• Aucun résultat trouvé

Les sections du codex Bruce et la direction des fibres de papyrus : Les Livres

Chapitre 2 L’histoire de la recherche

2. Codicologie du codex Bruce

2.2. Les sections du codex Bruce et la direction des fibres de papyrus : Les Livres

Reprenons chacune des six sections matérielles des Livres de Iéou et voyons ce que nous pouvons en dire à la lumière d’une enquête papyrologique et codicologique, aussi limitée soit-elle. La première section, c’est le folio que Schmidt place au tout début des

Livres de Iéou, sur un des côtés duquel – recto ou verso, on ne peut le déterminer –, se

trouve dessinée une croix, accompagnée de monogrammes grecs. Les fibres du côté sur lequel se trouve la croix sont horizontales (→), et l’autre côté resté vide présente des fibres verticales (↓). Comme ce folio ne contient aucun texte, il est difficile de déterminer s’il appartient bien aux Livres de Iéou et même s’il était placé en tête ou à la fin du codex. La plupart du temps, ce genre de décoration était en effet placé au début d’un codex et avait une intention apotropaïque309, mais le cas du codex Glazier (Bibliothèque Pierpont Morgan de New York – CopG67)310 nous invite à faire preuve de prudence. Ce manuscrit renferme, comme notre codex, une croix occupant une pleine page de manuscrit, mais elle est située à la toute fin de ce dernier et rien n’indique qu’elle répondait à une croix initiale aujourd’hui perdue311. Quoi qu’il en soit, le fait que le codex Bruce ne comporte aucune conclusion de traités, mais une introduction (voir deuxième section ci-dessous), nous porte à croire que cette croix devait originellement la précéder312.

La deuxième section des Livres de Iéou existe en deux exemplaires. Il s’agit en effet de la célèbre « double introduction », que Schmidt considère comme l’introduction des

Livres de Iéou (les pages 1 à 4 et 1a à 4a du manuscrit; p. 39 à 47 Schmidt). Cette partie

309 Voir Leroy, 1964, p. 113.

310 Pour une description, voir Plummer, 1968, p. 7-8.

311 Leroy, 1974, p. 57 affirme qu’il faut « considérer que sur ce point le volume de la Glazier Collection

constitue un hapax dans l’histoire de l’iconographie des livres ».

312 La croix du codex Bruce a intéressé, entre autres, Cramer, 1964a, p. 40-51 (surtout p. 40-41), de même que

Leroy, 1974, p. 58-59. On peut aussi mentionner les croix qui figurent à la toute fin de la Lettre de Pierre à Philippe dans le codex Tchacos (CT 1 9). Ces dernières sont cependant très petites et n’ont apparemment comme fonction que de remplir l’espace qui reste à la fin de la page.

semble bien correspondre à ce que l’on attend du début d’un traité de ce type. Nous y trouvons d’abord un incipit, qui est suivi d’un prologue dans lequel l’auteur annonce ce dont traite l’ouvrage : « Voici le livre des connaissances du Dieu invisible ». Pour la première version de l’introduction (p. 1-4), nous avons → ↓ → ↓ et pour la seconde (p. 1a- 4a) → ↓ ↓ →.

La troisième section va des pages 5 à 34 du manuscrit (p. 47-78 Schmidt). Le récit commence abruptement avec l’émanation de IÉOU, le dieu de la vérité. Une fois émis, IÉOU est mis en mouvement par le Père afin de produire d’autres émanations, elles-mêmes appelées « Iéous »313. Ces Iéous sont à leur tour mis en mouvement afin que d’autres émanations en sortent. Toutes ces émanations remplissent les trésors, les demeures célestes des Iéous, qui sont représentées figurativement dans le manuscrit par des diagrammes. Cette troisième section se termine aujourd’hui sur le diagramme intitulé « Iéou 28 ». Pour cette troisième section, nous avons une séquence très régulière qui alterne entre fibres → et ↓ de la page 5 jusqu’à la page 34.

La quatrième section est composée de deux folios et va des pages 35 à 38 du manuscrit, selon la classification de Schmidt (p. 79-82 Schmidt). Ce fragment est un hymne incomplet au mystère primordial, qui raconte comment IÉOU a établi les éons. Ces quatre pages font ↓ → ↓ →.

La cinquième section des Livres de Iéou est, avec ses quarante-huit pages, la plus longue des six sections. La présence d’un titre à la page 53 du manuscrit divise cette section en deux parties. La première partie couvre les pages 39 à 53 du manuscrit (p. 83-98 Schmidt) et relate la traversée des trésors cinquante-quatre à soixante par les disciples; elle se termine sur un hymne de Jésus à son Père, hymne qui est suivi d’un titre : « Le livre du grand discours mystérique »314. La deuxième partie va des pages 54 à 86 du manuscrit (p. 99-138 Schmidt). On y trouve d’abord un exposé « sacramentaire », puis Jésus y raconte la traversée des quatorze éons. Dans cette partie, les pages 51 à 74 sont dites par Woide dans son Pro Memoria être unies les unes aux autres (cohaerent)315. De ces quarante-huit

313 Pour éviter une confusion certaine, nous capitalisons le « IÉOU, dieu de la vérité », pour mieux le

distinguer de ses émanations à lui, les « Iéous ».

314 Voir les Notes philologiques et textuelles à 53,27 pour des précisions sur notre traduction du titre. 315 Voir l’Annexe 1, p. 477-478.

pages, manquent aujourd’hui les pages 45 à 50, qui ont probablement disparues lors de l’intervention de la Bodléienne sur le manuscrit, entre 1843 et 1882316.

Dans cette cinquième section, nous avons observé pour les pages 39 à 64 une séquence régulière de ↓ →. Dans cette séquence, il nous est cependant impossible de contrôler la direction des fibres pour les pages 45 à 50. À la page 65, la séquence s’inverse, et devient → ↓. Seuls deux folio viennent briser la régularité de cette séquence : les pages 69 et 70, qui font respectivement ↓ et →, et les pages 85 et 86, qui ont, pour la p. 85 des fibres ↓ à droite, mais → à gauche et pour la p. 86 des fibres → à gauche, mais ↓ à droite. Nous reviendrons plus loin sur ces deux cas d’espèce.

La sixième section de Schmidt se compose d’un seul folio et comprend les pages 87 et 88 du manuscrit (p. 139-141 Schmidt). S’il est vrai que le contenu de ce folio est fort différent d’une page à l’autre, l’examen du manuscrit confirme qu’il s’agit du recto et du verso d’un seul et même folio. La page 87 contient un hymne au mystère développé sur le thème de l’eau, tandis que la page 88 quitte le registre de l’hymne pour décrire le passage de l’âme dans les lieux des archontes. Ce folio est le seul pour lequel nous contestons l’ordonnancement de Schmidt. Nous voyons plutôt la p. 88 comme le recto et la p. 87 comme le verso317. Le folio présente des fibres ↓ à la p. 88 et → à la p. 87.

Documents relatifs