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Financer un grand plan de rénovation en réduisant les coûts économiques et sociaux de la précarité énergétique

Dans le document L’état du mal-logement en France (Page 150-154)

Où trouver les fonds pour accélérer la transition énergétique du bâtiment ? Dans les économies générées dans l’avenir. D’après une étude réalisée par le cabinet SIA Partners à l’occasion d’une campagne collective contre la précarité énergé-tique, ré nov er les 7 , 4 millions de pa ssoires t h ermiq u es en dix a ns c oû t e-ra it 4, 7 millia rds d’ eu ros pa r a n a u T ré sor pu b lic , soit près de 43 milliards d’eu-ros sur la période6. Une somme conséquente, supérieure à l’enveloppe publique dépensée aujourd’hui pour la rénovation thermique dans son ensemble, qui entraînerait autant d’investissements privés, soit un plan total à 80 milliards d’euros en 9 ans. C es ré nov a t ions a u ra ient des ef f et s ma ssif s su r la soc ié t é . E lles g é né rera ient plu s de 7 5 0 millions d’ eu ros pa r a n d’ é c onomie de soins. Sur 40 ans, la Sécurité sociale économiserait ainsi plus de 9 milliards d’euros.

Cette activité susciterait également 126 000 ETP nets dans le BTP (déduit des emplois détruits dans l’énergie) entre 2017 et 2025, au plus fort du plan, puis 18 000 jusqu’en 2047. Du point de vue de l’emploi, mieux vaut payer pour la réno-vation que de payer de l’énergie. En effet, un million d’euros dans la rénoréno-vation génère 16 ETP, contre seulement 3,5 s’il s’agit d’acheter du gaz… Pour les ménages bénéficiaires, cela représenterait une économie sur la facture énergétique en moyenne de 512 euros par an.

Au final, u n eu ro inv est i ra pport era it plu s de la moit ié en rec et t es f isc a les : 6 2 c ent imes. L e rest e de la dé pense est plu s q u e c ou v ert e pa r les é c onomies ré a lisé es pa r l’ É t a t : 44 c ent imes. Une fois achevé, le plan serait entièrement amorti pour l’État en 23 ans. La facture pétrolière et gazière de la France baisserait de plus de 1 milliard d’euros par an entre 2025 et 2050, tandis que le secteur résidentiel verrait son empreinte carbone baisser de 12,5 %.

Les chiffres indiqués ici sont calculés à partir d’une hypothèse de rénovation de toutes les passoires thermiques en dix ans. Cet objectif est sans doute trop ambitieux dans ce délai, au regard de la mobilisation encore insuffisante autour de ce chantier, mais l’envisager à l’échelle d’une génération semble la moindre des choses, et ne changerait rien aux avantageux ratios coûts-bénéfices calculés ici.

Synthèse des indicateurs du plan de rénovation énergétique7 Ratio Bénéfices nets par euro investi par l’État 1,06 €

dont : Économies nettes réalisées

par euro investi par l’État 0,44 €

dont : Recettes fiscales

par euro investi par l’État 0,62 €

Émissions annuelles de GES évitées 6,12 MteqCO2

Emplois créés 126 000 ETP (2017-2025)

18 000 ETP (long terme) Coûts de santé évités

(attribuables à la précarité énergétique) 758 M€/an Baisse de la facture gazière et pétrolière annuelle 1 034 M€/an Investissement privé par euro investi par l’État 1,02 €

Au-delà des économies réalisées, l’externalité la plus positive est que les ménages puissent se chauffer mieux et vivre plus confortablement. En effet, c’est là le vrai retour sur investissement : les gens vivent mieux dans un logement rénové. D’après l’agence de l’Union européenne Eurofound, corriger les principaux problèmes des 12 % de logements français les plus dégradés8, au-delà de la simple précarité éner-gétique, coûterait 45 milliards et permettrait d’éviter des coûts de santé à hauteur de 20 milliards d’euros par an, qu’il s’agisse de dépenses directes de soin (1 milliard) ou surtout de coûts indirects pour la société (19 milliards)9. Encore faut-il disposer de 44 milliards disponibles aujourd’hui. Mais les taux d’intérêt n’ont jamais été aussi bas. L ’ a lig nement des pla nè t es, q u elq u es mois a prè s le su c c è s de la C O P 2 1 à P a ris, n’ a donc sa ns dou t e j a ma is é t é a u ssi propic e à u n pla n d’ inv est issement de g ra nde env erg u re.

Enfin, outre les économies générées, le plan d’éradication des passoires thermiques aura besoin d’être davantage financé par le produit des taxes sur l’énergie. Le coût de l’énergie est en effet un facteur important de mobilisation de la société pour l’économie d’énergie. C’est pourquoi, la « contribution carbone », ou « taxe carbone », est décisive. D’un montant substantiel et croissant dans le temps de manière assurée, à un rythme supérieur à celui prévu aujourd’hui, elle constituerait également une

7 SIA Partners, Ibid.

8 Ayant au moins trois défauts parmi les items suivants : froid, humidité, moisissures, absence de toilettes intérieures ou de salle de bains, manque d’espace…

9 Eurofound, « Inadequate Housing in Europe : costs and consequences », 2016.

puissante incitation à rénover, en même temps qu’elle pourrait financer ces dépenses de rénovation et d’aide à la fourniture d’énergie pour les ménages modestes.

En attendant : pour un vrai chèque énergie

La rénovation thermique du parc est la meilleure et la plus durable des solutions à la précarité énergétique. Mais elle prend fatalement du temps à être mise en œuvre. En attendant, des ménages en grande difficulté souffrent du froid à leur domicile. C’est à eux que s’adresse le chèque énergie, censé depuis la loi relative à la transition énergétique remplacer les tarifs sociaux de l’énergie, qui ne touchaient qu’une minorité des ménages visés, soit parce que leur mode de chauffage était exclu du tarif social (bois, fioul, GPL…), soit en cas de défaut de croisement entre fichiers. Ce chèque énergie est une idée défendue notamment par la Fondation Abbé Pierre depuis des années, mais sa mise en application suscite des inquiétudes. Pour l’instant, seuls quatre départements bénéficient de son expérimentation alors que la loi a été adoptée il y a près de deux ans, avant une généralisation pro-mise pour 2018. Surtout, le chèque moyen est de 125 euros par an, alors que la facture énergétique pour le logement était en moyenne de 1 700 euros en 2015. C’est pourquoi son augmentation est indispensable, ainsi que son versement automatique via les APL, pour simplifier les canaux de distribu-tion du chèque et éviter le non-recours. L’enjeu est de passer de 2,8 mil-lions de bénéficiaires des tarifs sociaux à 4  mil2,8 mil-lions de bénéficiaires du chèque énergie.

CHAPITRE 9. Dynamiser les quartiers

populaires : améliorer les conditions

d’habitat et donner

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