M ODES D ’ INTERVENTION ORTHOPHONIQUE DANS LE CAS DES
2.3 T RAITEMENT DES TROUBLES LEXICAU
2.3.2 E FFETS DU TRAITEMENT PHONOLOGIQUE ET / OU SEMANTIQUE SUR L ’ ACQUISITION DE NOUVEAUX MOTS
Les enfants dysphasiques ont des difficultés à acquérir de nouveaux mots (cf. Chapitre II, paragraphe 4.4). Ces difficultés d’acquisition relèvent principalement des difficultés phonologiques (Gathercole & Baddeley, 1990, Gray, 2004, M. Nash & Donaldson, 2005) et sémantiques (Alt et al., 2004, Gray, 2004, M. Nash & Donaldson, 2005). En effet, plus les enfants ont des difficultés à répéter des pseudo-mots (critère phonologique), plus ils ont besoin de temps pour acquérir de nouveaux mots. Et, par ailleurs, plus les performances en vocabulaire sur le versant réceptif sont faibles (mesure sémantique), plus celles en appariement rapide (fast mapping) le sont également comme celles pour acquérir de nouveaux mots (Gray, 2004). Ces faits ont amené les chercheurs à considérer des stratégies d’intervention au niveau phonologique et/ou sémantique pour l’apprentissage des mots. Ainsi, on peut se demander si une intervention se focalisant sur la phonologie et/ou sur le sémantisme des mots peut alors améliorer l’acquisition de nouveaux mots.
Par exemple, Bragard & Maillard (2005) ont montré qu’un traitement basé sur la précision et l’organisation sémantique favorisait le développement lexical chez une fille âgée de 9 ans (présentant un retard en langage oral et des difficultés en mémoire verbale). Un traitement sémantique a été proposé pendant 6 mois et sur 23 séances de 45 minutes à cette enfant se focalisant sur les catégories sémantiques (fruits/légumes, animaux, vêtement, transport, jeux/jouets) dans le but d’affiner les représentations sémantiques. Ces catégories ont été travaillées dans diverses activités (catégorisation, point commun/différence, proposition d’indices, intrus, devinettes par questions ou par définitions, communication référentielle).
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L’efficacité du traitement a été évaluée à partir de « lignes de base » en pré-test et post-test (à partir d’une liste d’items travaillés et une liste d’items non travaillés). L’enfant a progressé au niveau lexical tant sur le versant réceptif que productif en atteignant un niveau dans la moyenne des enfants de son âge (alors que les scores en pré-test étaient déficitaires). Toutefois, cette étude n’étant pas contrôlée par un groupe ‘sans traitement sémantique’, il est difficile de savoir si cette évolution n’est pas liée à d’autres facteurs, tels que la scolarisation, le développement de l’enfant (+6mois), un effet placebo (par le simple fait d’être pris en charge), un effet du test/retest (les tests étant répétés deux fois avant et après le traitement). Or, les mesures prises en compte dans les lignes de base ont permis de montrer qu’il y avait un effet significatif seulement pour les items travaillés en séance de rééducation et non pour ceux non travaillés. Ce dernier résultat montre alors l’importance de contrôler les effets par des « lignes de base ». Par ailleurs, on peut s’interroger sur les limites d’une telle approche car si des effets sont observés seulement sur les items travaillés lors des séances, il est difficile d’envisager de travailler sur l’ensemble des items de la langue.
M. Nash & Donaldson (2005) mettent également en évidence l’importance d’affiner les représentations sémantiques des mots pour les enfants dysphasiques âgés entre 5;5 et 9 ans. En effet, ces derniers tirent davantage profit d’une situation où on leur offre le mot nouveau accompagné d’une description de l’item par la catégorie sémantique et l’attribut que d’une situation naturelle où on les expose aux mots dont le sens doit être déduit du contexte narratif dans lequel ils apparaissent. Les enfants sont davantage capables de donner une définition des mots dans la première situation que dans la seconde. Toutefois, les performances en dénomination des enfants sont identiques quelle que soit la condition d’apprentissage. Ainsi, le contexte d’apparition des mots nouveaux semble avoir un effet sur certains aspects de son acquisition. Ce contexte doit être optimisé de manière à organiser des représentations sémantiques et phonologiques.
Parmi les méthodes proposant un traitement phonologique, certaines se sont intéressées aux phonèmes initiaux des termes comme aide à l’accès lexical (cf. Hyde Wright, 1993, C. Easton, Sheach, S. Easton, 1997). Par exemple, Best (2005) a regardé l’efficacité d’une aide informatique qui convertit les graphèmes en phonèmes lorsque l’enfant est incapable de dénommer le mot spontanément. L’étude a été faite sur cinq enfants ayant des troubles de l’évocation lexicale âgés entre 6;;10 et 10;;07 ans. L’intervention est dirigée par un thérapeute
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(une fois par semaine pendant six semaines). L’aide porte seulement sur le premier phonème. Suite à ce traitement, tous les enfants présentent une amélioration significative dans la dénomination des items thérapeutiques, voire, pour certains, des améliorations dans la dénomination des items contrôles. Après l’intervention, deux des cinq enfants présentent une réduction significative des troubles du manque du mot.
D’autres recherches se sont intéressées à la complémentarité d’un traitement phonologique et sémantique. Par exemple, Gray (2005) a mis en place une méthode d’intervention mixte proposant des indices phonologiques et sémantiques aux enfants. L’étude est constituée de 24 enfants TDL âgés entre 4 et 5;11 ans et à 24 enfants tout-venant de même âge chronologique. De nouveaux mots accompagnés soit d’indices phonologiques (en donnant le phonème ou la syllabe initial(e) du terme) soit d’indices sémantiques (en offrant la catégorie, la fonction ou les caractéristiques matérielles) ont été présentés aux enfants. Les indices phonologiques et sémantiques aident les enfants dysphasiques de différentes manières dans le processus d’acquisition de mots nouveaux. En effet, les indices phonologiques facilitent la production alors que les indices sémantiques facilitent la compréhension de nouveaux mots. En revanche, les enfants tout-venant présentent les mêmes performances dans les deux conditions (indices phonologiques ou sémantiques). Contrairement aux indices phonologiques et sémantiques, les indices syntaxiques (soit avec des verbes transitifs ‘The dogs are verb-ing the cats. ’ soit avec des verbes intransitifs ‘The dogs and the cats are verb- ing.’) ne permettent pas aux enfants d’acquérir de nouveaux verbes (Shulman & Guberman, 2007).
3.0 LES APPROCHES CENTREES SUR LE DEVELOPPEMENT DE L’ENFANT DANS UNE