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Section III. Régulation des télécommunications dans l’optique européenne

III.3. Nécessité de régulation de la concurrence : régulation ex ante

III.3.2. Analyse des marchés et dominance.

Cependant, et étant données l‟hétérogénéité des approches qui ont été retenues par les différents membres de l‟union pour l‟évaluation de la dominance, ce nouveau régime a tenté d‟apporter une certaine harmonisation à toutes les étapes de la procédure de désignation des opérateurs puissants sur un marché. Ainsi ont été clairement définies les méthodes de la définition des marchés pertinents, la méthode d‟analyse de marché et les remèdes en cas de position dominante (imposition d‟obligations ex

ante).

III.3.2.1. Le passage d’une optique ex post à une optique ex ante.

Par rapport à l‟ancien cadre réglementaire, la démarche retenue par le nouveau régime, a changé de sens : d‟une analyse ex post elle est devenue ex ante, ce qui signifie notamment que les ARNs ne doivent pas nécessairement constater un abus de position dominante pour désigner une entreprise comme puissante sur le marché.

Ce changement d‟optique dans l‟application de l‟article 82 du traité implique que l‟on s‟intéresse d‟abord aux causes pouvant générer un dysfonctionnement du marché concurrentiel qu‟à ses conséquences potentielles. Ainsi, dans une analyse ex post, l‟attention des ARNs se porterait sur des attitudes et des comportements d‟entreprises révélateurs d‟une puissance sur le marché. Dans une optique ex ante, cette puissance est déduite à partir des possibilités que les entreprises suspectées ont d‟augmenter leurs prix en restreignant leur production sans enregistrer une baisse significative de leurs ventes ou de leurs chiffres d‟affaires.

La commission européenne103 a décrit précisément ce changement d‟optique : « L‟application ex ante de cette définition nécessite toutefois certaines adaptations méthodologiques quant à la façon dont la puissance sur le marché est appréciée. Plus particulièrement, lorsqu‟elles déterminent ex ante si une ou plusieurs entreprises détiennent une position dominante sur les marchés en cause, les ARNs appuient

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Lignes directrices de la commission sur l‟analyse du marché et l‟évaluation de la puissance sur le marché en application du cadre réglementaire communautaire pour les réseaux et les services de communications électroniques, 2002/C 165/03, JO C 165/15.

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en règle générale leur analyse sur un ensemble d‟hypothèses et d‟anticipations qui n‟est pas le même que celui utilisé par les autorités de la concurrence pour l‟application de l‟article 82 ex post en cas d‟abus présumé. Bien souvent, en raison de l‟absence de données ou de documents sur l‟attitude ou le comportement passés de l‟entreprise, l‟analyse du marché doit principalement se fonder sur une évaluation prospective. ».

II.3.2.2. Les critères d’évaluation d’une puissance significative sur le marché.

Sous le régime de 2002 et dans son évaluation ex ante de l‟existence d‟un opérateur possédant une puissance significative sur le marché, la commission est tenue de prendre en compte deux types de facteurs : l‟existence d‟une concurrence potentielle révélée par la taille des barrières à l‟entrée et le dynamisme de la concurrence existante sur le marché.

 Analyse de la concurrence potentielle : lors d‟une analyse du marché, ce nouveau régime recommande de prendre en compte l‟éventualité d‟entrées potentielles sur le marché. Ainsi et du fait que l‟existence d‟entrants potentiels limiterait la propension d‟une entreprise à se comporter d‟une manière indépendante du marché, la commission préconise aux ARNs de considérer « les entreprises qui sont capables, en réponse à une telle augmentation des prix, de modifier ou d‟étendre leur gamme de produits et/ou de services et d‟entrer sur le marché pertinent comme des concurrents potentiels alors même qu‟elles n‟offrent pas encore le produit ou service pertinent. »104.

Dans le secteur des communications électroniques, ces barrières sont souvent élevées et ce, pour des raisons législatives et réglementaires (nombre de licences octroyées) ou économiques (investissement élevé).

 Etat de la concurrence sur le marché : plusieurs critères sont retenus pour évaluer la puissance d‟une entreprise sur le marché. Dans ce processus d‟évaluation, la part de marché constitue un indicateur important mais insuffisant pour conclure à une puissance significative sur le marché. Il peut néanmoins servir de base pour écarter a priori les entreprises qui n‟ont pas de position dominante105

. Ainsi dans le paragraphe 75 de la même

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JO C 165/15, paragraphe 74.

105

La cour peut se baser dans son analyse sur l‟écart entre les parts de marché. Plus cet écart entre l‟entreprise incriminée et son plus proche concurrent est élevé, plus grande sera la présomption d‟une position dominante. Dans l‟affaire COMP/M.1741-MCI WorldCom/Sprint, la commission a estimé que l‟entité issue de la concentration détiendrait, sur le marché de la fourniture de la connectivité à l‟Internet de niveau supérieur, une part de marché absolue cumulée de plus de

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directive, il est stipulé qu‟ « il est peu probable qu‟une entreprise ne possédant pas une part notable du marché pertinent puisse jouir d‟une position dominante. Il est donc improbable que des entreprises dont la part de marché n‟excède pas 25% détiennent une position dominante (individuelle) sur le marché pertinent ».

Lorsqu‟elle est élevée (plus de 40%), la part de marché indique avec de très fortes probabilités, l‟existence d‟un pouvoir de marché. Lorsque le seuil de 50 % du marché est atteint, la commission conclut, sauf circonstances exceptionnelles, à l‟existence d‟une position dominante.

A l‟intérieur de ces limites, (25-40%), aucune conclusion n‟est directement possible sans examen de critères complémentaires.

Concernant les critères utilisés pour mesurer les parts de marché, la commission en nomme deux (recettes et quantités vendues) mais laisse la latitude aux ARNs, de juger, en fonction des caractéristiques des marchés pertinents retenus, des instruments les plus adéquats.

La part de marché ne constituant qu‟un indice de l‟existence d‟une position dominante, la commission propose une liste106de critères complémentaires qui permettent de mesurer la capacité d‟une entreprise à se comporter, dans une mesure appréciable, de manière indépendante de ses concurrents, de ses clients et des consommateurs.

II.3.2.3. Les remèdes proposés.

Dans le cadre de la réglementation de 2002, lorsqu‟une puissance significative est décelée sur le marché, la commission donne aux ARNs, des indications sur les mesures à prendre ex ante qui peuvent être l‟imposition, le maintien, la modification ou la suppression, d‟obligations réglementaires spécifiques.

(35-45%)-autrement dit, plusieurs fois supérieure à celle de son concurrent le plus proche, ce qui lui permettrait d‟agir indépendamment du marché.

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JO C 165/16 du 11 juillet 2002, paragraphe 78. « La taille globale de l‟entreprise, le contrôle d‟une infrastructure qu‟il n‟est pas facile de dupliquer, les avancées ou la supériorité technologiques, l‟absence ou la faible présence de contre-pouvoir des acheteurs, l‟accès facile ou privilégié aux marchés des capitaux et aux ressources financières, la diversification des produits et/ou des services (par exemple, produits ou services groupés, les économies d‟échelle, les économies de gamme, l‟intégration verticale, l‟existence d‟un réseau de distribution et de vente très développé, l‟absence de concurrence potentielle, l‟existence d‟entraves à l‟expansion.

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Afin d‟assurer une certaine harmonisation à cette étape du processus, le groupe des régulateurs européens, en accord avec la commission ont adopté une position commune sur une approche pour déterminer les remèdes appropriés conformément au nouveau cadre de régulation107.

Ces travaux ont établi une typologie de 27 problèmes concurrentiels potentiels basés sur quatre

scenarii de marché :

 « Verticalisation »de la dominance : ce cas est relatif au fait qu‟une entreprise, déjà puissante sur un marché, cherche à étendre sa dominance d‟un marché de gros à un autre marché de gros ou de détail lié verticalement.

 Extension horizontale de la dominance : cette catégorie décrit le cas où une entreprise possédant une puissance significative sur le marché cherche à étendre son pouvoir de marché à d‟autres marchés non verticalement liés.

 Dominance d‟un marché unique : les problèmes rencontrés dans ce cadre sont ceux relatifs aux barrières à l‟entrée, aux pratiques abusives des prix, et aux inefficacités de production

 Terminaison : les problèmes abordés dans cette catégorie sont relatifs aux liens entre la tarification sur les marchés de terminaison d‟appel et les marchés de détail liés, qui peuvent être concurrentiels.

Une fois le problème concurrentiel identifié, les ARNs sont tenues de suivre certains principes dans la détermination du remède approprié. Tout d‟abord, la décision devrait être prise en prenant en considération toutes les alternatives possibles et en retenant l‟option la moins contraignante. Ensuite, lorsque la concurrence sur les infrastructures n‟est pas possible, un accès suffisant aux ressources de gros doit pouvoir être assuré. En troisième lieu, lorsque la duplication de l‟infrastructure est possible, les remèdes doivent aider à la transition vers cette situation, par exemple à travers des incitations aux investissements. Le dernier principe est relatif au fait que le remède devrait être plutôt de nature à inciter l‟opérateur puissant à se conformer à la mesure plutôt qu‟à essayer de la contourner.

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