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Les modèles de plate-forme font référence à la théorie des marchés bifaces

Le porte-à-porte, un objectif partagé

Encart 8 Les modèles de plate-forme font référence à la théorie des marchés bifaces

La théorie des plates-formes s’est développée depuis le début des années 2000 au sein de la littérature économique sur les organisations industrielles. Son point de départ est l’étude d’un certain type de marché dans lequel au moins deux groupes d’utilisateurs qui constituent des marchés distincts sont mis en relation par un intermédiaire et où la valeur pour l’un des groupes augmente avec le nombre d’usagers de l’autre groupe (Parker & Van Alstyne, 2005; Rochet & Tirole, 2003). C’est ce qu’on appelle l’effet de réseau indirect, par opposition à l’effet de réseau direct où l’accroissement de la taille d’un groupe accroît la valeur pour l’ensemble des membres de ce même groupe, comme c’est le cas par exemple avec la connexion au réseau de téléphonie.

Ces marchés sont appelés marchés bifaces ou multifaces (two-sided market, multi-sided

markets). L’intermédiaire rend possibles les interactions entre les groupes. Ce faisant, il

tire parti des effets de réseau qui existent entre les différentes faces du marché. Ces faces se situent du côté soit de l’offre, soit de la demande. Par exemple, sur une plate-forme de covoiturage, l’utilité pour les demandeurs de trajets augmente quand le nombre d’offreurs augmente, et inversement. Ces effets de réseau reflètent une interdépendance, une complémentarité entre les différentes faces du marché qui sont toutes considérées comme des clients de la plate-forme. L’enjeu est donc d’attirer « à bord » les deux faces du marché (« get both sides on board »), c’est-à-dire de résoudre le dilemme de la poule et de l’œuf.

Rochet et Tirole (2005) montrent qu’une caractéristique essentielle des marchés bifaces est que le volume de transactions dépend de la structure des prix. C’est le principe de non- neutralité de la structure des prix. Il s’agit donc de trouver la structure de prix qui permet de maximiser les transactions entre les groupes de clients et le revenu de l’intermédiaire. L’intermédiaire, ou plate-forme, peut donc choisir de subventionner une des faces du marché, celle qui est la plus sensible au prix ou qui représente le plus de valeur pour les membres de l’autre face, pour attirer ses utilisateurs. Ce mécanisme permet de proposer aux clients des produits gratuits en générant des revenus sur une autre face du marché (c’est par exemple le cas des nombreux services proposés par Google ou des journaux gratuits dans le métro).

Pour bien distinguer les marchés multifaces d’autres modes d’organisation plus classiques, Hagiu et Wright (2015) proposent de préciser leur définition avec deux caractéristiques supplémentaires. D’une part, les contacts entre les différentes faces sont directs dans le cas des marchés multifaces contrairement aux modèles alternatifs que sont l’entreprise intégrée, la relation client-fournisseur ou le revendeur. Cela signifie que les différentes faces contrôlent des termes clés de l’interaction comme la nature et la qualité des services offerts42. Cependant, que la plate-forme impose des contraintes sur la fixation des prix

42 Ce critère de contrôle des termes clés de la transaction proposé par Hagiu et Wright donne un éclairage intéressant sur la controverse autour du statut des chauffeurs Uber. Plusieurs décisions de justice ont en effet accordé aux chauffeurs le statut de salariés de l’entreprise (indépendamment du fait que ceux-là se réclament ou non du statut d’indépendant), remettant ainsi en question la nature de « plate-forme » de l’entreprise.

entre ses usagers est un des critères faisant d’un marché un marché biface (Rochet & Tirole, 2005). D’autre part, chacune des faces est affiliée à la plate-forme, c’est-à-dire qu’elle réalise des investissements spécifiques relatifs à la plate-forme qui sont nécessaires pour entrer en interaction directe avec les autres faces.

Selon (Eisenmann et al., 2008), les plates-formes sont définies par un ensemble de composants (hardware et software) qui permettent la mise en relation et la transaction entre ses utilisateurs ainsi que par des règles d’organisation qui régissent les relations entre les membres de la plate-forme (standards de communication, contrats, licences). Au centre du réseau que l’on vient de décrire on trouve une plate-forme technique qui, du point de vue de l’utilisateur final, sert de fondement pour l’ajout de produits et services complémentaires offerts par des tiers. Ils distinguent deux catégories d’acteurs qui sont nécessaires pour créer et faire vivre la plate-forme : les fournisseurs et les sponsors de la plate-forme. Les premiers servent de point de contact avec les utilisateurs. Les seconds la possèdent et décident des règles d’utilisation et d’accès à la plate-forme mais ne sont pas nécessairement en contact avec les utilisateurs.

Les plates-formes de mobilité et la question des données

Il existe de nombreux exemples de plates-formes dans le domaine des transports et de la mobilité. Les applications qui mettent en relation des conducteurs et des chauffeurs (covoiturage, VTC, taxis) en sont des exemples qui viennent rapidement à l’esprit. Sur le marché de l’information mobilité, la métropole de Lyon a souhaité mettre en place un fonctionnement de plate-forme avec, du côté de l’offre, des fournisseurs de données de mobilité et, du côté de la demande, des développeurs d’application (voir encart ci-dessous). Toutes ces plates-formes cherchent à s’établir comme tiers de confiance entre les différents utilisateurs. La question de la confiance est bien sûr primordiale pour la mobilité porte-à-porte : confiance des individus envers l’ensemble des prestataires de mobilité, confiance des différents prestataires entre eux.

Encart 9 - Une tentative de mise en place de plate-forme de mobilité par un acteur institutionnel :

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