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Une utilisation des pesticides « compatible avec le développement durable ».

II. Des changements de pratiques agricoles attendus

24. Une utilisation des pesticides « compatible avec le développement durable ».

Selon son intitulé, la directive 2009/128/CE instaure « un cadre d’action communautaire pour parvenir à une utilisation des pesticides compatible avec le développement durable ». Définie, au niveau international, par le principe 3 de la déclaration de Rio175, cette notion ne comporte pas de définition officielle au niveau de l’Union européenne. L’article 3, paragraphe 3, du traité sur l’Union européenne précise toutefois que l’Union « œuvre pour le développement

171 Règlement (CE) n° 1107/2009, op. cit., considérant n° 5.

172 Directive 2006/42/CE du Parlement européen et du Conseil du 17 mai 2006 relative aux machines et

modifiant la directive 95/16/CE (refonte), JOUE L 157 du 9 juin 2006.

173 Directive 2009/127/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 modifiant la directive

2006/42/CE en ce qui concerne les machines destinées à l’application des pesticides, JOUE L 310 du 25 novembre 2009, considérant n° 4. Ces exigences se retrouvent donc au point 2.4 de l’annexe I de la directive 2006/42/CE et viennent s’ajouter aux exigences déjà prévues par cette directive pour l’ensemble des machines en matière de santé et sécurité des personnes et, le cas échéant, des animaux domestiques ou des biens.

174 Règlement (CE) n° 1185/2009 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2009 relatif aux

statistiques sur les pesticides, JOUE L 324 du 10 décembre 2009, considérant n° 3. Les modalités de collecte et de traitement des données par les Etats membres sont fixées dans l’annexe I du règlement en ce qui concerne la mise sur le marché des pesticides, et dans l’annexe II concernant leur utilisation.

durable de l’Europe fondé sur une croissance économique équilibrée et sur la stabilité des prix, une économie sociale de marché hautement compétitive, qui tend au plein emploi et au progrès social, et un niveau élevé de protection et d’amélioration de la qualité de l’environnement »176. Cette explication reprend donc les trois dimensions, à savoir la dimension économique, la dimension environnementale et la dimension sociale, que la notion de développement durable « invite non à distinguer […] mais à […] coordonner, non à

séparer mais à relier »177. L’article 37 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, auquel le considérant n° 23 de la directive 2009/128/CE renvoie, indique en outre : « Un niveau élevé de protection de l’environnement et l’amélioration de sa qualité

doivent être intégrés dans les politiques de l’Union et assurés conformément au principe du développement durable ». Sont donc ici retrouvées les notions d’intégration de la protection

de l’environnement aux autres politiques et de développement durable qui ont suscité jusque- là, au moins en partie, les changements du droit des produits phytopharmaceutiques et de la politique agricole commune. Comme les textes qui l’ont précédée, la directive 2009/128/CE cherche à concilier, d’une part, les intérêts économiques agricoles et la sécurité alimentaire, en assurant la protection des cultures contre les organismes nuisibles et, d’autre part, la protection de la santé et de l’environnement vis-à-vis des risques liés aux pesticides.

Le renvoi de la directive 2009/128/CE, via son considérant n° 23, à l’article 37 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, et non au principe d’intégration de l’environnement énoncé à l’article 11 du TFUE, interroge. En effet, si, pour l’article 37 de la charte des droits fondamentaux, l’application du principe d’intégration de l’environnement doit se faire « conformément au principe de développement durable », le lien de ce principe d’intégration avec le développement durable est moins fort dans la rédaction de l’article 11 du TFUE. Ce dernier article dispose ainsi : « Les exigences de la protection de l’environnement doivent être intégrées dans la définition et la mise en œuvre des politiques et actions de l’Union, en particulier afin de promouvoir le développement durable ». Il en ressort que pour l’article 11 du TFUE, le développement durable n’est pas nécessairement la finalité de l’intégration des exigences de l’environnement aux politiques et actions de l’Union. Le choix de l’article 37 de la charte des droits fondamentaux plutôt que celui de l’article 11 du TFUE peut donc laisser craindre une prise en compte a minima des exigences de la protection de l’environnement par la directive 2009/128/CE, cette prise en compte se trouvant diluée dans

176 Traité sur l’Union européenne, Version consolidée, JOUE C 326 du 26 octobre 2012, Article 3, paragraphe 3. 177 TREBULLE (F.-G.), « Droit du développement durable », JurisClasseur Environnement et Développement durable, Fasc. 2400, 1er juillet 2010, tel que mis à jour le 26 septembre 2012, n° 3.

l’objectif de développement durable dont le flou est souvent dénoncé178.

Il peut aussi être relevé que si les volets économique et environnemental sont bien identifiés par la directive, le volet social semble, lui, moins évident. Tout du moins, ce volet se trouve réduit à son aspect sanitaire, à savoir protéger l’ensemble de la population vis-à-vis des risques qu’elle encoure en étant exposée aux pesticides. Certes, le développement de pratiques agricoles économes en pesticides, recherché par la directive, peut impliquer, indirectement et à long terme, de permettre à l’ensemble des agriculteurs de continuer à exercer leur métier et à en vivre correctement, et ce durablement. Ce faisant, l’approvisionnement alimentaire de l’ensemble de la population se trouvera garanti. Ces objectifs sociaux restent cependant très implicites à la lecture de la directive 2009/128/CE. Cette directive cherche, avant tout, à concilier production agricole d’une part, et protection de la santé et de l’environnement d’autre part. Le volet social est négligé, comme dans l’ensemble de la politique agricole commune et du droit agricole français179. Cette tendance est d’ailleurs confirmée par le projet

agroécologique mis en œuvre par l’actuel gouvernement français, qui cherche à « concilier

performance économique et environnementale »180. Quoi qu’il en soit, notre étude se limitera à la prise en compte de l’exigence de protection de la santé et de l’environnement par le droit de la protection phytosanitaire. Elle n’a pas l’ambition d’explorer l’ensemble des implications sociales des textes de l’Union européenne encadrant la protection phytosanitaire.

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