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AUTRES MÉCANISMES DE PROTECTION

B. L’ INTÉRÊT PUBLIC

1. Patrimoine mondial (UNESCO)

Le Luxembourg a adhéré à la Convention du patrimoine mondial en 1983.

Le Luxembourg comporte un seul site culturel inscrit sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO : Ville de Luxembourg : vieux quartiers et fortifications (1994).

Un rapport sur l’application de la Convention du patrimoine mondial par les États parties en Europe dresse un état pour le Luxembourg. Toutefois il convient de prendre en compte le fait qu’il a été dressé par le ministère de la Culture, spécialement la Commission nationale auprès de l’UNESCO. Il ne s’agit donc pas d’un rapport indépendant de l’État partie.

D’une manière générale, les inventaires du patrimoine culturel et naturel, établis au niveau national, n’ont pas été utilisés comme base pour sélectionner les sites (rapport p. 1). S’il y avait jusqu’il y a peu un site culturel sur la liste indicative pour le patrimoine mondial (La Ville et le Château de Vianden), l’ICOMOS International a recommandé293 dans son rapport pour le Comité du patrimoine mondial que la Ville et le Château de Vianden ne soient pas inscrits sur la Liste du patrimoine mondial dans la mesure où294 :

- les conditions d’intégrité et d’authenticité n’étaient pas remplies, - la valeur universelle exceptionnelle n’avait pas été démontrée, - il n’existait aucun plan ou système de gestion

- la protection légale ainsi que les activités de conservation et d’implication de la communauté devaient être renforcées.

Les propositions d’inscription de biens culturels et naturels sur la Liste du patrimoine mondial sont placées sous la responsabilité du gouvernement (ministère de la Culture), qui prépare le dossier. Les motivations qui se trouvent derrière les propositions d’inscription sont tant la conservation que l’honneur ou le prestige ainsi que l’augmentation des ressources financières et la promotion du tourisme.

                                                                                                               

293 L’ICOMOS a notamment considéré que l’analyse comparative ne justifiait pas d’envisager l’inscription de

ce bien sur la Liste du patrimoine mondial, que les conditions d’intégrité et d’authenticité n’étaient pas remplies, que les critères selon lesquels l’inscription était proposée n’avaient pas été justifiés, que la protection légale en place devrait être renforcée pour s’étendre à toutes les structures architecturales du bien et apporter une protection plus globale, par la suppression des dérogations pouvant être accordées par le maire et la mise en place de sanctions. L’organisation a également considéré que les délimitations du bien étaient appropriées mais que la zone tampon devait être agrandie en direction des crêtes alentour. Si l’ICOMOS International considère que l’état de conservation du château est acceptable (puisqu’il s’agit d’un « château reconstruit » ) mais qu’il serait nécessaire de planifier la conservation des structures religieuses, et que la conservation des bâtiments résidentiels dépend presque exclusivement de la bonne volonté de leurs propriétaires. En outre, contrairement à ce que prescrivent les Orientations devant guider la mise en œuvre

de la Convention du patrimoine mondial, aucune structure ou plan de gestion systématique n’existe selon

les constats de l’ICOMOS International. Ce dernier ajoutait que les tentatives faites pour informer ou impliquer la population locale sont rares. Il recommandait enfin que le système et les indicateurs de suivi proposés soient développés pour permettre un suivi approprié du bien.

294 ICOMOSINTERNATIONAL, Évaluations des propositions d’inscription de biens culturels et mixtes, Rapport

de l’ICOMOS pour le Comité du patrimoine mondial, WHC-13/37.COM/INF.8B1, 37e session ordinaire,

En ce qui concerne le bien inscrit, selon un autre rapport de l’UNESCO295, l’agence responsable de la gestion du site est le SSMN, représentant le Ministère de la Culture. Selon nos sources, la Ville de Luxembourg est également responsable de cette gestion (coresponsabilité).

a) Présentation

Les fortifications de la « Gibraltar du Nord » ont commencé à être démantelées du fait de la déclaration de la neutralité du Grand-Duché en 1867 à Londres et, conséquemment, de leur inutilité militaire. Ce démantèlement s’est poursuivi jusqu’en 1883. Certains bastions ont été inclus dans la planification urbaine, en tant que point de vue. Des parties de fortifications furent laissées en place lors de l’enthousiasme romantique pour les ruines.

Les vieux quartiers consistent en, d’une part, les rues médiévales qui sont présentes dans chaque ancienne cité, et, d’autre part, celles qui ont été créées en même temps que la construction de la forteresse au XVIIe siècle.

Pour des raisons stratégiques, un certain nombre d’habitants ont, au fil du temps, quitté le logement qu’ils occupaient, et ont été installés dans un nouveau quartier de la Ville haute.

L’environnement naturel extraordinaire mentionné par l’UNESCO concerne, en dehors de la topographie sensu stricto, le travail paysager réalisé vers la fin du XIXe siècle par l’architecte français Édouard André. Du temps de la forteresse, la ville n’était naturellement pas dotée de parcs et forêts.

La description de l’appartenance des biens lors de la proposition d’inscription sur la Liste du Patrimoine mondial fait état de propriété soit de l’État, soit de la ville de Luxembourg. Elle souligne que la protection est régie essentiellement par la loi du 18 juillet 1983 relative à la conservation et à la protection des sites et monuments nationaux, « loi qui impose des restrictions importantes aux propriétaires et occupants des sites et bâtiments protégés ».

À l’époque, il est indiqué que le plan d’urbanisme général pour la ville de Luxembourg est présenté dans le Projet Général d’Aménagement (première révision de 1993). Ce projet général définissait – et définit toujours – les zones protégées à l’intérieur de la ville et « impose un contrôle très stricte (sic) sur l’utilisation, la construction et en particulier les limites d’occupation du sol ainsi que sur l’aspect des bâtiments dans ces zones ».

La description de la proposition ajoute encore que le plan d’urbanisme de la ville de Luxembourg concerne une superficie qui dépasse les limites des zones historiques et il contrôle le développement urbain sur une très grande partie de la ville, ce qui constitue une zone tampon adéquate pour le site objet de la proposition d’inscription sur la Liste du Patrimoine mondial.

Il convient d’attirer l’attention sur l’approche comparative à l’époque de l’organisation consultative (ICOMOS).

Dans un premier temps, le Dr Nicolas Faucherre, membre de l’ICOMOS et auteur de l’étude Monuments militaires occidentaux en Méditerranée orientale, préparée pour l’ICOMOS et le Comité du Patrimoine mondial, établissait que tout en ayant été un site militaire prestigieux, le démantèlement de la forteresse à partir de 1867 ne laissa

                                                                                                               

malheureusement « subsister que bien peu de choses de cet ensemble monumental unique : quelques tours quadrangulaires médiévales dans la vallée, les soubassements du château du Bock, quelques bastions de Vauban habillant le rocher et des casernes ... Rien ne permet donc d’avoir un panorama global des fortifications disparues, à part la vision du plan-relief de 1804 et le site intact et bien mis en valeur ». Il ajoutait que « Dans ce cadre, Luxembourg ne peut supporter la comparaison avec des ensembles fortifiés urbains conservés ailleurs en Europe, possédant les même critères d’érection sur la longue durée, du Moyen Âge aux Temps modernes, et ayant conservé l’intégralité ou la majeure partie de leur périmètre de fortifications. »

Dans un second temps, l’ICOMOS a préféré dans ce cas précis suivre les conseils de son Comité International confirmés par le rapport de mission de Jan Tanghe qui précise que la signification historique de Luxembourg, comme forteresse et ville historique, associée à la remarquable harmonie de la ville et de son paysage justifient son inscription sur la Liste du Patrimoine mondial.

L’organisation consultative a conclu que « En raison de sa position stratégique, la ville de Luxembourg a été l’une des plus grandes forteresses de l’Europe moderne. À ce titre, ce site défensif naturel a été sans cesse fortifié et renforcé alors qu’il passait successivement aux mains des plus grandes puissances européennes. Ses fortifications furent un condensé de l’architecture militaire au cours des siècles. Après le Traité de Londres en 1867, la majorité de ses fortifications furent démolies mais les structures restantes sont encore nombreuses pour donner l’impression de force et de puissance, en particulier les forts, bastions et casernes encore debout. La ville elle-même a conservé le tracé de ses rues, témoignage important de ses origines et de sa croissance depuis le Xe siècle. Un grand nombre de bâtiments publics survivent également. »

Actuellement, la brève description du bien du patrimoine mondial fait état de la position stratégique de la forteresse de Luxembourg. De ce fait, elle a été depuis le XVIe siècle jusqu’en 1867, date de son démantèlement, l’un des plus importants sites fortifiés d’Europe. « Renforcées à plusieurs reprises lors des passations d’un grand pouvoir européen à un autre (les empereurs du Saint-Empire, la maison de Bourgogne, les Habsbourg, les rois d’Espagne et de France et finalement les Prussiens), ses fortifications ont été un résumé d’architecture militaire s’étendant sur plusieurs siècles ».

b) Description et gestion

Le critère de l’inscription initiale est le critère n° IV : « offrir un exemple éminent d’un type de construction ou d’ensemble architectural ou technologique ou de paysage illustrant une ou des périodes significative(s) de l’histoire humaine »

La justification fournie par l’organisation consultative (ICOMOS) est que Luxembourg a joué un rôle important dans l’histoire de l’Europe pendant plusieurs siècles. Elle a su préserver les vestiges de ses impressionnantes fortifications et ses quartiers anciens dans un environnement naturel exceptionnel.

Selon l’UNESCO, la déclaration de valeur définit de manière adéquate la valeur universelle exceptionnelle. En outre, le statut et les limites du site (limites et zone tampon) sont définis de manière « adéquate ». Les valeurs du site du patrimoine mondial ont été maintenues.

Cependant, plus loin est remarqué à propos des dispositions législatives et administratives qu’ « aucune disposition légale spécifique pour le site » n’a été prise. Il est aussi dit que « Les dispositions de protection sont jugées suffisamment efficaces, mais doivent être améliorées ».

Le gestionnaire de site pour la zone “reconnue” de 30 hectares et la zone “tampon” de 90 hectares est en première ligne la commune de Luxembourg, malgré le fait que l’État soit le propriétaire principal des anciennes fortifications.

Le conseil municipal est compétent et responsable des permis de construire.

Lorsque le bien immeuble est protégé, le Service des Sites et des Monuments nationaux a bien entendu voix au chapitre.

Cependant, il convient de souligner que de nombreux bâtiments ne sont pas revêtus d’une protection nationale, ce qui est d’autant plus remarquable qu’ils sont pour la grande majorité assez importants :

- l’Hôtel de ville (1830) ; - la cathédrale (1613)296 ;

- le ministère des Affaires étrangères (1751).

Tous ces bâtiments situés au centre de la ville sont proches les uns des autres.

La loi de 1983 sur la conservation et la protection des sites et monuments nationaux est celle qui s’applique en matière de politique générale et de législation pour la protection, la conservation et la présentation du patrimoine culturel et naturel.

Il n’existe pas de législation de planification spécifique pour protéger le site inscrit sur la Liste du patrimoine mondial.

Quant au régime de gestion, il n’existe aucun comité directeur. Selon l’organisation internationale, les pouvoirs publics essentiellement engagés dans la gestion du site sont de niveau national et local. Si celle-ci trouve que le système de gestion en vigueur est suffisamment efficace, il doit cependant, selon elle, être amélioré.

Il n’y a aucun plan de gestion, la supervision de la gestion incombe pourtant au Ministère de la Culture.

Le financement du site du patrimoine mondial émarge au budget de l’État. L’État luxembourgeois n’a pas contribué à la création d’associations pour la collecte de fonds mais la législation nationale prévoit un financement pour la sauvegarde et la mise en valeur.

Il n’y a pas de sources spécifiques de compétences spécialisées et de formation en techniques de conservation et de gestion.

Le rapport constate quant à la gestion des visiteurs certains points faibles concernant le manque de sensibilisation. Les statistiques disponibles concernant les visiteurs sont basées sur les billets d’entrée vendus aux Casemates du Bock, le circuit Wenzel étant

                                                                                                               

296 Le « Rapport du Groupe d’experts chargé de réfléchir sur l’évolution future des relations entre les

pouvoirs publics et les communautés religieuses ou philosophiques au Grand-Duché de Luxembourg » (commandé par le Département des Cultes du Ministère d’État, Gouvernement du Grand-Duché de Luxembourg, octobre 2012) souligne une ambiguïté qui se retrouve dans l’arrêté royal grand-ducal du 23 juin 1873 et qui précise que l’église Notre-Dame est érigée en cathédrale, mais conserve juridiquement le statut d’église paroissiale. Selon les rapporteurs, il semble que le gouvernement de l’époque n’ait pas voulu décharger la Ville de Luxembourg de la charge de l’entretien de l’église, qui serait passé logiquement à l’État, si une fabrique cathédrale avait été créée.

gratuit. Il existe un centre d’information des visiteurs, mais aucun plan de gestion global des visiteurs.

Quant à l’information et la sensibilisation aux niveaux local, régional, national ou international, la promotion du site du patrimoine mondial est entreprise aux niveaux international et national à travers des publications, films, cartes postales, campagnes médiatiques, internet, etc. Selon le rapport, le public reçoit une présentation et une prise de conscience adéquates. Il y aurait également une participation au réseau des écoles associées de l’UNESCO. Il convient de souligner qu’eu égard à l’éducation, information et renforcement de la sensibilisation le nombre d’écriteaux indiquant que le bien est un site du patrimoine mondial est adéquat, que l’emblème de la Convention du patrimoine mondial est utilisé sur les publications, qu’il existe une bonne sensibilisation au patrimoine mondial parmi les visiteurs, collectivités locales et autorités locales ainsi que des projets pour développer des programmes éducatifs. Quant aux études scientifiques, une stratégie de recherche a été mise en place.

L’état de conservation du bien est affecté par certains facteurs et interventions. L’état de conservation actuel est « adéquat » et la restauration des fortifications dans la zone tampon est entreprise. Cependant le rapport insiste déjà sur les menaces et risques pour le site du fait de l’homme, plus spécialement de la pression due au développement. Il rappelle en outre qu’il n’y a aucun programme officiel de suivi. Un des principaux avantages du statut de patrimoine mondial a été la conservation. Les points forts sont la mise en valeur supplémentaire du patrimoine par des circuits et des visites guidées. Cependant aucune action future n’a été précisée.

Les avantages de l’inscription sont la conservation, la mise en valeur, et surtout la promotion du tourisme et l’augmentation des ressources financières.

Les forces qui se dégagent en effet de l’inscription sur la Liste du patrimoine mondial sont à tout le moins un effort de conservation du site du patrimoine mondial, une prise de conscience du public accrue, un financement adéquat du patrimoine, tandis que les faiblesses se révèlent être une nécessité d’assistance dans la mise en œuvre de la Convention du patrimoine mondial, ainsi qu’une amélioration de l’information concernant le Patrimoine mondial et une coopération internationale insuffisamment organisée. Cependant, de l’aveu même du rapport, aucune action n’est envisagée pour pallier ces faiblesses.

c) Appel à l’UNESCO

Selon le rapport, la conservation du patrimoine est institutionnellement intégrée et les communautés locales et les ONG sont impliquées. Il convient de constater qu’une ONG dégage certaines réflexions qui méritent toute l’attention.

ICOMOS297 Luxembourg note ainsi que la reconnaissance “patrimoine mondial de l’UNESCO” ne joue aucun rôle majeur dans la « conscience de sa propre valeur » que peut avoir la ville : « La ville se voit plus comme un centre moderne “multi-culti” et ne montre aucun intérêt particulier pour son patrimoine historique et culturel. »

Un contrôle continu, a fortiori régulier, n’est présent que de manière formelle.

                                                                                                               

297 En l’occurrence le Comité national luxembourgeois de l’International Council on Monuments and Sites

Lorsque des mesures de grande amplitude en vue de constructions sont mises en œuvre, la municipalité et l’État se tournent le plus souvent vers l’UNESCO, qui alors envoie des experts étrangers du Conseil international des monuments et des sites.

Voici les cas où il a été fait appel à l’UNESCO.

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