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DOCUMENTS D ’ URBANISME

2. Le SDEC et la protection du patrimoine culturel

Il convient d’insister sur la place accordée au patrimoine culturel dans le SDEC224.

                                                                                                               

222 Patrick SANAVIA, « Profondément choqué. Droit de réponse », d’Lëtzebuerger Land, 7 juin 2013.

223 Groß/Grande region, Guide des bonnes pratiques. Mise en œuvre de la Charte de Leipzig et de l’Agenda

territorial de l’Union européenne au sein de la Grande Région, réalisé sur demande et dans le cadre de la

présidence luxembourgeoise du 11e sommet (février 2008-juin 2009) par le groupe de travail

« Développement territorial » du Sommet de la Grande Région, présenté lors de la 1re réunion sectorielle

ministérielle « Aménagement du territoire » de la Grande Région, Luxembourg, 21 avril 2009.

224 COMMISSION EUROPÉENNE, COMITÉ DE DÉVELOPPEMENT SPATIAL, SDEC Schéma de Développement de

l’Espace Communautaire. Vers un développement spatial équilibré et durable du territoire de l’Union européenne. Approuvé au Conseil informel des Ministres responsables de l’aménagement du territoire à Potsdam, mai 1999, Luxembourg, Office des publications officielles des Communautés européennes, 1999.

Il déclare en effet que « Les politiques de développement spatial visent à assurer un développement équilibré et durable du territoire de l’Union. Les Ministres estiment qu’il s’agit d’atteindre de pair les trois objectifs fondamentaux de la politique communautaire » dont la conservation et la gestion des bases naturelles de la vie

et du patrimoine culturel.225

Il est encore question que le patrimoine naturel et culturel de l’UE est menacé par certains processus de modernisation économique et sociale. Il affirme que « Les paysages culturels européens, les villes et communes européennes, ainsi que nombre de monuments naturels et architecturaux font partie intégrante du patrimoine historique » et qu’il « échoit à l’architecture, à l’urbanisme et à l’aménagement paysager contemporains la mission importante de contribuer au développement futur de ce dernier dans toutes les régions de l’UE ».

Il indiquait que la nature et le patrimoine culturel sont un atout pour le développement Il constatait que la nature et le patrimoine culturel de l’UE sont menacés en permanence par des interventions d’ordres divers. « Même si des mesures strictes de protection se justifient parfois », le SDEC trouvait plus judicieux d’inclure la protection et la gestion des zones menacées dans des stratégies de développement spatial relatives à des zones plus vastes.

Il déclarait également que « le patrimoine culturel de l’Europe – qui va des paysages culturels en milieu rural aux centres urbains historiques – est l’expression de son identité et revêt une importance universelle »226.

Il tirait le constat que le patrimoine culturel fait également partie intégrante de l’environnement quotidien de beaucoup de personnes et enrichit leur qualité de vie. En outre, des mesures de protection rigoureuses, telles que les prévoit la protection des sites et monuments classés, ne peuvent couvrir qu’une petite partie de ce patrimoine. Il proposait dès lors, pour la majeure partie, une approche créative. Celle-ci pourrait « inverser la tendance à l’abandon, à la dégradation et à la destruction qui prévaut dans nombre de zones, et de pouvoir transmettre ainsi le patrimoine culturel aux générations futures, y compris les réalisations contemporaines. »227

La nature et le patrimoine culturel constituent d’après le SDEC un facteur économique qui gagne en importance pour le développement régional.

Le SDEC insistait sur le fait que « la qualité de la vie dans les villes, leurs alentours et le milieu rural, intervient de plus en plus dans les choix de localisation des entreprises. » Il ajoutait que « les curiosités naturelles et culturelles représentent également un atout essentiel pour le développement du tourisme. »

Le SDEC proposait aussi quelques considérations quant à la gestion créative des paysages culturels (il est fait ici écho in extenso des considérations).

« Par leur spécificité, les paysages culturels contribuent à l’identité locale et régionale et reflètent l’histoire et les interactions entre l’homme et la nature. Ils représentent par

                                                                                                               

225 Avec la cohésion économique et sociale et une compétitivité plus équilibrée du territoire européen.

(Extrait des Conclusions de la Présidence allemande du Conseil Européen à l’issue du Conseil informel des

Ministres responsables de l’aménagement du territoire dans les États membres de l’Union européenne, Potsdam, les 10-11 mai 1999, in COMMISSION EUROPÉENNE, op. cit.)

226 COMMISSION EUROPÉENNE, op. cit., p. 33.

conséquent une valeur considérable, par exemple en tant qu’attractions touristiques. La préservation de ces paysages culturels est très importante, mais elle ne doit pas entraver excessivement, voire rendre impossible l’exploitation économique. Dans certains cas, la protection ciblée de sites exceptionnels s’impose. Dans d’autres cas, il faut préserver ou réhabiliter des paysages entiers. Le type et le mode d’exploitation agricole sont souvent le facteur décisif pour prévenir la destruction des paysages culturels. »

« Dans bon nombre de cas, la réhabilitation ou l’aménagement créatif des paysages sont plus importants que la préservation de la situation actuelle. Actuellement, on assiste souvent à une mise en œuvre non coordonnée de mesures ayant un impact paysager, dont les résultats tiennent au hasard et ne font que refléter la diversité des intérêts en présence. Les nouvelles zones d’activités et les nouveaux quartiers résidentiels sont souvent aménagés sans tenir compte de critères esthétiques ou environnementaux. » « Nombre de régions européennes requièrent par conséquent une politique paysagère individualisée et créative, c’est-à-dire une politique basée sur l’intégration, ouverte aux nouvelles évolutions, et qui contribue à la création ou à la réhabilitation de paysages attrayants. »

Enfin le SDEC faisait part de quelques considérations quant à la gestion créative du patrimoine culturel.

Il constatait que « Bon nombre de villes et de communes européennes comptent de nombreux sites d’une valeur culturelle exceptionnelle, souvent victimes d’une dégradation lente mais constante. Les investissements considérables consacrés à la conservation et à la restauration n’ont pas encore permis d’arrêter cette tendance. Des programmes de protection doivent être lancés afin d’éviter des dommages irréparables. » « Les États signataires de l’Accord de Grenade de 1985 se sont engagés dans la voie d’une solution qui consiste à protéger le patrimoine architectural et à garantir sa conservation, mais à tenir compte en même temps des besoins d’une société moderne. » « Le patrimoine culturel est particulièrement menacé par la pollution, les interventions humaines et les risques naturels. Les connaissances relatives à ces facteurs de risque sont toutefois encore insuffisantes. Ceci nécessite le développement de méthodologies pertinentes, basées sur un modèle complet d’évaluation des risques. »

« Le patrimoine culturel de l’UE n’est pas seulement constitué de monuments et de sites archéologiques isolés, qui possèdent une valeur culturelle et historique certaine. Les différents styles de vie des habitants des villes et des communes européennes sont à considérer dans leur ensemble comme une composante à part entière du patrimoine culturel. Nombre de villes européennes sont exposées aux dangers de la commercialisation et de l’uniformisation culturelle, qui détruisent leur individualité et leur identité. Parmi ces dangers, on compte par exemple la spéculation immobilière, les projets d’infrastructure surdimensionnés par rapport à leur environnement, et les adaptations trop serviles aux exigences du tourisme de masse. Ces facteurs portent souvent gravement atteinte à la structure et à la vie sociale des villes, ainsi qu’à leur potentiel en tant que localisation attractive pour les investissements mobiles. Des stratégies de développement spatial peuvent contribuer à contrer ces risques. »

« Les constructions contemporaines novatrices ne devraient pas être considérées comme des facteurs dérangeants, mais plutôt comme un enrichissement potentiel du

patrimoine. Les meilleures œuvres architecturales apparaissent souvent comme des réussites isolées auxquelles succèdent d’autres projets qui dégradent la qualité de l’environnement urbain. La construction de bâtiments ou d’ensembles répond rarement à une vision contemporaine de l’urbanisme et s’intègre rarement harmonieusement dans les ensembles urbains. Tout comme en milieu rural, les paysages urbains sont souvent aussi le fruit de développements dus au hasard. Des stratégies pour une conception créative de l’image urbaine ne se développent que lentement. Elles sont pourtant urgentes, particulièrement dans les villes où l’abandon a causé une dégradation des bâtiments telle que plus personne ne veut y vivre ou y investir. »

Le SDEC proposait certaines options politiques comme la préservation et le développement créatif des paysages culturels de grande valeur historique, culturelle, esthétique ou écologique, la valorisation des paysages culturels dans le cadre de stratégies intégrées de développement spatial, l’amélioration de la coordination des mesures de développement qui affectent les paysages et enfin la réhabilitation créative des paysages ayant souffert des interventions humaines, y compris des mesures de remise en culture.

Ces options semblent être suivies dans la mesure où l’IVL a prescrit l’élaboration d’un plan directeur sectoriel « paysage ». Cependant, l’évolution du projet ne semble pas des plus prometteuses. Le cadre juridique du plan directeur sectoriel est toujours en cours de finalisation, alors que l’avant-projet du plan directeur sectoriel « Paysage » a été présenté à la Chambre des députés et au grand public en 2008.

Pour ce qui est des options politiques proposées par le SDEC à propos de la gestion créative du patrimoine culturel, il convient de s’interroger sur leur mise en œuvre à court, moyen ou long terme.

Il conseillait :

- le développement de stratégies intégrées pour la protection du patrimoine culturel menacé ou dégradé, y compris le développement d’instruments pour évaluer les facteurs de risque et pour surmonter les situations de crise.

- la préservation et l’aménagement créatif des ensembles urbains qui méritent d’être protégés.

- la promotion d’une architecture contemporaine de grande qualité.

- la sensibilisation au fait que les politiques de développement urbain et spatial d’aujourd’hui contribuent au patrimoine culturel des générations à venir.

Sans s’avancer trop loin, il faut constater que certaines de ces options politiques ont été mises en œuvre au Grand-Duché de Luxembourg.

D’abord concernant l’architecture et sa qualité.

En premier lieu, la loi du 13 décembre 1989 portant organisation des professions d´architecte et d´ingénieur-conseil peut être vue comme l’aboutissement d’une recherche de qualité. Elle déclare l’architecture d’intérêt public et réserve la conception de tous les projets de construction d’urbanisme et d’aménagement du territoire aux seuls hommes de l’art, organisés au sein de l’Ordre des Architectes et des Ingénieurs-Conseils.228 Le règlement grand-ducal du 10 juillet 2011 fixant les règles relatives au déroulement des concours d’aménagement du territoire, d’urbanisme, d’architecture et d’ingénierie

                                                                                                               

228 ORDRE DES ARCHITECTES ET DES INGÉNIEURS-CONSEILS DU GRAND-DUCHÉ DE LUXEMBOURG,FONDATION DE

L’ARCHITECTURE ET DE L’INGÉNIERIE LUXEMBOURG,MINISTÈRE DE LA CULTURE, DE L’ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

ET DE LA RECHERCHE, Pour une politique architecturale, texte proposé par le groupe interministériel et

portent sur des domaines spécialisés, notamment l’architecture de paysage, l’aménagement du territoire, l’urbanisme, l’architecture (bâtiments et ouvrages d’art) ainsi que l’architecture d’intérieur. Cependant, il convient de savoir qu’il s’agit d’un règlement d’exécution de la loi du 25 juin 2009 sur les marchés publics et que la démarche n’est donc pas directement liée à une préoccupation pour la qualité architecturale au Luxembourg.

Ensuite la prise en charge par certains documents d’urbanisme, au niveau local, du patrimoine culturel (PAG) pourrait être pertinente si elle était replacée dans le développement de stratégies intégrées pour la protection du patrimoine culturel menacé ou dégradé.

Pour rappel, le document Pour une politique architecturale229 évoque à juste raison le droit de chaque citoyen à un cadre de vie de qualité. Cet objectif indique qu’ « il faut également développer la prise de conscience du citoyen sur son rôle, actif ou passif, dans la forme donnée à l’environnement bâti ». Plus loin il est insisté sur l’objectif de valorisation du patrimoine architectural : « L’environnement bâti est un des fondements de la culture nationale et locale. Quand il rassemble des bâtiments d’époques différentes qui se complètent mutuellement et se fondent harmonieusement dans l’environnement naturel, il forme un paysage culturel, et un cadre positif pour les évolutions ultérieures dans un processus continu de création. Le programme de politique architecturale doit créer les moyens de rendre visible l’architecture dans sa diversité. La législation sur le patrimoine doit être tout autant appliquée à la préservation du patrimoine ancien qu’à celui de l’architecture moderne et contemporaine des 20e et 21e siècles.

S’en suivaient les résolutions n° 3 d’ « initier un travail d’inventorisation et de recherche sur l’ensemble du patrimoine bâti, y compris les réalisations modernes et contemporaines, afin de mettre sur pied une protection nationale conformément à la loi du 18 juillet 1983 concernant la conservation et la protection des sites et monuments nationaux » et n° 4 d’ « encourager la création contemporaine de qualité, ainsi que son intervention dans le domaine de la restauration du patrimoine historique et industriel ». Le même document parle également du patrimoine architectural et artisanal en ces termes : « Il faut intégrer dans les préoccupations sur le patrimoine tous les bâtiments de qualité, même de construction récente, soit : dès leur construction. Les tâches d’inventaire, de documentation et de transfert du savoir artisanal sont importantes et doivent être harmonisées entre les différentes démarches existantes, dans le cadre de l’enseignement, des organisations professionnelles et des services de protection du patrimoine.

Considérant l’ancrage local et l’implication humaine des métiers du bâtiment, une liaison utile doit être créée entre les savoir-faire anciens et les recherches sur les techniques actuelles du bâtiment. Aussi faudra-t-il réserver une attention particulière à la recherche comme à l’emploi des matériaux autochtones confirmés, ceci tant pour des raisons de préservation de l’identité des terroirs que dans l’intérêt d’une optimisation des rendements énergétiques et bilans écologiques ».230 La résolution corrélative (n° 9) était de soutenir les efforts de documentation et de transmission du savoir artisanal. Considérant que l’architecture d’aujourd’hui est en quelque sorte le patrimoine de demain, il convient d’insister sur la qualité et l’audace de celle-ci ainsi que sur la prise en compte de « l’existant ». Il faut aussi se diriger vers la protection des gestes contemporains architecturaux et vers une redéfinition publique des points de repère et d’intérêt (landmark).

                                                                                                               

229 Pour une politique architecturale, op.cit., p. 13. 230 Pour une politique architecturale, op.cit., p. 24.

3. La Charte de Leipzig et son application dans la Grande-Région231

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