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S'engager envers ses supérieurs

Chapitre 5 : L'engagement dans le milieu coopératif

5.2. Les différentes cibles d'engagement

5.2.3. S'engager envers ses supérieurs

Les employés du modèle coopératif semblent engager envers leurs supérieurs. Cependant, ce n'est pas un engagement comme on pourrait le voir dans une structure traditionnelle. Les répondants ne semblent pas engagés envers ceux-ci parce qu'ils sont en haut de la hiérarchie et qu’ils leur doivent du respect, mais bien parce qu'ils font partie des collègues du travail. S'engager envers ses supérieurs est ainsi une manière d'arriver à ce que le collectif fonctionne bien et aille dans le bon sens.

Chez Zone, Maxime mentionnait la différence qu'il voyait dans sa relation avec ses supérieurs entre les milieux coopératifs où il a travaillé et les entreprises traditionnelles :

J'ai déjà travaillé moi dans des magasins […] qui appartenaient à des particuliers. Puis, l'ambiance était moins bonne je trouve que dans les coops. […] Tu sais, les gens ont peut-être, peut-être un sentiment un peu plus de liberté, ou du moins de, qu'on leur fait confiance vu qu'il y a comme pas de vrai grand patron, tu sais. […] Mes supérieurs, ceux qui étaient justement les gérants de plancher étaient très gentils, puis c'était très agréable de travailler en leur compagnie. (Maxime, Zone)

Frédéric, lui, mentionnait la souplesse de la hiérarchie, qui facilite les rapports : « Si j'ai un problème avec un technicien admettons, je peux descendre en bas et parler directement

avec lui. Le fait que la structure ne sois pas très hiérarchique, ça fait qu'on peut directement aller à la personne qu'on a besoin de voir quand on veut. » (Frédéric, Zone)

À la Barberie, la relation particulière avec les superviseurs fait partie de leurs valeurs comme entreprise : « On embauche des supérieurs immédiats avec euh des qualités de, de travail d'équipe, puis d'écoute, puis de… Puis on a une de nos valeurs, de la Barberie, qui n'est pas nécessairement une valeur des coops, mais qui est euh leadership partagé. » (Myriam, Barberie) Cette manière de faire est remarquée par Laurence : « On se sent beaucoup moins, on sent pas tant de hiérarchie, tu sais. C'est sûr qu'il y a de la hiérarchie au niveau des serveurs parce qu'il y a toujours un premier serveur, un deuxième serveur, un troisième serveur. […] Mais tu sens moins un boss admettons. Il y a un gérant, mais tu te sens beaucoup moins dans une job avec une grosse hiérarchie d'employés, tu sais. » (Laurence, Barberie) Simon partageait aussi cette opinion : « Il n'y a pas, la hiérarchie est euh humaine si on veut. Il y a pas de patron qui, juste parce qu'il est patron, prend des décisions. Si je suis sur le CA, c'est parce qu'on a jugé que c'était bon de m'avoir sur le CA. Pas parce que j'ai juste fait l'application puis que n'importe qui peut y aller. » (Simon, Barberie)

Au MEC, Étienne précisait ceci : « J'ai l'impression que la compagnie fait plus attention à ses employés. Ils tiennent plus à ce que les gens soient contents de travailler. » (Étienne, MEC) Annie, quant à elle, disait qu'« Il y a beaucoup de rétroaction, de sondages sur nous […] sur nos chefs d'équipe, des trucs comme ça. Ils sont peut-être un petit peu plus euh… ils vont peut-être un peu plus chercher le feedback des employés qu'un magasin normal là. » (Annie, MEC) Annie aimait l'expérience qu'elle a eue avec la direction du magasin : « Ils sont vraiment compréhensifs. Si tu es en période d'examen et tu es dans le jus, ils vont pas te donner d'heures. Ils sont vraiment, c'est humain comme place là, tu sais. J'ai pas peur d'aller voir mes boss, j'ai pas peur de leur demander justement. » (Annie, MEC) Charles se sentait lui aussi assez près des superviseurs : « Ils essaient quand même de garder ça assez horizontal. Tu sais, les superviseurs viennent dîner avec nous autres. […] Les superviseurs sont sur le plancher avec nous, ils restent pas souvent dans leurs bureaux. » (Charles, MEC) Chez Pantoute, les répondants remarquaient une différence dans leur relation avec les supérieurs depuis leur changement organisationnel : « Il y a une certaine hiérarchie quand même à l'intérieur du système, mais euh, à l'intérieur de cette hiérarchie-là, que là, toutes

nos voies comptent finalement. Donc, en se votant des représentants […] qui vont gérer ça au mieux puis, bon, qu'on ne soit pas tenu comme dans une autre entreprise par exemple à l'écart des décisions. » (Marc, Pantoute) Guillaume, par exemple, évoquait le changement vers le modèle coopératif en ces termes : « Le principe d'ouverture, d'aller chercher les gens, il y a quelque chose de très sain là-dedans, ne serait-ce que la souplesse de la hiérarchie qui n'est pas aussi stricte, qui n'est pas aussi fermée. Il y a comme une possibilité, je sais pas, de polyvalence, d'évolution là-dedans qui, à mon avis, est plus saine. […] Il y a une haute direction, bien sûr, mais il y a une place un peu plus grande justement, je pense, pour la participation et l'expertise de chacun. » (Guillaume, Pantoute) Il mentionnait que certaines décisions sont moins centralisées, et qu'il sentait avoir a une plus grande place dans le processus décisionnel : « Je me sens justement peut-être un peu plus proche de, du processus décisionnel. D'au moins avoir justement une voix à dire, bon qu'est-ce que je veux que Pantoute soit, où est-ce qu'on veut qu'on s'en aille. » (Guillaume, Pantoute) Les rapports avec la direction générale semblaient aussi appréciés par les répondants : « Il y a justement un aspect hiérarchie qui est là pour les nécessités de l'organisation, mais qui est pas présent dans la relation interpersonnelle. Si j'ai quelque chose qui marche pas, je peux aller m'asseoir avec ma patronne et dire, là, ça n'a pas de bon sens, il faut changer ça. Et je ne me ferai pas dire, oui, mais là, tu es un simple employé puis prends ta place. Non, on va discuter, on va voir, tu sais, qu'est-ce qu'on a comme solution. » (Guillaume, Pantoute) Selon Denis, cette ouverture n'est pas seulement due au modèle coopératif. Cette ouverture vient aussi du fait que les deux directrices sont d'anciennes employées, qui ont travaillé sur le plancher comme libraires avec les employés actuels : « Le fait que les deux filles avaient déjà été des employées, ça aide à la communication aussi. » (Denis, Pantoute) Cette plus grande proximité facilite l'implication des employés dans des projets qu'ils ont pour l'entreprise :

Quand on est passé à la coopérative, bien disons que ça a redonné le souffle à certains de ces projets-là que nous on caressait comme employés, de changer un système d'exploitation, de faire quelques rénovations, quelques réorganisations dans la disposition des trucs. Bien ça a redynamisé ça, parce que tout d'un coup, on n'a plus eu cette barrière-là. Ça a été nous qui prenons la décision et donc, bien à partir de là, c'était donc un peu plus facile, un peu plus évident d'aller de l'avant avec certains trucs. (Guillaume, Pantoute)

Pour Marc, cette proximité avec la direction était très importante : « Je n'aurais pas voulu travailler dans un Renaud-Bray où on ne voit pas les patrons. Je vais prendre une bière avec

mes patrons parce que, justement, on est plus proche là. » (Marc, Pantoute) Denis va même plus loin. Il dit ne pas être en mesure de voir les deux directrices séparées de la coopérative : « Ce qui est différent, c'est la légèreté d'avoir toute une équipe, plutôt qu'un boss. À l'époque du boss, c'était difficile d'avoir une idée, d'aller demander, de pas l'avoir tout de suite. […] On travaillait avant pour satisfaire le boss, là on travaille pour satisfaire toute la gang. » (Denis, Pantoute)