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Aux Etats-Unis, les dispositions du « Sherman Act46 » relatives aux collusions ou aux tentatives de monopolisation ont été renforcées en 1914 avec l‟adoption du « Clayton Act » et du « Federal Trade Commission act ». « Le Clayton Act » a identifié quatre pratiques restrictives ou monopolistiques: la discrimination par les prix, la pratique des contrats exclusifs, l‟acquisition des firmes concurrentes et l‟entente.

Cependant ces pratiques ne deviennent illégales que dans la mesure où elles tendent à restreindre substantiellement le niveau de la concurrence ou à monopoliser une activité.

Le principal apport du « Federal Trade Commission act » a été de créer une commission (la FTC) et de l‟établir en tant qu‟agence administrative ayant un pouvoir quasi judiciaire lui permettant d‟enquêter sur des comportements suspects.

Aussi, les diverses commissions fédérales crées sont chargées de veiller à observer les différents marchés afin de détecter ces manœuvres anticoncurrentielles.

En Europe, ce sont les articles 81 et 8247 du traité de la communauté européenne qui constituent le fondement de la législation anti- trust. Ainsi, l‟article 81 prohibe toute action visant à restreindre le jeu concurrentiel ou pouvant affecter le commerce entre les états membres.

Cette interdiction est cependant fortement tempérée par l‟alinéa 3 du même article 81 qui stipule que : « Toutefois, les dispositions du paragraphe 1 peuvent être déclarées inapplicables:

à tout accord ou catégorie d'accords entre entreprises,

à toute décision ou catégorie de décisions d'associations d'entreprises et

à toute pratique concertée ou catégorie de pratiques concertées qui contribuent à améliorer la production ou la distribution des produits ou à promouvoir le progrès technique ou

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En fait, il s‟agit d‟un texte assez sommaire qui contient 8 articles et qui interdit tout acte pouvant restreindre le commerc e (article 1er « Every contract, combination in the form of trust or otherwise , or conspiracy, in restraint of trade or commerce among the several States, or with foreign nations, is declared to be illegal….”) et tout monopole (article2: “Every person who shall monopolize, or attempt to monopolize, or combine or conspire with any other person or persons, to monopolize any part of the trade or commerce among the several States, or with foreign nations, shall be deemed guilty of a felony…”)

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économique, tout en réservant aux utilisateurs une partie équitable du profit qui en résulte, et sans:

a. imposer aux entreprises intéressées des restrictions qui ne sont pas indispensables pour atteindre ces objectifs,

b. donner à des entreprises la possibilité, pour une partie substantielle des produits en cause, d'éliminer la concurrence. »

L‟article 82 autorise également les autorités à enquêter sur les entreprises qui sont suspectées d‟abus de position dominante au sein de la communauté. Ce même article énumère les pratiques pouvant constituer un abus de position dominante à savoir : « imposer de façon directe ou indirecte des prix

d'achat ou de vente ou d'autres conditions de transaction non équitables, limiter la production, les débouchés ou le développement technique au préjudice des consommateurs, appliquer à l'égard de partenaires commerciaux des conditions inégales à des prestations équivalentes, en leur infligeant de ce fait un désavantage dans la concurrence, subordonner la conclusion de contrats à l'acceptation, par les partenaires, de prestations supplémentaires qui, par leur nature ou selon les usages commerciaux, n'ont pas de lien avec l'objet de ces contrats. »

En France, ce sont les articles 59 et 59 ter de l‟ordonnance48

du 30 juin 1945 qui constituent les textes fondateurs de la protection de la concurrence.

L‟article 59 bis prohibe « les actions concertées sous quelque forme que ce soit ayant pour objet ou

pouvant avoir pour effet d’entraver la libre concurrence et faisant obstacle à l’abaissement des prix de revient ou de vente, ou favorisant une hausse artificielle des prix ». Ce même article prohibe

également « les activités d’une entreprise ou d’un groupe d’entreprises occupant sur le marché

intérieur une position dominante caractérisée par une situation de monopole, ou par une concentration manifeste de la puissance économique, lorsque ces activités ont pour objet ou peuvent avoir pour effet d’entraver le fonctionnement normal du marché ».

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Ordonnance n°45-1483 du 30 juin 1945. Ces articles ont été complétés par l‟article 3 de la loi de finances n°63-628 du 2 juillet 1963 portant maintien de la stabilité économique et financière. L‟article 59 bis a été complété par l‟alinéa sui vant : « sont prohibés dans les mêmes conditions les activités d‟une entreprise ou d‟un groupe d‟entreprises occupant sur le marché intérieur une position dominante caractérisée par une situation de monopole ou par une concentration manifeste de la puissance économique, lorsque ces activités ont pour objet ou peuvent avoir pour effet d‟entraver le fonctionnement normal du marché. Le premier alinéa de l‟article 59 ter du même texte est modifié comme suit : » ne sont pas visés par les dispositions de l‟article 59 bis les actions concertées, conventions ou ententes ainsi que les activités d‟une entreprise ou d‟un groupe d‟entreprises occupant une position dominante ».

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L‟article 59 ter stipule que « ne sont pas visés par les dispositions de l’article 59 bis les actions

concertées, conventions ou ententes, ainsi que les activités d’une entreprise ou d’un groupe d’entreprises occupant une position dominante (… ) ²dans la mesure où leurs auteurs peuvent justifier que ces actions ont pour effet d’améliorer et d’étendre les débouchés de la production ou d’assurer le développement du progrès économique, notamment par l’accroissement de la productivité »

Jusqu‟en 1977, c‟était la commission technique des ententes et des positions dominantes, dont le rôle était purement consultatif, qui était chargée de faire respecter ces textes, lorsqu‟elle était saisie par les pouvoirs publics.

La loi du n°77 806 du 19 juillet 197749 ainsi que le décret du 25 octobre de la même année50 ont modifié la situation. La commission de la concurrence a remplacé la commission des ententes et des positions dominantes. Cette nouvelle commission, dont le rôle demeurait uniquement consultatif, pouvait être saisie par une instance non gouvernementale.

En 198551, la loi 77-806 a été abrogée. La commission de la concurrence a été remplacée par le Conseil de la Concurrence dont le pouvoir a été renforcé. Enfin, un décret52 en 2002 a complété le dispositif juridique en place en précisant les modalités d‟application des textes relatifs aux pratiques anticoncurrentielles.

Récemment, la loi de la modernisation de l‟économie française53

(LME) a transformé le Conseil de la Concurrence en une autorité administrative indépendante [article 95 de la LME] et a renforcé ses prérogatives en la dotant, d‟un pouvoir d‟investigation accru en matière de pratiques anticoncurrentielles, d‟un pouvoir de décision54

ainsi que d‟un pouvoir de sanction55.

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Loi n° 77 806 du 19 juillet 1977, Relative au contrôle de la concentration économique et à la répression des ententes illicites et des abus de position dominante, Journal Officiel de la République Française du 20 juillet 1977 abrogée;

50

Décret du 25 octobre 1977, Journal Officiel de la République Française du 26 octobre 1977.

51 Loi n°85-1408 du 30 décembre 1985 portant amélioration de la concurrence, Journal Officiel de la République Française

du 31 Décembre 1985. L‟article 6 de cette loi modifie l‟article 4 de la loi 77-806

52

Décret n°2002-689 du 30 avril 2002 fixant les conditions d‟application du livre IV du Code de Commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence. Journal Officiel de la République Française du 3 mai 2002.

53

Loi n° 2008-776 du 04 Aout 2008. 54

Pouvoir toutefois tempéré par le pouvoir exécutif qui se réserve le droit de passer outre une décision de l‟autorité de la concurrence, en adoptant une décision motivée par des raisons d‟intérêt général, externes à la concurrence.

55

Ordonnance n° 2008-1161 du 13 Novembre 2008, émanant du ministère de l‟économie, de l‟industrie et de l‟emploi, portant modernisation de la régulation de la concurrence.

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En Tunisie, ce n‟est qu‟en 91 , suite à la libéralisation de l‟économie, qu‟est apparue une législation protégeant le marché et prônant la le principe de la libre concurrence. L‟article 2 de la loi du 29 juillet 1991 stipule que les prix des biens, produits et services sont librement déterminés par le jeu de la concurrence. Auparavant, la fixation des prix par le gouvernement était la règle, la liberté de le faire, l‟exception. Cette restriction de liberté en matière de fixation des prix remontait à 1970, date à laquelle il a été crée une commission nationale des prix ayant des attributions consultatives en matière de politique des prix57.

Les dispositions de la loi de 91 sont ordonnées selon cinq rubriques dont l‟une traite des pratiques anticoncurrentielles. Cette loi modifiée et complétée en 199558 et 199959, est relative à la réglementation des pratiques qui peuvent avoir pour effet d‟empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence.

L‟article 5 de la loi de 91 prohibe les actions concertées, conventions, ententes expresses ou tacites entravant le jeu de la concurrence sur le marché. Dans les mêmes conditions cet article prohibe l‟exploitation abusive par une entreprise ou par un groupe d‟entreprises, d‟une position dominante sur le marché intérieur ou une partie substantielle de celui-ci. L‟abus « peut consister notamment en

conditions de ventes discriminatoires ainsi que dans la rupture de relations commerciales sans motif valable ou au seul motif que le partenaire refuse de se soumettre à des conditions commerciales injustifiées ».

La loi de 95 a opté pour l‟interdiction absolue des contrats de distribution exclusive et sélective. La loi de 99 a atténué cette mesure en ce sens que dans des cas exceptionnels le ministre chargé du commerce après avis du conseil de la concurrence peut autoriser la conclusion de ce type de contrats.

La loi de 99 a introduit pour la première fois la notion de dépendance économique en ce sens qu‟elle a interdit en sus de l‟exploitation abusive d‟une position dominante, l‟exploitation abusive d‟un état de dépendance économique dans lequel se trouve une entreprise cliente ou fournisseur qui ne dispose pas de solutions alternatives, pour la commercialisation, l‟approvisionnement ou la prestation de service.

L‟évolution historique des textes législatifs des différentes zones géographiques de notre analyse, outre qu‟elle permet de préciser le contexte juridique de et donc de protection concurrentielle dans

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Loi n° 64-91 du 29 juillet 1991 relative à la concurrence et aux prix

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Article 9 de la loi n° 26-70 du 19 mai 1970 relative aux régimes des prix et contrôle économique.

58

Loi n° 42-95 du 24 avril 1995.

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lequel la lutte contre la dominance prend part, permet de dégager certains points qui leur sont communs.

Tout d‟abord, les concepts liés aux actes qualifiés d‟anticoncurrentiels sont identiques : monopole, discrimination par les prix, concentration ou tout acte ayant pour effet « de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence », ce qui signifie que la source des textes juridiques est globalement économique fondée sur un principe d‟universalité pouvant transcender les frontières. Ensuite, les différents textes législatifs prévoient tous, une autorité chargée de protéger la concurrence. Enfin, les textes ont évolué dans le temps, ce qui signifie notamment que les interactions entre les différents acteurs en présence ont été conflictuelles, que l‟ancien ordre n‟était plus à même de résoudre ces conflits et qu‟il a été nécessaire d‟adopter de nouvelles règles.

Dans la section suivante, nous nous intéressons à certains conflits ayant opposé des entreprises américaines aux autorités chargées d‟appliquer les lois antitrust. Chacun des cas présentés a été à l‟origine d‟une contribution à la théorie de la régulation de la dominance ou à son application.

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