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Des multiples travaux que la libre administration a cristallisés, il convient de retenir qu’elle ne devient effective que pour autant que lui sont créés des cadres juridique, institutionnel et financier adéquats. Autrement dit, la libre administration n’est garantie que lorsque les organes locaux ont «la maîtrise juridique de leur activité» 111 . Ce qui exige au moins trois préalables. D’abord, le bénéfice de la personnalité juridique, ensuite l’élection des dirigeants et enfin, l’autonomie financière112 .

109 Le Centre de Droit Administratif et de l’Administration Territoire, a organisé en janvier 2015, sous la direction du Pr Ibrahim SALAMI, un colloque sur l’effectivité de la décentralisation au Bénin.

110 V. entre autres, RIVERO J., WALINE J., Droit administratif, Paris, Dalloz, 21ème éd., 2006, pp. 70-160 ; CHAPUS R., Droit administratif général, Paris, Montchrestien, 15ème éd., pp. 389-435 ; SY D., Droit administratif, Dakar, CREDILA, L’Harmattan Sénégal, éd. revue corrigée et augmentée, pp. 197-243 ; SALAMI I. D., Droit administratif, Cotonou, CeDAT, 2015, pp. 78-84.

111 Au Bénin, l’organe délibérant est dénommé conseil communal pour les communes de droit commun et conseil municipal pour les communes à statut particulier (Loi n° 97-029, art. 11 ; Loi n° 98-005, art. 6). Au Niger, il s’agit du conseil municipal pour toutes les communes (Ord. n°2 010-54, art. 22 et 23) et du conseil régional pour les régions (Ord. n° 2010-54, art. 97 et 98). EISENMANN Ch., «Les structures de l’administration» in Traité de science administrative, Paris, Ed. Mouton, 1966, p. 229.

112 VEDEL G., Droit administratif, Paris, PUF, p. 641. : «L’élection est par excellence la technique qui assure l’autonomie des organes chargés de la gestion des intérêts en question».

21 La personnalité juridique fait de la collectivité territoriale décentralisée une personne morale, un sujet de droit, distinct de l’Etat central. Ce statut confère à celle-ci une aptitude à la vie juridique. Cette condition est si essentielle qu’elle est souvent incluse dans la définition de la décentralisation113 ainsi que le reflète celle qu’en donne PACTET114. La libre administration apparaît ainsi comme une liberté de nature essentiellement organique115. Il n’y a qu’à considérer les textes constitutionnels pour s’en convaincre. Bien qu’étant habilité à déterminer les conditions de la libre administration, le législateur trouve une limite à son intervention, «celle qui résulte de l’existence nécessaire de conseils élus»116. Pour garantir l’autonomie de la collectivité territoriale, le procédé le plus convenable et le plus efficace est celui de l’élection de l’organe chargé de l’administrer auquel elle est censée assurer une relative indépendance117. Encore faut-il que lesdits organes soient dotés de compétences couvrant l’ensemble des affaires essentiellement locales.

La collectivité bénéficie d’une clause générale de compétence qui lui donne vocation à gérer ses propres affaires118. C’est le sens qu’il convient d’accorder à la Décision n° 85-196 DC, Loi sur l’évolution de la Nouvelle-Calédonie, du 8 août 1985 du Conseil constitutionnel français qui a estimé que, pour s’administrer librement, une collectivité locale doit disposer d’un conseil élu «doté d’attributions effectives»119. Il ne peut toutefois en être déduit que tout

113 V. à ce sujet, SCHÖNDORF-HAUBOLD B., «L'émergence d'un droit commun de l'autonomie territoriale en Europe», Revue française d'administration publique, 2007/1, n° 121-122, p. 203 ; CORNU G., op. cit., p. 296 ; DEBBASCH Ch. et al., Lexique de politique, 7ème éd., Paris, Dalloz, 2001, p. 129.

114 PACTET P., Institutions politiques. Droit constitutionnel, Paris, Dalloz - A. Colin, 2003, pp. 48-49 : «en dehors et en marge de l’Etat personne morale… des collectivités territoriales… dotées elles aussi de la personnalité morale, habilitées à s’administrer elles-mêmes dans des conditions d’une relative autonomie par rapport aux gouvernants et aux organes centraux».

115 CHAPUISAT L.-J., «Libertés locales et libertés publiques», AJDA, 1982, p. 354.

116 BOULOUIS J., «Une nouvelle conception institutionnelle de l'administration territoriale. Commentaire des décisions du Conseil Constitutionnel», AJDA., 1982, p. 304.

117 De VILLIERS M., Le DIVELLEC A. la définissent comme la «procédure par laquelle un corps électoral confère un mandat à une ou plusieurs personnes qu’il choisit par son vote». De VILLIERS M., Le DIVELLEC A., Dictionnaire du droit constitutionnel, Paris, Dalloz|Sirey, 7ème éd. 2009, p. 142. PACTET P., ibidem. JICQUEL J., op. cit., p. 65. L'élection constituerait «la pierre de touche de la décentralisation».

118 Ce qui la différencie des établissements publics qui obéissent au principe de spécialité.

119 Dans une perspective développementaliste, cette conception reste valide ainsi que l’affirme Alpha Omar KONARE pour qui «Le postulat de tout développement possible me semble basé sur la décentralisation. Principe fondé sur une morale de l’humilité de l’Etat et sur la conviction qu’il ne saurait y avoir de meilleur avocat que les populations elles-mêmes pour déterminer leurs propriétés et gérer leur cause. La décentralisation n’est pas la panacée mais la seule alternative à l’exclusion et aux abus de tous genres...». Voir KONARE, A.O., Discours prononcé au colloque international sur «L’Afrique et les nouvelles technologies de l’information», Genève, 17 octobre 1996.

22 aménagement législatif des compétences ou une spécialisation soit contraire à la constitution120. Il est même nécessaire notamment lorsque l’organisation territoriale prévoit plusieurs échelons de collectivités territoriales. Il importera seulement que soit préservé l’esprit qui est à l’origine de la clause de compétence121. Mais la question des compétences locales est en prise directe avec une difficulté, celle de la délimitation des affaires locales que la dynamique de la vie locale ne permet guère d’enfermer dans une énumération et que la nécessaire collaboration entre personnes territoriales ne permet pas de barricader122. Au plan des moyens, la libre administration suppose une liberté d’organisation qui se manifeste à travers la libre mobilisation et l’autonomie de gestion des moyens financiers, matériels et humains123. Le conseil délibérant est responsable de la définition en quantité et en qualité desdits moyens que l’exécutif de la collectivité met en œuvre124. Or, la collectivité est un employeur singulier125. Elle est autonome, administrée par un conseil doté d’un exécutif, tous élus pour un mandat limité mais gérant des ressources publiques. Cette spécificité induit la nécessité pour le législateur d’instaurer un régime qui, quoique nécessairement libéral, assure une bonne utilisation des ressources publiques.

Une collectivité ne peut être autonome sans moyens propres d’action. En France, depuis les lois de 1871 sur le département et de 1884 sur la commune, décentralisation et autonomie financière sont demeurées liées126. En ce sens, le pouvoir budgétaire local peut

120 PASTOREL J.-P., «Collectivité territoriale et clause générale de compétence», RDP, 2005, pp. 51-80. V. aussi PONTIER J.-M., «Semper manet. Sur une clause générale de compétence», RDP, 1984, pp. 1443-1472 et BÉNOIT F.-P., Collectivités locales, Dalloz, T. 1, pp. 322-412.

121 Art. 4 de la Charte européenne de l’autonomie locale : «Les collectivités locales ont, dans le cadre de la loi, toute latitude pour exercer leur initiative pour toute question qui n’est pas exclue de leur compétence ou attribuée à une autre autorité».

122 BERNARD P., «La coopération entre l’Etat et les collectivités territoriales. Réflexions sur la co administration» in CURAPP, La loi du 28 pluviôse an VIII, PUF, 2000, pp. 123-128.

123 Bénin : Loi n° 97-029, art. 108 ; Niger : Ord. n° 2010, art. 3, al. 3.

124 Niger, Ord. n° 2010-54, art. 86 : «Le maire crée et organise, par arrêté, les services propres de la commune après délibération du conseil municipal» ; art. 87, al. 2 : «Toute création de poste d’emploi doit être autorisée par le conseil municipal et inscrite au budget».

Bénin : Loi n° 97-029, art. 48 : «Le maire est le premier responsable de la commune. Il est le chef de l'administration communale».

125 BOURDON J., «La fonction publique territoriale, 20 ans d’évolution permanente», AJDA, 2004, p.122 ; FIALAIRE J., «Droit de la fonction publique territoriale et management des ressources humaines», RGCT, 2004, p.

847 ; THOENIG J.-C., PIN J.-F., «Où va la fonction publique territoriale?», Pouvoirs locaux, 2003/IV, n° 59, p. 9.

126 MUZELLEC R., «Qu’est-ce que l’autonomie financière des collectivités territoriales», LPA, n° 7, 1991, pp. 19-25.

23 être considéré comme un principe fondamental en matière de libre administration127. Ceci implique que la collectivité dispose de marges suffisantes en matière de mobilisation et d’affectation de ses ressources d’une part et de programmation des dépenses, d’autre part128. La doctrine dominante et la jurisprudence font de l’autonomie financière une condition essentielle de la libre administration129 car «avoir un patrimoine, avoir des agents, avoir des ressources financières suffisantes, voilà qui est déterminant pour l’autonomie ainsi entendue»130. L’autonomie financière se révèle être le point de convergence des différentes lignes directrices en matière de libre administration.

Il demeure cependant que la notion d’autonomie financière n’est pas clairement définie par le législateur. Même pour la doctrine, l’exercice paraît délicat. Le Pr Robert HERTZOG souligne à ce propos que «si l’autonomie financière constitue un objectif politique faisant consensus, elle devient insaisissable et pétrie de contradictions dès qu’on veut l’enfermer dans une définition juridique apte à produire des effets normatifs»131. Elle peut néanmoins s’entendre, en définitive, comme étant

«la situation d’une collectivité locale disposant d’un pouvoir propre de décision et de gestion de ses recettes et

127 Le Conseil constitutionnel français l’admet implicitement lorsqu'il déclare que les modalités dérogatoires d'adoption du budget régional, loin de porter atteinte au principe de libre administration des collectivités locales, tendait, au contraire, à le rendre plus effectif. V. Déc. 397 DC du 6 mars 1998, consid. 12.

128 ZELLER A., La France enfin forte de ses régions. Glossaire engagé de la décentralisation, Paris, Gualino Editeur, 2002, pp. 43-45.

129 HOLO Th., «La décentralisation au Bénin : mythe ou réalité?», Revue béninoise des sciences juridiques et administratives, n° 7, décembre 1986, p. 1. : «Sans autonomie financière, la décentralisation n’est que mirage» ; ESSONO EVONO A.,

«L’autonomie financière des collectivités locales en Afrique noire francophone. Le cas du Cameroun, de la Côte-d’Ivoire, du Gabon et du Sénégal» (disponible en ligne via le lien URL: http://afrilex.u-bordeaux4.fr/sites/afrilex/IMG/pdf/4_L_autonomie_financiere_des_collectivites_locales_en_Afrique_noire_franc ophone_-_le_cas_du_Cameroun_de_la_Cote_d_Ivoire_du_Gabon_et_du_Senegal.pdf ), p.6 : «il ne peut y avoir une libre administration des collectivités locales sans une véritable autonomie fiscale locale» ; GAUDEMET P.-M. et MOLINIER J. affirment aussi que « la décentralisation est purement apparente lorsque la collectivité locale n’a pas de liberté financière réelle, même si elle a des compétences juridiques étendues... En fait, le degré d’autonomie, et par là même la mesure de la décentralisation, dépendent de l’aménagement des finances locales, plus que de l’ampleur des matières qui relèvent de la compétence des autorités locales ou du statut juridique de ces autorités», Finances Publiques, Editions Montchrestien, Paris, T. I, Budget/Trésor, 1996, p. 176. V. aussi, ROUX A., Droit constitutionnel local, op. cit., p. 47 : «la libre administration peut aussi se trouver mise en cause par une réduction excessive des ressources affectées aux collectivités» ; PILONE C., «L’autonomie financière des collectivités locales et le juge constitutionnel», Revue du Trésor, 85e année, nº 10, Octobre 2005, p. 513 : «L’autonomie financière se révèle donc être un point de convergence des différentes lignes directrices de la décentralisation». Le juge constitutionnel français ne contredit pas ce lien de causalité : Décisions n°

168 DC du 20 janv. 1984, consid. 10; 291 DC du 6 mai 1991, consid. 13; 397 DC du 6 mars 1998, consid. 5 et 6 ; 405 DC du 29 déc. 1998, consid. 50. Le juge constitutionnel qualifie toute réduction excessive des marges de liberté des collectivités territoriales comme attentatoire à la libre administration.

130 HERTZOG R., «L’autonomie en droit : trop de sens, trop peu de signification», Mélanges Paul AMSELLEK, Bruxelles, Bruylant, 2005, p. 468.

131 HERTZOG R., «L’ambigüe constitutionnalisation des finances locales», AJDA, mars 2003, p. 548.

24 de ses dépenses, regroupées en un budget, nécessaire pour l’exercice de ses compétences»132. Pour Guy GILBERT, l'autonomie financière suppose une capacité, non seulement juridique mais aussi économique, de réunir des ressources à hauteur des besoins de dépenses induits par les compétences assumées133. Paul-Marie GAUDEMET et Joël MOLINIER trouvent en l’autonomie financière un impératif. C’est pourquoi ils précisent que «l’autonomie n’est réelle que si la collectivité a des recettes propres abondantes…et que si elle dispose d’une grande liberté dans ses dépenses sans être entravée par des dépenses obligatoires ou par des dépenses interdites ou soumises à approbation»134. L’autonomie financière peut être plus longuement décrite : «Elle est à la fois la liberté de choisir les dépenses, celle de les décider et de les exécuter, la liberté de fixer le régime des recettes ou certains aspects de certaines recettes (le tarif des prix, les taux des impôts ou aussi leur assiette), la possibilité de choisir les modes de gestion, la capacité de déterminer librement le niveau et les types d’endettement, l’existence de ressources suffisantes grâce à des transferts justement calculés»135. Elle comporte au moins trois points d’application que sont la gestion, le budget et la fiscalité.

La question de la «suffisance» des ressources propres pour couvrir les charges que requiert l’exercice des compétences est critique136. Or, l’autonomie fiscale ne correspond pas à l’organisation unitaire de l’Etat, fut-elle décentralisée137. Dans la tradition française dont les deux Etats béninois et nigérien sont héritiers, l’État unitaire demeure marqué par la doctrine politique de l’égalitarisme républicain qui trouve son aboutissement juridique, en matière de

132 DUSSART V., L’autonomie financière des pouvoirs publics constitutionnels, Paris, Cnrs Editions, 2000, pp.12-13.

133 GILBERT G., «L'autonomie financière des collectivités locales est-elle en question ?», Quel avenir pour l'autonomie des collectivités locales ?, Les 2è Entretiens de la Caisse des dépôts, Paris, Éd. de l'Aube, 1999, pp. 159-190.

134 GAUDEMET P.-M. et MOLINIER J. Finances Publiques, Editions Montchrestien, Paris, T. I, Budget/Trésor, 1996, p. 176.

135 HERTZOG R., «L’ambiguë constitutionnalisation des finances locales», op. cit. p. 550.

136 V. ROUX A., «L’autonomie financière des collectivités territoriales dans les constitutions européennes», Mélanges en l’honneur de J. Jicquel. Constitutions et pouvoirs, Paris, Montchrestien, 2008, p. 483 : «L’autonomie financière revêt une double dimension. En premier lieu, c’est la reconnaissance d’une capacité juridique de décision qui, en matière de recettes, implique un véritable pouvoir fiscal, le pouvoir de créer et de lever l’impôt et, qui en matière de dépenses implique la liberté de décider d’affecter les ressources à telle ou telle dépense. En second lieu, c’est la possibilité pour les collectivités régionales ou locales d’assurer le financement de leurs dépenses par des ressources propres en volume suffisant» ; BAZIADOLY S., «La Charte européenne de l’autonomie locale et l’autonomie financière des collectivités locales françaises», Revue générale des collectivités territoriales, n° 29, mai-juin 2003, p. 721 : ««dont le montant dépend d’une décision prise par les collectivités locales : elles peuvent les instituer ou non et moduler leur assiette, elles en fixent le tarif ou le taux».

137 BOUVIER M., «Le Conseil constitutionnel et l’autonomie fiscale des collectivités territoriales : du quiproquo à la clarification», Nouveaux Cahiers du Conseil constitutionnel, n° 33 (Dossier : le Conseil constitutionnel et l’impôt), Octobre 2011 ; «L'autonomie financière locale : illusion ou refondation?», in revue Pouvoirs locaux, n° 87, 2010.

25 décentralisation, dans une autonomie financière très limitée138. Au demeurant, le concept de ressources propres n’est pas un concept juridique ayant un contenu rigoureusement bien délimité par le législateur.

Les réflexions doctrinales sur le contenu de l’autonomie financière locale sont aussi nombreuses que contradictoires139. Mais il est une constance. On s'explique mal que les collectivités territoriales soient dispensées des rigidités que l'Etat supporte pour son propre compte pour assurer les mêmes activités. De leur côté, les collectivités «voient dans l’Etat un monstre froid, peu efficace, qui les submerge de normes inutiles et ne les consulte que lorsque ça l’arrange»140. Cet environnement contraint les collectivités à la revendication chaque fois qu’il est nécessaire que soient prises des mesures pour assurer l’effectivité de leur autonomie. C’est souvent à l’occasion de l’examen des projets de loi de finances au parlement que les associations des pouvoirs locaux ont l’occasion de faire connaître leurs positions et propositions141 sur les nombreuses modifications que l’Etat ne cesse d’introduire chaque année à travers la nomenclature et les règles comptables, l’assiette et les taux d’imposition, les subventions à travers décrets, arrêtés ou simples circulaires et dont la véritable portée n’est bien appréhendée qu’à la mise en œuvre.

Le dessein constitutionnel pour la collectivité territoriale est essentiellement libéral. En tant que liberté, c’est le maximum qui devrait être recherché. Y sont donc contraires, toutes contraintes excessives tendant à annihiler ses possibilités de choix. Mais ceci ne signifie pas qu’aucun contrôle ne doit être exercé sur celles-ci. La doctrine et la jurisprudence admettent des limites à la liberté de s’administrer des collectivités comme juridiquement et

138 BESSON E., L’encadrement constitutionnel de l’autonomie financière des collectivités infra-étatiques, Thèse, Droit public, Paul Cézanne Aix-Marseille III, 2009, notamment pp. 72-96, 98-153.

139 V. par exemple TULARD J.-M., «L’autonomie financière des collectivités locales », Regards sur l’actualité, dec. 2002, n° 286, pp. 37 et s. ; DRAGO G., «La nécessaire consécration constitutionnelle d’un pouvoir fiscal des collectivités territoriales, Mélanges Jacques Moreau, Paris, Economica, 2002, pp. 125-137 ; HERTZOG R., «L’ambiguë constitutionnalisation des finances locales», AJDA, 2003, nº spécial (nº 11), pp. 548 et s.

140 COTTEN M., TROSA S., «Solidarité et performance : les enjeux de la maîtrise des dépenses publiques locales. Un rapport de Pierre RICHARD», La Revue du Trésor, vol. 87.2007, 5, p. 466.

141 V. dans ce sens les documents de plaidoyer élaborés par l’Association Nationale des Communes du Bénin à l’attention de la Commission des Finances et des Echanges du parlement béninois à l’occasion de l’examen des projets de loi de finances 2012, 2013.

26 politiquement nécessaires142. Il est toutefois essentiel que ledit pouvoir de tutelle ne fasse pas retomber la décentralisation dans la quasi hiérarchie qu’il a consacrée à ses débuts en France par exemple143.

Il n’y a de véritable décentralisation que si et dans la mesure où les autorités locales reçoivent le pouvoir de poser des règles ou des normes d’espèce avec la liberté que leur laisse la législation sans être soumises à aucune volonté d’une autorité administrative d’Etat si ce n'est en matière de contrôle de la légalité144. Du côté de l’Etat, un contrôle sur les actes des collectivités est nécessaire à la préservation de la légalité et de la forme unitaire de l’Etat.

Pour les administrés qui peuvent avoir besoin d’être protégés contre les abus de l’autorité locale, ce contrôle constitue une garantie et ne devrait donc pas justifier des atteintes exorbitantes à cette liberté considérée comme fondamentale145 dans les démocraties contemporaines. Dans les lois sur la décentralisation au Bénin et au Niger, ce contrôle prend la forme d’une tutelle administrative146 et d’un contrôle juridictionnel.

Parlant de tutelle, Roland MASPETIOL et Pierre LAROQUE la définissent comme

«l’ensemble des pouvoirs limités accordés par la loi à une autorité supérieure sur les agents décentralisés et sur leurs actes dans un but de protection de l’intérêt général»147. La tutelle administrative consiste

142 BAGUENARD J., «La décentralisation territoriale», Que sais-je ? Paris, PUF, 1980, p.14. Pour MASPETIOL R. et LAROQUE P., La tutelle administrative, Sirey. Paris, 1930, p. 9, «la tutelle…trouve tout à la fois son origine et sa fin dans la décentralisation».

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143 BURDEAU F., «1789, l’administration territoriale et nous», Annuaire des collectivités locales, T. 9, 1989, pp. 11-12. A la base de la pyramide, les municipalités sont sous la coupe des districts et départements. Autorités de tutelle en ce qui concerne la gestion de leurs affaires propres, ils sont leurs supérieurs hiérarchiques quant à leurs tâches relevant de l'administration générale. Les districts sont «entièrement subordonnés aux administrations de département…Les délibérations des organes départementaux pour être exécutoires doivent être approuvées…Plus tard, la loi des 15-27 mars 1791 renforça l'autorité du pouvoir central, en lui accordant le droit d'annuler leurs arrêtés et de suspendre leurs administrateurs».

144 EISENMANN C. «Les structures de l’administration», Traité de Science administrative, Paris, Mouton, 1966, p. 298 et 299 : «la primauté ou simplement le caractère obligatoire de la loi pour l'autorité administrative ne constitue en aucune façon une subordination quelconque de l'autorité administrative locale à l'administration de l'Etat ; elle ne la fait nullement dépendre de celle-ci ; les interventions de légalité et les pouvoirs correspondants de l'administration d'Etat ne restreignent point le degré de décentralisation... puisqu'ils en font simplement respecter la mesure».

145 FAVOREU L., ROUX A., «La libre administration des collectivités territoriales est-elle une liberté fondamentale ?», Les cahiers du Conseil Constitutionnel, n° 12, 2002, pp. 88-92.

146 CORNU G., op.cit., p. 1036, définit la tutelle comme l’«ensemble des contrôles auxquels sont soumises les personnes administratives décentralisées».

147 MASPETIOL R., LAROQUE P., La tutelle administrative, le contrôle des administrations départementales, coloniales et des établissements publics, Paris, Sirey, 1930, p. 10.

27 alors pour l’Etat à soumettre les actes pris par les collectivités territoriales à un contrôle a

27 alors pour l’Etat à soumettre les actes pris par les collectivités territoriales à un contrôle a

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