• Aucun résultat trouvé

I. D’UNE ACTUALISATION RESONANTE DE LA MUSEALITE

3. LA PRESENTATION DES ELEMENTS DE LA REALITE

3.1 LE MUSEE

3.1.2 Les facteurs d’ambiance

Ce second diagnostic n’est qu’en peu de points semblable à celui précédemment évoqué quant à la perspective de relation résonante passant par l’intermédiaire des musealia. Sa finalité vise la désignation des saillances odorantes présentes dans un espace, ainsi que l’estimation des paramètres influençant leur variation, et ce faisant, la compréhension de l’identité sensorielle

400 Se reporter à l’annexe n°3, MAIRESSE François, « Pour une introduction aux dispositifs olfactifs au musée »,

Les dispositifs olfactifs au musée, Contrepoint, Paris, 2018, p. 26.

401 DROBNICK Jim, « The Museum as Smellscape », The multisensory museum: cross-disciplinary perspectives

des lieux où doit plus avant pouvoir se déployer l’espace spécifique des éléments authentiques. Procédant principalement par localisation des sources odorantes et inventaire des facteurs d’ambiance, une analyse sensorielle standard réalisée in situ par un nez humain, couplée au repérage des bouches de ventilation et d’extraction d’air, ainsi qu’à la régulière prise de température en divers endroits de l’espace, devrait a priori suffire à performer ce diagnostic402. Sa méthode avoisinant par ailleurs celle de l’olfactométrie403, il ne requerrait nullement de recourir à l’expertise d’un parfumeur. Sollicitant des jurys de population, l’olfactométrie fut mise au point par Köster dans les années 1970 quant à l’avancé des recherches relatives à la pollution odorante404, et fit simultanément l’objet d’applications diverses405 et adaptations transverses406. Afin d’étudier la qualité de l’air d’une zone géographique définie, sa méthode

402 BALEZ Suzel, Ambiances olfactives dans l’espace construit : perception des usagers et dispositifs techniques et architecturaux pour la maîtrise des ambiances olfactives dans des espaces de type tertiaire, Op cit. p. 244. 403 GOURONNEC Anne-Marie, « Analyses olfactométriques ou mesure des odeurs par analyse sensorielles »,

Pollution atmosphérique, n°168, 2000, pp. 583-598.

404 KÖSTER Egon Peter, Adaptation and Cross-adaptation in olfaction, thèse, Pays-Bas, 1971.

405 MAINET-DELAIR Nicole, « Fragrances, fumets et pestilences. État des lieux en pays brestois » Géographie

des odeurs, Harmattan, Paris, 1998, p. 227. « Il reste l’usine de trituration du soja (Soja-France du Groupe Cargill) et c’est aussi la principale source d’odeurs sur la ville. Le soja, provenant essentiellement des États-Unis, d’Argentine et du Brésil, est déchargé et transféré directement du bateau dans les silos. Lors de cette opération, des graines s’échappent, constituant la « freinte » (termine de la marine marchande désignant les pertes au moment d’un déchargement de marchandise.) Les graines perdues et dispersées autour de l’usine s’imprègnent d’humidité, fermentent et dégagent une odeur caractéristique plus ou moins tenace. Quand souffle le surcroit, « Ça sent le soja ! ». »

MORINIAUX Vincent, « Les odeurs de levure dans la ville de Maisons-Alfort » Géographie des odeurs, Op cit. p. 162. « C’est chose courant à Maisons-Alfort que d’entendre dire : « Ça sent la levure, il va pleuvoir. » Les

Maisonnais ont en effet depuis bien longtemps établi le lien entre la situation météorologique et la fréquence des odeurs qui émanent de l’usine Springer. »

GRESILLON Lucile, « Le Paris qui sent. Les odeurs du quartier de la Huchette » Géographie des odeurs, Harmattan, Paris, 1999, p. 196. « Dans cette ambiance d’odeur culinaire omniprésente, la fréquentation du piéton

se métamorphose, de flânerie elle devient passage. »

ELLENA Céline, « Le métro parisien » NEZ, La revue olfactive, Contrepoint, n° 2, Paris, 2016, p. 50. « Je suis

une étrange personne. En ce vendredi 27 Mai 2015, à 14h17, depuis la place de la République, je descends dans les couloirs de la RATP pour un voyage sous la capitale. Pendant trois heures, j’inspire, je gobe, je grimace parfois. A chaque soubresaut odorant, je note dans un carnet tout ce qui me passe par le bulbe. Je suis une voyeuriste des odeurs. Je suis parfumeur. »

406 Application du Langage des nez (référentiel odorant conçu en 1983 par Jean-Noël Jaubert) pour la caractérisation olfactive des échantillons de la matériauthèque de l’École Nationale Supérieure des Arts Décoratifs

consiste à mobiliser des personnes bénévoles et riveraines du site étudié, afin qu’à dates et heures spécifiques, elles sortent de chez elles, appréhendent l’air environnant, puis l’évaluent au recours d’une carte-réponse. Favorisant la compréhension sensorielle des espaces, le principal intérêt de cette technique consiste en ce que son acheminement permet l’aboutissement d’une cartographie olfactive de la zone étudiée407.

Dulau écrit quant à ce mode de restitution que « rendre compte des espaces odorants au moyen

d’une cartographie subtile […] pourrait constituer, après analyse et théorisation des données sensorielles, un outil de référence pour toute entreprise de terrain »408. Évoquée en 1991409, établie en 1998410, et servant actuellement le déploiement de pratiques afférentes à l’art, l’architecture, l’anthropologie ou encore le design, la cartographie des odeurs connait un essor sans précédent depuis le début des années 2000411. De fait, permettant de rendre simultanément compte de l’implantation des systèmes d’ambiance et de la localisation des saillances odorantes d’un espace, l’établissement d’une cartographie olfactive, succédant la performance d’un diagnostic par analyse sensorielle, repérage du traitement de l’air et relevés de température des lieux d’exposition pressentis pour l’appréhension de l’espace spécifique des muséalia, permettrait d’en avérer ou démentir l’éligibilité, ainsi que d’envisager plus avant les moyens d’y exposer l’odeur des éléments authentiques.

depuis 2012, « Les nez de l’ENSAD », La gazette des nez, 9/06/16, http://www.atmonormandie.fr et https://www.ensad.fr/fiches-documentaires.

407 STASZAK Jean-François, « Pistes pour une géographie des odeurs », Géographie des odeurs, Op cit. p. 55. 408 DULAU Robert, « Deux lieux, deux approches du champ odorant : Pondichéry – Paris », Sentir. Pour une

anthropologie des odeurs, Harmattan, Paris, 2004, p. 130.

409 ONFRAY Michel, L’art de jouir : Pour un matérialisme hédoniste, Grasset, Paris, 1991. 410 DULAU Robert, PITTE Jean-Robert, Géographie des odeurs, Harmattan, Paris, 1998,

411 TOLAAS Sissel, SIRAP mon amour, exposée à la Fondation Cartier pour l’art contemporain, Paris, 2003. BARBARA Anna, PERLISS Anthony, Invisible architecture: Experiencing places through the sense of smell, Skira, Suisse, 2006.

DIACONU Madalina, Senses and the City: An Interdisciplinary approach to urban sensescapes, Lit Verlag, Münster, 2011.

HENSHAW Victoria, Urban smellscapes: Understanding and designing city smell environments, Routledge, Abingdon, 2013.

MCLEAN Kate, “Smell map narratives of place, Paris”, New American notes online, n°6, 2014, et https://sensorymaps.com.

HENSHAW Victoria, Designing with smell: Practices, Techniques and Challenges, Routledge, Abingdon, 2017. GELARD Marie-Luce, « L’anthropologie sensorielle en France, un champ en devenir ? », L’Homme, n°217, 2016, Paris, p. 100.