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L’intégration de l’environnement à la PAC de 1992 Le nouveau règlement

I. L’intégration de la protection de la santé et de l’environnement

15. L’intégration de l’environnement à la PAC de 1992 Le nouveau règlement

n° 2078/92 est consacré à l’encadrement des méthodes de production agricole compatibles avec les exigences de la protection de l’environnement ainsi que l’entretien de l’espace naturel. Il indique, dès le premier considérant, que « les exigences en matière de protection de

l’environnement sont une composante de la politique agricole commune »96. Ce faisant, il reprend la formulation employée dans l’Acte unique européen de la clause d’intégration de l’environnement aux autres politiques communautaires97.

En pratique, la fonction environnementale des agriculteurs est encore mise en avant, cette fois-ci clairement pour l’ensemble du territoire, et plus seulement pour les seules zones défavorisées98. En conséquence, les incitations financières à la mise en œuvre, par les

agriculteurs, de pratiques agricoles respectueuses de l’environnement doivent récompenser « le rôle qu’ils jouent dans l’amélioration de l’environnement »99. Le fait que ce régime d’aides intéresse désormais l’ensemble du territoire constitue ainsi « une réorientation, ou

devrait-on dire un revirement, de la politique agricole commune »100 vers le développement rural.

En outre, la politique de soutien des prix agricoles est progressivement abandonnée, au profit de paiements compensatoires qui encouragent des pratiques agricoles extensives, comme le gel des terres101 ou la diminution de la densité animale des élevages102. Si ces mesures ne

96 Règlement (CEE) n° 2078/92 du Conseil du 30 juin 1992 concernant des méthodes de production agricole

compatibles avec les exigences de la protection de l’environnement ainsi que l’entretien de l’espace naturel,

JOCE L 215 du 30 juillet 1992, considérant n° 1.

97 L’article 25 de l’Acte unique européen, JOCE L 169 du 29 juin 1987, ajoute notamment un article 130 R qui

dispose, à son paragraphe 2 : « Les exigences en matière de protection de l’environnement sont une composante

des autres politiques de la Communauté ». Le traité sur l’Union européenne signé à Maastricht le 7 février 1992, JOCE C 191 du 29 juillet 1992, adoptera une version plus aboutie à son point 38), modifiant notamment l’article

130 R, paragraphe 2, en ces termes : « Les exigences en matière de protection de l’environnement doivent être

intégrées dans la définition et la mise en œuvre des autres politiques de la Communauté »,

98 Règlement (CEE) n° 2078/92, op. cit., considérant n° 4 : « les agriculteurs peuvent exercer une véritable fonction au service de l’ensemble de la société par l’introduction ou le maintien de méthodes de production compatibles avec les exigences accrues de la protection de l’environnement et des ressources naturelles ou avec les exigences du maintien de l’espace naturel et du paysage ».

99 Règlement (CEE) n° 2078/92, op. cit., considérant n° 12.

100 DOUSSAN (I.), Activité agricole et droit de l’environnement, l’impossible conciliation ?, op. cit., p. 292 et

294.

101 Le gel des terres consiste à ne pas cultiver une partie des terres agricoles.

102 Règlement (CEE) n° 1765/92 du Conseil, du 30 juin 1992, instituant un régime de soutien aux producteurs de

certaines cultures arables, JOCE L 181 du 1er juillet 1992, considérant n° 13 ; Règlement (CEE) n° 2066/92 du

Conseil du 30 juin 1992 modifiant le règlement (CEE) n° 805/68, portant organisation commune des marchés dans le secteur de la viande bovine et abrogeant le règlement (CEE) n° 468/87 établissant les règles générales du

visent pas, à proprement parler, la protection de l’environnement, elles participent tout du moins à réduire les pressions exercées par les activités agricoles sur l’environnement, dans la mesure où elles n’encouragent plus l’augmentation de la production et favorisent même sa diminution.

Ces avancées environnementales répondent sans doute au principe d’intégration de l’environnement aux autres politiques communautaires. Elles répondent aussi, si ce n’est principalement, aux pressions commerciales internationales. Parce qu’elles récompensent des pratiques agricoles plus respectueuses de l’environnement, les aides agricoles du règlement n° 2078/92 sont en effet éligibles à l’annexe 2 de l’accord sur l’agriculture de l’OMC. Encore qualifiée de « boîte verte », cette annexe 2 concentre l’ensemble des aides exonérées de l’effort de réduction car considérées comme « économiquement neutres »103. Quant aux paiements compensatoires qui remplacent les soutiens des prix, ils sont éligibles à la « boîte bleue »104, temporairement exonérée de l’effort de réduction et spécialement créée à la

demande de la Communauté européenne. La Communauté européenne fait ainsi valoir que les effets des paiements compensatoires n’étant pas encore connus, ils ne peuvent être classés d’emblée dans les soutiens soumis à l’effort de réduction, classés dans ce qu’on appelle la « boîte orange »105. Il en ressort que si l’OMC pousse la Communauté européenne à réformer sa politique agricole commune106, cette dernière influence également les règles de cette organisation dans un « mouvement d’influence réciproque entre droit international et droit

communautaire »107.

régime de prime spéciale en faveur des producteurs de viande bovine ainsi que le règlement (CEE) n° 1357/80 instaurant un régime de prime au maintien du troupeau de vaches allaitantes, JOCE L 215 du 30 juillet 1992, considérant n° 10.

103 RUBIO (N.), « L’Accord sur l’agriculture. Une tolérance relative à l’égard des subventions

environnementales accordées dans le secteur agricole », in MALJEAN-DUBOIS (S.), (dir.), Droit de

l’Organisation Mondiale du Commerce et protection de l’environnement, Bruylant, Bruxelles, 2003, p. 246. 104 La « boîte bleue » correspond aux soutiens énumérés à l’article 6, paragraphe 5 de l’accord sur l’agriculture

précité.

105 PETIT (Y.), « L’agriculture, pomme de discorde entre l’Union européenne et les Etats-Unis », RTDE,

Octobre-décembre 2004, p. 602 ; ADAM (V.), La réforme de la politique agricole commune de l’Union

européenne ou l’évolutionnisme permanent du droit communautaire, L’Harmattan, Paris, Tome II, 2001, p. 62. 106 BIANCHI (D.), « Politique agricole commune », JurisClasseur Europe Traité, Fasc. 1312, 1er octobre 2007,

n° 22 ; VELILLA (P.), « La PAC, l’OMC et « son gouvernement des juges » », Revue de Droit rural, n° 370, Février 2009, n° 1 ;

107 RUBIO (N.), « L’Accord sur l’agriculture. Une tolérance relative à l’égard des subventions

environnementales accordées dans le secteur agricole », op. cit., p. 239 ; voir aussi ROCHDI (G.), « La politique agricole commune dans le commerce mondial des produits agricoles », RTDE, Janvier-Mars 2005, p. 52, ainsi que LUMBROSO (S.) et GRAVEY (V.), « International negotiations and debates : to what extent do they hinder or foster biodiversity integration into the CAP », IDDRI SciencesPo, Study n° 2/13, Janvier 2013, p. 7.

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