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De l’espace-matériau à l’espace moment logique : un double statut

L’Encyclopédie livre la complexité de l’espace, et rétrospectivement l’incomplétude de son appréhension comme matière-support, ce-sur-quoi indifférencié purement quantitatif, strate géologique de fait présupposée par la Phénoménologie et la Doctrine de l’Etre. L’espace n’est plus simple illustration de la quantité, il est maintenant thématisé pour lui-même comme premier moment logique de la Philosophie de la nature : c’est pour cela qu’elle commence non par le qualitatif, mais par le quantitatif1. En ce tout premier moment il est bien cette « matière » sans vie en tant qu’il est forme purement abstraite. Son homogénéité et son indifférence universelles-abstraites comme forme font de lui, à ce moment, une « abstraction de la sensibilité » possédant à titre de simple possibilité la division (discontinuité) et l'indivision (ou plutôt la non-division – continuité)2. C’est ici la forme kantienne3 qui est désignée. Abstraction faite des caractères subjectifs, il est pure forme :

« parfaite extériorité et indifférence réciproque, et tout de même unité parfaite. Tel est le concept totalement déterminé, véritable et objectif, de l’espace… On parle d’un espace absolu, ce qui ne signifie rien de plus que l’abstraction de l’espace lui-même en tant que tel »4

.

L’héritage kantien est assumé par cette affirmation implicite que le concept kantien a judicieusement réduit à l’essentiel l’espace « absolu » newtonien5

. Du point de vue de l’entendement, ses caractères, soit implicites, présupposés, soit essentiellement statiquement décrits : ce sont l’infinité, la continuité, l’isotropie, et la bi- ou tri-dimensionnalité selon que l’on se place en géométrie plane ou dans la mécanique classique. Ces propriétés sont de pures

possibilités affectées d’une indétermination et d’une indifférence essentielles6. L’isotropie

présupposée témoigne de cette indifférence ; quant à l’infinité et la continuité, qui sont intimement liées mais ne se recouvrent pas, leur indéfinition chez Euclide se traduit manifestement dans les postulats du premier Livre des Eléments : le postulat deux à lui seul par exemple suffit, demandant de « prolonger indéfiniment, selon sa direction, une droite finie » ou « de prolonger continûment en ligne droite une ligne droite limitée » 7. Posant la possibilité de la prolongation indéfinie (infinité) et d’un seul tenant (continuité) d’un segment de droite dans ses deux directions quelconques (isotropie), il montre que, bien qu’en l’absence

complète d’un concept explicite d’espace8

, ses déterminations géométriques sont déjà celles

1 Hegel 1830 § 254, Remarque p. 245

2 L’Aussersichsein de cette indifférence sans médiation est nommée « espacement » en Salanskis 1991 p. 204. 3 La référence est explicite à Kant en Hegel 1822 p. 9 et 13, ainsi qu’en Hegel 1830 § 254, Remarque, p. 245. Cf.

également Fichant 1997.

4 Hegel 1822 p. 8.

5 De façon générale, le propos hégélien sur la géométrie est souvent une « répétition divergente » de Kant, pour

reprendre l’expression de Salanskis 1997 p. 37.

6 L'espace est « le à-côté-de-l'autre tout idéel parce qu'il est l'être-hors-de-soi, et purement et simplement continu

parce que... tout abstrait », § 254.

7 Eléments, tr. fr. 1817 p. 2, tr. fr. 1994 p. 168 respectivement.

8 L’infini et le continu donnent à penser au philosophe, mais le mathématicien étudie des configurations planes,

sphériques ou solides, de « lieux » géométriques, sans égard pour la « matière » dans laquelle ces lieux trouvent leur visibilité empirique et leur ancrage théorique. Ce n’est qu’à partir du 17ème siècle que l’espace commencera

de l’espace perspectif, cartésien, newtonien, et kantien1

. Mathématiquement parlant, cette continuité n’a aucune détermination autre que celle de densité (essentiellement la divisibilité à l’infini d’un ensemble dénombrable de points2

), et cette infinité, de façon tout à fait complémentaire, correspond par cette indéfinition à l’infini quantitatif du rajout toujours possible d’un point contigu à une suite dense de points déjà donnée. L'espace comme premier moment logique du développement naturel de l’Idée, est donc abstraction pure, être-au-repos, indifférence totale dépourvue de médiation, autrement dit, comme extériorité réciproque et sans relations mutuelles des « ici, ici et ici ». Du point vue de la pure spatialité, il n'y a dans le premier moment aucun moyen de différencier ses éventuels « constituants » purement

possibles.

L’analogie avec la double figure générique de l’entendement

Une comparaison s’impose ici : de façon générale on peut distinguer l’entendement comme figure nécessaire mais partielle, c'est-à-dire moment logique, de la raison spéculative, de l’entendement incarné dans et par les pratiques théoriques des sciences positives historiquement évolutives. De la même façon, l’espace comme moment logique, c'est-à-dire en tant que concept constituant une figure de l’Idée dans la Philosophie de la nature, est riche de virtualités conceptuelles en tant qu’espace : ce qui n’est pas le cas lorsqu’il est considéré implicitement ou descriptivement comme simple support ou matière, ou encore cadre « réceptacle » des mathématiques dans la Doctrine de l’Etre et l’introduction de la

Phénoménologie de l’Esprit. Dans ce dernier cas, Hegel prend l’espace, à peu de choses près,

au sens où les mathématiciens eux-mêmes le prennent, et c’est à ce titre qu’il critique son absence de conceptualité. Logiquement parlant au contraire l’espace recèle des possibilités qualitatives que le point de vue spéculatif à justement à exposer et mettre en valeur.

On notera que c’est ce double statut, de l’entendement comme de l’espace, et malgré la proximité avérée et même l’affirmation de leur recouvrement par Hegel lui-même, qui permet de rendre raison de l’écart entre la sensibilité onto-épistémologique que le méta-discours dialectique hégélien manifeste, et sa sensibilité plus historienne, qui se révèle dans ses passages en revue en partie factuels et simplement chronologiques, sensibilité qu’on a notamment vue à l’œuvre dans la Remarque sur le concept de l'infini mathématique. Et, d’une manière qui ne saurait étonner, Hegel critique certes de façon acerbe du point de vue

conceptuel les concepts, pratiques et méthodes scientifiques historiquement constitués (qu’il

restitue très fidèlement dans l’ensemble : c’est sa sensibilité historienne évoquée ci-dessus) qui « gâchent » d’une certaine façon leurs richesses possibles par absence de réflexion. Mais, en contre-partie, il les valorise dès lors qu’il y a cette réflexion et cette exigence conceptuelle (ainsi la variété des discours hégéliens sur Newton, ainsi qu’on le verra en détail dans la quatrième section de ce chapitre), c'est-à-dire dès lors qu’il y a, par l’entendement scientifique concret, effort de se rapprocher du plan du Concept.

Revenons à l’espace proprement dit : si l’on suit en détail l’enchaînement des déterminations initiales de la Nature, on voit surgir un paradoxe. Première modalité purement abstraite de l'être-hors-de-soi de la Nature, il est pure quantité, mais c’est justement en tant que forme abstraite qu’il est pure quantité. Dans l'Encyclopédie, plus claire sur ce point que la

1 Dans la version officielle (strictement discutable, on y reviendra à un autre moment) de la conception kantienne

comme se contentant d’élever au transcendantal l’espace de la physique mathématique classique.

2

Rappelons seulement que c’est semble-t-il par l’idée de contact qu’a été obtenu un premier concept du continu, résidant dans la nature de l’extrémité, unique, d’un segment. Ce qui témoignerait de la présence de l’intuition du recollement physique de deux droites (l’instant chez Aristote, de même, identique quant à son substrat mais différent quand à sa fonction, est compréhensible à partir de la contradiction du point comme être-pour-soi). L’idée initiale, et toujours centrale, c’est que le continu naît du contact et de la consécution entre des éléments primitifs, dont importe finalement la seule contiguïté. Le continu, ainsi, est caractérisé par la divisibilité à l’infini : cette densité (i.e. entre deux points on peut toujours en intercaler un) est plus faible que la continuité des réels, ce qui montre que l’espace de la géométrie euclidienne est aussi bien ¤2 que ¡ , ou 2 ¤3 que ¡ (même si 3

rétrospectivement c’est 2

¡ qui est nécessité par certaines constructions géométriques, ou 3

¡ qui est exigé pour la mathématisation des processus continus en mécanique, ce dont s’occupe justement le calcul infinitésimal).

Manuscrit de Berlin, le § 99 ouvrant la section sur la Quantité précise que « L'expression grandeur, dans la mesure où elle désigne de préférence la quantité déterminée, ne convient pas à la quantité [en général]... La mathématique a coutume de définir la grandeur comme ce qui peut être augmenté ou diminué »1. Autrement dit comme pure quantité l’espace exige que le concept de nombre soit engendré (comme déterminité du quantum) : ce qui n'advient pourtant qu’au § 102, de l'unité contradictoire entre continuité et discrétion, laquelle n'arrive conceptuellement qu'après la quantité en général (§ 100-101). Or dès la fin du § 99 l'espace est évoqué en relation avec la quantité en général, absolument indifférente (à toute limitation) :

« Par ailleurs, l'espace pur, le temps pur, etc., peuvent être pris comme des exemples de quantité, dans la mesure où le réel est conçu comme emplissement indifférent d'espace ou de temps. »

Au paragraphe 101 qui suit, après l'introduction du couple continuité/discrétion, on lit de nouveau :

« L'antinomie de l'espace, du temps et de la matière... n'est rien d'autre que l'affirmation de la quantité tantôt comme continue, tantôt comme discrète. Lorsqu'on pose espace, temps, etc., avec la seule détermination de la quantité continue, ils sont divisibles à l'infini ; mais si on les pose avec la détermination de la grandeur concrète, ils sont auprès d'eux-mêmes divisés et consistent en uns indivisibles ; le premier point de vue n'est pas moins unilatéral que le second. »

On aurait pu penser que la quantification, et le besoin du nombre, succèderait au qualitatif, selon l’ordre de la Science de la logique : cela indique que le trait essentiel à retenir ici, c’est le caractère formel de pur possible non différencié de l’espace comme premier moment logique, et d’autre part, le double sens de la « quantité ». La quantité de l’espace du logique est encore ici détermination logique (bien que, puisque l’on est dans l’être-hors-de-soi, elle s’actualise dans l’extériorité immédiate2

) et non ce par quoi il va y avoir, par le truchement de son unité avec la qualité, possibilité de la mesure à la fois dans sa dimension opératoire des sciences positives et comme fondée dans sa nécessité, ce qui n’apparaîtra qu’avec les déterminations de la mécanique.

Résumons ce qui importe concernant le statut de la quantité et de l’espace. En premier lieu, l’espace est quantité : la quantité est une détermination générique qu’il spécifie, présentement, de deux façons. Autant le régime de la quantité est déficient conceptuellement dès lors qu’il est extrait du procès de l’Idée, autant ce régime est une détermination logique nécessaire de ce procès, et donc, partie du Concept : l’espace possède cette même dualité. Comme première détermination de la nature, il est partie nécessaire du développement du Concept. Mais si, de

moment logique, on l’hypostasie en cadre indépassable de la mathématique comme cela est

fait dans les sciences positives, il manque alors de toute conceptualité. Ce sur quoi l’on va s’appesantir maintenant, c’est le processus de différenciation qualitative du concept d’espace comme pure quantité, c'est-à-dire au processus interne à l’espace pris comme moment logique (et non comme ce « contenant » générique de la géométrie et de la mécanique issues de Descartes et Newton) : on va voir l’ambivalence du méta-discours dialectique hégélien. En effet, que signifie précisément cette affirmation : « Le traitement philosophique du cercle commence là où celui de la géométrie finit »3 ? De prime abord le fait que le philosopher pense ce que le mathématiser laisser de côté : c’est la lecture « standard ». Mais on peut considérer que c’est le discours géométrique lui-même qui s’approfondit : ceci n’est pas simplement une question de formulations, dans la mesure où, en choisissant cette seconde lecture, le penser spéculatif devient partie d’une science devenue enfin soucieuse de ses fondements – une métamathématique au sens contemporain, quoique non technique, du terme,

1 Hegel 1830 Remarque p. 153.

2 « Il est, absolument parlant, pure quantité, celle-ci non plus seulement comme détermination logique mais

comme immédiate et extérieure. La nature commence, non par le qualitatif, mais par le quantitatif... » Hegel 1830 § 254, Remarque p. 245.

très exactement comme Lautman le défendra1. Là encore, on voit que le méta-discours dialectique est plus qu’une épistémologie qui réfléchirait et réfléchirait sur les fondements d’une science : il fait science, dans la mesure où il prend en charge et pose ces fondements. C’est pour cette raison, me semble-t-il, que ce plan du Concept chez Hegel va retrouver, dans des termes proches, ce que des mathématiciens novateurs du 19ème siècle vont développer au titre d’un examen des principes de leurs sciences. Dit autrement et plus simplement, il me semble, même si c’est dans un idiome qui n’est pas celui de Hegel, et à partir de préoccupations distinctes (Hegel n’est pas mathématicien, n’est pas un savant) que Gauss, Grassmann, Riemann, et les savants en général, exactement comme Descartes, Newton, Leibniz le firent antérieurement, sont obligés d’excéder le cadre démonstratif de leur science dès lors qu’ils veulent en exposer les principes : et l’on retrouve ce que j’affirmais au début du chapitre, à savoir que, fonctionnellement parlant, le méta-discours dialectique est analogue aux métaphysiques fondatrices de l’époque classique, même si c’est dans des termes spécifiques.

Le géométrique au-delà du spatial

Etudions donc ce processus de différenciation interne à l’espace. Rappelons d’abord que le commencement de la géométrie ne peut être laissé au hasard : la détermination logique de l’espace dans la Philosophie de la nature retrouve l’ordre des définitions des Eléments d’Euclide. Le procédé consiste, de façon analogue à l’exposé axiomatique des termes d’un langage, à aller du simple constitutif au complexe constitué.

« Dans la géométrie, le commencement ne doit pas se faire une figure spatiale concrète, mais avec le point et la ligne, et ensuite avec des figures planes, et, parmi celles-ci, non pas avec des polygones mais avec la triangle2, et parmi les lignes courbes avec le cercle »3

Les axiomes quant à eux, en sus des définitions, ne véhiculent aucunement l’évidence dont on les crédite traditionnellement, et ne sont pas plus statutairement que les postulats, c'est-à- dire des présuppositions que l’on accepte de poser4 (et qui devraient être les théorèmes d’une

science supérieure, par exemple une mathématique conceptuelle et qui, en tout cas, ne peuvent ni ne doivent reposer sur l’intuition sensible, instance incompatible avec le penser des sciences).

Le processus de qualification logique, non spatial au sens de l’espace comme simple matière défectueuse, permet de penser l’engendrement d’un espace géométrique concret, dans et par une différenciation consistant à instituer conceptuellement la tridimensionnalité. En effet,

« On n'a pas à exiger de la géométrie qu'elle déduise la nécessité pour l'espace d'avoir justement trois dimensions, dans la mesure où la géométrie n'est pas une science philosophique... Mais, même autrement, il ne saurait être question de faire voir cette nécessité. Elle repose sur la nature du concept dont les déterminations pourtant, sous cette première forme de l'un-au-dehors- de-l'autre, dans la quantité abstraite, ne sont toutes que superficielles et constituent une différence pleinement vide. »

Autrement dit « Dans la géométrie, on présuppose les dimensions de l'espace5 ; on présuppose de même qu'il y a des points et des lignes, etc. La philosophie comporte l'exigence de considérer de telles déterminations dans leur nécessité. La géométrie n'a pas à s'engager dans de telles considérations. »6

Le procès de qualification de l’espace exige la présence d’une première différence à soi :

1

Cf. Section IV-5 à venir.

2 D’où l’importance méthodologique accordée au Théorème de Pythagore, par surcroît de sa synthéticité

exemplaire.

3 Hegel 1812c p. 338. 4

Hegel 1812c p. 345.

5 Cette présupposition disparaîtra par principe avec Grassmann et surtout Riemann. 6 Hegel 1830 § 255, Remarque, p. 245, Hegel 1822, § 198, p. 10 respectivement.

« Le premier point est que la différence existe d'une manière générale à même l'espace ; cette première distinction indifférente produit ce qu'on appelle les dimensions - Le concept apparaît ici d'une manière totalement formelle et indéterminée ; nous savons que le concept a trois déterminations. Dans l'espace, elles sont également trois, mais il reste que nous ne pouvons que les compter. La première différence est immédiate, privée de détermination. Les trois dimensions ne sont distinctes que numériquement, mais pas autrement... La différence ne peut pas cependant rester au sein de cette indéterminité. [§ 199] Il existe une différence essentiellement déterminée, qualitative. - Cette déterminité pour elle-même est l'Un. »1

Le passage correspondant de l'Encyclopédie dit :

« L'espace, comme concept auprès de lui-même, absolument parlant, a ses différences auprès de lui, a) immédiatement dans son indifférence comme les trois dimensions purement distinctes, sans aucune détermination... [§256] b) Mais la différence est essentiellement différence déterminée, qualitative. Comme telle, elle est 1) d'abord la négation de l'espace même, car ce dernier est l'être-hors-de-soi immédiat, indifférencié, le point… » ; « Il n'y a pas lieu de parler de

points spatiaux... le point, l'être-pour-soi, est bien plutôt la négation de l'espace, et cette négation

posée en lui… » 2

On arrive ici à un élément essentiel : on a déjà vu que l'être-pour-soi, dans la Doctrine de

l’Etre, était le moment de l’infini qualitatif : le point, qui n’était d’abord que pur « ceci » en

soi sans qualification3, c'est-à-dire purement idéal, subit le travail du négatif par lequel l’espace commence à se constituer conformément à son concept. La « différence essentiellement déterminée, qualitative », c'est l'Un, ainsi surgit le point : « être-pour-soi dans l'espace » trahissant une contradiction en lui.

En effet, il ne se trouve pas « dans » l'espace, puisque c’est par là que celui-ci advient, tout en en étant une déterminité. Comme ce point constitue, en tant qu'une de ses déterminités, la nature de l'espace, il existe, et la contradiction doit se résoudre : c'est l'avènement de la ligne qui « naît du mouvement du point » et constitue sa vérité. Contradiction dépassée, mais qui en apporte une nouvelle, interne à la ligne : si la ligne est « première limite positive » de l'espace, elle « passe maintenant dans la surface, qui est la ligne dépassée ». La surface est donc négation de négation, donc production d'être, totalité, superficie, devenir-autre de la ligne (et non agrégat im-pensable de lignes). Et l'on aboutit alors au « corps géométrique ».

Les ligne et surface sont pensées comme négations respectives du point et de la ligne : « La surface a deux dimensions, précisément parce qu'elle comporte en elle deux déterminations. On peut appeler ces deux dimensions longueur, largeur ou hauteur, comme l'on veut. La surface est donc d'une part négation de la négation, et par conséquent totalité ; la surface est ainsi essentiellement superficie - Nous avons donc ici ce qu'on appelle un corps géométrique : un Un, mais non pas l'Un abstrait du point, mais l'Un qui contient en même temps en lui les trois dimensions. »4

L'Encyclopédie reprend cela dans les termes suivants :

« ... La ligne passe ainsi au plan, lequel est, d'une part, une déterminité à l'égard de la ligne et du point et, de la sorte, un plan absolument parlant, mais, d'autre part, la négation supprimée de l'espace, donc une restauration de la totalité spatiale, qui possède auprès d'elle le moment négatif ; - surface englobante, qui isole un espace total singulier. »5

Cette dialectique de l'engendrement du « corps géométrique » amène à plusieurs remarques. 1 Hegel 1822, § 198-199 p. 10-1. 2 Hegel 1830, § 255 p. 245-6.

3 Cf. Sartre 1943, II-2 « L’être-pour-soi », « De la détermination comme négation » p. 224-6, qui reprend

presque telle quelle, et d’une façon encore une fois très éclairante, la conception hégélienne de l’espace- matériau, ainsi que la reprise de l’association entre négativité et temporalité comme l’instance de subversion de

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