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S'engager envers les buts ou les valeurs de l'organisation

Chapitre 5 : L'engagement dans le milieu coopératif

5.2. Les différentes cibles d'engagement

5.2.5. S'engager envers les buts ou les valeurs de l'organisation

Tous les répondants semblaient accorder de l'importance aux valeurs de leur organisation. Parfois, ils étaient mêmes critiques de leur entreprise parce qu'elle ne travaillait pas assez dans le sens de ses valeurs.

Les répondants de la Barberie montrent bien l’importance qui est accordée aux valeurs de l’entreprise : « Je dirais la transparence puis de donner beaucoup d'information et nos, la communication, la transparence, donner beaucoup d'info à nos membres, c'est vraiment important. […] C'est ce qui fait que les gens se sentent plus concernés, embarquent plus et mettent plus d'énergie puis sont plus motivés. Ici, c'est vraiment ça. Le monde est avide d'information. Tu sais, ils veulent pas qu'un client en sache plus que nous autres. » (Myriam, Barberie) Son intérêt pour l'entreprise, et le modèle, fait qu'elle a choisi de s'impliquer sur le CA. Simon, quant à lui, souhaitait y travailler avant tout en raison des valeurs du commerce : « Honnêtement, il y avait rien à voir avec le modèle coopératif. C'était une belle place avec des belles valeurs que j'aimais. […] C'est une clientèle qui a une tête sur les épaules d'habitude. Qui vient pas là pour foutre le trouble. C'est une clientèle qui vient pour apprécier la bière, jaser. On n’a pas de plancher de danse, on n’a pas de shooter, donc ça limite beaucoup le … » (Simon, Barberie)

Dans les coopératives de consommation, certains répondants critiquaient les buts de l'entreprise, qui ne seraient plus de répondre à un besoin des membres, mais d'accaparer une plus grande part du marché. Cependant, ces coopératives ont quand même une mission qui n'est pas tournée vers le profil, ce qui fait que les répondants se sentaient mieux dans ce modèle. Maxime, par exemple, expliquait qu'il sentait pouvoir être lui-même chez Zone :

J'ai jamais été poussé à vendre plus que ce que moi je voulais. Tu sais, la personne passait et j'y donnais le meilleur service possible, mais j'essayais pas d'y pousser du stock. Et je le disais à mes patrons. Moi, je veux pas faire ça, je veux pas juste essayer d'y vendre le plus de cossins possible, puis ils ont toujours respecté ça, puis je me suis jamais fait reprocher de, de pas vendre à outrance, tu sais. […] Je sentais que j'avais le droit de, tant que je faisais un bon travail, tu sais, je pouvais être comme je voulais finalement dans la coopérative. (Maxime, Zone)

Il se sentait fidèle à ce magasin : « Les ordinateurs que j'ai achetés, je les ai achetés aux coopératives Zone. Puis, je peux même te dire que la journée que mon ordinateur va briser, peu importe je suis où au Québec, je risque de revenir quand même à la coopérative sur Charest parce que, parce que, tu sais, je les connais puis parce que c'est une coopérative. » (Maxime, Zone) Dans le cas de Benoît, il accordait une grande importance aux valeurs de transparence de Zone : « C'est pas tous les organismes […] qui sont aussi transparents que nous autres. C'est-à-dire donner les états financiers, les rendre publics même sur le site Web. Ça démontre une très grande forme d'ouverture puis de transparence envers les membres, tu sais. Il n'y a pas, il ne peut pas y avoir de cachette. On ne veut pas qu'il y ait de cachette. » (Benoît, Zone) Dans son cas, il s'engageait dans l'entreprise (et dans le mouvement coopératif) parce qu'il croit en ses valeurs :

Je crois à certaines valeurs. […] On m'a demandé à plusieurs reprises de travailler pour une entreprise privée ce que j'ai refusé parce qu'il y a, il y a toute la question d'intérêt collectif. […] C'est la finalité. Pourquoi tu le fais? C'est pour le collectif. Parce que tu peux faire de l'argent, tu payes de l'impôt, tu payes un loyer, tu payes des employés, tu payes des taxes, etc. Ça fait que c'est la même chose qu'une autre entreprise. C'est la finalité qui est toute la différence. C'est-à-dire qu'au lieu que ce soit un ou des individus plus limités qui s'enrichissent, bien tu essaies de faire quelque chose de mieux pour la société. (Benoît, Zone)

Il mentionnait d'ailleurs l'évaluation du travail, qui correspond mieux à un bon modèle d'affaires pour lui : « Leur base de dire qu'ils [les gestionnaires d'entreprises privées] sont bons ou qu'ils sont pas bons, de mérite, c'est le nombre d'heures qu'ils font. Moi, c'est plus sur le résultat. […] L'avantage de le voir de cette façon-là, c'est que ça rend les gens très imputables. […] Je pense que tout le monde est intelligent, ils sont de bonne foi, mais souvent, l'imputabilité des gens, ils ont de la misère avec ça. » (Benoît, Zone) Il ne croyait cependant pas que c'est un modèle de gestion propre au milieu coopératif, mais que la coopérative le facilite : « Le modèle coopératif accepte ce modèle de fonctionnement là, que peut-être l'entreprise accepterait pas. Non, tu rentres le plus tôt possible, tu sors le plus

tard possible, s'il le faut, tu travailles le soir et les fins de semaine. » (Benoît, Zone) Il mentionnait que la motivation, dans ce modèle ne peut être monétaire : « Tu n'as pas de rémunération sur le bénéfice, ça fait qu'il faut que tu cherches ta, ta motivation, ta valorisation personnelle ailleurs que dans l'argent. Moi, je la retrouve dans l'humain. » (Benoît, Zone)

Chez MEC, malgré les critiques que les répondants pouvaient avoir sur la gouvernance de la coopérative, ils accordaient tout de même une très grande importance aux valeurs de l’entreprise. C'est d'ailleurs l'une des principales raisons pour laquelle ils ont voulu travailler pour cette entreprise : « J'ai l'impression que comme entreprise, c'est plus tourné vers des valeurs moins euh monétaires Ahah. J'ai moins l'impression qu'on est là pour faire de l'argent, pour vendre à tout prix, mais plus pour conseiller les membres, essayer de faire une différence dans la communauté là. » (Étienne, MEC) Ce sont les valeurs de l'entreprise et l'engagement que MEC prend pour la communauté qui font qu'Étienne aimait cette entreprise : « Ce qui fait que j'aime l'entreprise, c'est pour l'espèce d'esprit d'on veut essayer d'améliorer le monde là, tu sais. Pour l'environnement, la communauté, le bénévolat qu'ils encouragent, essayer d'intéresser le monde à bouger plus, à sortir dehors. » (Étienne, MEC) Pour lui, le fait que l'entreprise rejoigne ses valeurs fait qu'il s'y sentait plus engagé : « Admettons que j'ai besoin de parler du magasin, bien je vais être plus euh convaincu que si, je sais pas comment dire… Je me sens plus fidèle au magasin admettons. Parce que, pour toutes les raisons que j'ai dit là. […] Comme le recyclage, ils sont vraiment, ils font vraiment plus de recyclage, ils donnent un pourcent de profit à des causes environnementales » (Étienne, MEC). Charles, quant à lui, aimait que MEC ne l’oblige pas à vendre à pression aux clients : « Le but en fait de travailler dans une coopérative pour moi c'était justement de permettre aux gens d'avoir un service et non d'avoir une personne qui leur vend un truc tu sais. » (Charles, MEC) Il relatait une de ses expériences de travail passé : « Quand j'étais chez [nom d'une entreprise], c'était rendu tellement agressif la vente à pression que… je trouvais ça complètement ridicule. Ça m'achalait en criss là. C'est vrai là, c'est ben ben le fun quand tu vois ton chèque de paye puis tu as un salaire genre de 20 $ de l'heure là, mais criss que c'est de la marde là. Moi je trouve ça inhumain autant pour l'employé, surtout pour l'employé puis d'ailleurs l'acheteur en fait. » (Charles, MEC) Annie accordait elle aussi une importance à cet aspect de MEC : « Je peux voir que MEC, dans ce qu'elle fait, c'est pas juste vendre du stock de plein air pour faire de l'argent, tu sais. Il y a

beaucoup d'énergie de dépenser pour tous les événements. Les courses, festivague, festivélo, festineige, tout ça. On voit le côté euh implication dans la communauté qui est présent et qui fait la différence. » (Annie, MEC) Elle préférait aussi la manière dont la vente se passe chez MEC : « On se le fait dire aussi en formation. Essaie pas de vendre quelque chose pour vendre quelque chose, tu sais. Ment pas au membre pour lui vendre quelque chose. Dis-lui pas de la schnout si tu sais pas c'est quoi, va poser des questions. Ils sont beaucoup axés sur la sincérité et ça, je trouve que ça fait une différence quand je travaille. » (Annie, MEC) Elle précisait que la mentalité de MEC à propos de ses employés est de « les former le plus possible, puis s'ils ne connaissent pas la réponse, on veut qu'ils aient les ressources pour aller les chercher. Ça fait que je trouve ça le fun de comme pas avoir l'impression de dire n'importe quoi aux membres. De savoir pour vrai de quoi je parle » (Annie, MEC). Ce sont les formations qu'offre MEC qui l'ont vraiment marquée : « Ce qui m'a frappé à la formation au début, c'est, Oh my god! Ils me mettent pas sur le plancher sans que je sache rien! C'est la première job de ma vie qui me donne une formation avant de, tu sais, une job de service à la clientèle, c'est la première fois que je me faisais former autant avant d'être sur le plancher. » (Annie, MEC) Pour Charles, c'est le côté éthique et environnemental de la compagnie qui l’a marqué : « On m'avait jamais parlé que des superviseurs allaient superviser des usines pour voir s'il y avait des enfants qui travaillaient dedans euh systématiquement. […] Je pense que c'est vraiment, ils sont vraiment vraiment rares les… les entreprises qui font autant pour l'environnement, mais surtout pour les milieux humides et la conservation privée. » (Charles, MEC)

À la librairie Pantoute, les valeurs importantes de l'entreprise pour les répondants sont celles relatives aux librairies indépendantes. Les trois répondants ne se voyaient pas travailler dans une librairie à bannière, puisqu'ils y perdraient leur liberté en tant que libraires :

Ce qui moi me frappait et que je trouvais qui était bien central et bien important, c'est la liberté. La liberté de dire moi j'aime ça ce bouquin là, même si on en a une copie, même si on le vend une fois par année, je le montre quand même parce que moi, j'aime ce bouquin-là. Si euh, un client me demande l'opinion sur un bouquin que j'ai moins aimé, bien de dire, ah, bien oui, c'est bon, puis vous allez voir, puis parce qu'il faut vendre je sais pas 100 copies de celui-là absolument parce qu'il faut faire nos chiffres à la fin du mois. Nonon. Si je l'ai pas aimé, bien je vais avoir l'honnêteté, la liberté de dire : écoute, je l'ai pas aimé. De manquer une vente, mais d'établir une relation de confiance qui fait que lui va revenir me voir. (Guillaume, Pantoute)

Guillaume ne voyait d'ailleurs pas les autres librairies indépendantes comme des compétiteurs. Les compétiteurs de Pantoute seraient plutôt les librairies à bannière : « D'avoir cette espèce de passion commune là, bien ça crée vraiment un esprit de corps qui est là. Il y a, oui, une compétition, mais elle est très saine, et elle est vraiment encore justement, basée sur une amitié, je dirais, avec les autres, les autres librairies. » (Guillaume, Pantoute) Il en était de même pour Marc, qui précisait qu'il ne se verrait pas travaillé dans un Archambault ou un Renaud-Bray.