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Le développement de l’offre porte-à-porte au sein de SNCF Voyages

La problématique organisationnelle au cœur du modèle économique du porte-à-porte

Encart 12 Le rôle des coûts de transaction dans l’économie du porte-à-porte

2.6 Les enjeux du porte-à-porte pour SNCF : reflets de la diversité de l'entreprise

2.6.2 Le développement de l’offre porte-à-porte au sein de SNCF Voyages

L’engagement à développer des solutions porte-à-porte pour les voyageurs, annoncé en 2013 dans le plan SNCF stratégique Excellence 2020, s’est concrétisé dans la création, au sein de la direction SNCF Voyages, d’un programme transversal : le programme porte-à-porte. Il devait en premier lieu généraliser et industrialiser les offres de porte-à-porte existantes de l’entreprise (SNCF, 2013b, p. 23). Le premier service arborant explicitement le nom de « porte-à-porte » fut celui du taxi combiné au train.

Un premier service porte-à-porte : offrir un taxi au bout du train de manière intégrée

L’idée d’associer au voyage en train la réservation d’un taxi ou d’un VTC avait été proposée par deux cadres de l’entreprise dès 201178. Selon les termes de l’un d’eux, carte blanche leur a été donnée en 2012 pour la développer dans une filiale indépendante. Le service a été lancé en 2013 sous le nom de « service porte-à-porte » avant d’être rebaptisé iDCAB. Son modèle économique était fondé sur une logique client-fournisseur : des appels d’offres étaient passés auprès de sociétés de taxis et de VTC sur les différentes gares concernées et pour une durée déterminée. Des trajets leur étaient achetés en gros par SNCF qui les revendait au détail à ses clients des trains à grande vitesse tout en prélevant une commission sur chaque course. L’intérêt pour le client était de profiter de services complémentaires permettant d’améliorer la connexion avec le train. Le client avait ainsi de l’assurance qu’un taxi serait présent à l’arrivée même en cas de retard important du train. L’intérêt

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Entretien du 1er septembre 2014. 78

pour les sociétés partenaires était de bénéficier d’une clientèle supplémentaire issue du train. SNCF se présentait donc auprès des sociétés de taxi comme un apporteur d’affaires.

Un des objectifs du service porte-à-porte était d’être rentable. Par conséquent, le service n’avait de sens que dans des gares fréquentées par un nombre suffisant de passagers. Le service était ainsi disponible début 2017 dans les vingt-sept gares les plus importantes79. Par construction, ce service

est destiné à améliorer l’accessibilité des principales dessertes TGV. Il n’est pas destiné à répondre aux enjeux de desserte des territoires. A titre d’exemple, le service était disponible en Aquitaine dans la seule ville de Bordeaux.

L’information voyageurs : un outil intégré qui s’appuie sur les systèmes locaux

Dès 2011, SNCF Voyages avait commencé à travailler sur un autre aspect du porte-à-porte, l’information multimodale d’adresse à adresse. Le lancement d’un concours lancé par la Commission Européenne sur les planificateurs multimodaux de voyages à l’échelle européenne, le First Smart

Mobility Challenge, était à l’origine de cette initiative (SNCF, 2013a). Le développement d’un

calculateur d’itinéraire innovant avait alors été confié à VSC, la filiale de SNCF Voyages spécialisée dans la distribution de billets de train et de produits touristiques packagés, et qui exploite le site voyages-sncf.com. Le résultat de ce travail fut le lancement en 2012 du service Mytripset qui offrait la possibilité de planifier des voyages en Europe de porte à porte.

Le passage de l’information gare-à-gare à l’information porte-à-porte n’était aisé d’un point de vue ni technique ni juridique, pour les questions de mise à disposition des données. Le service Mytripset a permis à l’entreprise d’apprendre les dimensions métiers et juridiques qui ont ensuite été mises à profit pour développer le calculateur multimodal intégré de l’application SNCF lancée en 201580. D’un point de vue technique, Mytripset était un système intermédiaire entre centralisé et réparti. Un système centralisé agrège toutes les données transport et réalise à partir de cette base un calcul d’itinéraire. C’est par exemple le cas du moteur Navitia développé par Kisio (ex-Canal TP). Inversement, un système réparti met bout à bout les solutions d’itinéraires calculées par différents systèmes d’information multimodale (SIM) couvrant des périmètres contigus. Dans le cas d’un déplacement traversant deux régions, le calculateur central interroge séparément les SIM des deux régions et définit les points d’interconnexion. Ce type de fonctionnement pose cependant des difficultés d’optimisation des trajets. C’est d’ailleurs sur ce sujet que l’AFIMB avait travaillé, notamment avec Cityway et CanalTP, filiales respectives de Transdev et de Keolis, pour proposer des améliorations algorithmiques. Les systèmes répartis fonctionnent donc à partir de l’échange de services alors que les systèmes centralisés reposent sur l’échange de données (Canal TP, 2013). Le calculateur de Mytripset, tout comme le calculateur multimodal de l’application SNCF qui s’en est inspiré, fonctionnait sur un mode hybride. Il scindait le déplacement en trois parties : la zone de départ, le déplacement longue distance et la zone d’arrivée. Il s’appuyait donc sur les calculateurs

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Site internet d’iDCAB : idcab.sncf.com, consulté le 22 mars 2017.

80 Entretien du 6 juin 2016 avec la directrice d’iDVROOM, responsable marketing de voyages-sncf.com au moment du développement de Mytripset.

d’itinéraires régionaux pour les parties locales du déplacement81. L’intérêt pour les régions est

qu’elles conservent la maîtrise des choix d’itinéraire sur leurs territoires. Ce système est donc compatible avec un modèle économique partenarial pour le porte-à-porte. Cependant, le choix du maillon longue distance est contrôlé par SNCF. Il peut donc exister, dans certains cas, des solutions avantageuses qui combinent un maillon central plus court et des transports locaux. Le caractère fermé du code autorise un sentiment de suspicion, fondé ou non, de la part des clients et des partenaires.

Le lancement en 2015 de l’application « SNCF » d’information voyageur a mis un terme au service Mytripset. Fermé en 2016, il n’avait pas réellement rencontré le succès escompté. Selon la responsable de l’innovation de voyages-sncf.com82, la raison principale est qu’il n’avait pas été mis en avant sur la page de voyages-sncf.com. Ceci s’expliquait par des considérations à la fois commerciales et réglementaires liées à la position de voyages-sncf.com dans l’entreprise. D’un point de vue réglementaire, voyages-sncf.com, qui est une agence de voyage (voir encart ci-dessous), aurait pu être accusée de distorsion de concurrence vis-à-vis des autres agences de voyages en affichant toute l’offre ferroviaire, aérienne et de location de voiture de manière combinée. De plus, pour une question de maîtrise de son chiffre d’affaires, ce n’était pas dans l’intérêt de SNCF Voyages de promouvoir l’avion sur des destinations accessibles en train.

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Entretien du 6 juin 2016 avec la directrice de l’innovation de voyages-sncf.com entre 2012 et 2015. 82

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