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AUTRES MÉCANISMES DE PROTECTION

2. La limite à la propriété : totale ou partielle

« La propriété selon le droit civil peut être restreinte dans son usage par “la loi ou les règlements”. Ceux-ci veilleront notamment à protéger certains intérêts particuliers – ceux des commerçants, des fermiers, de catégories déterminées de propriétaires ... –. Ils chercheront aussi à préserver l’intérêt général - les règles d’urbanisme s’inspirent, par exemple, de considérations d’ordre économique, social et esthétique et visent à conserver les beautés naturelles du pays ou de la région »263.

Plus que la proclamation générale du respect du droit de propriété en tant que tel, le régime porté par la Constitution luxembourgeoise concerne la procédure d’expropriation, soit la remise en cause totale de la propriété.

Le premier protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l’homme est en ce sens plus complet car il consacre la propriété avant de viser sa privation pour cause d’utilité publique.

La privation de la propriété est considérée par la jurisprudence comme une matière réservée par la Constitution au législateur.

La Cour de cassation a jugé dans un arrêt du 4 juin 1953264 que nul ne peut être privé de sa propriété en vertu de l’article 16 de la Constitution que pour cause d’utilité publique dans les cas et de la manière établis par la loi et moyennant une juste et préalable indemnité. Cependant le principe ne fait pas obstacle à ce qu’un arrêté grand-ducal, sans priver les propriétaires de leur propriété, réglemente l’usage du droit du propriétaire en y apportant certaines restrictions, étant donné que le mode de jouir de la propriété ne constitue pas une matière réservée.

Le droit de propriété immobilière est remis en cause par l’expropriation pour cause d’utilité publique.

                                                                                                               

262 Francis DELPÉRÉE, Le droit constitutionnel de la Belgique, Bruxelles, Bruylant, Paris, LGDJ, 2000, p.

249 et s., in Dean SPIELMANN, op. cit., p. 587.

263 Francis DELPÉRÉE, Le droit constitutionnel de la Belgique, Bruxelles, Bruylant, Paris, LGDJ, 2000, p.

249-250, n°242, in Dean SPIELMANN, op. cit., p. 588.

La loi sur l’expropriation a pour but de « permettre la réalisation de travaux d’utilité publique et l’acquisition des biens appartenant à des tiers, tout en protégeant les droits de ces propriétaires.

Une procédure formaliste a été prévue par le législateur ; elle peut transférer de force la propriété en l’absence d’accord avec les propriétaires.

L’expropriation ne saurait se concevoir que « pour cause d’utilité publique » et « dans les cas et de la manière établis par la loi moyennant une juste et préalable indemnité. » (art. 16)

La déclaration d’utilité publique, déclarée dans les formes légales, soit dans une loi, soit dans un arrêté grand-ducal peut, sous certaines conditions, être soumise au contrôle des juridictions administratives. Tel est le cas pour l’acte réglementaire qui depuis la loi du 7 novembre 1996 peut être censuré par le Tribunal administratif ou la Cour administrative. Il en est de même pour ce qui est du contrôle de la notion de nécessité absolue, condition à toute expropriation alors que celle-ci constitue une atteinte grave au droit de la propriété.

La loi de 1979 contient des règles procédurales précises concernant l’expropriation poursuivie à la demande de l’État, des communes, des établissements publics ou d’utilité publique ou de particuliers.

Sous réserve du contrôle de l’utilité publique et de la nécessité absolue effectué par les juridictions administratives, la procédure se déroule devant le tribunal de l’ordre judiciaire qui dans un jugement interlocutoire fixe l’indemnité provisionnelle et nomme un ou trois experts chargés de dresser l’état descriptif des immeubles et d’évaluer ceux- ci. Il commet un juge pour faire rapport et pour se rendre sur les lieux avec les parties et les experts aux jour, heure et lieu qui sont indiqués au même jugement. Ce jugement qui sera transcrit n’est susceptible d’aucun recours. La somme fixée par le jugement est déposée par l’expropriant à la caisse de consignations.

Le jugement interlocutoire est un jugement déclaratif qui opère le transfert de propriété. L’envoi en possession se fait par une ordonnance du président du tribunal qui statue sur le dossier. Sur base de l’expertise, le tribunal fixe alors l’indemnité définitive qui doit être juste et complète.

L’article 544 du Code civil luxembourgeois dispose que « la propriété est le droit de jouir et de disposer des choses, pourvu qu’on n’en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements ou qu’on ne cause un trouble excédant les inconvénients normaux de voisinage rompant l’équilibre entre les droits équivalents ».

Un grand nombre de lois emportent des limitations ou des restrictions au droit de propriété. C’est le cas des restrictions commandées par l’intérêt de la propriété voisine, parmi lesquelles les servitudes, qu’elles dérivent de la situation des lieux ou qu’elles soient établies par la loi. C’est le cas également des restrictions au caractère absolu du droit de propriété, établies dans l’intérêt de la collectivité, soit les servitudes d’utilité publique ou limitations du droit de propriété dans l’intérêt public.

Il convient de souligner que l’article 544 du Code civil ne contient pas la moindre restriction. La jurisprudence s’est cantonnée à une application de cette disposition essentiellement en matière immobilière. Cette matière comme la mobilière et toutes les autres voit s’appliquer l’article du Code civil luxembourgeois concernant l’abus de droit

(art. 6-1 C. Civ. luxembourgeois). Robert Krieps265 a résumé de la sorte la controverse que l’introduction dans le Code civil luxembourgeois avait fait naître : « (...) la notion d’abus de droit n’était pas seulement une théorie chère à quelques auteurs mais constituait un indispensable tempérament à un régime juridique fondé sur la reconnaissance des droits subjectifs individuels. »

Si la Constitution luxembourgeoise ne contient pas de proclamation solennelle du principe du droit de propriété, l’article premier du premier protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l’homme propose, lui, une protection plus détaillée. Cet article impose en effet positivement le droit au respect des biens de toute personne physique ou morale.

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