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CHAPITRE 4 LA DIVERSITE DES VIEUX VILLAGES CHINOIS

I. Une diversité au niveau architectural

1. Bassins centraux du Shanxi

En Chine traditionnelle, en plus des maisons simples, c’est-à-dire celles à plan rectangulaire avec trois travées (une salle principale flanquée par deux pièces latérales), les maisons à trois ou quatre ailes entourant une cour constituaient une autre forme très courante que l’on appelle heyuan.Si la cour est entourée par trois ailes, il s’agit d’un sanheyuan. Si elle est entourée par quatre ailes, il s’agit d’un

siheyuan. Ce dernier, dont le prototype parfait remonte jusqu’au XIe siècle avant J.- C. (dynastie des Zhou de l’Ouest)38

, était pendant très longtemps le type élémentaire des habitations en Chine du Nord. Il était également le modèle des yamen39, des palais, des temples et des monastères. Il y a des siheyuan tout simples et d’autres plus élaborés.

La conception du siheyuan se conformait parfaitement au code de conduite hiérarchique du confucianisme qui marquait une stricte distinction entre l’intérieur et l’extérieur, le supérieur et l’inférieur, l’homme et la femme. Un siheyuan est un espace emmuré, un enclos rectangulaire, formant un monde à part, reclus et isolé du monde extérieur. Toutes les pièces entourant la cour tournent le dos à l’extérieur. Dans un siheyuan simple, en régle général, les pièces exposées au sud, qui sont les plus ensoleillées, sont les pièces centrales (zheng fang) destinées aux maîtres de la maison ou aux plus âgés. Les pièces latérales (xiang fang), exposées respectivement à l’est et à l’ouest, sont occupées par ses descendants. Face à la pièce centrale, l’aile sud abrite les chambres d’amis, les salles d’études, les cuisines et les réserves. La porte de la maison se trouve aussi sur ce côté.

« Les familles riches ne se contentaient pas d’un siheyuan simple ; elles en

ajoutaient un deuxième et un troisième le long de l’axe sud-nord, formant des

38Il s’agit des vestiges découverts en 1976 au village de Fengchu dans le district de Qishan dans la province du

Shaanxi.

39En Chine impériale, un yamen était un ensemble de constructions variées servant à la fois de bureau

complexes de siheyuan. Au fur et à mesure de l’élargissement de la famille, on construisait de chaque côté de l’axe principal. Encore une fois, les plus vieux occuperaient le siheyuan le plus au nord...

Avant d’entrer dans à un siheyuan, on perçoit le mur écran[zhao bi ou ying bi]. Ce mur était autrefois le garant de l’intimité lorsque la grande porte de l’entrée principale était ouverte pour accueillir les visiteurs. Pour entrer dans le siheyuan, la personne devait contourner le mur par la gauche... En entrant par la porte principale, le visiteur tournait ensuite vers l’ouest, dans le premier siheyuan, où un serviteur demandait au visiteur de s’asseoir, alors qu’un autre annonçait son arrivée. Les membres de la famille se préparaient alors à recevoir le visiteur dans l’endroit convenable et selon les règles de l’art. Chaque siheyuan était séparé du suivant par une porte, flanquée d’une paire de lions en pierre. Dans certains complexes de siheyuan, on devait accéder aux siheyuan intérieurs en franchissant deux ou trois marches, et tous étaient organisés en fonction d’une exposition maximale au soleil et de l’éthique confucéenne. La grandeur et la décoration du siheyuan dépendaient de la richesse, du statut et du nombre de membres de la famille.

Si la famille possédait des animaux, elle ajoutait alors un espace pour une étable. En Chine du Nord, cet espace était habituellement situé dans la partie est du siheyuan principal, ce qui en formait un autre au sein du complexe. Les très grandes résidences qui comprenaient de nombreux siheyuan étaient finalement entièrement emmurées. A l’intérieur des murs, on pouvait trouver le jardin de la famille, des pâturages, parfois même un lac, et des siheyuan à l’intérieur d’autres siheyuan.» 40

Bien que celui de Pékin soit le plus connu surtout pour les étrangers, c’est dans les bassins centraux de la province du Shanxi où se concentrent le plus de siheyuan magnifiques servant de résidences familliales. Les habitants de cette région avaient la tradition de faire du commerce. Pendant les Ming et les Qing, ils constituaient l’une des deux colonies commericiales les plus puissantes en Chine. Cette prospérité commerciale a fait naître dans la région, à la campagne comme en ville, de nombreuses demeures somptueuses que l’on appelle dayuan.

Gardant un aspect varié, ces dayuan possèdent des caractères communs suivants : « Primo, [munis] de hauts murs d’encente. D’une hauteur égale

à celle d’un bâtiment de quatre ou cinq étages, les murs de brique dépourvus de fenêtre jouent le rôle de protection. Secundo, les principaux bâtiments ont un toit en une seule pente, permettant à la pluie de s’écouler vers la cour, ce qui rappelle un

40Voir

proverbe chinois disant qu’ « il ne faut pas laisser l’eau fertillisante quitter ses propres champs ». Tertio, la cour rectangulaire est longue du nord au sud et étroite d’est en ouest, et la porte se trouve souvent dans l’angle sud-est. » (Wang Qijun,

2006, p. 23), Quarto, dans presque n’importe quel dayuan, la salle des ancêtres n’occupe pas une place aussi importance que celle dans les maisons en Chine du sud ; en revanche, une scène de thêatre y est indispensable.

Située au coeur du village fortifié de la famille Qiao (Qiaojiabao) dans le district de Qixian, la gigantesque demeure des Qiao est mondialement connue pour avoir servi de beau décor au film de Zhang Yimou avec Gong Li « Epouse et condubines » et représente à la perfection ce style d’architecture. De l’extérieur, on remarque que cette résidence est constituée de murs épais en briques grises et d'un toit noir majestueux. Une fois à l’intérieur, on peut voir que la demeure comporte de nombreuses pièces. Par ailleurs, un axe central d’une longueur de 80 m et recouvert de dalles, divise la maison en deux parties Sud-Nord. Chacune d’elles est dotée de trois cours. A l’extrémité opposée de la porte d’entrée, se trouve une salle qui sert au culte des ancêtres. Somptueusement décoré, l’ensemble des six cours couvre une superficie de 90 000 m² environ. Les décorations se trouvent partout dans le domaine, même sur les cheminées des toits où elles sont impossibles à voir.

Photo 4-1 : la demeure des Qiao, district de Qi, province du Shanxi

Aujourd’hui, c’est surtout dans de petites cités anciennes et à la campagne que l’on trouve encore de telles grandes demeures. La plupart d’entre elles, entourée par

des maisons modestes et basses, forme chacune le noyau du village en question ; d’autres, en forme de manoir, constituent toutes seules un village entier. Outre celle des Qiao, parmi les plus connues, il y a encore :

- la demeure des Qu, dans le chef-lieu du district de Qixian;

- la demeure des Cao, dans le village de Beiguang dans le district de Taigu; - la demeure des Wang, dans le village de Jinsheng dans le district deLingshi; - le manoir des Chang, dans le village de Chewang dans le district de Yuci.

D’ailleurs, à la périphérie de cette région, se distribuent aussi plusieurs vieux villages constitués également de grands ou petits siheyuan ou sanheyuan parfois, par exemple :

- Dans l’est de la même province, le village de Xiaohe en banlieue de

Yangquan ;

- Toujours au Shanxi, dans le sud, les villages de la famille des Ding (district de Xiangfen), de Xiwenxing, de Guobi (district de Qinshui), de Guoyu et de

Huangcheng (district de Yangcheng) ;

- Sur l’autre rive du Fleuve Jaune, dans l’est de la province limitrophe du Shaanxi, le village de Dangjiacun en banlieue du district de Hancheng ; - Dans le sud-ouest de l’autre province limitrophe du Hebei, le village de

Piancheng dans le district de Shexian.

Ou encore un peu plus loin, en grande banlieue de Pékin, les villages de

Cuandixia et de Lingshui par exemple.

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