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Des Autorités Organisatrices de la Mobilité chargées d’intégrer toutes les mobilités

La problématique organisationnelle au cœur du modèle économique du porte-à-porte

Encart 10 – L’approche par les parties prenantes (R Edward Freeman)

2.3 Un contexte institutionnel qui modifie en profondeur l’organisation du transport et de la mobilité

2.3.2 Des Autorités Organisatrices de la Mobilité chargées d’intégrer toutes les mobilités

Des AOM aux compétences élargies qui sont amenées à établir de nouveaux modes de coopération avec les opérateurs

Au niveau local, avec la loi NOTRe, les AOM ne sont plus seulement responsables des transports publics urbains. Leurs compétences sont élargies à l’autopartage, au covoiturage et aux modes actifs, dont la location de vélo. Elles deviennent par ailleurs responsables des lignes de transport non urbaines lorsque celles-ci se situent à l’intérieur de leur ressort territorial. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle le terme de « périmètre des transports urbains (PTU) » a été remplacé par celui de « ressort territorial de l’autorité organisatrice de la mobilité ». La loi MAPTAM renforce en outre les compétences des métropoles qui disposent déjà de celles de gestionnaire de voirie, de parcs et aires de stationnement et de participation à l’aménagement et la gouvernance des gares.

L’objectif de l’élargissement des compétences des AOM aux lignes non urbaines est, comme le note le GART, « de prendre acte de l’accroissement généralisé des périmètres de transport urbain (PTU) à

des zones peu denses » (GART, s. d.). Entre 2008 et 2013, la superficie des PTU a ainsi augmenté de

40% alors que leur population n’a augmenté que de 7% (GART, 2013). Cette tendance a contribué à remettre en cause la conception selon laquelle les réseaux de transport public doivent desservir l’intégralité des territoires à l’intérieur du périmètre de compétence des AO. En effet, le développement des lignes de transport collectif vers les zones moins denses demande des investissements accrus du fait de la longueur des lignes. Comme la fréquentation y est plus faible que dans les zones denses, le taux de couverture des dépenses d’exploitation par les recettes est moins élevé, ce qui aggrave le déséquilibre économique des transports publics.

Ce constat amène les collectivités à se demander comment mettre en place de nouveaux services de mobilité tout en limitant la dépense publique. Cette question est au cœur des préoccupations. Le président de l’Assemblée des Communautés de France (AdCF) et vice-président du GART en appelle ainsi à imaginer de nouvelles solutions impliquant toute une palette de solutions de mobilité incluant

« le transport employeur, le covoiturage, les transports à la demande, une collaboration avec des taxis, avec d’autres opérateurs, des aides aux déplacements en « deux-roues propres » (du vélo au scooter électrique) » (Transdev & AdCF, 2016). Dans la même ligne, le responsable mobilité urbaine

de la métropole de Lyon expliquait lors d’une journée intitulée « Optimisez les solutions de mobilité durable en fonction de vos ressources »56 que le développement des réseaux de transport en commun avait atteint un palier. C’est pourquoi la métropole a, d’une part, mis au premier plan l’action en faveur des modes actifs dans son nouveau PDU, et d’autre part œuvré à la mise en place de services innovants en partenariat avec des opérateurs privés. L’ouverture des collectivités à de nouveaux modèles économiques impliquant des acteurs privés est un phénomène récent qui est apparu au travers du développement des offres de mobilités partagées comme Velib’ à Paris (Huré, 2017). L’extension du domaine de compétence et du périmètre d’action des AOM dans un contexte financier contraint devrait renforcer cette dynamique. Le passage des autorités organisatrices de transport aux autorités organisatrices de la mobilité acte bien que les pouvoirs publics entendent organiser les mobilités au-delà des seuls transports publics. De récentes prises de parole montrent

56 Journée organisée le 27 septembre 2016 à Lyon par Techni.Cités, magazine des cadres techniques de la fonction publique.

même que l’idée d’un financement par les autorités organisatrice de services purement privés, comme les VTC, est devenue tout à fait envisageable. C’est par exemple ce que déclarait lors d’une table ronde le directeur du développement, des affaires économiques et tarifaires du Syndicat des Transports d’Île-de-France (Stif) (Nalin et al., 2017). De manière synthétique, on peut dire que le contexte et le nouveau cadre d’organisation de la mobilité incitent les AOM à établir de nouveaux modes de coopération avec les opérateurs. La question de l’intégration dans les stratégies territoriales de long terme, d’une offre privée par nature imprévisible à court terme doit être posée. On doit aussi s’interroger sur l’aide à apporter au développement de cette offre privée de nouveaux services de mobilité en complément de l’offre publique.

La maîtrise par les AOM de la circulation sur voirie et du stationnement impacte directement le modèle économique du porte-à-porte

A partir du 1er janvier 2018, la loi MAPTAM prévoit en outre la décentralisation du stationnement. Le

GART militait activement pour cette mesure depuis de nombreuses années. Dans une position commune avec l’UTP, il considérait en effet que la réforme du stationnement serait une évolution législative « décisive ». Il s’agit pour lui d’un « levier primordial de l’efficacité des politiques publiques

de mobilité » puisque « une politique de stationnement harmonisée et optimisée participe favorablement à la complémentarité des modes et améliore, entre autres, le rabattement vers les transports alternatifs à la voiture particulière » (GART & UTP, 2013). Le caractère indissociable de

l’offre de transport public, de la planification territoriale et de l’offre de stationnement a en effet déjà été démontré (Kaufmann, 2003). La réforme donne non seulement aux collectivités la possibilité de déterminer leur politique de stationnement mais elle leur donne aussi les moyens de la faire respecter. La ville de Paris a ainsi annoncé fin 2016 la délégation du contrôle du stationnement de surface à des entreprises privées de manière à faire baisser significativement la fraude (Hidalgo, 2016). Les stratégies de rabattement vers les transports de masse ne pourront plus être imaginées indépendamment des communes et de leurs délégataires. Il y aura donc une nécessité de coordination et de coopération avec les acteurs locaux. Les principaux opérateurs de transport public ne s’y trompent d’ailleurs pas si l’on en juge par l’intérêt qu’ils accordent à l’obtention du marché parisien du stationnement (Mobilicités, 2017b)

La maîtrise du stationnement permet aux collectivités de peser sur le coût généralisé de la voiture particulière. Celui-ci constitue la référence à concurrencer dans le modèle économique du porte-à- porte. La loi de 2015 sur la transition énergétique et la croissance verte instaure avec les zones à circulation restreinte un autre outil de gestion de la présence de l’automobile dans les territoires. Les véhicules sont classés en fonction de leur niveau d'émission de polluants atmosphériques (République Française, 2016a). Ils sont identifiés avec des certificats d’émission : les vignettes Crit’Air. Les maires et les présidents d’EPCI peuvent sur cette base limiter la circulation dans des zones à circulation restreinte à certaines catégories de véhicules (République Française, 2016b). Les pouvoirs publics se sont donc dotés d’un ensemble d’outils leur permettant de déterminer où et à quel prix la voiture est acceptée. L’attractivité d’une offre porte-à-porte sur un territoire donné est directement en lien avec ces choix. Bénéficiant sur leurs territoires de prérogatives élargies à l’ensemble des mobilités, y compris individuelles, les autorités organisatrices de la mobilité deviennent dans ce nouveau contexte institutionnel des acteurs incontournables dans l’organisation de la mobilité porte-à-porte.

2.3.3 De nouvelles compétences font de l’intermodalité un paradigme croissant dans les

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