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L’abaissement du seuil de l’intégration fiscale

Dans le document La radiation de la cote (Page 57-59)

Chapitre Premier : L’amendement du squeeze out à la française

Section 3 : Les mesures complémentaires envisageables

A. L’abaissement du seuil de l’intégration fiscale

Cette étude est peut-être un peu ambitieuse, mais il est intéressant d’examiner de manière plus précise le régime d’intégration fiscale car nombreuses sont les sociétés qui souhaitent sortir de bourse notamment pour intégrer un schéma d’intégration fiscale1. Les questions de

fiscalité ne sont jamais étrangères aux offres publiques. Bien entendu, quant à la fiscalité des particuliers notamment avec les enjeux des régimes d’exonération d’ISF en matière de pacte Dutreil dans l’affaire Hermès – LVMH ou dans la récente affaire Safran – Zodiac. Mais c’est nécessairement la fiscalité des entreprises qui est aussi concernée, et il faut alors être attentif à l’interaction entre le droit boursier et le droit fiscal2.

La cotation entraîne des conséquences indéniables sur la fiscalité, et « l’accès à la bourse signifie en effet l’acceptation d’actionnaires minoritaires inconnus des dirigeants, et l’acceptation d’un univers régulé comportant des obligations renforcées d’information sur les intentions, les prévisions et les résultats, alors que la fiscalité est un domaine qui se gère plutôt dans une certaine confidentialité. En contrepartie de cette ouverture du capital et de cette plus grande transparence, les sociétés cotées bénéficient parfois d’une réglementation fiscale plus favorable ou moins exigeante, notamment lorsque l’application d’une mesure incitative ne risque pas d’être utilisée de manière abusive au sein d’un groupe »3.

La loi du 30 décembre 19874 instituait un taux élevé de participation pour rejoindre un

schéma d’intégration fiscale, puisque l’article 223 A du Code général des impôts (GCI) disposait déjà que : « Une société, dont le capital n’est pas détenu à 95 p. 100 au moins directement ou indirectement, par une autre personne morale passible de l’impôt sur les sociétés, peut se constituer seule redevable de l’impôt sur les sociétés dû sur l’ensemble des résultats du groupe formé par elle-même et les sociétés dont elle détient 95 p. 100 au moins du capital, de manière continue au cours de l’exercice, directement ou indirectement par l’intermédiaire de sociétés du groupe. Dans ce cas, elle est également redevable du précompte et de l’imposition forfaitaire annuelle dus par les sociétés du groupe ».

1 Anselmi F., « Les retraits de cote restent complexes à Paris », L’Agefi Hebdo, du 16 au 22 juin 2011, p. 36 ; « un enjeu crucial autour de

l’intégration fiscale ».

2 Entraygues G., « Avant-propos sur l’interaction entre droit boursier et droit fiscal », in Les offres publiques d’achat, G. Canivet, D. Martin,

N. Molfessis (dir.), Lexisnexis Litec, 2009, p. 257

3 Entraygues G., « Avant-propos sur l’interaction entre droit boursier et droit fiscal », in Les offres publiques d’achat, G. Canivet, D. Martin,

N. Molfessis (dir.), Lexisnexis Litec, 2009, p. 257

52 Le taux de participation de 95 % était identique à celui en vigueur, nous dit-on, dans le souci de protéger les intérêts des minoritaires1. Ce choix s’explique par le fait que la consolidation fiscale peut être d’autant plus poussée que le périmètre d’intégration est étroit, et que toutefois, ce périmètre se trouve tout de même élargi par le mécanisme résultant de la loi de finances de 1988, via la prise en compte des participations indirectes.

Nous pouvons dès lors nous interroger sur l’abaissement dudit seuil, dans la mesure où quelques cas de radiation seraient surement évités — même si le fait de rejoindre une intégration n’est surement pas le seul et unique motif de radiation, et que par ailleurs la protection des actionnaires minoritaires ne nous semble guère remise en cause.

Pour autant, si prima facie, l’abaissement de ce seuil peut paraître comme étant une heureuse solution, deux objections doivent être émises. D’une part, via les mécanismes de détention indirecte, il semblerait que ce seuil ne soit pas si difficile à atteindre que cela. En effet, trois règles successives sont à appliquer pour calculer le seuil de détention de 95 % des droits aux dividendes et des droits de vote. En premier lieu seront multipliés les taux de détention successifs. Il faudra ensuite ne retenir les sociétés intermédiaires dans le calcul qu’à la condition qu’elles fassent elles-mêmes partie du groupe. À la suite de la décision Papillon2,

le législateur a admis qu’il était possible d’intégrer une sous-filiale française lorsqu’elle est détenue par une société située dans l’Union européenne, qui est elle-même la filiale de la société mère du groupe français. Il faudra toutefois que la société étrangère remplisse les critères qui lui auraient permis d’être intégrée si elle avait été française. Enfin une filiale intégrée est considérée comme détenue à 100 % pour le calcul de la participation indirecte. De sorte qu’in fine, il est rare qu’une société ne remplisse pas la condition dudit seuil, et donc les conditions pour faire partie d’une intégration fiscale.

D’autre part, le champ de notre étude met en perspective les sorties de cote, au regard d’un régime relativement attractif et prisé, mais dont les conséquences ne sont pas négligeables pour l’État d’un point de vue budgétaire. Ce régime est en effet, comme une étude récente l’a montré, un outil de compétitivité des entreprises françaises3. La présente étude rappelait d’ailleurs que le rapport annuel de 2011 de la Cour des comptes et l’annexe au projet de loi de finances pour 2016, proposait d’ajouter à la liste des niches fiscales l’intégration fiscale, ce qui n’est bien entendu pas en adéquation à l’objectif poursuivi

1 « Une nouvelle branche de la fiscalité des entreprises – L’institution d’une taxation spécifique des groupes de sociétés », Droit fiscal n°1, 6

janvier 1988, 10000

2 CJUE, 4e ch., 27 nov. 2008, aff. C-418/07, Sté Papillon : Rec. CJCE 2008, I, p. 8947

3 Rutschmann Y., Durand P.-H., « Le système d’intégration à la française faxe aux exemples étrangers », Droit fiscal n°39, 29 sept. 2016,

53 initialement par le législateur. Dans ce même rapport, le coût budgétaire de l’intégration fiscale était évalué à près de vingt milliards d’euros1.

Il apparaît alors peu opportun de proposer un abaissement du seuil de l’intégration fiscale, uniquement pour contourner les difficultés liées à la radiation, au vu des effets que cela pourrait avoir d’un point de vue budgétaire, mais il convient d’avoir une réflexion plus globale.

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