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Chapitre 1: La mission de l’école enfantine, de l’accueil des élèves allophones

1.3 Six communautés d’étrangers : état de leur situation dans les contextes

Des neuf enfants allophones, ceux observés en Suisse sont d’origines portugaise (Mira) et kosovare (Emir, Nelly et Alice) et les cinq enfants observés en Hongrie sont de nationalités vietnamienne (Zeno et Ivett), chinoise (Lucie), irakienne (Sami) et mongole (Beatrix).

Les portugais24 représentent entre 2 et 3% de la population suisse et 13,3% de la population résidente permanente en Suisse25. Parmi eux, 23% ont moins de 18 ans (en 2008). Seul un enfant portugais sur 3 nait au Portugal, ce qui signifie que la majorité des familles s’installe en Suisse avant la naissance de leurs enfants. Pour rappel, les premiers immigrés portugais sont arrivés en Suisse dans les années 1960 pour motif économique (3ème génération). Depuis, nombreux ont obtenu la nationalité suisse, et n’apparaissent pas dans les recensements actuels. La plupart des portugais en suisse soutiennent financièrement leur famille restée au pays. Leurs projets de migration sont variés : seuls certains envisagent de rentrer au pays. Du point de vue professionnel, ils ont majoritairement un niveau d’étude bas et travaillent essentiellement dans le bâtiment, l’industrie, l’hôtellerie, la restauration, les services et la vente (surtout la première génération). Parmi les jeunes, nombreux sont hautement qualifiés. Leur intégration dans la société suisse est globalement positive, ils sont perçus comme des travailleurs investis, même si parfois, on leur reproche

22 Les détails sur l’école sont présentés dans la Partie 2

23 idem 42

24 ge.ch/integration/media/integration/files/documents/2_diasporastudie-portugal-f.pdf

25https://www.sem.admin.ch/dam/data/sem/publiservice/statistik/auslaenderstatistik/monitor/2016/stati stik-zuwanderung-2016-12-jahr-f.pdf

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d’être « invisibles », surtout dans le milieu scolaire, où les parents s’investissent peu dans l’éducation et la formation de leur enfant.

Les kosovars26, tout comme les portugais représentent environ 2% de la population suisse et 5,5 % de la population résidente permanente en Suisse22. Ce sont surtout des familles et des jeunes couples, dont 35% de jeunes de moins de 18 ans. Ils sont arrivés en Suisse en raison de l’instabilité économique et politique dues aux conflits en Yougoslavie depuis les années 1960 (3ème génération). Aujourd’hui, la plupart d’entre eux conçoivent une sédentarisation tandis que les premiers arrivants envisageaient de retourner au pays. Ils économisent souvent de l’argent en vivant dans des logements bon marché, ce qui leur permet d’épargner pour pouvoir envoyer de l’argent à la famille restée au Kosovo. La plupart des hommes sont des travailleurs non-qualifiés et les femmes kosovares ne travaillent que rarement et restent plutôt au foyer. Dans les années 1980, ils avaient une image négative et dévalorisante basée sur des préjugés. Aujourd’hui ils sont perçus comme étant plus ouverts et moins discrets (changements entre la 2ème et 3ème génération). Chez les familles kosovares nouvellement arrivées en Suisse, les enfants arrivent à l’école sans parler français puisqu’ils ne fréquentent que rarement les crèches ou autres institutions de la petite enfance. Hormis la barrière de la langue, les familles sont investies dans l’éducation de leurs enfants.

En ce qui concerne les communautés étrangères en Hongrie, il existe des études portées sur la situation socio-économique et migratoire des chinois et des vietnamiens27. Les données sur la situation des minorités mongole et irakienne restent toutefois quasiment absentes. Dans une étude comparant six groupes minoritaires en Hongrie (Örkény & Székely, 2010b), la minorité « arabe » sans préciser la/les nationalité-s qui correspondent à cette dénomination. Nous mentionnons leurs résultats à titre indicatif.

Les chinois en Hongrie représentent officiellement 0,09% de la population néanmoins, leur nombre estimé varie entre 0,4 et 1%. Ils sont présents en Hongrie depuis la fin des années 1980, quand les visas ont été supprimés afin de faciliter les relations bilatérales entre les deux pays. Les raisons de la migration chez les premiers immigrés chinois étaient surtout économiques et politiques mais les nouveaux arrivants recherchent essentiellement des conditions économiques favorables. Ce sont surtout des jeunes couples avec ou sans enfants qui arrivent en Hongrie pour rejoindre leur famille. Ils encourent souvent à la disqualification professionnelle et se réorientent vers des activités commerciales. Les hongrois les identifient souvent avec la vision stéréotypée du commerçant productiviste qui représente une menace au marché concurrentiel hongrois. Les chinois ont tendance à rester entre eux et se mêlent peu à la population locale. Ils emploient souvent des nounous hongroises appelées

« mamies hongroises » qui gardent leurs enfants à partir de quelques mois de vie. La plupart des enfants chinois apprennent donc très tôt le hongrois ce qui facilite leur entrée à l’école. Les enfants sont souvent renvoyés en Chine vers l’âge de cinq ans, pour quelques années, afin de leur conférer un double bagage scolaire28. L’éducation

26 ge.ch/integration/media/integration/files/documents/1_diasporastudie-kosovo-f.pdf

27d’après Feischmidt & Nyíri (Eds.), 2006 ; Nguyen et al., 2009 ; Nyíri, 2011 et Örkény & Székely, 2010a

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a une place centrale pour les familles chinoises. Ils encouragent leurs enfants vers des études supérieures.

Tout comme les chinois, les vietnamiens qui arrivent en Hongrie sont aussi essentiellement des jeunes couples avec ou sans enfants, qui sont le plus souvent implantés dans le secteur du commerce. Les premiers vietnamiens en Hongrie sont des étudiants qui arrivent dans les années 1950, mais la minorité actuelle est érrivé au pays à partir des années 1990. Ils représentent 0,03-0,06% de la population hongroise. Ils sont aidés et soutenus par leur communauté dans leur activité professionnelle (surtout le commerce). Ils sont perçus comme étant très solidaires et souvent invisibles et en périphérie de la société. Cette tendance n’est plus valable dans la nouvelle génération, surtout chez les jeunes vietnamiens scolarisés dans les écoles hongroises qui s’intègrent davantage à la société hongroise. Contrairement aux chinois, les familles vietnamiennes projettent de se sédentariser en Hongrie. Les enfants suivent le même parcours scolaire que leurs camarades hongrois. Les petits sont souvent gardés, tout comme les chinois, par des « mamies » qui leur apprennent à parler hongrois dès leur plus jeune âge29.

Enfin, les « arabes » en Hongrie (Örkény & Székely, 2010b) sont essentiellement des hommes ou des jeunes couples avec ou sans enfants. Leur niveau de qualification est varié, ainsi que leurs projets de migration. Auparavant, dans les années 1950-60, des étudiants de pays arabophones sympathisants avec le régime socialiste, comme la République arabe unie (Syrie et Egypte) ou l’Algérie recevaient des bourses d’études pour étudier dans les Universités hongroises. Ces premiers arrivants se sont pour la plupart, installés en Hongrie. A l’été 2015, la Hongrie est devenue provisoirement un pays de transit pour les demandeurs d’asile en provenance de Syrie, Lybie, Irak, Érythrée, jusqu’à la fermeture des frontières dans la même année. Il est donc difficile d’estimer l’origine et le projet migratoire des personnes originaires de pays arabophones sur le territoire hongrois30.

Pour résumer, ce chapitre visant à poser le décor contextuel, a apporté des éclairages sur plusieurs plans : la place et le rôle de l’école enfantine, l’arrière-plan migratoire, la prise en charge des élèves étrangers, migrants, allophones dans les contextes suisse et hongrois et la situation actuelle des communautés d’étrangers étudiées. La juxtaposition des contenus des textes officiels a mis en lumière que l’approche éducative suisse romande s’articule essentiellement autour du travail et de l’apprentissage, tandis que l’approche hongroise favorise l’affectivité et le jeu. Les deux chapitres qui suivent se focalisent sur les particularités de l’entrée à l’école des enfants ainsi que sur les enjeux du statut d’étranger et plus particulièrement de l’allophone à l’école.

29 Ce n’est pas le cas de enfants choisis dans notre étude

30 L’école où nous avons conduit cette recherche reçoit chaque année 5 à 10 enfants originaires de pays arabophones. Retenons que tout comme Örkény et Székely (2010b), les enseignants et la directrice ne connaissent pas toujours leur pays d’origine, d'où l'appellation "arabe" peu spécifique et difficile à interpréter.