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La dimension répressive de l’objectif d’efficacité

Chapitre II – La fonction répressive de l’état de droit

Section 2. La prééminence de la fonction répressive dans le cadre de l’édification de l’état de droit

II. La dimension répressive de l’objectif d’efficacité

l’homme, 1ère édition, juin 2012, 140 p. 693 Ibid., p.1.

694 Ibid., pp.45 et suivantes.

695

Dans le projet d’accès à la justice en Afghanistan, « [o]utput 2.4 focuses on research to provide an evidence

base for sustainable justice sector development. This includes a continuation of support to the Rule of Law Indicator Study (ROLIS) », Document de projet « Access to Justice in Afghanistan » du PNUD en Afghanistan

2016-2019 p.24. 696

Voir supra, Section 1, § 1, II, 2, et § 2, I, 2, ii), β).

697 Voir la révision des procédures par le PNUD et le Haut-Commissariat aux droits de l’homme, Plan cadre des Nations Unies pour l’aide au développement en Côte d’Ivoire 2009-2013 p.50, voir aussi le rapport du PNUD en Côte d’Ivoire 2013 p.10, et S/2012/186 par. 53.

698 Il s’agit d’améliorer la capacité du personnel policier et pénitentiaire en « case-tracking and management » en Sierra Leone, Plan cadre des Nations Unies pour l’aide au développement en Sierra Leone 2008-2010 p.5 (version « draft »)

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L’Onuci rapporte un « projet d’informatisation des greffes », A/68/632 p.47. La Minustah a par exemple soumis « des propositions en vue de normaliser et reproduire des fichiers judiciaires afin d’améliorer leur accessibilité pour les magistrats », et fourni un appui « à des tribunaux choisis en vue d’améliorer leurs registres et former les greffiers », A/66/658 p.2, de même elle a organisé une « [f]ormation sur l’enregistrement et la gestion des dossiers dispensée à environ 700 fonctionnaires judiciaires et personnel administratif des tribunaux du pays », A/67/605 p.36, et a dispensé « une formation à plus de 300 assistants sur l’utilisation d’outils d’aide à la gestion des éléments de preuve et en matière de préparation de duplicata des dossiers afin d’éviter les retards dus à la perte d’exemplaires uniques » A/67/605 p.36. Conjointement avec le PNUD, la Minustah a également « rassemblé tous les formulaires utilisés par tous les tribunaux du pays, qui ont été ensuite révisés et remaniés afin de les uniformiser » A/67/605 p.37, voir encore A/68/626 pp.38 et 41.

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Si le fait de viser la mise en place d’un système de justice pénale « efficace » et « performant » peut sembler évident et difficilement questionnable, il convient de préciser que l’efficacité recherchée s’applique à la fonction répressive de la chaîne pénale avant tout, et non aux autres fonctions qu’elle pourrait éventuellement remplir, en particulier la fonction de protection des droits fondamentaux700. L’efficacité du système, y inclus la question de la rapidité de la procédure701, est en effet intrinsèquement liée à la dimension répressive de la justice pénale702 qui « se manifeste par une augmentation quantitative et qualitative du niveau des peines et des taux d'incarcération »703.

En effet, plutôt que la nature ou la « qualité » de la justice, il transparaît que c’est la réponse pénale elle-même, en termes quantitatifs, qui est privilégiée par les Nations Unies à travers des objectifs chiffrés et procéduraux. Si la rapidité dans le traitement des affaires ou la révision de certaines procédures participe de l’amélioration de la « qualité » de la justice à certains égards704, le prisme de l’efficacité et la façon dont il est appliqué a pour objectif la maximisation des résultats de la fonction répressive. Le recours à des indicateurs, de préférence mesurables, est caractéristique, non seulement du paradigme de l’efficacité, mais de l’intérêt pour la fonction répressive de la justice pénale705

. Les indicateurs utilisés dans les documents onusiens en sont une illustration : ainsi du nombre de policiers706 ou de membres du personnel judiciaire par habitants707, du nombre de tribunaux fonctionnels708, mais surtout

700 Voir à ce sujet, infra, Chapitre VI, Section 2, § 2, II.

701 Si certains estiment nécessaires de souligner que « l’accélération de la justice ne doit pas, pour autant, être synonyme de justice expéditive ou plus répressive », c’est qu’en effet ce lien peut exister si l’on n’y prend garde, C. GUILLAIN et D. VANDERMEERSCH, « Les droits de l’homme en droit pénal et en procédure pénale : effectivité ou alibi ? », dans Y. CARTUYVELS (éd.), Les droits de l’homme, bouclier ou épée du droit pénal ?, Bruxelles, Bruylant, 2007, p.386. Voir aussi Y. CARTUYVELS, « Les droits de l’homme, frein ou amplificateur de criminalisation ? », dans H. DUMONT, F. OST et S. VAN DROOGHENBROECK (éds.), La responsabilité, face

cachée des droits de l’homme, Bruxelles, Bruylant, 2005, p.425.

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En matière d’édification de l’état de droit, « so much [is] devoted instead to yearnings for a more capable

coercive state such as, for example: numbers of prisons constructed; police and prison officers trained; prosecutions launched and convictions achieved (…)», S. HUMPHREYS, Theatre of the Rule of Law, op. cit., p.163.Y. Cartuyvels parle « d’efficacité répressive », estimant, en contre-pied de cet objectif d’efficacité, que « le respect des libertés et des garanties du citoyen valent bien certaines concessions sur le plan de l’efficacité dans la recherche et la punition des crimes », Y. CARTUYVELS, « Les droits de l’homme, frein ou amplificateur de criminalisation ? », art. cit., pp.406 et 402 respectivement.

703

A. BARATTA, « Droits de l’Homme et politique criminelle », Déviance et société, vol. 23, n° 3, 1999, p.247. 704 De nouveau, voir sur ce point infra, Chapitre VI, Section 2, § 2, II.

705 Sur la tendance au mesurable et sur l’intérêt pour les chiffres dans la justice, et les conséquences de cette tendance, voir généralement A. VAUCHEZ, « Le chiffre dans le « gouvernement » de la justice », art. cit., et A. GARAPON, « Un nouveau modèle de justice », art. cit., p.101.

706

Les Plans cadres des Nations Unies pour l’aide au développement en Sierra Leone 2004-2007 et 2008-2010 sont particulièrement représentatifs de cette perspective, voir p.16 et p.5 respectivement. Pour le Mali, voir A/71/690 p.40 ; pour Haïti voir entre autres A/62/631 p.19 ; pour la Côte d’Ivoire, voir entre autres A/64/584 p.36.

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du nombre de procès709 ou d’audiences tenues710 et, de façon très caractéristique, de décisions rendues711. On voit bien que l’accent est mis ici sur le fait de rendre et appliquer la justice pénale, plus que sur la nature et le fond de la justice ainsi rendue.

C’est donc bien la fonction répressive de l’état de droit qui se trouve ici privilégiée. Mais si l’objectif d’efficacité révèle ici une priorisation de la fonction répressive, il reste ancré dans la démarche de mise en place d’un ensemble institutionnel incarnant l’état de droit – si « efficace », et répressif, dût-il être. Il arrive toutefois que les Nations Unies dépassent la dimension institutionnelle de l’édification de l’état de droit, pour s’intéresser alors uniquement à la fonction.

§ 2. La priorisation de la fonction répressive sur les institutions

L’apparente exclusivité de l’intérêt des Nations Unies pour la mise en place et le fonctionnement d’un ensemble d’institutions se trouve relativisée, d’une part par la mise en œuvre de l’objectif d’efficacité présentée ci-dessus, mais surtout par certaines formes particulières d’édification de l’état de droit, analysées ici. La façon dont certaines activités sont réalisées révèle en effet que l’objectif poursuivi par les Nations Unies n’est plus tant la mise en place d’institutions per se, mais la fonction répressive que ces institutions sont censées remplir. Le soutien institutionnel passe alors au second plan (I), au point même d’être parfois abandonné au profit d’une intervention directe des Nations Unies afin d’assurer la fonction répressive (II).

procureurs par mille résidents » en Haïti, Cadre stratégique intégré des Nations Unies en Haïti 2010-2011 p.21, voir aussi l’extension au cadre stratégique intégré 2012 p.12. Voir de nouveau les Plans cadres des Nations Unies pour l’aide au développement en Sierra Leone 2004-2007 et 2008-2010 p.16 et p.5 respectivement

708 « Indicator: No. of district level courts and jails functioning », Plan d’action du PNUD en Afghanistan 2010-2013 p.23. Pour la Côte d’Ivoire, S/2010-2013/761, par. 32, A/63/610 p.39, A/64/584 p.39. Pour le Mali, voir A/71/690 p.40. En République centrafricaine, voir entre autres A/71/651 p.43.

709

Voir parmi de nombreux autres exemples, en Haïti, le Cadre stratégique intégré des Nations Unies en Haïti 2010-2011 p.22, ou S/2017/840 par. 16, A/63/549 p.28 ; à propos de la République centrafricaine, A/70/604 p.35, A/71/651 p.43.

710

En Côte d’Ivoire, A/63/549 p.28.

711

Comme dans le cadre du projet du PNUD en République centrafricaine : « Stratégie de développement des capacités pour le renforcement de l’état de droit » 2012-2016, p.3 du document de projet. Voir aussi le Plan cadre des Nations Unies pour le développement en Afghanistan 2015-2019 selon lequel l’amélioration des institutions de l’état de droit doit être « reflected through an increase in tracked and investigated complaint

cases » p.34, et « Indicator 5.4 Percentage of court cases that receive judgment », Programme pays du PNUD en

Afghanistan 2015-2019 p.16. Voir aussi le Plan cadre des Nations Unies pour l’aide au développement en Haïti 2017-2021 p.100.

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