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a Les débats parlementaires relatifs à la légitime défense

La légitime défense est l’objet de l’article L122-4 du projet de loi. Le projet propose principalement d’intégrer dans le NCP, la jurisprudence antérieure de la Cour de cassation relative à l’exigence de proportionnalité entre l’agression et la riposte et à l’acceptation decette cause justificative en cas d’atteinte aux biens. Il ne retient en outre que le premier des deux cas de présomption de légitime défense, l’hypothèse de « pillage », prévue par le code de 1810 semblant anachronique. Les dispositions sexo- spécifiques antérieures ne sont pas reprises et la définition de la légitime défense n’est pas repensée mais seulement reconduite.

Les travaux parlementaires prolongent cette approche. Le rapporteur de la commission des lois du Sénat, Marcel RUDLOFF, le relève : « L'article 122-4 du projet reformule une

solution traditionnelle et fondamentale du droit pénal français : le droit de légitime

mort aux coupables qui l’outragent, elle l’excuse seulement. Son agression est donc injuste. », op. cit.

art. 328, n°81.

564 Art. 324, al. 1.

565 « Il n’y a ni crime ni délit, lorsque l’homicide, les blessures et les coups étaient commandés par la

nécessité actuelle de la légitime défense de soi-même ou d’autrui. »

566 « Sont compris dans les cas de nécessité actuelle de défense, les deux cas suivants :

1° Si l’homicide a été commis, si les blessures ont été faites, ou si les coups ont été portés en repoussant pendant la nuit l’escalade ou l’effraction des clôtures, murs ou entrée d’une maison ou d’un appartement habité ou de leurs dépendances;

2° Si le fait a eu lieu en se défendant contre les auteurs de vols ou de pillages exécutés avec violence. »

défense568. » Il valide l’extension légale de la légitime défense des biens et note par

ailleurs que « Pour sa part, le projet soumis à notre examen ne propose pas de nouveaux

cas de présomption qui correspondraient à des situations nouvelles connues du XXe siècle569. » Lui-même ou la commission des lois ne poursuivent pas cette réflexion sur les

« situations nouvelles », lesquelles auraient pu inclure celle des femmes victimes de violences.

Dans l’ensemble, les parlementaires ne remettent pas en cause le principe de l’existence de la légitime défense570. Le débat porte plutôt sur les limites de ce droit571 et sur son

extension aux biens.Pour argumenter en faveur572 ou en défaveur573 de cette extension,

Ils s’appuient sur des exemples types (« le vol du sac à main d’une personne âgée ») ou sur des affaires récentes « la boulangère de Reims574 », « l’agression de

568 Marcel RUDLOFF, Rapport au Sénat, n°271, p. 79. 569 Ibid., p. 80.

570 Avec une nuance toutefois de la part des députés communistes. Cf. M. ASENSI, 2e séance du 10 octobre

1989, p. 3360 : « Certes, le législateur ne peut recouvrir d'une définition juridique parfaite toutes les

situations concrètes dangereuses qui peuvent se présenter, mais il doit affirmer un principe : celui de la mesure et de la non-violence. Or le projet de loi ne justifie pas la légitime défense, il légitime la violence. Pour les députés communistes, c'est inacceptable. »

571 « II ne faut pas oublier, en outre, que la légitime défense - qui est à la fois un droit fondamental, dont

l'exercice ne peut être exagérément restreint, et la première dissuasion des malfaiteurs potentiels - s'exerce par définition dans le feu de l'action. », José ROSSI, Assemblée nationale, 1ère lecture, 2e

séance du 10 octobre 1989, JO 11 octobre 1989,p. 3357.

572 Cf. par exemple, l’intervention du député jacques TOUBON: « Si la loi ne prévoit pas la possibilité, dans

certaines conditions et avec une proportionnalité calculée, de légitimement défendre son patrimoine, dans le climat que nous connaissons, le vide de la loi justifiera les réactions viscérales, les réflexes d'auto-défense et même, au-delà, l'apparition d'organisations qui se donneront pour but d'organiser cette auto-défense. Donc, l'introduction de la notion de légitime défense des biens est la meilleure protection contre la résurgence de la vengeance privée et contre tous les systèmes d'auto-défense, de police personnelle et antres qui sont détestables et que les progrès du code pénal ont justement pour but d'empêcher. » Assemblée nationale, 1ère lecture, 3e séance du 11 octobre 1989, JO 12 octobre 1989 ;

numéro de page illisible sur le site de l’AN.

573 Cf. l’intervention du sénateur Charles LEDERMAN lors de la première lecture : « La définition de cette

notion est si large qu'il est difficile d'y voir autre chose qu'une concession majeure à l'idéologie sécuritaire. Comment accepter que soient mises sur un pied d'égalité la légitime défense d'une personne et la légitime défense d'un bien, du bien d'autrui au surplus ? », Sénat, 1ère lecture, séance du

9 mai 1989, JO 10 mai 1989,p. 567. Ou de la sénatrice Jacqueline FRAYSSE-CAZALIS: « Loin d'être

un progrès pénal, il s'agit d'une régression sociale que nous refusons. Car, ne nous leurrons pas : autoriser la légitime défense pour la défense des biens, c'est encourager les pulsions meurtrières les plus basses, c'est favoriser les comportements irresponsables. » Ibid., p. 575. Et l’opposition de

l’Assemblée nationale.

574 « Cette boulangère voit entrer dans sa boulangerie deux jeunes gens qui prennent, qui volent quelques

croissants et qui s'en vont après avoir commis, je crois, quelques exactions. La boulangère saisit son révolver et tue l'un d'eux au moment où il repartait. (…) Voilà un cas précis, vécu et récent. Il y avait eu effectivement légitime défense des biens, mais il y avait eu aussi la mort, une réaction qui n'était pas proportionnée à l'attaque. II s'agissait simplement de la défense d'un bien, et la boulangère a été

Gennevilliers575 ». Le sujet monopolise les débats qui seront vifs et longs, puisqu’un

accord ne sera trouvé qu’en commission paritaire.A aucun moment, la réflexion ne porte sur la réalité des femmes victimes de violences précédemment décrite576. Et pour cause,

la légitime défense d’une femme victime de violences « installées », est impensable en raison de la conception qu’en ont les parlementaires.

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