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L’institutionnalisation d’une évaluation communautaire préalable

Paragraphe I. Une séparation progressivement gagnée

A. L’institutionnalisation d’une évaluation communautaire préalable

77. Initialement facultative, et réalisée par un comité scientifique placé auprès de la Commission européenne (I), l’évaluation des composants des produits phytopharmaceutiques s’est systématisée et a été confiée à l’EFSA, autorité scientifique indépendante de la Commission (II).

I. Une évaluation optionnelle, chapeautée par la Commission

78. Une évaluation confiée au comité scientifique des plantes. Avant que

l’article 62 du règlement n° 178/2002 confie l’évaluation des risques alimentaires à l’Autorité européenne de sécurité des aliments, cette évaluation était réalisée par l’ensemble des comités scientifiques placés auprès de la Commission européenne. Concernant les produits phytopharmaceutiques, le comité scientifique des plantes assurait jusqu’alors l’évaluation des risques et de l’efficacité liés aux composants de ces produits396. La Commission n’était

toutefois pas tenue de consulter ce comité dans la mesure où la directive 91/414/CEE ne prévoyait pas de telle consultation. Il était en revanche prévu que la Commission européenne sollicite l’avis du comité phytosanitaire permanent397, constitué de représentants des Etats membres et présidé par un représentant de la Commission398. De fait, n’étant pas constitué d’experts scientifiques, le comité phytosanitaire permanent ne remplissait pas une mission d’évaluation scientifique des risques et de l’efficacité liés aux composants des pesticides. Son but était en revanche d’assurer « une coopération étroite entre les Etats membres et la

Commission » dans le domaine phytosanitaire399, notamment pour la décision d’approbation d’une substance active400. Autrement dit, le comité phytosanitaire permanent remplissait une mission de gestion des risques, l’évaluation des risques étant assurée par le comité

396 Décision 97/579/CE de la Commission du 23 juillet 1997 instituant des comités scientifiques dans le domaine

de la santé des consommateurs et de la sûreté alimentaire, JOCE L 237 du 28 août 1997, Article 1.

397 Directive 91/414/CEE, op. cit., Articles 6 et 19.

398 Décision 76/894/CEE du Conseil du 23 novembre 1976 portant institution d’un comité phytosanitaire

permanent, JOCE L 340 du 9 décembre 1976, Article 1.

399 Ibid., considérant n° 1.

scientifique des plantes, tout du moins lorsque la Commission estimait nécessaire de consulter ce dernier comité.

79. Une évaluation anciennement confiée au comité scientifique des pesticides.

Avant la mise en place, par la décision n° 97/579/CE, du comité scientifique des plantes, la mission d’évaluation des composants des pesticides était remplie par le comité scientifique des pesticides. Composé de scientifiques nommés par la Commission, ce comité étaitconsulté selon les besoins de cette dernière, notamment sur les « questions concernant l’efficacité des

pesticides et leur innocuité pour les végétaux, pour l’homme et les animaux et pour l’environnement »401. Le comité scientifique des pesticides avait donc un statut similaire à celui du comité scientifique des plantes qui l’a remplacé, puisque la Commission n’était pas tenue de le consulter402. Ce système de consultation facultative était somme toute logique, dans la mesure où le droit communautaire des pesticides se limitait alors à la directive 76/895/CEE relative à la fixation de limites maximales de résidus de pesticides sur et dans les fruits et légumes. En d’autres termes, la procédure systématique d’autorisation et donc d’évaluation des substances actives et des pesticides, préalablement à leur mise sur le marché, n’était pas encore prévue.

Dès lors que la directive 91/414/CEE a imposé l’évaluation et l’autorisation préalable des pesticides et des substances actives qui les composent, le caractère facultatif de la consultation du comité scientifique, des pesticides puis des plantes, est devenu plus discutable.

II. Une évaluation systématique et indépendante

80. L’EFSA en charge de l’évaluation. La consultation des comités scientifiques

s’est progressivement systématisée, en particulier suite aux crises sanitaires des années quatre-vint-dix403, sans pour autant être inscrite dans les textes. Le règlement n° 1107/2009 a clarifié la situation en imposant une évaluation systématique des risques et de l’efficacité des pesticides et de leurs composants selon des critères définis. Cette évaluation est, de surcroît, réalisée, depuis le règlement n° 178/2002, par l’EFSA. L’EFSA est une autorité distincte de la

401 Décision 78/436/CEE de la Commission du 21 avril 1978 instituant un comité scientifique des pesticides, JOCE L 124 du 12 mai 1978, Article 4 et article 2, paragraphe 1.

402 Ibid., Article 2, paragraphe 1 : « Le comité peut être consulté par la Commission ».

403 Commission des Communautés européennes, Santé des consommateurs et sûreté alimentaire,

Commission européenne, dotée de la personnalité juridique404, et regroupe des experts scientifiques entièrement consacrés à l’évaluation scientifique des risques alimentaires. Les missions du comité scientifique des plantes rattaché à la Commission ont ainsi été transférées à l’EFSA. Celles du comité phytosanitaire permanent, en revanche, ont été attribuées au comité permanent de la chaîne alimentaire et de la santé animale (CPCASA), créé simultanément à l’EFSA par le règlement n° 178/2002405.

Le caractère indépendant de l’évaluation scientifique des risques et de l’efficacité des composants des pesticides est donc désormais doublement marqué. Sur le plan institutionnel, premièrement, l’évaluation est confiée à une entité clairement séparée de l’autorité décisionnaire. Deuxièmement, sur le plan procédural, l’évaluation n’est plus soumise au bon vouloir du décideur public. Comme l’indique le règlement n° 1107/2009, « l’Autorité effectue

une évaluation des risques, tandis que la Commission assume le rôle de la gestion des risques et prend la décision définitive concernant une substance active »406.

81. Des dispositions qui renforcent l’indépendance. D’autres éléments viennent

encore renforcer l’indépendance de l’expertise de l’Union européenne en matière de pesticides. L’EFSA peut ainsi produire des avis de sa propre initiative ou encore sur sollicitation du Parlement européen et des Etats membres407. Elle a en outre la possibilité de refuser ou modifier une demande d’avis scientifique dans plusieurs cas, à savoir, premièrement, « lorsque des demandes différentes sont formulées sur des questions

identiques », deuxièmement, lorsque la demande n’est pas accompagnée d’informations

générales expliquant la nature de la question scientifique devant être traitée ainsi que l’intérêt pour la Communauté, troisièmement, lorsque la demande « n’est pas claire », et quatrièmement enfin, lorsque l’EFSA a déjà rendu un avis sur la question et qu’il n’existe pas de nouveaux éléments scientifiques qui justifient son réexamen408.

82. L’occasion de développer les solutions alternatives aux pesticides. Dans la

pratique, l’évaluation des composants des pesticides est confiée au « groupe des produits

phytopharmaceutiques et de leurs résidus », séparé depuis 2006 du « groupe de la santé des plantes ». En conséquence, les institutions de l’Union européenne considèrent que la santé des

404 Règlement (CE) n° 178/2002, op. cit., Article 46. 405 Ibid., Article 62, paragraphe 2.

406 Règlement (CE) n° 1107/2009, op. cit., considérant n° 12.

407 Règlement (CE) n° 178/2002, op. cit., considérant n° 47, Article 29, paragraphe 1. 408 Ibid., Article 29, paragraphes 4 et 5.

plantes et les risques alimentaires associés dépassent la seule problématique de l’emploi de produits phytopharmaceutiques et nécessite, de fait, une expertise à part entière409. Cette scission, qui permet le développement d’une véritable évaluation de l’ensemble des solutions de lutte contre les organismes nuisibles aux plantes, témoigne sans doute de l’intérêt croissant des institutions de l’Union européenne pour ces solutions alternatives aux pesticides.

De la même façon que l’évaluation des composants d’un produit phytopharmaceutique a été confiée à une institution en charge de l’expertise, séparée de l’autorité gestionnaire, l’évaluation des pesticides a finalement été attribuée, en France, à une agence indépendante.

B. Le long processus de rattachement à l’AFSSA de l’évaluation

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