• Aucun résultat trouvé

2.4 Une grossesse apr` es un deuil pr´ enatal

3.1.5 Surmoi

Freud explique que le surmoi ne se constitue pas `a l’image des parents mais `a l’image de leur surmoi « il s’emplit du mˆeme contenu, devient le repr´esentant de la tradition, de tous les jugements de valeur qui subsistent ainsi `a travers les g´en´erations » (Freud, 1933, p. 94). Pour Freud, la formation du surmoi est corr´elative du d´eclin du complexe d’Œdipe. L’investissement sur les parents se transforme en identification aux parents, permettant l’int´eriorisation de l’interdiction des d´esirs œdipiens. « Le surmoi n’est ni un produit du ¸

ca ni un produit du moi : il apparaˆıt comme un syst`eme qui se constitue `a travers des bricolages interactifs auxquels participent les deux parents » (Lebovici, 1995, p. 119). Pour un certain nombre d’auteurs, l’int´eriorisation des interdits est bien ant´erieure au d´e- clin du complexe d’Œdipe. C’est le cas par exemple de l’´education sphinct´erienne (Ferenczi, 1925). Il y a pour Klein un surmoi pr´ecoce d`es la phase orale. Pour Spitz (1958) ce serait la formation du surmoi qui commencerait avant l’Œdipe, il reconnaˆıt des primordia au surmoi : L’interdiction par une action physique et un non de la m`ere `a l’enfant entrainant une frustration pulsionnelle et un investissement ambivalent de la m`ere ; Identification- imitation de l’enfant aux actions parentales ; Identification `a l’agresseur d’A.Freud, iden- tification `a un objet ambivalent. Le surmoi sera ensuite enrichi par les apports sociaux- culturels (´education, religion, moralit´e).

Le surmoi a une composante sadique mais le masochisme y est aussi pr´esent. L’enfant en phase œdipienne se contraint `a penser et `a agir de sorte `a ´eviter les « trois calamit´es de l’enfance : la perte d’objet, la perte d’amour et la castration » (formulation emprunt´ee `a Mahler), ainsi que l’angoisse ou la d´epression qui en d´ecoulent. Cependant ce n’est pas forc´ement dans le sens de ce que les parents consid`erent comme bien ou mal mais dans le sens du fantasme de l’enfant sur ce qu’en pensent ses parents. Brenner (1982) montre que « le masochisme joue un rˆole important dans la formation et dans le fonctionnement du surmoi normal » (cit´e par Frejaville, 1995, p.106). Ainsi, le d´eplaisir que l’on s’impose est une fa¸con d’´eviter un d´eplaisir plus grand, une des trois calamit´es.

3.1.5.1 surmoi au f´eminin

Dans l’optique freudienne, chez le gar¸con, c’est face `a la menace de castration que l’en- fant se voit contraint d’abandonner ses d´esirs, ce qui donne lieu `a la construction d’un « surmoi rigoureux » (Freud, 1932). Chez la fille `a l’inverse, c’est le constat de sa castra- tion et sa blessure narcissique qui engendre l’envie du p´enis et le complexe d’Œdipe. Ce dernier n’est jamais vraiment abandonn´e « le surmoi ne peut parvenir ni `a la puissance ni `a l’ind´ependance qui lui sont, au point de vue culturel, n´ecessaires. . . » (Freud, 1932, p. ). Autrement dit, « l’investissement narcissique de ses organes g´enitaux par la femme affaiblirait le jugement de sa conscience morale, puisque l’angoisse de castration n’existe que chez l’homme » (Cosnier, 1995, p. 147). Cependant, Cosnier note que la logique phal- lique de Freud lui permet « d’ignorer l’existence et la transformation des organes g´enitaux f´eminins, donc de l’angoisse de castration sp´ecifiquement f´eminine. La « vue » joue une fonction tr`es importante pour la sexualit´e infantile. . . mais il n’est pas question de ce que voit et vit l’enfant lorsque sa m`ere est enceinte » (Coscnier, 1995, p. 152). Freud, de par son roman familial, sa relation `a sa propre m`ere et sa place d’aˆın´e d’une fratrie de sœurs,

ne parvient pas `a tenir compte des d´esirs et des fantasmes pus sp´ecifiquement g´enitaux f´eminins. Il ne consid`ere de sp´ecifique au f´eminin que « un degr´e plus ´elev´e de narcissisme (ˆetre aim´e est un besoin plus fort que d’aimer), vanit´e corporelle comme effet de l’envie du p´enis, pudeur masquant le d´efaut d’organe g´enital. . . » (Cosnier, 1995, p. 155). En fait il y a la mˆeme angoisse de castration « g´enitale » (et non « phallique ») chez la fille. Si l’on tient compte de la derni`ere th´eorie des pulsions, et de l’importance donn´ee alors aux pulsions destructrices – th´eorie indissociable de l’´elaboration de la deuxi`eme topique – on ne peut que relativiser l’importance de la diff´erence des sexes par rapport `a la constitution du surmoi. Le masochisme moral, l’autopunition, le sentiment inconscient de culpabilit´e d´epassent, comme la mort, la probl´ematique de la castration. (Cosnier, 1995, p. 157) Cependant il y a bien des nuances. Ainsi, chez la femme c’est l’angoisse de perte d’amour qui remplace l’angoisse de castration, mais il y a bien angoisse « le complexe d’Œdipe de la fille est aussi coupable que celui du gar¸con : le d´esir de prendre la place d’un des parents est associ´e au d´esir de faire disparaˆıtre l’autre » (Cosnier, 1995, p. 157). Contrairement `

a l’id´ee freudienne d’une protection de la fille des angoisses de castrations, elles sont plus angoissantes « dans la mesure o`u les organes g´enitaux f´eminins sont internes et que le

« ventre de la m`ere » contenant les b´eb´es est l’objets d’attaques destructrices selon les fantasmes d´ecrits par M.Klein » (Cosnier, 1995, p. 159). Ceci accentue la d´ependance `a l’´egard des parents et le refoulement des attaques fantasmatiques les concernant : « On peut reconstituer l’origine du sadisme du surmoi `a partir du sadisme infantile contre les adultes, retourn´e contre soi pour ne pas perdre leur amour » (Cosnier, 1995, p. 165). Chabert met aussi en avant l’id´ee que « surmoi au f´eminin (et pas seulement le surmoi des femmes) » (Chabert, 2008, p. 88), contrairement `a ce qu’en pensait Freud, serait « la forme tyrannique et s´ev`ere, la moins aimante, la plus puissante de la conscience mo- rale » (Chabert, 2008, p. 89). Ce qui peut s’expliquer dans le d´eveloppement du choix d’objet chez la fille. Le choix d’objet chez la fille est plus risqu´e et complexe que pour les gar¸cons. Il y a une d´eception pr´ecoce dans le lien `a la m`ere qui n’a pas tout donn´e, ce qui entraˆıne un changement de choix d’objet et un d´eplacement sur le p`ere. Mais ce changement d’objet constitue d´ej`a une trahison envers la m`ere, `a laquelle s’ajoute celle de vouloir la remplacer aupr`es du p`ere. « Le risque encouru est majeur : (. . . ) d´etruire cette affection fondamentale assurant l’investissement narcissique, le premier s´ediment des identifications, indispensable pour attirer les forces pulsionnelles qui maintiennent le sen- timent d’exister, sa continuit´e libidinale. » (Chabert, 2008, p.89). Ainsi, en s’acceptant comme victime des punitions surmo¨ıques, le moi prot`ege l’objet des attaques qui risque- raient de le d´etruire : « cette protection que je t’offre est celle que j’ai attendue de toi, toi qui m’a abandonn´e(e) parce que je t’ai trahi(e) ou que tu l’as cru » (Chabert, 2008, p. 90).

3.1.5.2 Le surmoi, garant du narcissisme

Nous l’avons vu, classiquement c’est l’id´eal du moi qui est reli´e au narcissisme. Mais nous avons aussi constat´e qu’id´eal du moi et surmoi ´etaient intimement li´es. Ainsi, le surmoi a aussi un rˆole `a jouer dans le fonctionnement narcissique. « Proc´edant `a la fois de l’intrapsy- chique et de l’intersubjectif, la formation du surmoi paraˆıt indissociable de l’investissement

narcissique du moi et de l’´elaboration de l’objet interne » (Frejaville, 1995, p. 109). L’action du narcissisme vise l’unit´e et en terme psychanalytique vise `a la construction de l’appareil psychique. C’est la perte en amont qui engage cette construction et c’est ainsi qu’on peut y comprendre `a la fois la place fondamentale des identifications mais aussi le rˆole important de la formation du surmoi dans cette entreprise : « Il se situe au point de jonction de l’individuel et du collectif, il est port´e par les valeurs et les aspirations de l’id´eal du moi, il est le garant des interdits originaires de l’inceste et du parricide. Dans le mˆeme mouve- ment il draine les transformations civilisatrices susceptibles d’endiguer et d’apprivoiser la sauvagerie du ¸ca » (Chabert, 2008, p. 93).