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Plateau de lœss autour du Fleuve Jaune

CHAPITRE 4 LA DIVERSITE DES VIEUX VILLAGES CHINOIS

I. Une diversité au niveau architectural

2. Plateau de lœss autour du Fleuve Jaune

Traversé par le Fleuve Jaune dans ses cours supérieur et moyen, le plateau de lœss est un vaste plateau constitué de dépôts sédimentaires éoliens de lœss. Il recouvre principalement, d’ouest en est, la marge nord-est du Qinghai, le centre et le nord-est du Gansu, la plus grande partie du Ningxia, le nord du Shaanxi, la plus grande partie du Shanxi, le sud de la Mongolie intérieure, le nord-ouest du Henan, le sud-ouest et le nord-est du Hebei. Considérée comme le berceau de l’agriculture et de la civilisation chinoise, cette zone géographique a comme particularié de contenir la plus grande concentration d’habitations troglodytiques au monde.

Carte 4-1 Localisation du China Loess Plateau - Plateau de Lœss — Wikipédia

Source : http://fr.wikipedia.org/wiki/Plateau_de_Lœss#mediaviewer/File:China_Loess_Plateau.png Plateau de loess

Indifféremment nommées « yao-dong », ces maisons-grottes présentent comme tous les autres types d’habitations chinoises, une variété qui « s’observe tant dans

les formes rencontrées que dans le degré de complexité de leur élaboration. Nous pouvons pour la clarté de l’exposé proposer une typologie comprenant essentiellement deux grandes familles :

- les grottes creusées, où nous distinguerons :

 les troglodytes latéraux, [creusés dans les escarpements de loess, à flanc de vallée],

 les troglodytes creusés en puits, [réalisés à la surface du plateau autour d’une excavation en constituant une espèce desiheyuan souterrain] ; - les grottes construites, [édifiées totalement ou partiellement à l’extérieur,

avec une structure en voûte de plein cintre inspirée des constructions souterraines.]

[...] ces catégories ne sont pas étanches ; les passages de l’une à l’autre se font par une continuité de situations intermédiaires. Cette remarque s’applique au passage des grottes creusées aux grottes construites, mais également à l’intérieur de chacune de ces deux grandes familles. Le « creusé » n’est jamais exclusif du « construit ». » (Jean-Paul Loubes, 1988, p. 50)

L’histoire des yaodong remonte très loin. Des habitations de type yaodong datant du néolithique tardif ont été successivement redécouvertes ces dernières années. Parmi lesquelles, les plus anciennes sont celles près l’actuel village de Yangguanzhai dans le district de Gaoling au nord de la préfecture de Xi’an. Il s’agit d’un groupe de 17 grottes datant de 3500 ans avant J.-C. creusées latéralement dans

une falaise dominant la rivière Jing. Il est suivi par la redécouverte des troglodytes creusées en puits datant de 3000 ans avant J.-C. dans la même région, dans le district de Qixian, considéré comme le berceau de la Dynastie Zhou. Malgré toutes ces découvertes, les chercheurs chinois estiment généralement que ce type d’habitat s’est développé surtout à partir de la dynastie Han ([-202] à 220), parallèlement à une amélioration progressive des techniques de construction jusqu’aux dynasties Sui (581 à 618) et Tang (618 à 907). C’est cependant au cours des dynasties Ming (1368 à 1644) et Qing (1644 à 1912) que leur rythme de construction a atteint son apogée.

Il est hors de doute que les yaodong font un habitat adapté parfaitement aux conditions géologique (d’importantes couches de loess d’une épaisseur de jusqu’à quelques centaines de mètres) et climatique (de faibles précipitations annuelles entre 300 et 600 mm) de la région. Le peuple leur reconnaît plusieurs bonnes qualités dont les principales sont (Caroline Bodlec, 2005) :

- qualités thermiques, soit le maintien d’une température stable à l’intérieur des maisons tout au long de l’année, dû notamment à la couche de lœss au- dessus et à l’orientation sud-sud-est ou sud-sud-ouest ;

- résistance aux tremblements de terre : l’architecture de type yaodong présente certaines qualités de résistance aux secousses sismiques grâce surtout à l’usage de la voûte en adobe et au choix de la couche de loess lors du creusement ;

- Economie de matériaux de constructions : il s’agit des yaodong troglodytiques qui sont évidemment plus économiques que les maisons à structure de charpentes et de murs maçonnés.

Selon l’estimation du Laboratoire de l’Architecture verte de l’Université d’Architecture et de Technologie de Xi’an (2008), dans les milieux ruraux du plateau de loess, quelque vingt millions de personnes perpétuent encore cet habitat.

Il est important d’indiquer que, présentant par certains aspects « une originalité

au sein du panorama mondial d’habitations troglodytiques» (Caroline Bodlec, 2005,

p. 193) , les yaodong de Chine ne destinent toutefois pas uniquement à l’habitation, ils peuvent aussi être des ateliers, entrepôts, étables, écoles, temples des ancêtres ou des dieux, etc., ayant donc toutes les fonctions comme les autres formes de bâtiments.

Photo 4-2 : Dikenyuan, district de Shaan, province du Henan

En effet, « les techniques de creusement, l’édification des grottes construites, la

maçonnerie et la charpenterie chinoise traditionnelle vont conjuguer leurs moyens, exprimer toutes leurs ressources, dans la topographie de ravins, de collines, de terrasse naturelles taillées et crevassés par l’érosion, qui caractérisent les zones accidentées du pays de loess. [...] La progression vers la complexité que nous avons suivie depuis les troglodytes latéraux élémentaires, jusqu’aux groupements importants, trouve une expression particulièrement élaborée dans un certain nombre de résidences tenant à la fois du palais chinois et de la demeure fortifiée.

Ces vastes constructions réalisent une synthèse difficile entre deux impératifs qui peuvent apparaître sinon incompatibles, du moins contradictoires :

- d’une part le programme de la maison chinoise et les principes qui président

à son organisation :

 axialité dans la composition et sa conséquence, symétrie des ailes de

bâtiment autour des cours carrées ;

 succession des cours emboîtées selon ces axes principaux.

[...]

- d’autre part, la topographie accidentée qui crée les conditions les plus

défavorables pour l’application des principes précédents ([...]), dont le site idéal d’application serait bien évidemment le terrain plat.

Ces contradictions sont résolues par les techniques du troglodytisme qui permettent le remodelage du site en même temps que la construction d’habitations : terrasses sur voûtes des grottes construites, soutènement de terrain ménageant

plusieurs terrasses, imbrication dans la colline de divers niveaux de grottes creusées. » (Jean-Paul Loubes, 1988, p. 86)

Par ailleurs, il ne faut pas oublier que, sur les yuan, hauts plateaux tabulaires, plats et larges, entourés de ravins, ces contradictions ne restant pratiquement plus, des « siheyuan souterrains » peuvent être réalisés facilement. Certains villages sont même entièrement « gravés en creux », par exemple les villages de Macun et de

Xiniucun dans le district de Pinglu au Shanxi.

Photo 4-3 : Dikenyuan, district de Shaan, province du Henan

De fait, le mot yaodong ne désigne plutôt qu’un type de « construction » comme expliqué plus haut ; tandis que le mot siheyuan ou sanheyuan écrit notamment l’organisation spatiale des différentes composantes d’un ensemble de batîments. Donc, il est tout à fait normale qu’il existe des yaodong arrangés en

siheyuan ou sanheyuan, ou des siheyuan ou sanheyuan composés de yaodong. Cette

coïncidence peut atteindre la perfection surtout avec les « grottes constuites », par exemple au Shanxi, la demeure des Shi du village de Shijiagou dans le district Fenxi et la demeure des Zhu du village Xucun en banlieue de Huozhou concernent tous un ensemble des siheyuan composés de « grottes constuites » ; et le village de Hougou dans le canton de Dongzhao à l’est de Yuci est presque entièrement constitué des « grottes constuites » arrangés en siheyuan ou sanheyuan. Il existe aussi des

demeures mélangées de bâtiments et de grottes, par exemple, le gigantesque manoir des Kang les Millionnaires en banlieue de Gongyi au Henan.

Quelques autres excellents villages de yaodong : - Lijiashan (district de Linxian, province du Shanxi), - Huaixiacun (district de Pinglu, province du Shanxi),

- Liujiamao et Yangjiagou (district de Mizhi, province du Shaanxi), - Liangjiazhuang (district de Chunhua, province du Shaanxi), - Hanjiabao (district de Qian, province du Shaanxi),

- Zhongtoucun et Miaogou (banlieue de Luoyang, province du Henan).

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