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Expérimentation, Recherche d’inspiration (1907-1918)

4. Conception et composition architecturale

4.3. Evolution technique et conséquences architectoniques

4.3.2. Aération passive, ventilation mécanique

L’aération de la salle, touchant à la fois l’hygiène et le confort, devrait faire partie des principales préoccupations des architectes et exploitants de cinémas ; attendu que, malgré les grandes proportions de la plupart des établissements, les séances faisant salle comble sont nombreuses à cette époque, et que de surcroît, le public est souvent autorisé à fumer dans la salle. Or, les premiers architectes de cinémas semblent se tenir essentiellement à respecter les prescriptions préfectorales indispensables à l’obtention de permis de construire. D’ailleurs, comme nous l’avons déjà remarqué, la quasi-totalité des arrêtés de refus de permis compte parmi leurs motifs, l’insuffisance d’aération et d’éclairage de la salle ; aération et éclairage qui devraient être assurés, selon le règlement sanitaire, par des baies d’une section totale au moins égale au sixième (par dérogation au huitième) de la surface de la salle. Pour satisfaire à cette prescription, la solution communément adoptée est basée sur le principe de la ventilation par le plafond ; des trappes ou des baies sont percées dans les rampants, autrement un ou plusieurs lanterneaux sont installés sur le faîtage. Ce lanterneau est, en fait, un deuxième toit qui recouvre partiellement, à quelques dizaines de centimètres, la toiture principale avec des parois verticales percées de baies pour laisser circuler l’air et pénétrer le jour dans l’édifice. Ce mode d’aération trouve ses origines dans une tradition de l’architecture théâtrale. En effet, dans les théâtres du XIXe siècle, le système le plus courant d’aération consiste à établir une lanterne au-dessus du grand lustre central qui conforte, par la chaleur produite, l’effet « d’appel d’air » et l’évacuation de l’air vicié237. D’ailleurs, ce dispositif s’impose la plupart du temps, car la majorité des salles, établie à l’intérieur des parcelles, au cœur des îlots, se trouve privée d’autre accès à l’air libre qu’à travers le toit. Cependant, lorsque la salle est implantée sur la bordure de la voie publique, contiguë à une cour ou à un passage en plein air, les architectes n’hésitent pas à ouvrir des fenêtres ou

237 Bellon 1922. Cet essai hygiéniste, rend compte des différents modes d’aération des salles de spectacles en se basant essentiellement sur des exemples d’anciens théâtres, mais décrit également les plus récents systèmes de ventilation de l’époque sur un ton plutôt technique, formules et calculs à l’appui.

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même de vastes baies dans les parois afin d’atteindre la surface libre exigée par le règlement. Les exemples en sont nombreux pendant toute la période 1907-1918238 , avec toutefois une légère baisse à compter de 1911. Ce mode d’aération que l’on pourrait qualifier de « passif » n’a pas de conséquence concrète sur la conception architecturale des salles ; le fameux lanterneau constitue un élément ajouté, installé au besoin sur la toiture, et les fenêtres latérales sont recouvertes de rideaux pendant les projections de jour. Toutefois, les frontons qui couronnent, telle une composante quasi incontournable, les façades des cinémas de cette époque, servent entre autres à dissimuler ce lanterneau débordant qui risquerait de nuire à l’esthétique et à l’intégrité de la façade (voir notamment les projets de Cinéma Exploitation). Quant à la disposition intérieure de la salle, l’impact de ce mode d’aération se matérialise par le recours aux faux plafonds ajourés, souvent sous forme de coupoles décoratives, pour masquer le lanterneau et atténuer la lumière du jour pendant les séances de « matinée ». Ce dispositif est observé surtout dans les cinémas d’après 1910 comme le Bijou Cinéma 1910, le Grand Cinéma Lecourbe 1911, le Palais Rochechouart 1912, le Mozart Palace 1913, l’Alexandra Passy Palace 1916, et le Cinéma Max Linder en 1917.

Les prémices d’innovation par l’utilisation de moyens mécaniques se manifestent à compter de 1912. En fait, deux projets de la société Cinéma Exploitation prévoyaient, dès 1907, des ventilateurs suspendus au plancher du balcon, à l’arrière de la salle. Quoiqu’il s’agît, là, bel et bien de l’usage d’un appareil mécanique, celui-ci n’était censé qu’assister l’aération passive de la salle, et ce, seulement dans la partie au dessous du balcon où ce dernier entrave l’ascension de l’air vicié vers le lanterneau. Les premiers signes d’un changement radical du système d’aération apparaissent dans l’Artistic Cinéma Pathé de la même société, conçu en 1912 par Marcel Oudin. Ici, le lanterneau et les trappes cèdent la place à quatre longs « tuyaux » perçant le plafond dans les angles de la salle, reliés deux à deux par un « passage de service ». Ceci laisse supposer l’installation de certains équipements sur la voûte en béton armé de la toiture. Les écrits ne font pas explicitement mention de moyens mécaniques de ventilation, cependant, vu que le permis de construire est accordé après un premier refus en raison du défaut d’aération, et que la section des ouvertures de la salle n’atteint pas la surface règlementaire sur les plans approuvés, on peut supposer qu’un système de ventilation mécanique est prévu. Quoi qu’il en soit, dès l’année

238 Parisiana et Alhambra de la rue des Pyrénées, le Cinéma Parmentier, Cinématographe Couchat, Cinéma Théâtre Voltaire, Grand Cinéma de l’avenue de St Ouen, Pathé Clichy, Pathé Bagnolet et Cinéma du Lac St Fargeau (dont les trois derniers du circuit Cinéma Exploitation) en 1907 ; Cinéma Cambronne en 1908 ; Trianon et Nouveau Cinéma en 1909 ; Cinéma Excelsior, Royal, Paradis, Bijou Cinéma en 1910 ; St Charles Hall en 1911 ; Cinéma Concert National et Royal Cinéma, Grand Cinéma, Palais Rochechouart en 1912 ; Ciné Magic, Cinéma Combat et Parodi en 1913 ; Cinéma Park 1914 et Beranger Cinéma 1917.

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suivante, d’autres exemples viennent confirmer, de manière plus convaincante, l’introduction de moyens mécaniques de ventilation dans les cinémas. En témoignent notamment une correspondance entre le Service de voirie de la Préfecture et l’architecte du Cinéma Jeanne d’Arc, Adolphe Gérard. Comme cela a été relaté plus haut239, la Commission Supérieure de Voirie admet, non sans quelques réticences au départ, qu’à défaut d’ouverture règlementaire pour l’aération, l’exploitant devra assurer, par tout moyen possible, le renouvellement de l’air de la salle à raison d’une fois et demi son cube par heure240. Cet objectif serait atteint, au Cinéma Jeanne d’Arc, par l’installation de « trois ventilateurs aspirateurs à commande électrique » dans le plafond, ce qui permettrait de renouveler l’air de la salle en 7 minutes. Cet exemple est immédiatement suivi par deux autres établissements projetés la même année 1913, le Cinéma Palace de la rue de Flandre, et le Lutetia Wagram. Dans le cas du Cinéma Palace, les maîtres d’ouvrage se contentent de préciser, dans une demande de tolérance adressée au Préfet de la Seine, que « la ventilation se fera électriquement pour renouveler l’air une fois et demi à l’heure »241 et l’architecte, d’indiquer, sur le plan de la salle, l’emplacement de quatre ventilateurs au plafond. Si cet établissement, comptant environ cinq cents places, est proportionnellement comparable aux précédents, l’Artistic Cinéma Pathé et le cinéma Jeanne d’Arc, le Lutetia Wagram, en revanche, est une grande salle de plus d’un millier de places ; l’une des première de cette ampleur, à s’équiper en ventilation mécanique. Là encore, aucun détail n’est fourni du système de ventilation prévu, ni sur les plans ni dans la correspondance. Seulement l’engagement est pris de faire renouveler l’air au rythme exigé moyennant des ventilateurs électriques. Néanmoins, dans son rapport sur la conformité des travaux exécutés à la permission accordée, l’architecte voyer du XVIIe arrondissement, un dénommé Rouchette, impressionné par la performance du système de ventilation de cette salle, n’hésite pas à faire un « Nota » admiratif à ce propos : « Il doit être ajouté, écrit-il, que la ventilation mécanique de cet établissement a été très sérieusement installée et de nature à assurer les conditions hygiéniques de la salle de spectacles »242. Ceci est d’autant plus significatif que de telles remarques sont rarissimes dans les rapports de ce genre ; les architectes voyers se contentent habituellement de confirmer la réalisation des travaux suivant l’autorisation en demandant le classement de l’affaire. En effet, l’usage des ventilateurs-aspirateurs électriques dans les cinémas semble aboutir à des résultats satisfaisants, car trois autres salles datant de 1913, après avoir rencontré, tous, un premier

239 Voir supra, pp. 66-67.

240 Cette norme est, à l’époque, obtenue par des calculs approximatifs dont un exemple est proposé dans L’état actuel

de la question de la ventilation et du chauffage au point de vue théorique et pratique, thèse de doctorat présentée par Adolphe

A. Rundzieher à la faculté des sciences de Grenoble, soutenue en novembre 1910.

241 Lettre de Woronick et Gobert au Préfet de la Seine, datée 30 octobre 1913, Permis de construire n° 4667, 140 rue de Flandre, Archive de Paris, VO11 1231.

242 Vérification d’un permis de Grande voirie, datée 14 septembre 1914, dossier n° 3779, Archives de Paris, VO11 4004.

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refus de permis en raison d’insuffisance d’aération, optent pour cette solution plutôt que de percer de nouvelles fenêtres ou d’agrandir le lanterneau. La mode se répand peu à peu ; la technique est adoptée aussi bien dans de petites salles de quartiers périphériques (Cinéma Combat, rue de Meaux, XIXe avec 300 places) que de vastes établissements des boulevards ou de quartiers élégants (Ciné Magic, avenue de la Motte Piquet, VIIe). A ce début de prolifération de ventilation mécanique, une autre solution non moins « technique » est proposée par les architectes Orlhac et Duron dans le Palais Montparnasse. Ils projettent le fameux lanterneau d’aération en deux parties mobiles pouvant se glisser sur des rails pour créer une salle à toit ouvrant, dispositif qui facilite et accélère l’aération naturelle de la salle. Cette tentative insolite et singulière à l’époque pourrait avoir une motivation davantage

« esthétique » que technique, mais symbolise, en tout cas, les expérimentations

« technicistes » à la veille de la Grande Guerre.

Le déclenchement des hostilités en 1914, avec le ralentissement de la construction des salles, freine le développement de la ventilation mécanique. Si la seule année 1913 voit six établissements recourir à ce mode d’aération, durant les quatre années suivantes, seulement deux projets proposent d’aérer la salle mécaniquement. Le reste se contente d’une aération au mode traditionnel. Nul doute que cela ressortit aux circonstances critiques de la guerre, puisque, comme nous le verrons, à partir de 1919, parallèlement aux nouveaux cinémas, de nombreuses salles existantes s’équiperont en ventilation mécanique. Au demeurant, le changement de mode d’aération des salles ne semble pas affecter, pour le moment, leur conception architecturale. Il s’agit généralement d’un ajout a posteriori, et les architectes hésitent même, encore, à supprimer les ouvertures dans les parois ou le lanterneau au plafond de la salle. Parmi la dizaine de projets de cette période, dotés de ventilation mécanique, trois, seulement, forment une « boîte aveugle », une salle vraiment obscure. A remarquer, néanmoins, que l’installation, à cette époque, des ventilateurs-aspirateurs électriques, exclusivement dans la partie supérieure de la salle implique l’aménagement d’un espace entre la couverture du toit et le plafond, souvent avec un accès de service de l’extérieur. Cette disposition du plafond survient presque au moment où un nouveau mode de construction, basé sur le béton ou ciment armé, commencent à intéresser les bâtisseurs de cinémas. Nous verrons que, dans les projets où ces deux techniques, ventilation mécanique et construction en béton armé, sont concomitamment adoptées, le profil de la salle connaît une nette transformation : la toiture à deux versants cède la place à une double dalle horizontale ou légèrement en voûte.

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4.3.3. Construction : du bois au métal

Le procédé et les matériaux de construction ne sont explicités qu’exceptionnellement dans les permis de construire de la période 1907-1918, partant, c’est à travers les plans et coupes que l’on pourrait étudier la technique de construction prévue. Nous nous contentons, à cet égard, d’analyser le parti structural de la toiture et, le cas échéant, du balcon ; deux éléments dont l’établissement est problématique dans un cinéma, car le recours aux points d’appui dans la salle nuit à la visibilité de l’écran. Par ailleurs, une certaine corrélation semble exister entre la structure de la toiture, la largeur de la salle et l’existence d’un balcon. Avant 1910, où peu de cinémas disposent d’un balcon et la largeur des salles ne dépasse que rarement les 11 mètres, le parti constructif le plus courant est la charpente de bois. En 1907, notamment, seuls les huit projets de Cinéma Exploitation prévoient une ossature métallique ; c’est parmi ceux-ci que l’on retrouve les trois salles avec balcon de cette année. L’architecte de la société, Georges Malo adopte, ainsi, outre une conception typique, un parti constructif identique à tous les établissements du circuit. Toutes ces salles, d’une largeur moyenne de 15m, sont couvertes par une charpente métallique à double pente, posée sur deux séries de poteaux également métalliques adossés aux mitoyens. Une curieuse différence entre les projets initiaux et tardifs réside dans la trame des poteaux. Les quatre premiers projets, avec une largeur de salle inférieure à 14m50, prévoient des poteaux disposés à environ cinq mètres d’intervalle, dans les quatre derniers, en revanche, où la largeur de salle s’élève à 17m50 voire 20m, la portée latérale des poteaux est aussi augmentée à 10 mètres. Y a-t-il un changement au niveau du profil des pièces d’ossature ? S’agit-il d’une prise de conscience de la réelle portée soutenable à travers des calculs plus exacts ? Quoi qu’il en soit, sauf l’inexactitude des plans, on assiste à un usage progressivement plus confiant de l’acier. Quant à la construction du balcon, dans les deux projets où la largeur de la salle excède 10 mètres, deux minces poteaux métallique sont interposés à environ 3 mètres de distance de chaque mitoyen ; ils supportent l’essentiel de la charge du balcon, un plancher composé de profilés métalliques en I avec remplissage de briques. Dans le reste des projets de 1907, la toiture est constituée de fermes en bois à section triangulaire, couvrant une portée d’environ 11 mètres. Cette charpente est souvent supportée par des poteaux également en bois, engagés ou adossés aux mitoyens. Quelques remarques à faire : d’abord, dans deux salles de moins de 10 mètres de largeur (Eden Lyrique et Cinématographe Couchat [p. 28]) la charpente est directement posée sur les mitoyens ; ensuite, au Grand Cinéma de Saint Ouen, la salle singulièrement large d’une vingtaine de mètres est couverte par une charpente de bois sans aucun point d’appui intermédiaire [p. 29] ; enfin, le Cinéma Parmentier dont la toiture plate est supportée par les

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mitoyens et quatre pylônes métalliques disposés sur une trame de 6mx4m [p. 27]. En 1908 et 1909, ce même procédé de construction en bois reste le plus fréquent ; il est observé dans cinq salles sur sept, par ailleurs, toutes dépourvues de balcon, d’une largeur comprise entre 8 et 14 mètres. Deux exceptions, le Cinéma Cambronne et le Nouveau Cinéma, se démarquent par l’usage de la structure métallique. Si dans le dernier, il s’agit de couvrir, d’un seul jet, une portée de 16m, dans le premier, la largeur de la salle atteint à peine 11m ; c’est probablement l’existence d’un balcon qui est à l’origine du choix d’une ossature métallique. Ce matériau est utilisé aussi bien pour la charpente de toit et les poteaux latéraux, que pour la poutre transversale supportant le balcon, les deux longues fermes de la galerie et les deux minces pylônes sur lesquels elle s’appuie.

Avec la généralisation du balcon dans les cinémas, en 1910, un type de structure « composite » fait son apparition ; il s’agit de construire la toiture en charpente de bois et de recourir, pour le balcon, à des poteaux et poutres en fer. La quasi-totalité des salles avec balcon de cette année adoptent ce procédé, malgré la différence des portées qui varient de 7m30 (Bijou Cinéma) à 16m20 (Cinéma Excelsior). Seule exception, à cet égard, le Cinéma Paradis de la rue de Belleville qui est édifié entièrement, toiture et galerie, en ossature métallique. Même dans les cinémas sans balcon, l’usage de fer marque une nette avancée par rapport aux trois années précédentes. Les salles des cinémas Plaisir et de Lion d’Or, dont la largeur n’excède pas 9 mètres, sont couvertes par une charpente métallique posée sur les mitoyens, alors que les deux autres, d’une portée de 14m et 16m, sont construites en ossature métallique quasi indépendante des mitoyens. 1911 voit la prédominance du fer se poursuivre ; tous les projets de cette année, avec ou sans balcon, quelle que soit leur portée, de 9m50 à 18m20, ont recours à la structure métallique. La construction en bois qui n’est, d’ailleurs, tolérée par la Préfecture de Police qu’à condition d’être enduite d’une enveloppe résistante au feu243, semble désormais évincée. Encore que dans la vague des projets de 1912 et 1913, cette technique soit sporadiquement adoptée, surtout dans de petites salles dépourvues de balcon dont la largeur ne dépasse pas 10m ; celles-ci représentent environ un quart des cinémas projetés. A la veille de la guerre, on relève encore des exemples plus remarquables de l’usage de bois : d’une part, le Cinéma Music Hall Empire du Faubourg Montmartre, où une portée de 17m est subdivisée par deux arcades longitudinales en maçonnerie, à 4m des mitoyens, pour permettre la couverture de la salle par des poutres en bois. D’autre part, le Colisée, le seul cinéma des Champs Elysées à cette époque, où, malgré une portée de 14m, une structure composite est mise en œuvre : charpente de bois

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pour la toiture, poteaux métalliques pour la galerie. Mais ces deux œuvres sont le chant du cygne : aucune salle de la période de guerre ne sera construite en bois.

Les projets de 1912-1913 se démarquent des précédents par la récurrence du balcon mais davantage, par un net élargissement des salles. Une salle sur trois a une largeur supérieure à 17m. Peut-être est-ce l’effet de la généralisation de l’ossature métallique, ou en est-il la raison. En tout cas, les deux tiers des cinémas projetés à la veille de la guerre sont conçus en structure métallique souvent indépendante des murs mitoyens. La charpente est étayée de plusieurs pylônes interposés quand la portée excède 20m (Cinéma Concert National, Palais Rochechouart) ou lorsqu’il y a une galerie (Féérique Cinéma, Moulin Rouge). L’incommodité de ces points d’appui intermédiaires est pour le moment tolérée, vu la sveltesse des poteaux métalliques. La solution à ce problème est pourtant proposée dès 1912, par l’architecte Oudin qui ose la construction en béton armé à l’Artistic Cinéma Pathé. Cette salle en éventail dont la plus large portée atteint 24m, est, en effet, couverte par une dalle légèrement en voûte, qui se pose transversalement sur les murs latéraux, longitudinalement sur deux doubles poutres en té, le tout coulé en béton armé [p. 44]. De même, le balcon installé dans la partie la plus large de la salle, est constitué d’une dalle supportée par les murs latéraux, cramponnée par des consoles à deux piliers engagés dans la paroi du fond de la salle ; ainsi, aucun point d’appui ne gêne la vue des spectateurs. La réalisation du galbe frontal du balcon, singulier dans son genre, est probablement une autre possibilité offerte par ce mode de construction. Cela dit, il ne s’agit pas vraiment d’une prouesse, car ce balcon, ne comportant qu’une batterie de loges, est de proportions nettement moindres que la plupart des cinémas contemporains, à l’instar du Palais Rochechouart dont le vaste balcon avec ses 600 places est soutenu, sans appui interposé, par des fermes métalliques de 20 mètres de portée. En tous les cas, l’exemple est suivi, en 1913, par deux autres projets : le Palais Montparnasse et le Batignolles Cinéma. Celui-là est