautés issues de l’immigration les plus représentées.

15 Sources : L’office fédérale de la statistique : statistiques suisses sur les indicateurs de la migration

Chapitre 1: La mission de l’école enfantine, de l’accueil des élèves allophones et les communautés d’étrangers selon les contextes

Figure 3: Effectifs de la population résidente permanente étrangère au 31.12.2014

 En Hongrie

En Hongrie, l’immigration est plus récente qu’en Suisse étant donné que le pays a été fermé durant les cinquante années du régime communiste. Ce n’est que depuis le changement de régime en 1989 que la Hongrie est devenue un lieu propice à l’immigration (Hárs, 2010). En 1987, la suppression du visa pour les chinois, ainsi que la crise et la récession en Chine favorisent l’arrivée massive des immigrants chinois sur le sol hongrois.

A partir des années 1990, les commerçants chinois sont concurrencés par l’arrivée des commerçants vietnamiens (Feischmidt & Nyíri (Eds.), 2006 ; Kováts (Ed.), 2010, Nyíri, 2011, 2014). Parallèlement à cette immigration d’Asie du Sud-est, arrivent en Hongrie des migrants des pays limitrophes, en particulier des travailleurs venant de Transylvanie. Par la mise en vigueur de la loi sur la naturalisation de 201016, les ressortissants de pays limitrophes magyarophones ayant des ancêtres hongrois (venant des territoires ayant été annexés aux pays limitrophes suite au traité de Trianon en 1920) peuvent obtenir la nationalité hongroise. Cette immigration diffère considérablement des pays d’Asie du Sud-Est puisque ces ressortissants parlent hongrois. Dans les années 1990, certains rescapés de la guerre de Yougoslavie trouvent refuge en Hongrie. Pour la plupart, ils retournent dans leur pays après la guerre.

16 http://mkogy.jogtar.hu/?page=show&docid=a1000044.TV

Chapitre 1: La mission de l’école enfantine, de l’accueil des élèves allophones et les communautés d’étrangers selon les contextes

Une troisième vague d’immigration, celle des « vrais migrants » selon Kováts et ses collègues (2010), regroupent les immigrés venus de loin et les demandeurs d’asile (politique) arrivés en Hongrie à partir de la fin des années 1990. Parmi eux, il y a les chinois et les vietnamiens qui continuent à s’installer en Hongrie, des afghans, des mongols, des turcs mais aussi des demandeurs d’asile provenant de Lybie, Syrie, d’Irak ainsi que des pays d’Afrique subsaharienne (Nguyen et al., 2009). Ils présentent une grande variabilité du point de vue de leurs statuts socio-économiques, leurs projets de migration (et de sédentarisation), leurs maitrises de la langue, etc. Nous verrons par la suite plus particulièrement les données statistiques concernant les nationalités des enfants que nous avons observés dans notre étude, à savoir la situation de migration des chinois, des vietnamiens, des irakiens et des mongols vivant en Hongrie.

Aujourd’hui, les étrangers représentent environ 2% de la population hongroise contrairement à la Suisse, où ce chiffre s’élève à 22%. L’accueil des étrangers en Hongrie est nettement en-dessous de la moyenne d’autres pays européens (Győri &

al, 2011 ; Hárs, 2010) puisque selon les statistiques sur la migration et la population migrante dans l’Union européenne, les migrants représentent 3,9% de la population (sans compter les naturalisés)17.

Les étrangers sont plus présents dans les milieux urbains. Selon Kőszegi (2010), La population budapestoise compte 4,4% d’étrangers. Les mineurs quant à eux représentent 10,7% du total des étrangers. Ces chiffres montrent une tendance changeante, il est néanmoins difficile d’estimer le nombre exact de personnes venues d’ailleurs sur le territoire hongrois. En 2013, au moment de l’enquête de terrain, les demandeurs d’asile de Syrie, d’Irak et d’Afghanistan, fuyant la guerre étaient nettement moins nombreux que suite aux évènements de l’été 2015, où la vague d’immigration massive vers l’Europe a fait de la Hongrie un pays de transit. Les demandes d’asile politique se sont multipliées mais de nombreux migrants ont choisi de quitter illégalement le pays pour continuer vers des pays d’Europe occidentale.

1.2.2 L’accueil des élèves étrangers dans les écoles et les dispositifs mis