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AUTRES MÉCANISMES DE PROTECTION

B. L’ INTÉRÊT PUBLIC

2. L’évaluation jurisprudentielle de l’intérêt public

En ce qui concerne le Grand-Duché de Luxembourg, la jurisprudence s’est maintes fois penchée tant sur l’intérêt général que sur l’intérêt public.

Un acte administratif, quel qu’il soit, ne peut jamais viser un but autre que celui d’intérêt général278.

Ainsi, à propos de la compétence respective des autorités nationale et communales, il a été jugé concernant le bien-être des animaux et la protection de la vie, que « les autorités

                                                                                                               

275 J. Cl. administratif, Fasc. n° 149, Notion de service public. 276 J. Cl. administratif, Fasc. n° 149, Notion de service public.

277 Le Conseil d’État français a estimé par l’arrêt Léoni que l’activité d’un théâtre municipal correspond à un

intérêt public local parce qu’elle a pour "but d’assurer un service permanent de représentations théâtrales de qualité (...) en faisant prédominer les intérêts artistiques sur les intérêts commerciaux de l’exploitation" (CE, 21 janv. 1944, Léoni : Rec. CE 1944, p. 26). Plus généralement, cette jurisprudence s’applique aux spectacles (T. confl., 19 déc. 1988, Ponce : AJDA 1989, p. 330, obs. Prétot). Il a été par exemple jugé que l’intérêt général pouvait intéresser le tourisme (CE, 18 déc. 1936, Prade : Rec. CE 1936, p. 1124 ; S. 1938, 3,

p. 59, note Alibert) dès l’instant où les activités considérées répondent à un besoin de la population et font

face à une absence ou carence de l’initiative privée.

278 Tribunal administratif (TA), 16 juillet 2008 (24082) ; TA, 13 octobre 2008 (24097, c. 12 février 09,

communales ne peuvent réglementer des objets considérés comme d’intérêt général par le législateur. Donc, dès lors qu’une matière ou un objet est réglementé par le législateur national, il échappe de suite à la compétence des autorités communales qui ne peuvent plus intervenir du fait du législateur national »279.

En cas de tutelle, l’autorité communale exerce ses compétences sous l’approbation du ministre de l’Intérieur. Il appartient à ce dernier, en tant qu’autorité de tutelle, de veiller à ce que les décisions de l’autorité communale ne violent aucune règle de droit et ne heurtent pas l’intérêt général

Il a été jugé que l’administration est tenue, en toute hypothèse et dans toutes ses actions, à agir conformément à l’intérêt général, ou, à tout le moins, de manière à concilier l’intérêt particulier avec l’intérêt général280. Tandis que l’intérêt public ne constitue pas en soi un critère permettant de distinguer les décisions individuelles des autres actes administratifs.

Il a été rappelé à propos de construction en zone verte que « la notion d’intérêt général n’équivaut juridiquement pas à celle plus restrictive d’utilité publique, qui seule habilite la puissance publique à imposer des contraintes de droit public »281.

À propos d’un recours en annulation, il a été jugé que le juge administratif est particulièrement amené à effectuer la balance entre les intérêts publics et privés qui, en règle générale, sont appelés à être servis et observés de façon complémentaire, sauf cas de contradiction irréductible, auquel cas l’intérêt public a vocation à l’emporter sur l’intérêt privé.282

Il a été jugé à propos de la création d’une zone protégée que l’inclusion de terrain dans une zone protégée a pour effet direct de grever ceux-ci de charges et de servitudes, ce qui restreint le droit de propriété sur les parcelles grevées, droit garanti par la Constitution. Il importe dans ces circonstances que les propriétaires concernés soient à même de faire valoir leurs objections relatives à un tel projet, afin de permettre au ministre compétent de concilier en connaissance de cause les intérêts privés des propriétaires intéressés avec l’objectif d’intérêt général poursuivi par la création de la zone protégée.

Il a également été rappelé que l’intérêt général prévalait sur l’intérêt particulier. « À propos de la protection de la nature, les exigences d’intérêt général telles que découlant de l’art. 1er de la loi du 19 janvier 2004, à partir des objectifs y mis en avant tenant notamment à la sauvegarde du caractère, de la diversité et de l’intégrité de l’environnement naturel, à la protection des espaces naturels, à la protection de la faune et la flore, au maintien et à l’amélioration des équilibres et de la diversité biologiques, font en sorte que les considérations d’intérêt particulier sont appelées à céder le pas »283. Il a été jugé284 qu’ « en ce qui concerne des questions de circulation, d’environnement et d’aménagement du territoire, l’État ne dispose pas d’un intérêt propre, qui coïnciderait avec l’intérêt général, étant donné que le seul intérêt susceptible d’être défendu à cet égard par l’État est l’intérêt de la collectivité, à savoir l’intérêt général ».

                                                                                                               

279 Tribunal administratif (TA), 29 septembre 2010. 280 TA, 7 octobre 1997.

281 TA, 12 janvier 2011.

282 CA, 19 février 2009 (24834C) ; TA, 12 janvier 2011 (26756, c. 24-5-11, 27947C). 283 TA, 16 juillet 2008.

La justification d’un refus d’approbation d’une décision soumise à l’autorité de tutelle peut se faire seulement des arguments tirés de la légalité, considérée au regard des dispositions de la législation relative à la protection de la nature et des ressources naturelles concernées, de même que des considérations de conformité à l’intérêt général ainsi circonscrit peuvent entrer en ligne de compte sur base de l’article 2 alinéa final de la loi du 11 août 1982285.

En matière d’urbanisme

En matière d’urbanisme et en vertu du principe de l’autonomie communale inscrit à l’article 107 de la Constitution, la commune bénéficie d’un droit d’appréciation très étendu.

Le ministre de l’Intérieur doit a contrario se limiter en tant qu’autorité de tutelle à veiller à ce que les décisions de l’autorité communale ne violent aucune règle de droit et ne heurtent pas l’intérêt général étant donné que la tutelle n’autorise pas l’autorité supérieure à s’immiscer dans la gestion du service décentralisé et à substituer sa propre décision à celle des agents du service286.

Il a été jugé à propos de l’interprétation de la réglementation d’urbanisme, que le « caractère strict des dispositions du plan d’aménagement général faisant partie des règles de police communale signifie que pour les parties non réglementées le principe de liberté doit prévaloir et que cette liberté, notamment par rapport aux attributs du droit de propriété, dont le droit de construire, ne se trouve restreinte, essentiellement dans un but d’intérêt général, que dans les limites strictes de ce que prévoit la réglementation d’urbanisme afférente »287.

Il n’en reste pas moins que des dispositions d’un plan d’aménagement général communal doivent reposer sur des considérations légales d’ordre urbanistique ayant trait à l’aménagement des agglomérations et d’ordre politique tirées de l’organisation de la vie en commun sur le territoire donné, tendant les unes et les autres à une finalité d’intérêt général288.

Pouvoirs de l’autorité communale – développement concentrique d’une agglomération – L’accent mis sur un développement concentrique d’une agglomération par exclusion, dans la mesure du possible, de toute excroissance d’ordre tentaculaire ou désordonnée répond à des considérations légales d’ordre urbanistique ayant trait à l’aménagement des agglomérations de nature à confluer de manière utile avec l’organisation de la vie en commun sur le territoire donné et est de nature à tendre à une finalité d’intérêt général289.

Il n’en demeure toutefois pas moins que les pouvoirs publics, d’une part, et les particuliers, d’autre part, ne se trouvent pas dans des situations similaires, dans la mesure où, d’une part, une différenciation est faite entre les collectivités publiques, agissant nécessairement en vue d’assurer l’intérêt général, et les particuliers, agissant généralement de manière à satisfaire leurs besoins privés et, d’autre part, les seuls

                                                                                                               

285 TA, 31 mai 2000 (11328).

286 TA, 9 juillet 07 (22242) ; TA, 3 novembre 2011 (22229a). 287 CA, 26 novembre 2009 (25790C et 25847C).

288 Notamment TA, 27 juin 2007 (22253). 289 TA, 3 novembre 2011 (22229a).

constructions et aménagements susceptibles de tomber sous le champ d’application de la dérogation sont ceux réservés à un usage d’intérêt public290.

Il semble également que le motif tiré de l’absence d’intégration harmonieuse dans le tissu urbain existant puisse mener au refus d’une autorisation de bâtir291. Un pouvoir discrétionnaire des autorités administratives ne s’entend non pas comme un pouvoir absolu, inconditionné ou à tout égard arbitraire mais comme la faculté qu’elles ont de choisir, dans le cadre des lois, la solution qui leur paraît préférable pour la satisfaction des intérêts publics dont elles ont la charge.

C. L’AUTONOMIE COMMUNALE

L’intérêt communal et l’autonomie locale est souvent en question eu égard au patrimoine culturel.

Le Grand-Duché de Luxembourg a approuvé par la loi du 18 mars 1987 la Charte européenne d’autonomie locale (signée à Strasbourg le 15 octobre 1985). Cette charte comprend le concept d’autonomie locale comme « le droit et la capacité effective pour les collectivités locales de régler et de gérer, dans le cadre de la loi, sous leur propre responsabilité et au profit de leurs populations, une part importante des affaires publiques » (article 3, § 1). La même charte prévoit que ce « principe doit être reconnu dans la législation interne et, autant que possible, dans la Constitution ».

Cette dernière consacre le principe d’autonomie communale par l’article 107, 1° en ce qu’il dispose que « les communes forment des collectivités autonomes, à base territoriale, possédant la personnalité juridique et gérant par leurs organes leur patrimoine et leurs intérêts propres. »

La Constitution confère ainsi aux communes l’autonomie communale qui comme le note Marcel Majerus dans son manuel L’État luxembourgeois, est « le droit reconnu aux organes représentatifs de la commune de gérer eux-mêmes les intérêts exclusivement locaux ».

La loi qui définit aujourd’hui l’organisation territoriale est la loi communale du 13 décembre 1988 qui dispose dans son article 1er que le grand-duché est divisé en communes qui forment à leur tour des districts. Le Luxembourg en raison de l’exiguïté de son territoire, ne connaît donc ni province, ni département. La commune est la seule application du principe de la décentralisation territoriale292.

Les communes sont regroupées en trois districts qui sont des divisions administratives à la tête desquelles la loi place un délégué du pouvoir central , en l’occurrence le commissaire de district, agent de contrôle, de transmission et d’information du gouvernement.

La loi autorise cependant les communes, dans certaines hypothèses :

- À créer des établissements publics communaux, dotés de la personnalité juridique et jouissant, en raison de leur caractère spécial, d’une certaine autonomie, sous la surveillance des communes et sous la tutelle administrative du gouvernement.

                                                                                                               

290 TA, 30 juin 2004 (16533).

291 Jurisnews, droit administratif, vol. 9, 2012, n° 6.

292 Claude FRIESEISEN, Christiane LOUTSCH-JEMMING, « Luxembourg. L’autonomie communale », in Alain

DELCAMP (dir.), Les collectivités décentralisées de l’Union européenne, notes et études documentaires,

- À s’associer en vue d’une œuvre d’utilité intercommunale, comme par exemple en matière d’évacuation et d’élimination des ordures. Ces associations sont les syndicats de communes.

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