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La limitation des compétences exclusives des autorités nationales de la concurrence : Exemple de la CNCC du Burkina-Faso et la CNC du

Paragraphe I- Les compétences des structures nationales de la concurrence

B- La limitation des compétences exclusives des autorités nationales de la concurrence : Exemple de la CNCC du Burkina-Faso et la CNC du

Sénégal

D'abord, soulignons que contrairement au droit européen où il y a, d'une part, une coexistence des législations nationales de concurrence et de la législation communautaire et, d'autre part, un concours de compétences entre la Commission européenne et les différentes structures nationales de concurrence419, en droit de l’UEMOA la législation communautaire

de la concurrence « avale » les législations nationales420. Cela justifie largement les

compétences limitées des structures nationales de la concurrence dans le processus de contrôle de la concurrence. Ainsi, leurs compétences exclusives dans le contrôle de la concurrence se limitent donc essentiellement à l'application des législations nationales. En effet, les compétences des autorités nationales se limitent à l'assurance de la transparence du marché et au contrôle des pratiques commerciales restrictives de la concurrence421. Ces dernières sont énumérées par l'article 21 de la loi précitée422. Ainsi les compétences de ces autorités nationales de la concurrence ne tirent pas directement leur fondement juridique dans le droit communautaire de la concurrence, mais plutôt du droit communautaire en général (droit primaire), puisque, le principe de subsidiarité qui est un des principes clés du droit communautaire permet aux structures nationales de se saisir d'une compétence exclusive dans les domaines ne relevant pas de la compétence du droit communautaire. Ainsi, le domaine « du petit droit de la concurrence », c'est-à-dire la transparence du marché et les pratiques restrictives de la concurrence, notamment le droit de la concurrence déloyale, est réservé implicitement à la compétence exclusive des autorités nationales de la concurrence. Dans ce sens, elles peuvent ordonner des mesures provisoires423, des cessations d'infractions424,

419 Voir l’article 3 paragraphe 1 du Règlement 1/2003/CE.

420 Sur ce point le législateur UEMOA a fait évoluer la position de la jurisprudence européenne de 1969 en

l'adaptant au contexte économique de la zone UEMOA. En effet, la CJCE dans l'affaire Walt Wilhelm du 13 février 1969 en acceptant l'application parallèle des deux législations notamment communautaire et nationale, précise que cela ne serait admis que lorsqu'elle ne porte pas préjudice à l'application uniforme dans tout le marché commun. Ce qui suppose que les législations nationales se voient écrasées par le droit communautaire.

421 Voir, article 35 point 2 et 3 de la loi n°15/94/ADP du 5 mai 1994 modifiée par la loi 33-2001 du 4 Décembre

2001 du Burkina-Faso.

422 L'article 21 de la loi n°15/94/ADP du 5 mai 1994 modifiée par la loi 33-2001 du 4 Décembre 2001 du

Burkina-Faso dispose que : « l’importation ou l’exportation sans titre ou sans déclaration en douane des biens et produits soumis à ce régime; l’importation ou l’exportation de marchandises en violation de la réglementation du contrôle des marchandises avant expédition; la détention et la vente desdits biens, produits et marchandises; toute falsification pratiquée sur des documents à des fins d’importation ou d’exportation; toute forme de cession de titre d’importation ou d’exportation ».

423 Voir l’article 3 de la loi n°15/94/ADP du 5 mai 1994 modifiée par la loi 33-2001 du 4 Décembre 2001 du

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infliger des amendes425, ordonner la publication de leurs décisions dans un journal aux frais du contrevenant426. En outre, elles veillent à la surveillance du déroulement du marché par application du droit communautaire afin de repérer les dysfonctionnements relatifs aux pratiques commerciales anticoncurrentielles427. Au contraire, une approche comparative avec le droit européen nous permet de constater que la compétence des autorités nationales s’exerce concurremment avec celle de la Commission dans l'application de la législation communautaire (européenne). En droit européen, les autorités de concurrence des États membres sont compétentes pour appliquer les articles 101 et 102 TFUE. À cet effet, « elles peuvent, agissant d'office ou saisies d'une plainte, adopter les décisions suivantes : ordonner la cessation d'une infraction et des mesures provisoires, accepter des engagements et infliger des amendes et des astreintes ou toute autre sanction prévue par leur droit national. Lorsqu'elles considèrent, sur la base des informations dont elles disposent, que les conditions d'une interdiction ne sont pas réunies, elles peuvent également décider qu'il n’y a pas lieu pour elles d'intervenir »428. Toutes les compétences précitées sont aussi détenues par les

autorités nationales de la concurrence des États membres de l'UEMOA, sauf que celles-ci se limitent à l’application du droit interne de la concurrence (petit droit de la concurrence) alors que celles de l'UE s'étendent au droit communautaire. En effet, la grande différence qui se trouve ici entre le système de contrôle de l’UE et celui de l’UEMOA est le fait que les structures nationales de la concurrence de cette dernière sont quasiment dépourvues de tout pouvoir dans l’application du droit communautaire de la concurrence et sont réduites à des structures « inutiles », contrairement au droit européen où il y a un partage de pouvoir entre les structures nationales et la Commission européenne en fonction de l’infraction en cause. C’est dans ce sens que la doctrine européenne considère que, « le critère de l’obligation au contrôle européen d’une opération de concentration est, en principe, sa dimension européenne, celui de l’obligation au contrôle national est, en principe, sa dimension nationale »429.

Par ailleurs, l'article 35 de la loi précitée énumère aussi les pratiques anticoncurrentielles « le grand droit de la concurrence » parmi les infractions qui sont

424 Ibid. 425 Ibid. 426 Ibid.

427 Voir l’article 31. 1 de la directive 2/2002/UEMOA. 428 Voir l’article 5 du Règlement 1/2003/CE.

429 Voir André DECOCQ et Georges DECOCQ, op.cit., p.232. Ou voir l’article L. 430-2 et suivants du C.com

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interdites sur le marché national430, mais l’autorité de la concurrence nationale, en l’occurrence CNCC du Burkina n’est pas compétente en la matière. Cela est d'une logique indiscutable, puisque le droit communautaire s’intègre obligatoirement dans l'ordonnancement juridique interne des États membres mais n’octroie pas de compétences de contrôle aux structures nationales dans ces matières, ce qui implique que leur constatation et leur sanction relèvent du pouvoir exclusif de la Commission de l'UEMOA431. Cependant, il

ressort de l’article précité que « la Commission nationale de la concurrence et de la consommation peut, après avoir entendu toutes les parties intéressées, au besoin contradictoirement, ordonner qu'il soit mis fin aux pratiques incriminées au Chapitre I, Titre I du Livre II de la présente loi dans un délai déterminé ou imposer des conditions particulières »432. Ceci semble être un empiètement des compétences exclusives de la

Commission de l’UEMOA, puisque l’article 90 du traité de Dakar octroie à la Commission un monopole de pouvoir décisionnel en matière de pratiques anticoncurrentielles.

Par ailleurs, ces quasis pouvoirs de la Commission ne l’empêchent pas de collaborer avec les structures nationales pour le besoin d’une efficacité des opérations de contrôle.

430 Selon l’article 35 de la loi n°15/94/ADP du 5 mai 1994 modifiée par la loi 33-2001 du 4 Décembre 2001 du

Burkina-Faso, « Sont soumises aux dispositions du présent Livre, les infractions ci-après : - les infractions qualifiées de pratiques anticoncurrentielles ; -les infractions aux règles de la transparence du marché et aux pratiques restrictives de la concurrence ; -les infractions aux dispositions annexées à l’organisation de la concurrence ». Et l’article 36 de la même loi en disposant que, « est qualifié de pratique anticoncurrentielle, le fait de contrevenir aux dispositions du Livre I, Titre III de la présente Loi » fait un renvoi aux ententes et abus de dominations. Les articles 5 de ce livre I dans son titre III dispose que, « toutes les formes d’actions concertées, de conventions, d’ententes expresses ou tacites ou de coalitions ayant pour objet ou pouvant avoir pour effet d’empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence sur un marché, sont prohibées notamment lorsqu’elles tendent à : -1° limiter l’accès au marché ou le libre exercice de la concurrence par d’autres entreprises ; -2° faire obstacle à la fixation des prix par le libre jeu du marché en favorisant artificiellement leur hausse ou leur baisse ; -3° limiter ou contrôler la production, les débouchés, les investissements ou le progrès technique ; - répartir le marché ou les sources d’approvisionnement » et l’article 6 ajoute que, « est prohibée dans les mêmes conditions que celles visées à l’article 5 ci-dessus, l’exploitation abusive par une entreprise ou groupe d’entreprises : D’une disposition dominante sur le marché intérieur ou une part substantielle de celui-ci :- 1° de l’état de dépendance économique dans lequel se trouve à son égard, une entreprise cliente ou fournisseur qui ne dispose pas de solution équivalente ; -2° ces abus peuvent notamment consister en des refus de vente, en des ventes liées, en des conditions de vente discriminatoires ou en des pratiques de prix imposé ainsi que dans la rupture injustifiée de relations commerciales ».

431 Voir l’article 90 précité du traité de Dakar.

432 Voir l’article 3 bis de la loi n°15/94/ADP du 5 mai 1994 modifiée par la loi 33-2001 du 4 Décembre 2001 du

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Paragraphe II- La collaboration entre la Commission et les autorités

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