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La location-accession, un produit bien ciblé à favoriser

Dans le document L’état du mal-logement en France (Page 185-188)

Tout l’enjeu est de développer u ne a ide à l’ a c c ession q u i c ib le c eu x q u i en ont b esoin, c’est-à-dire les ménages modestes pour é v it er les ef f et s d’ a u b a ine, a v ec u n ef f et dé c lenc h eu r dans l’acte d’achat, mais sa ns ef f et inf la t ionnist e, tout en proposant u ne sé c u risa t ion su f f isa nt e pou r ne pa s f ra g iliser les a c c é -da nt s. Le tout avec un coût pour les finances publiques raisonnable, eu égard aux besoins criants des millions de ménages mal-logés. En définitive, à l’inverse d’une subvention à l’achat sans ciblage social, il faut mettre l’accent, pour résoudre cette équation à multiples inconnues, sur les mécanismes qui sécurisent les accédants en cas d’accident, soit en proposant une accession progressive et réversible, comme le PSLA, soit en solvabilisant de manière fine les ménages à bas revenus en fonction de leurs fluctuations de revenus, comme le fait l’APL-accession, deux outils sociaux qui évitent la plupart des effets pervers des autres dispositifs d’aide à l’accession. L ’ ob -j ec t if quantitatif n’ est pa s de f a ire de l’ a c c ession à t ou t prix , en encourageant les ménages les plus en difficulté à franchir le pas, au risque de les fragiliser un jour ou l’autre, ma is de sé c u riser c eu x q u i en ont les moy ens et q u i y sont prê t s.

Les ménages modestes, du fait de leurs revenus faibles ou irréguliers, et d’un dé-ficit d’épargne disponible, sont en effet particulièrement exposés à certains aléas, comme les séparations conjugales ou la perte d’emploi. Quand ils surviennent, ces événements peuvent avoir des conséquences particulièrement néfastes pour ceux qui sont engagés dans le remboursement d’un prêt. L’accompagnement des acqué-reurs modestes, aussi bien dans les démarches préalables à la décision d’achat, qu’au niveau des garanties après-vente ou de la gestion des copropriétés, apparaît donc indispensable, en proposa nt des mé c a nismes sou ples et su r la du -ré e. Dès lors, l’intervention publique « gagne à être ciblée sur des catégories plus restreintes : les primo-accédants, des populations déterminées, des localisations précises ou un certain type d’opérations11 ».

11 Bernard Vorms, « Les politiques d’aide à l’accession à la propriété à l’épreuve de la crise », Informations sociales, n° 155, 5/ 2009.

La solution sécurisée qu’offre le PSLA s’avère particulièrement adaptée à ce type de situation. Une analyse que confirme le témoignage de Michael, 33 ans, loca-taire-accédant à Guyancourt, dans les Yvelines12. Ayant grandi dans cette ville plutôt onéreuse proche de Paris, son salaire, bien que dans la moyenne, ne suffit pas pour acheter ne serait-ce qu’un F2, à plus de 200 000 euros. « Et puis je suis tombé sur le premier projet social immobilier de Guyancourt qui permettait aux jeunes couples et aux célibataires de devenir propriétaires. » Calculs financiers, entretiens, évaluations du prêt auprès de sa banque… Michael a préparé sa candi-dature et rencontré le bailleur et le promoteur de l’opération, un immeuble de 30 logements. Trois ans plus tard, il vit dans un logement de 80 m² tout neuf et une place de parking. Le tout pour 611 euros/mois. « Pour moi, c’est une belle réussite.

J ’ai emprunté sur 25 ans ; j’ai pu valider mon acquisition auprès du bailleur au bout de 6 mois de loyer pris en compte dans l’achat. J e suis fier de ce projet-là.

Finalement, par rapport au prix du marché, j’ai économisé près de 60 000 euros.

Et je suis dans un quartier que j’aime et dans la ville que j’ai choisie ».

C ré é en 2 0 0 4, le P S L A pré sent e de mu lt iples a v a nt a g es. La location- accession offre à un ménage un t emps d’ a da pt a t ion a v ec u ne ph a se loc a t iv e de 1 à 5 ans pour changer d’avis ou pour l’apprentissage de la propriété. Cette période permet d’éviter les désillusions de l’accession classique, quand le ménage s’aperçoit trop tard des coûts sous-estimés, de charges, de chauffage, ou de trans-ports liés à un logement, des vices de construction ou tout simplement que le quartier ne lui convient pas vraiment. Une fois la phase locative terminée et l’option d’achat levée, le ménage devient accédant en bonne et due forme. À tout moment au cours des 15 années suivantes, en cas d’accident de la vie, il bénéficie d’une garantie de rachat et de relogement en logement social.

Les organismes Hlm sont les principaux opérateurs de l’accession sociale à la propriété par le biais des PSLA, car il s’agit là d’une de leurs missions tradition-nelles, à travers notamment la branche « coopérative » du mouvement Hlm. Ils sont ainsi parties prenantes dans 80,5 % des PSLA financés entre 2004 et 2014. Par rapport à l’accession classique dans le neuf, les logements produits en PSLA pré-sentent une qualité supérieure. L es b a illeu rs soc ia u x en effet ont t ou t int é rê t à s’ a ssu rer de la q u a lit é de leu rs prog ra mmes, pu isq u ’ ils rev iendront da ns leu r pa t rimoine en c a s de ra c h a t a u mé na g e. Le foncier est également économisé, car maîtrisé par les opérateurs Hlm, même s’il est possible que des promoteurs privés portent ce type d’opérations. En ce qui concerne la gestion des copropriétés ainsi produites, elle est assurée par les bailleurs sociaux qui jouent le rôle de syndic, diminuant ainsi le risque de fragilisation des copropriétés.

12 Fondation Abbé Pierre, Et les autres ?, juillet 2016.

L’accès au PSLA ouvre droit à des avantages fiscaux pour l’opérateur et pour le ménage (TVA basse, droit aux APL et au PTZ+, exonération de taxe foncière…). La redevance versée par le locataire-accédant est plafonnée (autour de 8,25 euros en zone B1 par exemple), incluant un loyer et une fraction acquisitive, assimilable à une épargne et imputable sur le prix. Mais les plafonds de ressources à respecter sont suffisamment bas pour éviter les effets d’aubaine trop importants, puisque ces plafonds sont inférieurs aux plafonds PLS, plus bas que les nouveaux plafonds du PTZ+ par exemple. Le PSLA combine de plus l’ a v a nt a g e de f a v oriser l’ a c -c ession so-c ia le et la -c onst ru -c t ion neu v e, et de libérer des logements sociaux pour les candidats à la location.

Les résultats quantitatifs sont modestes mais non négligeables. 45 000 logements PSLA ont été produits entre 2004 et 2015 et 8 080 logements en 2015, dont 1 312 en zone A et 3 645 en zone B1. Leur nombre a triplé en 2011, passant de 2 000 à plus de 6 000, sous l’effet de réformes ayant assoupli leur utilisation.

Le modèle PSLA affiche tout de même de fortes limites. Leur développement est très inégal selon les régions. La collaboration entre organismes Hlm et collectivi-tés locales apparaît encore trop limitée. Du côté de ces dernières, certains freins peuvent en effet bloquer la mise en œuvre de réelles stratégies d’accession sociale : un manque d’habitude et de pratique de ce type de produit, la crainte de voir sur-gir à moyen terme des copropriétés dégradées, une absence de coordination entre objectifs stratégiques à l’échelle intercommunale (via les Programmes locaux de l’habitat) et gestion du foncier à l’échelle communale, etc.

C’est pourquoi il serait pertinent de systématiser l’inscription des PSLA dans les PLH et PLU, puis réserver du foncier en conséquence et définir des conditions de cession pour éviter la spéculation. Le PLH de Rennes Métropole prévoit ainsi par exemple une production annuelle comprise entre 250 et 300 logements en PSLA incluant une aide « à la surcharge foncière » pour ramener la valeur de la charge foncière à 100 euros/m². Des aides complémentaires pour les accédants peuvent enfin être proposées.

Le PSLA est donc un dispositif utile et efficace, qu’il convient de développer. Mais une piste originale, actuellement en voie d’expérimentation, pourrait également se développer : le b a il ré el solida ire. Le bail réel solidaire est la déclinaison permise par l’outil de dissociation de la propriété intitulé Office foncier solidaire (OFS), adopté dans le cadre de la loi ALUR en 2014. L’OFS permet à la c ollec -t iv i-t é ou à une communauté d’intérêt public de g a rder la proprié t é d’ u n t er-ra in ma is d’ a c c order à u n mé na g e la j ou issa nc e du b â t i, pour une longue durée, à travers ce bail réel solidaire. La municipalité de Lille cherche actuellement à développer cet outil à la place du dispositif PSLA. L’avantage de la dissociation de propriété est de permettre d’offrir des logements à moindre prix à des ménages modestes, tout en gardant la maîtrise publique du foncier. Ce montage fonctionne in fine comme une clause antispéculative maximale et pérenne. Il permet de s’as-surer que les efforts financiers parfois importants consentis ne soient pas accaparés

par le ménage au moment de la revente du logement. Élément de justice sociale, ce bail est une condition de sa généralisation. En effet, il serait financièrement et politiquement difficile d’engager des sommes très importantes pour aider des mé-nages à accéder si la plus-value est ensuite totalement captée par ce ménage, sans justification.

Un diagnostic gratuit avant l’achat : une aide simple et efficace D’autres dispositifs publics, plus simples à mettre en place que le PSLA ou des prêts aidés, sont de nature à aider concrètement les accédants modestes à la propriété. C’est le cas par exemple d’un programme mis en œuvre par la communauté de communes de Ploërmel avec le soutien du département du Morbihan, qui propose aux potentiels accédants dans l’ancien des diagnostics réalisés gratuitement par l’opérateur Soliha afin d’évaluer la faisabilité et le coût des projets de rénovation envisagés.

Beaucoup d’accédants modestes se rabattent en effet sur des biens de mauvaise qualité en espérant les améliorer progressivement, sans toujours bien mesurer la difficulté de la tâche, au risque de dépasser leur budget ou de demeurer durablement en habitat indigne. Le but du diagnostic est dès lors de les aider dans leurs démarches de travaux… ou de les amener à réinterroger leur projet s’il n’est pas réaliste. Un regard d’expert du bâtiment, en préalable à un projet d’achat, coûte peu à la collectivité mais est susceptible de prévenir de graves difficultés.

Protéger les APL accession, un outil adapté et équitable

Dans le document L’état du mal-logement en France (Page 185-188)

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