• Aucun résultat trouvé

L’application de la règle coutumière internationale dans le droit interne des États du

PARAGRAPHE II : L’INCORPORATION DU DROIT INTERNATIONAL DANS LA PRATIQUE DES

1) L’application de la règle coutumière internationale dans le droit interne des États du

De prime abord, soulignons brièvement ce qu’est la coutume internationale. L’article 38 du Statut

de la Cour internationale de Justice qui porte sur l’identification des sources du droit international

dispose en son alinéa (b) que la coutume internationale constitue une pratique générale acceptée comme étant du droit525. Deux éléments composent cette définition : 1) une pratique générale et 2) une pratique générale acceptée comme étant du droit. La Cour internationale de Justice maintient

524Olowu, International Law, supra note 519, à la page 109. 525 Statut de la Cour internationale de Justice, 26 juin 1945, art. 38(b).

dans une jurisprudence constante, notamment dans l’arrêt Affaires du Plateau Continental de la Mer

du Nord526 que la preuve d’une coutume internationale implique la coexistence des deux éléments : un élément matériel (consuetudo) qui consiste à dire que l’acte considéré doit être constant ; et un élément psychologique (opinio juris) qui consiste en la conviction que cette pratique est obligatoire. Ainsi, la coutume internationale n’est autre chose qu’une pratique que les États observent avec la conviction réciproque de se comporter conformément au droit527. Souvent, lorsque les traités en vigueur n’offrent pas de solution à un problème particulier, les tribunaux internationaux se tournent vers les règles coutumières internationales.

Revenons maintenant à l’essentiel, c’est-à-dire à l’application de la règle coutumière internationale par les États. En effet, les États n’appliquent pas le droit coutumier international de la même manière que les traités dans leur droit interne. Ainsi, les règles régissant l’application de celui-ci (droit coutumier international) sont prévues soit par la Constitution, soit par la jurisprudence.

Au Royaume-Uni, l’ancien colonisateur de la plupart des États du Pacifique Sud, la jurisprudence établit que le droit coutumier international fait partie de l’ordre juridique interne. Par conséquent, les tribunaux anglais l’appliquent directement, sauf en cas de conflit avec les législations nationales où ces dernières l’emportent. Ainsi, dans l’affaire Chung Chi Cheung v. The King, Lord Atkin affirme ce qui suit : « The courts acknowledge the existence of a body of rules which nations accept among themselves. On any judicial issue they seek to ascertain what the relevant rule is, and having found it they will treat it as incorporated into the domestic law, so far as it is not inconsistent with rules enacted by statutes or finally declared by their tribunals »528.

Cette position a été contredite à quelques reprises par un certain nombre de décisions529. Mais c’est finalement l’arrêt Trendtex Trading Corporation v. Central Bank of Nigeria530 qui vient clore le débat en confirmant la théorie de l’incorporation qui retient la conception moniste en cas d’application de droit coutumier international.

Qu’en est-il des États du Pacifique Sud ? Il faut noter premièrement que cette position anglaise n’est retenue qu’implicitement par ses anciennes colonies du Pacifique Sud. Aucune Constitution de ces

526 Affaires du Plateau continental de la Mer du Nord (République Fédérale d’Allemagne c. Danemark ; République

Fédérale d’Allemagne c. Pays-Bas, 1969), C.I.J., Recueil, 1969, à la page 3.

527Arbour et Parent, Droit international 2006, supra note 520, à la page 66. 528 Chung Chi Cheung v. The King, 1939 A.C. 168.

529 R. v. Keyn, 1876 2 Ex. D. 63 ; West Rand Central Gold Mining Co c. The King, 1905 2 K.B. 391 ; Reg. c. Secretary

of State for the Home Department, ex parte Thakrar, 1974 Q.B. 684.

États ne mentionne ou ne fait référence au droit coutumier international. Selon certains auteurs, en accédant à l’indépendance, ces anciennes colonies sont méfiantes vis-à-vis de leurs colonisateurs et refusent par conséquent d’adopter clairement la même position que ceux-ci avaient531. Toutefois, par interprétation notamment constitutionnelle, les tribunaux nationaux de ces États du Pacifique Sud sont malgré tout compétents pour appliquer directement le droit coutumier international. Une telle application doit cependant être conforme à la Constitution. Un exemple typique de cette affirmation se trouve dans l’article 3 de la Constitution de Tuvalu qui dispose que :

« (1) This Constitution is supreme law of Tuvalu and, subject to subsection (2), any act (whether legislative, executive or judicial) that is inconsistent with it is, to the extent of the inconsistency, void. (2) All other laws shall be interpreted and applied subject to this Constitution, and, as far as is practicable, in such a way as to conform with it »532.

Jennifer Corrin explique ainsi que même lorsque le droit international est incorporé dans le droit interne de ces États du Pacifique Sud, il ne saurait l’emporter sur la Constitution nationale considérée comme la loi suprême533. Cette expression « loi suprême » désignant la Constitution a d’ailleurs été employée par plusieurs de ces États534.

Pour ce qui concerne le Vanuatu en particulier, comme nous l’avons mentionné plus haut, la Constitution ne traite pas de l’application du droit coutumier international dans le droit interne et aucune décision de tribunal ne porte pour le moment sur celle-ci. Le Vanuatu étant un pays du Commonwealth, nous voyons cependant mal comment les tribunaux ne respecteront pas la position anglaise advenant le cas où il est question du droit coutumier international.

En somme, comme dans les autres États du monde, lorsqu’il s’agit du droit coutumier international, c’est généralement le monisme qui a la faveur. Il n’en est cependant pas ainsi en ce qui concerne les traités.

531Olowu, International Law, supra note 519, à la page 112. 532Constitution of Tuvalu, supra note 265, art. 3.

533 Corrin, « Cultural Relativism », supra note 33, à la page 120.

534 L’article 2 de la Constitution de Vanuatu, l’article 3 de la Constitution de Tuvalu, l’article 2 de la Constitution des Iles

Salomon, l’article 2 de la nouvelle Constitution des Iles Fidji et l’article 11 de la Constitution de la Papouasie-Nouvelle- Guinée.

2) L’application des traités internationaux dans le droit interne des États du Pacifique